6. Je te fais confiance

Les deux aventuriers étaient enfin repartis. Aucun d'eux ne paya Ishtar. Sur le chemin, le mage observait l'allure de son partenaire qui semblait être le même.
- C'était quoi, ça ?
- Je ne comprends pas ce que tu me demande mais en attendant, j'ai un trou dans le bide...

La main sur sa plaie, il avançait difficilement. Le mage prit alors la peine de le soigner. Assis dans le sable, sous le soleil brûlant, ils se regardaient dans les yeux. La blessure se refermait lentement.
- Je ne sais pas qui tu es ni quel est ton vrai but mais je commence à me poser des questions.
- J'ai craqué ? demanda Hermin. Si c'est juste ça, tu n'as rien à craindre.
- Hélas, j'ai bien du mal à y croire, camarade. Je ne suis en aucun cas ton ami mais je ne te laisserais pas tomber si tu es un psychopathe, du moment que tu ne me tues pas sur le chemin.

Arthirion se releva. Le soin était terminé.
- On retourne chacun de son côté quand on arrive au tombeau et tout ira pour le mieux. Je veux juste savoir si je risque ma vie.
- Je...
- Est-ce que je peux te faire confiance ?

Valalm était un des villages les plus beaux de Mernes. Il y avait moins d'une cinquantaine d'habitant autour de l'oasis à l'eau si pure que les malades s'y jetaient il y a fort longtemps afin de retrouver la forme.
- On raconte que les personnes tombées au plus bas dans leur vie peuvent obtenir la grâce de dieu en plongeant dans l'eau...

Jack ayant entendu ces paroles en buvant une bière fade dans une taverne mal famé, décida de s'y rendre et d'y faire son vœu.

Sa route fut longue et fatigante mais pour un homme immortel, mourir de faim et d'épuisement n'était rien de plus qu'une piqûre de scorpion pour un humain normal.

Enfin arrivé à Valalm, l'homme avança jusqu'à l'unique taverne du village. Quelques habitants se relaxaient près de l'oasis et personne ne fit attention à lui. Totalement déprimé, silencieux, il entra dans le bar et s'installa en commandant une dernière bière.
- Ben alors ? rit le tavernier. Quel est ce visage désespéré ?
- Je compte en finir rapidement avec ma vie...
- Oh, non, non, non, s'exclama le maître du bar.

Le barbu sans cheuveux s'installa auprès de Jack et croisa les bras.
- Hors de question ! Je ne sais pas ce que tu as vécu mais il arrive parfois que la vie nous joue des mauvais tours.
- Je suis immortel...
- Alors pourquoi tu veux mourir ?

Son cœur s'arrêta un instant. C'était la deuxième personne qui le croyait. Le premier étant son ami décédé par sa faute.
- Je veux mourir pour de bon. Pas juste me tuer et revenir.
- Commence déjà par trouver un moyen d'arrêter cette malédiction.
- Comment savez-vous que je suis maudit ?
L'homme prit la pinte de bière du client de la table voisine et bu quelques gorgées.
- La vie éternelle est le rêve de tout homme. Si tu veux y échapper, c'est que ce n'est pas ton désir le plus cher. Si tu as vécu des choses que tu regrette, tu peux toujours t'en prendre à celui qui t'a infligé ça.

Jack soupira.
- Un type m'a sauvé d'une maladie contre de l'argent... Je crois qu'il faisait partie d'un ordre. Kaber, il me semble.
- Alors là.
Le barbu se leva et s'éloigna de l'immortel, inquiet.
- Que se passe-t-il ? Notre conversation est-elle terminée ?
- Sors de ma taverne. Immédiatement !

Hermin et Arthirion arrivèrent quelques minutes après. Le soleil se couchait déjà. Ils allaient peut-être pouvoir passer une bonne nuit ici. Le silence régnait sur Valalm mais une personne restait à l'extérieur. Face à l'oasis.
- Bonsoir. sourit le majordome.
Jack tourna la tête et n'adressa au garçon qu'un sourire sans sincérité. Une joie factice se lisait sur son visage.
- Vous n'avez pas l'air d'aller pour le mieux, déclara Arthirion. Vous avez une dégaine de voyageur. Vous avez besoin de sommeil ?
- J'ai besoin d'en finir au plus vite, surtout... J'ai tant de remords qui me rongent.

Hermin laissa les deux autres discuter. Lui, il s'accroupit sur l'herbe poussant autour de l'eau. Une sublime fleur blanche reflétait la lumière des torches disposées un peu partout dans le village.
- Le Lys... J'ai déjà mon premier ingrédient !
Il se leva et s'approcha du mage qui l'ignora, toujours en pleine conversation.
- Si tu veux mourir, fais-le. Seulement, un homme doit avoir une fierté.
- Qu'est-ce que tu entends pas là ?
- Si quelqu'un a détruit ta vie, détruis cette personne en retour. Pourquoi devrais-tu payer pour les erreurs d'un autre ?

Jack attrapa le mage par le col, avec ses deux mains, lui lançant un regard noir.
- Je crois que ces personnes sont dangereuses ! Je risquerais surtout de me faire torturer des années durant si je ne suis pas capable de mourir de leurs mains !
- Lâche-moi immédiatement...
L'homme laissa Arthirion et leur tourna le dos.
- Je vais trouver ce fameux glyphe et oublier l'histoire du vœu de l'oasis. Ce ne sont que des mensonges.

L'homme s'éloigna pas à pas de Valalm tandis que les deux autres allèrent à l'auberge. Hermin put enfin dormir dans un lit confortable et propre. Sa nuit fut relaxante mais courte.

Au réveil, il s'habilla et s'approcha de la porte. Sur le parquet se trouvait une lettre. Intrigué, il la déplia et s'adossa au mur pour la lire :

« Au revoir, camarade. Nos chemins se séparent ici. On se reverra peut-être si le destin le veut mais je compte accomplir mon devoir et je devais partir au plus vite. Un mage se doit d'étudier son thème toute sa vie. Pas fréquenter un majordome avide de vengeance. L'océan noir n'est pas très loin d'ici. Pars vers l'Est et sauves ton maître. »

Hermin fronça les sourcils, se sentant abandonné. Il ouvrit la porte et s'en alla. Le soleil tapait déjà si fort dès le matin. Le majordome avança vers sa nouvelle destination et se fit interpeller par un homme.
- Oh, Jack ? Tu es encore ici ?
- J'ai pensé que tu avais peut-être une réponse.
- À quelle question ?
- Tout le monde évite de me répondre par crainte, du moins, c'est l'impression qu'ils me donnent. Peut-être que toi, tu sais qui ils sont.
Les mains dans les poches, se tenant droit devant Hermin, l'immortel lâcha un long soupir.
- Est-ce que tu connais l'ordre de Kaber ?

Le maître du garçon avait prononcé ce nom avant son départ. C'était ceux qui l'avaient empoisonné.
- J'aurais aimé ne pas avoir à les connaître. Si je voyage dans Mernes, c'est de leur faute.
- Est-ce que... Je peux faire du chemin avec toi ? J'aimerais retrouver celui qui m'a rendu immortel... Peut-être qu'en le tuant, je pourrais redevenir normal.

Au château de Quan, Mikhail enfila son armure et courut jusqu'aux remparts sud de la capitale. Les saints chevalier se ruèrent jusqu'à la porte principale et se mirent en garde.
- L'armée impériale a lancé l'assaut... déclara le roi. Bartolomia, tu peux aller sur le front.
- Avec plaisir !
À l'horizon, sous le ciel azur et clair, arrivait une armée entière de soldats à cheval. Le royaume sans nom était prêt à en découdre.

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