10 - Ndombolo



*

Après quinze jours d'arrêt, Ceska revint au bureau. Mme Archibald fut soulagée de la retrouver, mais elle ne put s'empêcher de lui faire des reproches.

Car en l'absence de la « fille au nez magique », Mme Archibald fut incapable de faire progresser seule, tous ses projets. Elle dû reporter plusieurs rendez-vous, en s'assurant de la date de retour de sa poule aux oeufs d'or.

Du coup, le planning de la semaine fut très chargé. D'autant plus qu'à cette période, les campagnes de trois nouveaux parfums devaient être lancées.
— Venez-là que je vous dise Franceska. Demain matin, nous aurons des rendez-vous de la plus haute importance. L'un avec BabyGirl pour leur nouvelle gamme enfant. Et l'autre avec le prince héritier du Sultanat d'Oman, sa majesté Kheïr Al Arafat.
— Je connais assez bien le dossier BabyGirl puisqu'on y travaille depuis un moment, mais je n'ai aucune idée de ce que le prince veut. Pouvez-vous me briefer s'il-vous plaît ?
— J'y viens. Pendant votre absence, j'ai dû préparer de nouvelles formules pour la nouvelle gamme de BabyGirl. Je vais donc me charger de les leur présenter. Je vous laisse traiter avec le prince héritier. Il souhaite une composition personnalisée pour l'offrir à sa fiancée, je suis sûre que vous vous en sortirez. Gardez en tête, que c'est un client prestigieux et que c'est la réputation mondiale de Blue Divine et Coldchester qui est en jeu.
— Bien Madame, mais je ne crois pas que ce soit judicieux de...
— Cessez-donc de vouloir toujours tout discuter Franceska et faites ce que je dis, un point c'est tout. Vous êtes payée pour cela je crois n'est-ce pas ?
— Oui Madame.
— Bien.

Incompréhensible. Il aurait été plus logique qu'Astrid Archibal se charge du projet de son richissime client, plutôt que de présenter une simple composition à un client déjà conquis. Tout cela n'avait pas de sens.

Chen qui avait assisté Mme Archibald au labo pendant l'absence de Ceska, fit un signe discret à son amie.
— N'acceptes pas, lui articula-t-elle silencieusement.

Entre temps, Mme Archibald reçu un coup de fil personnel et sortit du bureau pour y répondre. Chen en profita pour lui expliquer en quelques mots :
— N'acceptes pas. Je ne sais pas ce qu'elle trafique, mais je l'ai entendu parler de toi à Héléna... Et pas en bien.
— Ah bon ? Elle est étrange ces derniers temps.
— Complètement ! Si tu la laisses faire, elle va tout faire capoter, BabyGirl est un gros client. Ça risque de nous retomber dessus.
— Je vais voir ce que je peux faire Chen.
— Qu'étiez-vous en train de dire bel enfant ?
— Je disais juste que j'aurais voulu que Chen soit avec moi lorsque je verrai le prince héritier. Et si vous le permettez, j'aimerais assister à la présentation BabyGirl. J'ai besoin de vous observer pour pouvoir m'améliorer.
Orgueilleuse comme elle l'était Mme Archibald accepta. Chen lança un clin d'oeil satisfait à Ceska, qui n'en revint pas que ce soit aussi facile de lui faire avaler un tel boniment. Visiblement, Mme Archibald sous-estimait son nouveau nez.

*

Depuis qu'il s'était occupé d'elle après l'attaque de Sonny, Cassidy passait beaucoup de temps avec Ceska. Souvent, ils dinaient ensemble, chez lui, cette dernière craignait encore que son frère ne débarque à l'improviste dans son appartement et la trouve seule avec un homme.

Ce soir-là, Ceska cuisina un plat de chez elle. Au menu: poulet fumé à la sauce arachide, et riz parfumé. Pendant que son plat mijotait, Ceska alluma son portable et fit jouer sa playlist sur l'enceinte Marshall de son hôte. Cela détendit instantanément l'atmosphère.

Elle fit danser ses longues jambes sur du Koffi Olomidé. Embarqué par le rythme, le jeune homme la suivit :
— Mon Dieu Cassidy, vous êtes aussi raide qu'un piquet. Bougez enfin !
— Je bouge, mais je ne comprends pas, il faut bouger les jambes ou le bassin ou alors le popotin? Pff, que c'est compliqué !
— C'est pas croyable ! Quel carnage ! Se moqua-t-elle.
— Vous exagérez. Voilà, je m'améliore.
— Mais pas du tout. On croirait que votre corps est commandé par dix cerveaux différents. Essayez donc de coordonner tout ça ? Regardez-moi faire.
— Je capitule. Vous avez raison, je ne suis qu'un « babtou fragile », je ne saurais jamais danser le Dondjolo.
Ceska hilare s'arrêta de danser.
— C'est le Ndombolo Cassidy. Si en plus vous n'arrivez pas à le prononcer, il n'y a plus aucun espoir dit-elle riant plus fort.
— Laissez-moi du temps. Je pourrai y arriver un jour.
— Je ne crois pas ! Il n'y a pas une once d'exotisme en vous mon ami. Heureusement, que je mets un peu de piment dans votre vie.

Ceska n'était pas loin de la vérité. Subissant l'amnésie persistance de sa mère, le beau brun trouva dans sa relation avec Ceska un peu de stabilité. Elle était la douceur dans son monde de brutes. Avec elle, il oubliait tout, il se sentait mieux.

Il aurait voulu que les choses accélèrent entre eux mais Ceska freinait des quatre fers. À part quelques pelles bien roulées, il ne se passait pas grand-chose entre eux. Cassidy comprit très vite qu'il faudrait une expédition militaire pour la dérider.
— Je pense qu'un jour, je vais vous sauter dessus Ceska. C'est tout simplement de la provocation !
— Non, Cassidy, c'est de la préparation. Un peu de patience, vous tenez le bon bout.
— Votre ironie m'épuise ma chère, moi, je voudrais juste vous faire l'am...
— Chut ! Je ne veux pas savoir, fit-elle en déposant un smack sur son nez.
— Arrêtez donc de m'allumer !
— Oh sans blague, un bisou sur le nez et je vous allume ? Vous êtes rempli de péchés ! Je ne vous embrasserai plus jamais, pouffa-t-elle.
— Sérieusement Ceska, combien de temps encore ?
— Le temps qu'il faudra. Regardez-nous, nous nous vouvoyons encore.

*

Le lendemain matin, à la réunion BabyGirl, Mme Archibald déroula parfaitement son argumentaire et Ceska constata que Chen avait raison. Mme Archibald avait présenté aux clients l'une de ses compositions. Comment se l'était-elle procurer ? Ceska choquée vit la moutarde lui monter au nez.

Cependant, Mme Maroin, PDG de BabyGirl ne fut pas très emballée. Ceska se leva et osa proposer une autre solution. Mme Archibald plissa les yeux, comme pour mieux la foudroyer.
— Si vous permettez, je pense qu'avec une petite note poudrée on sentirait plus le bébé, le propre, le frais, mais aussi le bonheur. C'est subjectif dit comme cela mais accordez moi cinq minutes et je vous montrerai.
L'équipe approuva et Ceska courut au labo. Avec l'aide de Chen, elle réalisa une formule améliorée, qu'elle leur fit tous sentir.
— C'est exactement ça, se réjouit Mme Maroin ! Une note poudrée qui sent le bébé. Astrid votre petite collègue est un génie. C'est absolument parfait !
Mme Archibald sortit son plus faux sourire et eut du mal à contenir sa colère. Mais les faits étaient là ! La note poudrée était la solution, ça sentait divinement et surtout les clients adoraient cette fragrance.

L'accord fut conclu et les clients partirent ravis. Une fois seules, Mme Archibald attrapa Ceska par le col :
— Vous venez de commettre la pire erreur de votre vie Franceska. Tôt ou tard, vous me le paierez. Croyez-moi !





***

retrouvons-nous par ici


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