L'armée du roi Quin se préparait à combattre. Le fils de cet homme qui aurait trahi le royaume avait libéré sa rage meurtrière qui se fit sentir sur des kilomètres à la ronde.
- Il va attendre, déclara Mikhail en saisissant son épée à deux mains. Il n'attaquera pas maintenant.
- Qu'est-ce que tu en sais ? s'exclama son père.
- Il a toujours été un grand stratège. Vous connaissez ses exploits, n'est-il pas ?

L'homme baissa les yeux.
- Oui, je le sais. Il a conquis deux royaumes en une journée et est devenu l'empereur de la mort...

Il y avait trois royaumes à Mernes. Le plus au centre, où régnait le roi Quin, était nommé Quan. Au nord-est, à la bordure des monts enneigés, se trouvait Sartras, désormais conquis par Soran, le frère de Mikhail. Plus au sud, proche de la mer, se trouvait la capitale impériale de Lord Dantsu. Le royaume n'avait aucun nom particulier et c'était un grand ennemi de Quin. Cet homme ne possédait aucun village. Ceux qui étaient bâtis près de la plage tels que Mancha et Estarios appartenaient à la capitale au centre des contrées de Mernes.

Dans des terres plus lointaines se trouvait le royaume où Soran s'est réfugié de longues années avant de refaire surface et de renverser le trône par simple ennui.
- Bartolomia... On va écouter mon fils.
- Mon roi...
- L'armée peut se retirer. Que nos soldats se reposent et se préparent mentalement à perdre la partie...

L'homme prit une grande inspiration, adossé à son trône.
- Soran à déjà gagné la guerre.
- Il n'en est pas question ! hurla Mikhail. Il a beau être mon frère, je le tuerais s'il tente de nous détruire.
- Ton frère fait partie de l'ordre du roi fantôme... À lui seul, tu sais de quoi il est capable. S'il nous attaque avec ses frères d'armes, Mernes plongera dans le chaos le plus total en seulement quelques heures.

La journée commençait. Le midi, les habitants d'Istandar ouvraient les restaurants et les deux aventuriers ne pouvaient qu'être attirés par les alléchantes odeurs de viande. N'ayant pas beaucoup dormi, Hermin alla attendre son camarade à l'extérieur.
- Tiens, tu es déjà réveillé ? demanda Arthirion.
Le mage était déjà sur le balcon.
- Ouais... J'ai encore sommeil.
- Moi aussi. Je n'ai pas dormi, j'ai plutôt médité sur un problème.

De l'agitation provenant de tout en bas interpella les garçons qui se retrouvèrent face à une scène époustouflante. Un bandit se faisait traîner sur le sable, rué de coups par beaucoup de femmes en pleurs.
- Il va se faire exécuter ? s'étonna le majordome.
Son ami lui saisit le bras et lui lança un regard des plus effrayants.
- C'est l'occasion de fuir !

Sans expliquer quoique ce soit à son partenaire, Arthirion se mit à courir.
- Qu'est-ce que tu fais ? On devrait l'aider !
- Il est condamné ! hurla le jeune aux cheveux d'argent. J'ai lu les rumeurs sur cette ville, c'est une horreur !
- Quoi ?
- On doit se barrer pendant que les gardes ne nous surveillent pas.
Il se retourna et fronça les sourcils.
- Enfin, les gardes ont l'air d'être dissimulés parmi nous. Comme des civils.
- Tu es un sorcier ! Tu ne sais pas utiliser la téléportation ?
- À ton avis, pourquoi je suis allé demander une potion à Rickert ?

À cet instant, il pensa à l'utiliser mais lui seul se serait enfui. Tout un tas de mauvaises pensées défilaient dans sa tête. Il pouvait bien abandonner Hermin qui n'était pas réellement son ami mais seulement un compagnon de route. S'enfuir d'ici serait un jeu d'enfant pour Arthirion mais comment récupérer l'objet qu'il convoitait dans le tombeau d'Avalon ?
- Pourquoi on doit partir, d'ailleurs ?
- Plus on reste, plus on doit donner d'argent au seigneur. Si on n'a pas assez, on fini aux cachots. C'est ce que tu veux ?

Le majordome baissa les yeux et pensa à son maître. Puis, il sourit.
- Je ne m'attendais pas à m'amuser autant...
Le garçon prit appuie sur une rambarde et sauta au loin. C'était si haut qu'à l'atterrissage, il risquait de se briser les jambes. De ce fait, il s'agrippa aussitôt à un ponton afin de se laisser tomber avec moins de hauteur. Arthirion l'avait suivi mais ces aventuriers n'étaient pas les premiers à vouloir duper Ishtar.
- Halte là !

Six hommes se tenaient autour d'eux.
- On va vous emmener voir notre grand seigneur.
Les bras ligotés, les garçons furent emmenés au sommet de la pierre B. Dans une grande pièce, plus somptueuse que le reste du village, se tenait un homme assis sur une chaise confortable.
- Qui sont ces individus ?

Ce type à la peau métissée, aux yeux rouges et aux cheveux cachés par une couronne dorée croisa ses bras.
- Encore des bandits ?
Puis il se recourba vers l'avant pour mieux les observer.
- Non, ils n'en n'ont pas la tête. Encore des nouveaux qui refusent de payer.
Arthirion ouvrit la bouche, prêt à parler.
- Ne dis rien, j'en ai assez d'entendre de stupides excuses.

Celui qui régnait sur la ville se leva.
- En général, je laisse un sceau maudit sur le corps des fugitifs et ils ont deux jours pour trouver de l'argent. Ensuite, ils sont téléportés ici et on règle nos affaires.
Trois soldats à lance se mirent en garde, prêts à en découdre.
- Aujourd'hui, je suis de mauvaise humeur...

Avec sa magie, tandis que les protecteurs du grand Ishtar leur fonçaient dessus, le mage fit disparaître leurs liens. La pointe d'une lance arriva vers lui à toute vitesse. Sans se presser, il se décala légèrement sur le côté et saisit le manche en bois, souriant.
- On aurait pu trouver un accord, vous savez...
Arthirion brisa l'arme et fit voler les morceaux avec son mana afin de les faire traverser la gorge de son assaillant.
Les deux autres s'en prenaient au majordome qui malgré son agilité, semblait être en difficulté.
- Pulvérisation...

Simplement en ouvrant son poing droit, le mage fit disparaître un des deux sbires du seigneur. Il ne fallu que trois secondes de plus pour qu'Hermin se débarrasse du dernier.
- Qu'est-ce que...
Furieux, Ishtar dégaina son épée et laissa la foudre imprégner la lame. Les éclairs tournoyaient autour de celle-ci.
- Vous allez être punis, inconscients !

Il s'élança jusqu'au majordome qui para le premier coup vertical avec sa chandelle. Sans hésiter, l'homme tenta de mettre deux tranches supplémentaires, à l'horizontale. La seconde toucha le bras du garçon qui sentit une légère douleur.
- Arthirion ! hurla Hermin.
Son bras était paralysé à cause de la foudroyante attaque. C'en était fini de lui. Avec un coup d'estoc final, Ishtar s'apprêtait à le tuer.
- Blocage !

Des chaines sortant de chacun des murs s'enroulèrent autour du seigneur qui ne put porter le coup fatal à son adversaire. Profitant de sa faiblesse et de son incapacité à bouger, le majordome le traversa avec son arme. Puis il approcha sa bouche de l'oreille d'Ishtar.
- Expulsion...
Son âme fut projetée à l'autre bout de la pièce.

Lentement, le garçon marcha jusqu'à lui avec un visage différent. Le mage serra les poings, sentant que quelque chose clochait.
- J'ai fait beaucoup de promesses dans ma vie et jamais je n'ai osé en rompre une.
Une aura étrange enveloppait le majordome.
- Vous commencez à m'agacer avec vos conneries. J'ai une urgence et tout le monde se dresse contre moi.

Il attrapa l'esprit par le cou et le souleva sans forcer. Ce n'était qu'une âme après tout.
- Exorcisme...
Puis il baissa les yeux. Quelque chose sortait de son ventre. Une douleur lacérante vint le faire lâcher Ishtar qui put retourner dans son corps libéré.
- Qui es-tu ? demanda Arthirion, une épée en main.

Le mage venait de transpercer le dos de son compagnon.
- Tu n'es pas Hermin... N'est-ce pas ?

« Un jour viendra où la colère t'emportera, fiston... À ce moment, tu devras te contrôler. Sinon, tu risques de libérer ton âme. Celle que j'ai scellée au plus profond de toi. Ne m'en veux pas pour ça, Hermin... »

Le majordome ne bougea pas d'un pouce. Du sang coula hors de sa bouche tandis qu'Ihstar s'approchait d'eux.

« Si j'ai fait ça, c'est parce que tu es un monstre... »

Le mage fut repoussé loin et l'épée disparut. Le jeune homme se retourna et fixa le seigneur qui se mit à genoux, par peur.
- Je vais très bien, sourit Hermin. Je me suis juste un peu emporté...

« Tu es le fils du diable. »