Chapitre 22: Lila
Ou peut-être que je me leure. Peut-être que j'ai tellement besoin qu'on prenne soin de moi que j'en perds l'esprit. En vrai, ça n'a pas d'importance! Pour l'instant, il y a plus de chances qu'elle me tue plutôt qu'elle ne me protège. Elle me déteste! Il n'y a pas le moindre doute. Rien que voir mon visage l'irrite au plus haut point.
Pourtant, je fais de mon mieux. Je suis douce avec elle. Pas très attentive mais je suis ses ordres au mieux. Ce n'est pas tout ce qui compte ? Non, apparemment. Avec elle, il faut être parfaite et ne pas commettre la moindre erreur. Mais comment je pourrais ? C'est la première fois que j'accepte un boulot pareil.
C'est à peine si j'arrive à faire du thé. Alors être docile et garder d'obscurs secrets...c'est beaucoup me demander. Certains jours, j'ai juste envie de prendre mes jambes à mon cou et de m'enfuir. Peut-être que je devrais le faire. Peut-être que je devrais lui ramener ces fleurs et disparaître. Ellen risque pas de me chercher. Elle n'a pas besoin de moi. Elle a juste besoin d'une victime à traumatiser.
Moi, je suis beaucoup trop fragile et beaucoup trop sensible pour te tenir bon. Heureusement c'est bientôt terminé.
Je vois enfin le magasin apparaître sous nos yeux. C'est une herboristerie avec un nom bien particulier :"Madame Rose". Je ne m'y attendais pas. Mais, au moins, je suis sûre d'être au bon endroit. Il n'y a peu de chances que je me sois trompée. C'est forcément là !
–Je t'attends ici!
Sonia préfère m'attende devant. Je ne peux pas lui en vouloir: moi-même je ne sais pas ce qui m'attend à l'intérieur.
–Ça marche. Je me dépêche !
Puis je pousse la porte et un petit tintement de cloche se fait entendre. Jusque-là, tout va bien. Je suis presque heureuse de découvrir ce nouvel endroit. Je n'ai jamais mis les pieds dans une herboristerie. C'est si beau, si calme et ça sent si bon. Je m'attendais bien à voir des plantes et des fleurs séchées...mais pas autant.
Il y en a partout ! Que ce soit enfermés dans des bocaux, posés sur des étagères, ou à l'air libre dans des présentoirs en bois. Et leurs douces odeurs remplissent déjà la pièce. Je ferme les yeux et me laisse un moment de répis, pour profiter. J'ai l'impression d'être sur un nuage de douceur. C'est si...apaisant.
Tout le stresse des derniers jours semble s'évaporer, le temps d'un instant. Un instant qui ne dure pas longtemps...
–Je peux vous aider ?
Quelle est ma surprise quand j'ouvre les yeux et vois enfin qui me fait face.
–Madame Stevenson?!
-Lila!
Qu'est-ce qu'elle fait là ? Je ne savais même pas qu'elle avait un boulot. Je pensais qu'elle passait toutes ses journées à faire des pâtisseries, pour ses petits-enfants.
-Tu es là pour les fleurs de Madame Rose, n'est-ce pas ?
–Comment vous... ?
Elle pointe l'enveloppe du doigt, debout derrière son comptoir.
–Elle est bien la seule personne que je connaisse donnant des enveloppes roses pâles.
–Vous vous connaissez ?
Elle sourit.
–Je vais tout expliquer. Mais, d'abord, tu as bien droit à une petite visite, non ?
Puis elle sort de son comptoir et me rejoint. Je suis bien contente de l'avoir mais les dernières informations me perturbent toujours autant. La probabilité pour que Madame Rose connaisse ma voisine est si fine... mais pas impossible !
–Je sais déjà quelles fleurs elle veut. Mais je vais t'en montrer d'autres aussi. Juste pour ta culture personnelle...
Heureusement qu'elle sait déjà qu'elles fleurs me donner. Je viens à peine de réaliser que ma patronne ne m'a donné aucune instruction. Donc je me laisse guider et la suis, entre les présentoirs. Les plantes séchées colorées défilent. Certaines ayant une bonne odeur, d'autres non. Certaines étant comestibles, d'autres non. C'est captivant.
–Madame Rose les connaît toutes ?
–Évidemment, c'est sa boutique !
–Wow. Mais comment elle fait ? Je n'en serais jamais capable, même si j'ai passé des nuits blanches à les apprendre.
–C'est Madame Rose, tout simplement...
Comme si c'était une réponse. Cette femme est remplie de mystères...
–Elle les a toutes sélectionnés, une par une. Mais bien sûr, elle a des préférés. Je les garde précieusement, en haut des étagères.
Je suis son regard et lève la tête. Le nom d'un des bocaux me fait sourire.
–Donc elle apprécie les Lilas...
–Oh que oui!
-Il n'y a que moi qu'elle n'apprécie pas.
–Ne dis pas ça. Elle est compliquée à comprendre mais elle ne mord pas.
Elle ne mord mais... elle tue! Et je me demande si Madame Stenvenson le sait déjà. Après tout, elle ne m'a toujours pas dit comme elles se connaissaient. Peut-être qu'elles sont amis, meilleurs amis ou encore confidentes. Peut-être qu'elle s'ouvre à elle et lui confie ses plus lourds secrets.
–Vous semblez bien la connaître. Vous êtes amies?
–Non. Je travaille juste pour elle. Comme toi. Juste que je la connais depuis plus longtemps.
Je me dis qu'elle a de la chance. Elle travaille dans un beau magasin. Elle n'a pas à subir les folies et la rage de Madame Rose. Elle peut se cacher derrière son comptoir et ne pas en sortir. Elle n'a pas à les affronter, elle et son regard perçant, chaque après-midi. Elle n'a pas à se retrouver emprisonné dans une forêt lugubre, dans une cave remplie de tueurs et à devoir s'en échapper, au plein milieu de la nuit.
Non. Elle, elle peut tranquillement rester assise sur son tabouret, plongée dans la douceur des fleurs séchées. Qu'est-ce qu'il en a de la chance ! Mais tout de suite, elle a plutôt l'air pressée.
–Bon, assez perdu de temps. J'attendais depuis longtemps de savoir qui étais sa nouvelle recrue, pour lui donner de petits conseils. Je suis bien content que ce soit toi, Lila. Je vais pouvoir te donner quelques petites astuces pour adoucir son tempérament de feu.
Je suis à deux doigts de sortir un carnet et de prendre des notes. Justement, j'en aurais bien besoin de quelques astuces pour adoucir cette bête aux dents d'acier.
–D'abord, les fleurs séchées.
Elle s'agite, en tirant une échelle sur une étagère. Puis elle la monte et se met à triturer des bocaux.
–Je suis un peu surprise. Je pensais qu'elle prendrait ton frère. Je me suis trompée.
–Mon frère? Pourquoi donc ?
Elle s'arrête un moment, avant de se tourner de nouveau.
–Je ne savais pas qu'elle cherchait une servante. Par contre, je sais qu'elle cherchait un chauffeur...
Un chauffeur ? Cela pourrait être une bonne occasion pour Tomd'avoir un boulot. Mais, je préfère le garder loin de cet endroit.
–Après, ce n'est pas comme si Tom cherchait réellement un boulot...
–Oui c'est vrai..., elle ricane.
Tout le quartier connaît sa oisiveté et sa détermination à devenir un rockeur. Même si, pour être honnête, c'est mal partie. Madame Stevenson fini par redescendre avec un bocal rempli de fleurs. Puis elle récupère une petite pochette ornée de dessins.
Elle en verse une quantité raisonnable de fleurs séchées, la referme et me la tend.
–Tu connais ces fleurs ?
Je fais non de la tête.
–Ce sont des "Gloire du matin".
Je n'en avais jamais croisé avant mais elles sont magnifiques. Leur pétales délicates d'un rose vif, crées un éclat vibrant et une beauté florale captivante. Leur forme étoilée s'épanouit généreusement et ajoute une touche d'élégance à toute la pièce.
-Elles sont sublimes.
-Oui. Les abeilles et les papillons l'apprécient énormément. Mais quand elles sont digérées, elle entraîne de très violentes hallucinations. De terribles hallucinations ! Je te déconseille de les ingérer par accident.
–Surtout que, vu son caractère, il y a peu de chances que Madame Rose me donne un antidote...
–Mais si ! Elle le fera, mais, avant, elle risque de te regarder paniquer pendant de longues minutes...
Décidément, elle la connait très bien. C'est une vraie sadique, qui se réjouit de mon malheur.
–J'ai déjà eu un avant-goût, avec ses cookies empoisonnés aux lauriers-roses.
Je m'attendais à de la compation de la part de Madame Stenvenson. Mais j'obtiens tout l'inverse.
–Oh celle-là... elle a fait le coup à tout le monde !
-Vraiment ?
-Oui ! Crois-moi, si elle voulait réellement te tuer, elle l'aurait fait depuis bien longtemps. Ce n'est pas le matériel qui lui manque. Elle a une collection de plantes, de fleurs si large... de quoi faire rougir n'importe quelle musée ou herboristerie du monde.
–Je ne pensais pas que ça la passionnait autant. Elle qui n'a pas la moindre fleur, dans son jardin. Peut-être qu'elle préfère les choses mortes, aux vivantes...
Là je ne parle pas de fleurs. Mais Madame Stenvenson ne capte pas la nuance.
–Oh non! C'est juste parce qu'elle n'a pas la même verte! Pas comme toi! J'ai vu comment tu as sauvé mes tulipes, l'année dernière.
Ça avait été un plaisir de pouvoir l'aider. D'habitude c'est plutôt le contraire. Alors pouvoir enfin me sentir utile à ses yeux a été un vrai plaisir.
–Je pense qu'avoir des fleurs lui ferait plaisir... vu à quel point elle les aime !
–Tu as raison !
Elle prend un moment pour réfléchir puis son visage s'illumine.
–Tu veux quelques graines ?
Lila, tu vas finir dans une boîte qui tu continues à jouer avec les nerfs de cette folle😂😂😂
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