Chapitre 12: A glimmer of hope.

Mia

J'y suis. J'ai enfin réussi à y aller. J'ai enfin réussi à me convaincre de sortir pour aller à un de ces matchs de foot regroupant tous les lycéens. J'y suis arrivée. 

Je ne parle même pas de l'effort surhumain que j'ai du faire pour sortir de mon lit, je parle plutôt de l'effort que j'ai dû faire pour supporter l'idée que j'allais être entourée par tous ces gens. Tous ces gens qui semblent avoir peur de moi. Ou plutôt avoir peur de la maladie que j'ai. Je n'aurais pas cru être capable d'aller de mon plein gré à un endroit ou j'aurais été susceptible de rencontrer, ne serait-ce que l'un d'entre eux. Je n'aurais pas pensé être capable de surmonter ça. Mais j'y suis arrivée et j'ignore comment. Tout ce que je sais c'est que mon envie d'aller voir ce garçon était plus forte que le reste. Plus forte que tous les inconvénients qu'ils pouvaient y avoir. Je ne sais pas pourquoi mais depuis ce que m'a dit ma psy j'ai vraiment l'impression qu'il me porte de l'attention et j'aime ça. J'adore ça, même. Cela faisait tellement longtemps qu'on ne se préoccupait plus de moi. Et maintenant que quelqu'un semble le faire à nouveau, je n'ai pas envie que ça cesse. Je ne veux plus me sentir délaisser. Je ne veux plus que ça arrive. Jamais. 

J'arpente rapidement le trottoir bondé, me faufilant entre les lycéens pour rejoindre les complexes sportifs. Mes pas sont rapides et maladroits à cause de l'appréhension qui me submerge. L'appréhension d'être si près de toutes ces personnes. Et même si aucun d'entre elles ne semble me prêter attention, je ne peux m'empêcher d'être inquiète. Quand on a connu quelque chose de dur à vivre on a toujours peur que cela se reproduise. Et en l'occurrence, j'ai vraiment peur que dans quelques secondes tout le monde s'arrête de parler et me dévisage le temps que je passe mon chemin, comme d'habitude. J'ai vraiment peur que ça arrive car je suis sûre que ça me ferait fuir. J'en suis même persuadée et ce n'est vraiment pas ce que je veux. 

Je traverse les grandes grilles qui précédent les terrains de sport, et avance le long d'une allée de pierre, qui semble montrait la voix à suivre pour atteindre les complexes. Sur le chemin j'aperçois quelques lycéens bavardant et rigolant, assis sur le rebord d'une clôture, tout en se partageant une cigarette. À cause du fort vent qui souffle ce soir, je peux sentir l'odeur enivrante de leur clope de là où je suis. L'odeur entêtante et addictive de leur clope. Je fourre mon nez dans mon écharpe pour éviter d'inspirer l'odeur toxique et continue d'avancer tête baissée. Plus je me rapproche du terrain où se disputera prochainement le match, plus les cris des supporteurs se font clairs et distincts. J'espère vraiment qu'à la fin de cette soirée je n'aurais pas les neurones réduits en bouillie et les idées en désordre. Et avec tout ce bruit et ses odeurs désagréables, c'est très probable que ça arrive. Et franchement, je n'ai pas besoin d'un mal de crâne. J'ai déjà assez à gérer. 

J'aperçois enfin les tribunes qui précèdent, le terrain de foot. Pour le moment il n'apparaît pas dans mon champ de vision sûrement dissimulé par la hauteur des tribunes. Je réduis les quelques secondes de marches qui me séparaient des estrades et les contournes pour passer devant. Il s'étend alors, devant moi, une grande pleine verte délimitée par des marquages blancs au sol: le terrain de foot. L'animation qu'il y a tout autour est impressionnante. Des vendeurs de confiseries et de barba papa se font la guerre pour savoir qui vendra le plus ce soir, tandis qu'un groupe de Cheerleaders, totalement cliché des séries Américaines, danse au milieu du terrain sous l'acclamation de la foule. Un sourire apparaît sur mon visage devant un tel spectacle. Ici, tout paraît plus vivant et plus gai et tout le monde à l'air incroyablement heureux. Cela faisait longtemps que je n'avais pas été témoin d'une telle euphorie.

Je gravis les marches de la tribune principale pour arriver en haut, là où se trouvent les dernières places libres. Encore une fois, je suis surprise de passer inaperçu aux yeux des lycéens, et je dois avouer que ça m'enlève la quasi-totalité de mon stress. Je m'assois à l'avant-dernier rang sur le siège le plus près des escaliers. J'ai choisi cette place car,  s'il m'en prend l'envie, j'aurais plus de facilité à m'en aller rapidement. Je dépose mon sac sous mon siège et m'affaisse un peu plus dans ce dernier pour rendre ma position confortable. L'air est froid mais n'est pas insupportable, disons juste que la chaleur que me procure mon manteau est indispensable. Tout est réuni pour que je passe une bonne soirée comme je n'en ai pas vécu depuis longtemps. 

À peine quelques minutes après mon arrivée, une voix métallique retentit dans l'ensemble du stade, provoquant un calme général. Je reconnais la voix du coach sportif demandant à tout le monde de gagner sa place et de faire du silence, le temps que les joueurs entrent sur le terrain. Il enchaine en disant qu'il s'agit du premier match par poule de la saison, et qu'il est très important pour l'équipe. Il souhaite finalement une bonne soirée à tout le monde et le crépitement des hauts parlers s'arrête enfin. 

L'équipe adverse arrive sur le terrain sous les applaudissements de quelques supporteurs et elle se range en ligne de leur côté. À la tenue des joueurs je reconnais l'équipe d'Oxford. La plupart d'entre eux paraissent confiants et orgueilleux, ce qui me provoque un frisson dans le dos. Les garçons de mon école ne sont peut-être pas si horribles qu'ils en ont l'air. 

L'équipe du lycée arrive à son tour et une vague d'applaudissements inonde les tribunes. Je reconnais certains des garçons mais mon attention est portée sur le brun bouclé dont j'ignore toujours le vrai prénom. Je ne peux m'empêcher de frapper des mains comme tous les autres pour soutenir mon équipe favorite. Les joueurs de notre lycée se rangent en ligne en face de l'autre équipe. Les applaudissements s'évanouissent petit à petit et un arbitre s'approche des deux équipes pour l'engagement. Il dépose la balle au milieu des deux rangées de joueurs et demande au capitaine de l'équipe d'Oxford de s'approcher. Je connais à peine les règles du jeu, alors je pense que suivre le match risque d'être dur. Je ne sais pas pourquoi je connais presque toutes les équipes du pays mais pas les règles de jeux. Je pense que ça ne m'intéresse simplement pas. L'arbitre se recule un peu et siffle un long coup de sifflet. Le joueur d'Oxford envoie la balle à quelqu'un de son équipe et le jeu commence. Les passes entre les coéquipiers sont rapides et précises si bien que notre équipe n'arrive pas à toucher le ballon les trois premières minutes. C'est Louis qui récupère la balle par je ne sais quel mouvement de jambe et il commence à courir en direction des buts adverses. Il envoie la balle à un brun dont j'ignore une fois de plus le nom, et il continue de courir toujours dans la même direction. 

*

Un long coup de sifflet retentit annonçant la mi-temps. Le score est toujours à 0-0 ce qui semble contrarier tout le monde. Les joueurs disparaissent du terrain pour aller boire et revoir leurs tactiques de jeu. La plupart des lycéens s'en vont également pour aller s'acheter des encas et des boissons. J'observe toute l'animation qui se déroule autour du terrain un grand sourire sur le visage. 

Avoir vu le bouclé ce soir m'a fait énormément de bien. J'ai l'impression d'avoir enfin fait ma part d'effort dans l'évolution de notre relation. J'ai l'impression de lui avoir rendu la pareil. Avant, c'était toujours lui qui faisait le premier pas et cette fois c'est moi qui l'ai fait. Comme on dit " les personnes s'arrêteront de s'intéresser à toi si tu montres que tu n'en a rien à faire d'eux". Et je ne veux pas qu'il arrête de s'intéresser à moi, alors, je lui montre que je ne lui suis plus indifférente. 

Quand il m'a regardé tout à l'heure et m'a adressé un beau sourire, j'ai senti mon cœur s'accélérer. Je n'arrive même plus à me rappeler de la dernière fois où on m'a fait un vrai et beau sourire comme celui là. Les seuls sourires auxquels j'ai eu le droit ces dernières années, étaient des sourires remplis de pitié et de compassion. 

Mes yeux continuent de survoler l'intégralité du stade, cherchant à chaque fois, quelque chose d'amusant ou d'intéressant à regarder. Mais avant que je trouve quelque chose de convenable à observer mon regard s'arrête sur quelqu'un. Quelqu'un qui marche de dos en direction des vestiaires de sport. Une fille. Je me lève précipitamment et continue de la suivre du regard. Ses longs cheveux châtains se balancent d'une manière familière dans l'air. C'est elle. 

Je descends les marches deux par deux pour la suivre, au même moment où les joueurs retournent sur le terrain. J'aperçois le bouclé. Il s'arrête et regarde là où je vais mais je continue de courir sans lui porter d'attention. Je me rapproche un peu plus d'elle à chaque foulée, et plus je suis prêt plus je reconnais sa silhouette et ses longs cheveux. 

« Kate! appelais-je. »

La fille ne se retourne pas, et elle continue de marcher tranquillement. Je cours le plus rapidement que mon corps puisse me le permettre, pour pouvoir arriver à sa hauteur. 

« Kate! criais-je. »

Pourquoi ne se retourne-t-elle pas? De là où elle est, elle peut facilement entendre ma voix suppliante. Je la rattrape enfin et pose ma main sur son épaule frêle. 

« Kate... murmurais-je. »

Elle se retourne et je me décompose. La fille n'a pas de beaux yeux azur, sa peau n'est pas mate et ses pommettes ne sont pas relevées. Je retire immédiatement ma main de son l'épaule alors que j'essaye de récupérer ma respiration. Ce n'est pas elle. 

J'avale difficilement ma salive, les yeux écarquillés et horrifiés. Elle me regarde étrangement, avant de me demander si j'ai besoin d'aide. Je me contente de secouer la tête, incapable de dire un mot. Elle hoche la tête, un léger sourire étire ses lèvres minces. Elle replace une de ses belles mèches châtaines avant de reprendre son chemin. 

Je cligne des yeux et une larme dévale le long de ma joue rougis. Mes bras, mes jambes, mes mains et mes lèvres tremblent à n'en plus finir.

"Arrêtes d'espérer Mia. Elle ne reviendra pas..."

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