Il ne gagnera pas.

Même s'il m'a pris un bout de moi, je vais tout faire pour le récupérer. Quel qu'en soit le prix. Hors de question de laisser gagner ce petit sourire orgueilleux, ce « Je t'ai bien eue » ancré au coin des lèvres, ce connard narcissique dont la beauté dissimule la noirceur de son âme.

J'ai toujours eu un instinct de contradiction surdéveloppé. Je me suis construite contre ma mère et mon frère. Pour ne jamais devenir comme eux. Je me suis disputée des milliers de fois avec Julian juste pour le plaisir de le contredire.

Et je laisserais gagner Sebastian ? Je laisserais cette nuit triompher et déterminer le reste de ma vie ?

Non.

Je n'ai pas su le dire cette nuit-là, je n'ai pas su attraper ce petit mot qui résonnait pourtant dans tout mon être. Figée par la panique, il s'est dissout sur mes lèvres. Maintenant je te le dis haut et fort, Sebastian :

NON !

Quoi que tu m'aies pris, aussi profonde soit la blessure, je vais la panser. Redevenir comme avant. Ton ombre, je vais la réduire en sharpie.

Non, je n'accepterai pas que tu m'aies détruite.

Non, tu n'auras pas le dernier mot.

Le cœur tremblant, je saisis mon portable et presse les touches avec fébrilité :

Tu m'as dit que tu ferais n'importe quoi pour m'aider. J'ai trouvé.

J'hésite un instant en contemplant le nom de Julian affiché sur l'écran. Je ne peux pas croire que je suis en train de faire ça. J'y ai réfléchi tout l'hiver, je suis sûre que c'est la seule solution, mais je sais aussi que cela pourrait briser définitivement tout lien entre nous.

Je clique sur envoyer avant de changer d'avis.

Les petits mots s'envolent.

Lourds de conséquences.

Maintenant le plan est lancé.

J'ai intérêt à être convaincante.