9 - Réconfortée



*

En voyant Ceska en si piteux état, Cassidy paniqua. Il voulut s'approcher d'elle, mais elle le repoussa.
— Mais qui vous a fait ça ? Avez-vous vu un médecin, au moins ?
— Ne vous inquiétez pas pour moi. Allez-vous -en !
— C'est votre petit ami, n'est-ce pas ?
— Je ne suis pas comme vous moi ! Je ne cours pas dix lièvres à la fois.
— J'ai été odieux l'autre jour, je sais, mais ce n'est pas ce que croyez.
— Je n'ai rien besoin de croire, je sais très bien ce que j'ai vu !
— Laissez-moi vous expliquer Franceska. S'il-vous plaît !

Impossible de dégager elle-même ce grand gaillard de son entrée. Usée par la lutte, elle le laissa finalement entrer. De toutes façons, elle pouvait bien l'écouter, ça ne changerait rien aux faits. Pour elle, Cassidy n'était qu'un goujat.

Il lui tendit le bouquet de pivoines qu'il avait apporté. Mais Ceska n'en voulut pas. Il posa donc le contenu de ses bras sur la table basse du salon.

Épuisée d'être debout, Ceska voulut s'assoir. À cause de ses douleurs elle s'enfonça péniblement dans son canapé. Cassidy en fit de même. Ils se fixèrent pendant de longues minutes, sans pouvoir dire un mot.
— Qui vous a fait ça Franceska ? Commença-t-il.
— Qu'est-ce que ça peut vous faire ? Dites plutôt ce que vous avez à dire et barrez-vous !
— Je voudrais m'excuser. Je n'étais pas dans mon état normal l'autre-jour. J'ai...
— Moi, je crois que vous saviez parfaitement ce que vous faisiez. Vous êtes comme tous les autres. Un lâche !
— Si je l'étais, je ne viendrais pas me confondre en excuses à vos pieds. Je vous aurais définitivement ignorer.
— C'est ce que vous avez fait. Vous m'avez ignoré.
— Je peux tout vous raconter si vous m'en donner le temps.
— Et moi, je veux juste que vous foutiez le camp !

Ceska voulut changer de position, mais couverte d'ecchymoses, elle eut du mal à bouger. La douleur s'intensifiait à chacun de ses mouvements. Ses quelques efforts lui coutèrent quelques larmes, Cassidy ne put se retenir et il l'aida à se replacer. Le jeune homme l'entoura de ses bras. Ceska le repoussa d'un geste sec. Ce qui raviva aussitôt sa douleur.
— Je ne sais pas qui vous a fait ça, mais il mérite qu'on lui casse la gueule !
— Il m'a fait mal à l'extérieur et vous à l'intérieur. Croyez-vous vraiment que vous valez mieux que lui ? Les pires coups sont ceux qu'on ne voit pas Mr Legrand !
— À qui le dites-vous... souffla-t-il tristement.

Face à tant de franchise Cassidy fut démuni. Ceska avait raison, son comportement était inapproprié et méchant. Il regrettait sincèrement ce qu'il s'était passé bien que selon lui, les circonstances soient atténuantes.

Il lui expliqua que son coup de fil urgent de l'autrefois, fut au départ une excellente nouvelle. Sa mère, Valériane Legrand-Olchester venait de reprendre conscience, après plus de sept mois passés dans le coma.

Lorsqu'ils arrivèrent dans la chambre de leur mère, elle identifia instantanément deux de ses enfants, Caleb et Christina. Mais elle ne reconnut absolument pas Cassidy, qui était pourtant l'aîné des trois.

Cassidy avait toujours pensé que le réveil de sa mère serait une délivrance mais au contraire ce fut un accablement. Difficile d'accepter que sa propre mère oublie votre existence quand elle est seule parent que vous n'ayez jamais eu !

Cela fit remonter à la surface chaque mauvais souvenir de son enfance. Il se sentit aussitôt orphelin de mère. Il eut si mal au coeur, qu'il se terra dans le silence. Affligé, il noya son chagrin dans la boisson. Évidemment, l'alcool ne fut pas assez fort et il rappela son ancien dealer. Lui qui n'avait plus rien touché depuis des années, replongea illico dans de mauvais travers.

Et c'est imbibé d'alcool et de stupéfiant qu'il se présenta à la fameuse soirée, accompagné de sa plantureuse cavalière blonde. C'est lorsqu'il recouvrit l'esprit qu'il réalisa la portée de ses actes. À compter de cet instant, il n'eut qu'un seul objectif : Se faire pardonner.
— C'est comme ça que vous réglez vos problèmes ? Brillante idée Mister Legrand !
— Ne me jugez pas.
— C'est une solution de riche ! Comment auriez-vous fait sans argent ?
— Ne me jugez pas Franceska.
— De toute façon ça n'excuse rien. Vous êtes un mufle ! Un point c'est tout.
— Je sais... dit-il en haussant les épaules.
— Et vos frères et soeurs ? Qu'ont-ils dit ? Demanda-t-elle rattrapée par la curiosité.
— Que voulez-vous qu'ils disent ?
— Désolée... Et sinon...Que font-ils dans la vie ? Dit-elle d'une voix radoucie.
— Ma soeur est mère au foyer. Elle n'a ni l'envie, ni le besoin de travailler. Son mari est l'un des patrons du Nasdaq.
— Voyez-vous ça, fît-elle en se moquant.
— Quant à mon frère, vous le connaissez. C'est votre PDG.
— Caleb Oldchester ? Fit-elle en manquant de s'étouffer. Mais comment est-ce...
— Oui je sais. Nous n'avons que la même mère. Lui a un père. Moi pas.

Ceska n'osa plus parler. Elle aurait voulu lui dire la vérité mais elle craint qu'il s'imagine, comme son diable de frère qu'elle ait obtenu son poste à cause de cette ancienne relation.

De toute évidence, Cassidy souffrait beaucoup, la mine triste et déconfite du jeune homme attestait de sa franchise.  Elle eut pitié de lui, et n'en rajouta pas. Au lieu de ça, elle le laissa vider son sac.

Elle refusa en revanche, de se confier sur l'origine de ses blessures. C'était un traumatisme qu'elle vivait encore dans sa chair. Fière, elle garda tout pour elle. Cassidy insista pour qu'elle se libère de ce poids au lieu de ça, elle éclata en sanglots. Et bien qu'elle fut encore en colère contre lui, cette fois-ci, elle accepta l'asile de ses bras. À ce moment précis, son besoin de protection et de sécurité fut plus important que tout le reste.

Après avoir versé de lourdes larmes. Ceska se calma, sans se défaire de l'étreinte de Cassidy. La chaleur positive et le parfum agréablement boisé du jeune homme apaisèrent momentanément sa peine.

— Vous sentez bon, dit-elle en humant discrètement son torse.
— Venant d'une experte en odeur je suppose que c'est un compliment ?
Elle ne répondit pas. Elle resta blottie contre lui, et pour la première fois depuis deux jours, elle s'endormit.

*

Le lendemain elle fut surprise de se réveiller dans son lit. Elle se leva, fit sa toilette et se dirigea dans la cuisine :
— Bien dormi Mademoiselle Milembo ?
— Vous êtes encore là ? Dit-elle étonnée.
— Rassurez-vous, je m'en vais.
— Je ne vous chasse pas, c'est juste que je vous croyais parti depuis cette nuit.

Elle le regarda un moment, sans vraiment savoir quoi dire.
— J'ai préparé du café et des oeufs brouillés. J'ai trouvé du pain de mie dans vos placards et je l'ai fait griller.

Ceska sourit, puis s'assit sur l'unique tabouret de sa cuisine.
— Je vais devoir y aller. Est-ce que ça va aller ?
— Oui merci.
— Prenez soin de vous, Ceska.
— Et ne vous inquiétez pas, je ne dirais rien à personne. Promis.
— Merci.

Cassidy lui colla une bise sur le front, remballa ses affaires restées dans le salon, puis il s'en alla, soulagé d'avoir pu s'expliquer.




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