2. La cité marchande

De grands murs s'étendant à l'infini intriguaient le garçon dans la charrette à l'arrière. Calé entre des tonneaux de vin, il admirait ceux-ci en se posant un tas de question. Puis, il sauta sur le toit de la calèche et alla rejoindre le vieil homme qui conduisait seul.

Il tenait ses chevaux avec quelques câbles en cuir.
- Que faites vous ? hurla le type surpris.
- Ne vous en faites pas, je viens seulement vous tenir compagnie. Votre femme est cachée ?
- Elle a besoin de repos, voilà tout.

Les cieux éclairci laissaient place aux rayons du soleil. Il faisait bon dans cette nature qu'était l'extérieur. Hermin sentait enfin la chaleur de Mernes sous ses plus beaux jours.
- C'est quoi, ça ? demanda le majordome en pointant les murs à l'horizon.
- Tu es sérieux ? Tu n'es jamais sorti de chez toi ou quoi ?
Le garçon baissa les yeux et répondit d'une voix saccadée.
- C'est bien ça...
Touché par sa réaction, le vieillard se racla la gorge et détourna le regard.
- Je vous prie d'accepter mes plus plates excuses. Je l'ignorais.

Les nuages commençaient à obscurcir les plaines de Carlem.
- C'est la capitale. Le centre du royaume.
- Je vois.
- Pourquoi veux-tu te rendre à Pegredin, mon garçon ?
- Je dois sauver mon maître d'un poison mortel. Là-bas, je devrais rencontrer un alchimiste.
- Haha, il doit s'agir de Rickert !
- Vous le connaissez ?
Le sourire de l'homme resta figé un instant. Puis il redevint morose.
- C'est mon fils, qui m'a renié de sa famille parce que ses expériences semblent plus importantes que moi.

Hermin fit alors une promesse à cet homme. Son but étant de retrouver l'alchimiste, il allait lui parler de son père et essayer de régler leurs problèmes.

Au bout d'une heure de trajet supplémentaire, ils arrivèrent à la bordure de Pegredin, une forêt dense et peuplée de monstres faibles. Sans trop se faire remarquer, le père de Rickert avança tout droit.
- Au fait, vous ne m'avez pas dit votre nom...
L'homme s'appelait Julius. Il venait d'Estarios, un village en bord de mer, au sud. Chaque année, il allait vendre son vin à la cité marchande à très bon prix.

Tout en discutant silencieusement, ils s'approchaient de leur destination. Soudain, quelque chose traversa la forêt. Une lance magique. Le rayon surpuissant traversa le bras droit du vieil homme qui hurla de douleur. S'il avait eu le temps de se retourner et de voir la tête de sa femme totalement effacée, il aurait pu crier bien plus fort. La calèche était trouée et les barils explosés.

Au sol, en proie à la douleur, Julius grimaçait.
- Ne le touchez pas ! s'exclama Hermin en sautant vers son nouveau camarade.
Des Gobelins mages, une race faible, s'approchaient à toute vitesse du blessé.
- Pourquoi ? demanda l'homme. Pourquoi risquer ta vie pour moi ? On ne se connaît pas...
- Parce que sans vous je serais mort. Je vous ai peut-être aidé la première fois par pure folie mais Julius...

Les monstres arrivaient à toute vitesse.
- Vous êtes mon ami... Mon premier ami...
Sa chandelle en main, les yeux rivés vers l'horizon, il s'apprêtait à terrasser chacun des ennemis qui tentaient de s'approcher.
- Hermin...
Sa voix était devenue si faible.
- Tu es quelqu'un de bien... Tu sauvera ton maître... J'en suis certain...
Les larmes aux yeux, debout devant le corps du défunt vieillard, il tremblait. Ces paroles venaient d'atteindre sa sensibilité au plus haut point. Vint alors le moment d'exterminer leurs assaillants.

Les trois flammes s'allumèrent et sans utiliser la moindre magie, il balaya les airs en laissant un souffle ardent éloigner les quatre Gobelins.
- Vous venez de vous condamner...
Le majordome prit appuie sur la terre humide couverte de feuilles mortes. Puis, il sauta vers celui qui semblait être leur chef. Plus grand, plus fort et muni d'un casque de fer.
- Bande de fils de putes...
Il atterrit sur les épaules de la créature, en colère. Avant même que celle-ci s'écrase au sol, poussée par le poids et la force de ce garçon au cœur empli de haine, sa tête brûla suite à une combustion.

Apeurés, les trois autres reculèrent. Cependant, non satisfait de sa victoire contre un monstre aussi insignifiant, il se redressa. Debout sur le corps de leur chef de groupe, le regard perdu, du sang sur le visage, il leur adressa un sourire des plus sadiques. Son maître lui avait appris quelque chose qu'il allait également pouvoir appliquer à la lettre.

« Dans ce monde, tout se paie. Parfois, saches que l'argent est inutile pour payer une dette. »

Avec sa vélocité étonnante, il se rua sur sa prochaine victime et sans s'arrêter, il le transperça avec sa chandelle. Ses bougies étaient devenues des lames de métal grâce à sa magie. Ensuite, il retira son arme du ventre ensanglanté du monstre en le repoussant avec son pied. L'un d'eux s'était déjà enfuit. Le dernier se fit trancher la tête.

Épuisé, le garçon se laissa tomber contre une roue de la charrette en piteux état. Il regardait le cadavre de ce pauvre homme, en pleurant.

« Tu es quelqu'un de bien... »

En plein centre de la forêt, le majordome était observé par beaucoup de monstres. Ils avaient tous l'air effrayés par sa soif de sang. Puis, lorsqu'il se leva pour reprendre la route, ils s'en allèrent le plus loin possible afin d'éviter son courroux.

Pendant ce temps, au château de la capitale, le saint chevalier Mikhail s'agenouilla devant son père.
- Tu l'as ressenti aussi ?
- Oui, mon roi...
- Sauf votre respect, monseigneur, je ne pense pas que ce soit l'armée impériale de Rolores. Cette aura meurtrière, je ne la reconnais pas...
Le prince se releva et croisa ses bras.
- Bartolomia a raison. Cela ne venait pas du royaume.
- Je le sais, déclara le roi. J'ai reconnu cette fureur...

À des centaines de kilomètres d'eux, dans un village en ruine, sur une montagne de cadavre, un type afficha un sourire malsain sur son visage recouvert de sang.

« Saint chevaliers, tenez vous prêts à protéger le royaume... Un traitre compte s'en prendre à moi. À nous... »

Mikhail posa sa main sur la garde de son épée.
- Dans quelques heures, il est probable que mon autre fils revienne pour tous nous tuer...

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