Le traitre
Jonas vient de tomber à terre. Loïs, qui arrive maintenant à sa hauteur, s'agenouille précipitamment au-dessus lui. Il essaie vainement de stopper avec ses mains le flot de sang qui s'étale sur le torse de son mentor. Je m'extirpe de ma cachette et commence à m'élancer pour le rejoindre mais je sens que quelqu'un me retient par le bras. Je me retourne et me retrouve face à Néven qui lance des regards inquisiteurs autour de lui.
- Reste cachée Manéa, on ne sait pas d'où vient le tir.
Il me fait signe de me baisser et de me mettre à l'abri derrière un rocher.
- Mais je dois rejoindre Loïs ! Regarde, fais-je, en lui désignant la navette, Jonas est blessé.
- Je te dis d'attendre deux minutes ! s'énerve Néven . Obéis-moi pour une fois, s'il te plaît !
Je le fixe avec étonnement. Je ne l'ai jamais vu aussi anxieux. Aurait-il remarqué quelque chose qui m'ait échappée ? J'observe les environs et, effectivement, un détail maintenant m'interpelle. Des silhouettes semblent en mouvement à quelques mètres de nous. Des sentinelles sortent de derrière les collines. Leur nombre ne cesse d'augmenter au fil des secondes. Elles sont des dizaines, armées de fusils d'assaut et se mettent à tirer sur les dissidents qui se sont précipités vers la navette. Ces derniers s'effondrent sur le sol, telles des marionnettes dont les fils auraient été sectionnés d'un coup de ciseaux.
- Fichez le camp d'ici ! hurle Néven dans leur direction, en faisant de grands gestes avec ses bras. Allez-vous mettre à l'abri ! Dépêchez-vous !
C'est la pagaille pendant quelques minutes, le temps que les dissidents comprennent la situation. Puis les représailles s'organisent. Les résistants ripostent maintenant et se mettent à couvert. Malgré tout, les corps s'accumulent sur le sol. Des cris et des hurlements résonnent ici et là. Les blessés sont laissés à l'abandon, autant d'un côté que de l'autre. Je regarde, affolée, Loïs qui tente de ramener, comme il le peut, aidé par David, Jonas dans la navette. Gaïa sécurise leur position en mitraillant les sentinelles qui approchent. Je ne discerne pas bien ce qu'il se passe, ma position étant trop éloignée, alors je prends mes jumelles pour être au plus près du vaisseau. Jonas a disparu à l'intérieur de la navette. Loïs vient aider Gaïa à tenir à distance les soldats. Des dissidents arrivent d'Altis, sûrement alertés par d'autres rebelles. Notre camp semble reprendre peu à peu le contrôle de la situation. Les soldats commencent à reculer. J'aperçois soudain un homme qui leur donne un ordre de repli.Cette silhouette, elle ne m'est pas inconnue. Alors que Ségal et Néven continuent à tirer sur les soldats à leur portée, je pointe mes jumelles dans la direction de l'homme. Un énorme poids s'abat sur moi. Il n'y a aucun doute possible, il s'agit de Follins.
- Néven, crié-je, complètement déstabilisée par ma découverte, le mec là-bas, c'est Follins !
Néven s'est arrêté de tirer et m'arrache mes jumelles des mains. Je vois son expression changer, ses mains se crisper. Tandis qu'il est toujours fixé sur Follins, j'entends soudain la navette émettre un bruit étrange. Je me retourne vers elle et je la vois qui entreprend de décoller. Un nuage de poussière se déploie sur la zone, obligeant les belligérants des deux camps à se protéger les yeux.
Où sont passés Loïs et les autres ? me demandé-je. Sont-ils à l'intérieur ? Alors que la navette s'élève dans les airs, une voix me parvient dans ma radio.
- Manéa, c'est Loïs. Tu es là ? Réponds-moi !
Je récupère à toute vitesse ma radio. Dans la précipitation, je manque de la lâcher.
- Loïs, tu es où ? Qu'est-ce qui se passe ?
- Je suis dans la navette. On va trouver un endroit pour se poser à l'abri puis on revient vous aider.
- Comment va Jonas, Loïs ?
Un silence se fait à l'autre bout de la radio.
- Il est mort, lâche ce dernier. Il a l'air accablé, très touché par les événements, je le sens au son de sa voix.
- Merde, je réponds simplement. Qu'est-ce qui s'est passé Loïs ? C'est quoi ce merdier ?
- Je ne vois qu'une réponse. Quelqu'un nous a trahis, affirme-t-il, comme une évidence.
Je reste consternée. Dans l'action, je n'avais pas pensé à cette éventualité et pourtant, en y réfléchissant, c'est la seule possible !
- Mais qui a pu faire ça ?
- Je n'en ai aucune idée. Ecoute, je dois te laisser maintenant. Je vous rejoins dès que possible. Faites attention et méfiez-vous de tout le monde !
Alors que la radio se tait, je vois Néven et Ségal qui m'observent. Ils ont tout entendu.
- Quel est le connard qui a pu nous faire ça ? exulte Ségal.
Son regard est rempli de haine, je ne l'ai jamais vu ainsi.Personne ne comprend comment quelqu'un a pu nous trahir de la sorte. Sur le terrain en contrebas, les combats se sont calmés. Les soldats ont presque tous rejoint Follins.
- Ils ont abandonné le combat bien vite, fait Néven, pensif, alors qu'il s'appuie sur le rocher derrière lui. Je pense que leur but était d'éliminer Jonas, et peut-être même David. Ce doit être pour cela qu'ils se replient maintenant.
- Mais pourquoi seulement eux ? demandé-je. Ils pouvaient en profiter pour prendre le dessus sur nous !
- J'en sais rien. Quelque chose m'échappe. Quel intérêt de tuer Jonas et de s'en aller ? Ils ne peuvent rien en tirer, à part peut-être l'espoir de freiner les dissidents.
- Ils doivent penser, intervient Ségal, que nous seront déstabilisés sans notre chef et que cela effraiera les partisans de Nolan.
Tandis que nous discutons de ces éventualités, une scène m'interpelle dans la zone de combat. Je récupère mes lunettes et aperçoit Gaïa et Télia en train de discuter ou plutôt, de se disputer au milieu du champ de bataille. Je pensais que Télia serait dans la navette, aux côtés de son père. Que fait-elle là ?
Elle semble vouloir se diriger vers Follins alors que Gaïa tente de l'en empêcher. Télia se dégage et je reste interloquée par ce que je vois. Télia a pris son fusil et menace Gaïa de son arme. Cette dernière est tétanisée. Je ne sais pas ce que lui dit Télia mais son visage semble distordu par la douleur. Des larmes se mettent à couler sur ses joues. Télia reprend son chemin vers Follins. Je préviens les autres.
- Ségal, Néven, il se passe un truc bizarre. Regardez, Télia est en train de rejoindre Follins.
- Qu'est-ce qu'elle fait ? Elle n'est pas avec son père ? s'exclame Ségal.
- Visiblement non, je rétorque. On aurait dit qu'elle se disputait avec Gaïa. Elle part vers Follins et je crois savoir ce qu'elle veut faire !
- Venger son père ! dit Néven, arrivant à la même conclusion que moi.
- Mais elle va se faire tuer ! fait Ségal en la suivant du regard.
Nous observons la scène avec anxiété, le cœur battant. Va-t-on perdre une autre personne ce soir ? Télia arrive près de Follins. Il lui tourne le dos. Personne ne semble l'avoir remarquée, même pas les soldats. Alors qu'elle est à deux mètres de lui, Follins, se retourne et lui fait face. Ils se trouvent désormais confrontés l'un à l'autre. Mais au lieu d'une lutte sanglante entre eux deux, ce à quoi nous assistons est d'une toute autre nature. Follins affiche un grand sourire en la voyant et tend la main à Télia qui la serre fermement dans la sienne. Nous avons notre traître.
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Coucou,
J'espère que ce chapitre vous a plu.
Qui aurait pensé que Télia trahisse ainsi son père ? Et surtout pourquoi ? Gaïa va se poser mille questions.
Cette situation va entraîner bien des changements chez les dissidents. Ils vont devoir se trouver un nouveau chef. Vous avez des idées ?
Certaines réponses à ces questions seront à découvrir dans le prochain chapitre.
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