Chapitre 21: Lila

N'oubliez pas de lire aussi le Chapitre 22. Il est déjà publié. Très bonne lecture💕
...

-Je comprend. Tout ce travail doit te couper l'appétit.

-Oui...on peut dire ça.

-Et donc, qu'est-ce qu'elle te fait faire?

Je manque de m'étouffer avec mon verre d'eau.

–Oh...rien important, juste du thé...

–Du thé ?! OK.

Évitons de donner trop de détails. Moins elle en saura, mieux elle se portera.

–Et à la maison, comment ça se passe ?

–Pour dire vrai, je n'ai pas vu ton frère depuis hier.

J'en lâche ma fourchette.

–Comment ça ? Où est-ce qu'il est passé ?

–Aucune idée. Pour dire vrai, pendant un moment, j'ai pensé qu'il était peut-être chez une pouffiasse à me tromper. Mais je me suis faite des films...

Un ricanement lui échappe.

–Ce matin, l'une de mes amies m'a appelé. U. guitariste s'est fait foutre à la porte d'un club huppé. J'ai directement pensé à lui.

Elle rit de nouveau et je la suis.

–Ton frère est irrécupérable ! Mettre tout son argent dans une guitare ne lui a pas suffi. Maintenant, il s'amuse à détruire le peu de réputation qu'il a réussi à construire...en se faisant chasser des clubs.

–Vu comment il chante aussi...

–Je ne comprends pas pourquoi il est aussi obstiné !

Moi, j'ai bien une petite idée, pourtant!

–Sois patiente avec lui, Sonia.

–Tu veux dire, "patiente" comme toi qui laisses tout passer et qui l'encourage à continuer ses bêtises ?

–Oui...enfin...

-Écoute, je fais mon maximum pour le soutenir depuis deux ans mais...

Elle prend un moment avant de continuer. Je vois qu'elle lutte pour retenir ses larmes. Sonia n'aime pas pleurer devant les gens.

–Les factures s'accumulent et il ne semble pas réaliser!

–Je suis désolée. Et j'imagine que payer notre loyer ne t'aide pas beaucoup.

–Oh que si! Emménager avec vous et payer votre loyer était une superbe idée. Je ne regrette rien! Le problème sont ces dépenses imprévues. J'ai l'impression qu'il devient de plus en plus irresponsable. Il n'est pas invité au club où il se rend. Il doit presque soudoyer les videurs pour qu'ils le laisse passer et se produire pour une ou deux chansons. Enfin, quand il ne se fait pas chasser avant...

Pourquoi il ne m'en a jamais parlé ?

–Et ça c'est sans parler de toutes les autres dépenses qu'il fait : bouteille de champagne, location de limousine... Il vit au-dessus de ses moyens pour se donner, le temps d'une soirée, l'illusion d'être une rock star. Mais il ne fait que nourrir ses fantasmes et nous appauvrir!

Je ne pensais pas que c'était aussi grave.

–Je suis vraiment désolée que tu es à subir ça, Sonia.

Je pose ma main sur la sienne et elle me sourit.

–C'est pour ça que je suis si contente que toi tu ai enfin trouvé un boulot. Promets-moi que tu vas t'en sortir, Lila. Ne coule pas avec ton frère.

–Il ne va pas couler, je la rassure. Et toi non plus !

Elle essuie une larme qui coule sur sa joue.

–Maintenant, je vais pouvoir vous aider. Ce boulot paie largement nos factures et on pourra peut-être même emménager dans un appartement plus grand. Je vais me donner à fond pour pouvoir m'occuper de vous deux...

–Tu es adorable mais normalement ce n'est pas à toi de t'en occuper. C'est sensé être le boulot de Tom!

–Sauf que si on attend qu'il s'y mette, les poules ont largement le temps d'avoir des dents...

Je réussi à la faire rire. C'est une victoire. Je n'ai jamais aimé la voir pleurer. Même si c'est juste la deuxième fois que je vois ses larmes couler. La première fois c'était quand le propriétaire de l'appartement nous avait mis dehors, en plein hiver, Tom et moi. Elle était venue nous voir et avait refusé de s'en aller, jusqu'à ce qu'on trouve un endroit où dormir.

Elle est restée là, dans la neige, avec nous, grelottant sous les flocons. Elle n'avait qu'une une gourde de café chaud pour nous réchauffer. Elle avait proposé qu'on vienne dormir chez elle mais l'égo de Tom a refusé. Et, au final, la neige a tellement bloqué les routes, que nous avons dû passer la nuit roulé en boule dans le jardin.

Cela ne fait pas parti de mes meilleurs souvenirs. Mais ce jour m'a permis de découvrir l'existence de mon adorablevoisine: Madame Stevenson. Elle a bravé le froid pour nous recueillir et nous servir un petit déjeuner bien chaud.

Puis les choses se sont arrangées. On avait déjà l'argent du loyer. Tom avait juste oublié de le payé. Trop bourrée, il l'avait oubliée sous un tabouret de bar.

–Je sais qu'il n'est pas facile à gérer. La vérité c'est que je ne laisse pas faire parce que je suis naïf, mais parce que j'ai de la peine pour lui...

–Comment ça ?

J'ai l'esprit d'une gamine de sept ans. Je pense que la vie rose et tout m'effraie. Mais s'il y a une chose sur laquelle je ne me leure pas, c'est bien ma famille!

–La mort de nos parents a été très brutale et ça a été très compliqué, pour lui, de l'accepter. J'aimerais pouvoir dire que nous nous sommes retrouvés balancé de famillesd'accueil en famille d'accueil, mais ce n'est pas vrai. Personne n'a voulu de nous donc nous sommes restés en foyer d'accueil.

–Oui, j'en ai entendu parler...

-Ça été dur pour lui. Certains enfants étaient des vraies brutes. Il devait passer la nuit éveillé, pour être sûr qu'aucun d'entre eux ne m'approche. Il restait assis sur mon lit, à me regarder dormir. Mais je fais semblant. J'avais trop peur qu'il finisse par s'évanouir de fatigue ou de faim.

–Pourquoi de faim ?

–Des fois, il me filait aussi ses repas...

Elle semble bien surprise d'entendre qu'il sait être attentionné.

–Mais c'était son rôle, de se sacrifier. Il est ton frère, après tout!

–Oui mais il aurait aussi pu fuir ses responsabilités et me laisser seul. Il ne l'a pas fait!

–C'est vrai. Mais pourquoi maintenant, il les fuit? Il devrait continuer d'être un bon frère.

–Je ne sais pas... un jour, nous avons enfin réussi à trouver une famille d'accueil. Tout se passait bien et là, il a craqué. Il a pillé tous les objets de valeur et a mis le feu au salon.

–Pardon ?

–On a fui mais la police a quand même réussi à le rattraper. Ça lui a valut un beau casier judiciaire. C'est pour ça qu'il ne peut pas bosser. Il ne veut juste pas te l'avouer.

–Ça explique pas mal de choses... Comme pourquoi il devient frileux dès qu'on croise une voiture de police.

–Oui... et quant à son obstination pour la musique...il se rappelle que notre père adorait jouer de la basse. Je pense qu'il aime jouer de la guitare pour cette raison: ça lui permet de se sentir plus proche de lui. C'est pour ça qu'il s'obstine autant!

-Et pourquoi il me dit pas tout ça ? Je suis sa petite amie depuis deux ans et je ne l'ai jamais jugée, quelque soit les conneries qu'il ai fait.

–Je sais...mais il n'a jamais été très doué pour parler de son passé. Même avec moi. Il est comme ça: compliqué à comprendre.

Il ne m'a jamais confié quoi que ce soit. Je m'en suis rendue compte toute seul, en l'observant toutes ces années. Parce que j'en avais marre de le voir souffrir en silence et de tout prendre sur lui.

-Je pense qu'il t'en parlera un jour. En attendant, tu vas devoir être patiente avec lui, comme moi.

–Je ferais au mieux. Mais, à ce rythme, je reste plutôt de lui mettre un coup de botte dans le cul!

–Et abîmer tes belles bottines noires? Non, je ne crois pas...

Nous rions un petit moment. Elle en ai totalement capable! Puis nous nous remettons à déjeuner tranquillement. Ça m'avait manqué de partager ce genre de moments avec elle. Surtout qu'elle est la seule personne avec laquelle je peux partager un repas, sans finir seul autour de la table. Tom est toujours trop occupé.

Puis, lorsque nous terminons enfin, elle règle la note, malgré que je proteste, et nous sortant. À présent que je n'ai plus mon estomac qui crie famine, je peux me reconcentrer sur ma mission. J'ai encore des fleurs à aller chercher et ce n'est pas la porte à côté.

On aurait pu prendre un taxi, pour aller plus vite mais j'ai bien envie de marcher. J'ai envie de regarder toutes ces fleurs, le long de la route. Elles sont si belles et colorées. Le jardin de l'autre tirant en aurait bien besoin! Mais je l'entends d'ici me dire qu'il en est hors de question.

Comment autant de cynisme peut exister en une personne aussi belle... Pourtant, elle a un visage si angélique, des joues potelées et des lèvres rouges comme des pétales de roses. Quant à son regard ténébreux, il est aussi perçant que la nuit....

Cette femme est une énigme à elle seule : autant captivante que terrifiante. Aussi tranchante qu'apaisante. Et même si chaque seconde passée auprès d'elle est une vraie torture pour moi, je ne peux pas nier une chose: je ne me suis jamais sentie autant en sécurité, près d'une personne.

Madame Rose est vraie. Elle est franche. Soit elle vous déteste et vous tue, soit elle vous protège, vous épargne et vous protège. Elle ne joue pas de double jeu. J'aurais aimé l'avoir auprès de moi pendant les moments sombres de ma vie...

J'espère que vous avez aimé ce chapitre. Un deuxième arrive. Je vous le doit bien 🖤

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