Chapitre 11 : Quelques notes au coeur


Ragnor se vantait souvent, surtout en présence de ses élèves à l'Académie des Chasseurs d'Ombres, qu'il était un homme de logique et de raison. Le sorcier affirmait faire passer le sens pratique avant ses sentiments. Et pourtant, jamais l'immortel n'avait dit plus gros mensonge que celui-ci. S'il était homme de raison, l'ancien Grand Sorcier de Londres aurait ouvert un Portail, ou même demandé à son épouse de lui en ouvrir un, mais à peine son fils l'avait appelé pour lui dire que Magnus était sur un pente glissante qu'il s'était mis à courir à en perdre haleine dans les rues bondées et grouillantes de New York. Le souffle court, le front ruisselant et les yeux baignés de larmes, Ragnor ne mit que quelques minutes à peine pour atteindre l'appartement des Lightwood-Bane, grimpant les escaliers quatre à quatre pour rejoindre son fils aîné qui se trouvait en mauvaise posture. La porte n'étant verrouillée que par magie et accessible à chaque membre de leur famille, l'immortel à la peau verte n'eut qu'à en pousser le battant pour pénétrer dans le loft en criant le prénom de Magnus à se briser les cordes vocales. Ce fut la voix d'Alec qui lui répondit en un étranglement étouffé et sanglotant, le menant sur la piste de la nouvelle chambre des jumeaux de Max et de Rafael. Ragnor s'empressa de les rejoindre et sentit son coeur rater plusieurs battement en apercevant l'Indonésien inconscient sur le sol, étendu immobile dans les bras de son époux qui caressait ses cheveux et le berçait inconsciemment en chuchotant et pleurant silencieusement, priant pour qu'il tienne le coup. Ragnor sentit distinctement son esprit se déconnecter quelques instants, ses souvenirs, fugaces et pourtant si douloureux, le ramenant à chaque instant de cette vie où son enfant s'était retrouvé dans cette même situation. Son attaque, son coma, son cancer. Toujours Magnus avait été le plus fort d'entre eux, et toujours Magnus avait été le plus touché par la vie, par les aléas du quotidien et par les dés lancés du destin. Cependant, même si la situation était des plus difficile à vivre, Ragnor savait qu'il devait se reprendre et aider son enfant. Si Magnus mourrait sans qu'il n'eut fait quoi que ce soit pour l'aider, ce serait sa faute pleine et entière. S'intimant au calme, le sorcier cornu s'agenouilla près de son cadet et, comme Max un peu plus tôt, posa une main sur son cœur, prenant l'autre dans la sienne.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? S'enquit-il d'une voix tendue alors que sa magie commençait déjà à englober le corps de l'inconscient.

- Je ne sais pas, il a juste utilisé un peu de magie et il s'est écroulé en disant qu'il avait mal au cœur..., répondit Alec en reniflant avec inquiétude.

- C'est sa magie, il s'épuise trop vite, réfléchit Ragnor à voix haute, son esprit tournant à vive allure. Max, va dans son bureau, dans l'armoire à potion, cherche un petit flacon avec de la poudre orange et argentée. Prends aussi la fiole avec les gouttes de nitrate d'argent, je vais en avoir besoin.

Hochant la tête, Max se précipita hors de la chambre en direction de l'office où son Ayah rangeait toutes ses affaires de Grand Sorcier. Cela faisait des mois, si ce n'est plus, que l'asiatique avait fortement ralenti ses activités de Grand Sorcier de Brooklyn. Par le passé, il prenait plusieurs rendez-vous par jour, parfois même avec des Terrestres. Aujourd'hui, Magnus aidait avant tout les Nephilims et les membres du Monde Obscur. Malgré ce ralentissement, l'immortel aux yeux de chat faisait toujours en sorte d'entretenir et d'étendre son savoir en matière de sorts et de magie, tant et si bien qu'il passait parfois plusieurs heures par jour dans son bureau à développer ses connaissances, Max apprenant lui aussi le savoir de son Ayah en l'observant de ses grands yeux curieux. Se dirigeant vers l'armoire à potions, le futur père trouva rapidement les flacons demandés par son parrain et il les lui apporta sans plus tarder, sentant lui-même sa panique augmenter au fur et à mesure des minutes qui s'écoulaient sans que l'Indonésien de se réveille. Dans la chambre, Magnus, lui, ne s'était toujours pas réveillé et son cœur ralentissait dangereusement. Lorsque Max revint, Ragnor usa de sa magie, sans jamais lâcher son fils, pour verser trois gouttes de nitrate d'argent sur la poudre orange argentée avant de passer le flacon fumant et odorant sous le nez de Magnus. Il ne fallut pas attendre plus de quelques secondes avant que le Grand Sorcier de Brooklyn n'ouvre faiblement les yeux en gémissant, tentant vainement de repousser la fiole que Ragnor referma pour le ranger en lieux sûr.

- Drogues féériques, expliqua-t-il aux trois autres qui retenaient encore leur souffle. Dangereuses à consommer mais mélangées à du nitrates elles peuvent faire des miracles et booster le système immunitaire ! Magnus, ça va Annaku ?

- Pas si fort..., marmonna le plus vieux en gémissant et se nichant un peu plus contre son époux.

- Le seul effet secondaire est une gueule de bois carabinée, ça passera dans quelques minutes; sourit-il simplement en se sentant lui-même déjà soulagé.

- Comment c'est possible ? Comment est-ce qu'il a pu faire une crise cardiaque ? S'enquit Rafael en se tordant nerveusement les mains.

- Insuffisance cardiaque, corrigea le plus vieux avec bienveillance sans faire attention que son interlocuteur n'était plus Raphaël Santiago. Magnus a lié sa magie à son âme pour ramener Rafe, même si c'est toi qu'il a ramené. Quoi qu'il en soit, même si sa magie n'a rien perdu en puissance, il s'épuise plus vite que d'habitude vu qu'il tire sa force de son énergie vitale et non plus de son Centre Magique. Tu vas devoir limiter les efforts pendant un temps mon grand, soupira-t-il envers son fils qui venait de rouvrir les yeux.

Magnus grommela qu'il n'était pas un vieillard mais ne se redressa pas pour autant, préférant reprendre sereinement ses esprits entre les bras que son époux qui n'allait certainement pas s'en plaindre. Rafael, lui, essaya de garder son calme en jetant un coup d'œil au plus vieux.

- Oncle Ragnor...C'est moi, chuchota-t-il presque avec timidité en faisant un pas en avant.

- Rafe...?

L'Argentin opina lentement du chef et, face à lui, l'immortel cornu à la peau verte resta sans voix, incapable de bouger. Puis, lentement, son choc laissa place à un immense sourire et il éclata de rire subitement en se levant pour le prendre dans ses bras et le faire tournoyer sur place comme lorsqu'il était petit garçon. Magnus, qui se sentait déjà mieux et en pleine forme, observa son père soulever leur fils aîné et son regard se chargea de douceur et de tendresse pour eux. Ragnor était le patriarche de leur famille, leur papa poule à tous, et le voir aussi heureux du retour de Rafael leur mettait à tous un peu de baume au cœur. Posant une main baguée sur la joue de son compagnon, Magnus tourna la tête et captura ses lèvres avec bonheur et amour, soupirant de soulagement. Cette fois, tout était parfait, absolument tout. Alec lui rendit son baiser et, lorsqu'il s'écarta finalement, fit promettre à son sorcier de se ménager, ce que Magnus accepta, bien qu'en ronchonnant comme à son habitude lorsque sa santé était en jeu. Enfin tous soulagés, Ragnor proposa qu'ils se rendent à l'Institut afin d'annoncer aux autres le retour de Rafael et de leur expliquait comment ils en étaient arrivés là.

- Je vais les prévenir qu'on arrive, lança le britannique en sortant son téléphone de son long manteau d'époque.

- Oncle Ragnor, attend, sourit Rafael avec malice, je crois que j'ai une idée...

Pendant ce temps, à l'Institut, l'esprit de chacun était tourné vers Magnus et son état de santé. Lorsque Ragnor avait décroché, le sorcier se trouvait en compagnie de ses proches et n'avait eu d'autres choix que de leur dire la vérité sur ce qu'il se passait avant de s'enfuir en courant en direction de l'appartement des Lightwood-Bane et, à présent, il ne leur restait plus qu'à attendre, même si l'attente était des plus éprouvante. Tout d'abord Alec et sa poussée magique, puis Rafael, ensuite Max, et à présent Magnus...Quand le malheur allait-il arrêter de s'abattre sur leur famille ? Aucun d'eux ne le savait. Alors, quand un Portail s'ouvrit dans le vaste salon et que Ragnor et Magnus en sortirent les premiers, toute leur famille se leva d'un bon pour le prendre dans leurs bras en lui posant mille questions pour savoir comment il allait. L'Indonésien sentit son cœur s'apaiser à la constatation que sa famille s'était inquiétée pour lui, en dépit de tout ce dont il s'était rendu coupable au cours des dernières années écoulées. Ragnor expliqua donc, alors qu'ils s'installaient tous, que Magnus s'épuisait plus vite à présent que sa magie tirait son pouvoir de sa vitalité et qu'il faudrait être prudent à l'avenir. Evidemment, c'était sans compter sur Catarina qui promit, avec l'aide de Tessa et de Jem, de trouver un traitement sur le long terme pour permettre à Magnus d'éviter des crises du genre de celles qu'il venait de subir un peu plus tôt. L'immortel aux yeux de chat les remercia avec joie et vola un baiser à son amant qui, lui aussi, leur était reconnaissant pour tout ce qu'ils faisaient pour tous les aider sans jamais faillir. Chacun leur assura que c'était normal, puisqu'ils étaient tous unis, puis Isabelle rompit le silence en dardant son regard sombre sur Raphaël, que personne n'avait remarqué être en réalité Rafe, qui observait d'un oeil suspect une stèle brisée en deux et placée sous verre comme un trophé quelconque.

- Ne touche pas à ça ! Gronda-t-elle en fronçant les sourcils lorsqu'elle l'aperçut levant la main pour la toucher. C'est à Rafe, tu peux regarder avec les yeux, hors de question que tu poses tes doigts dessus.

- Elle est brisée en deux, pourquoi la garder de toute façon ? Demanda-t-il d'un ton qui se voulait dédaigneux en haussant les épaules. C'est juste une stèle stupide, rien de plus.

- C'est la stèle de la première rune permanente de Rafael, expliqua Clary en tâchant de se montrer un peu moins froide qu'Isabelle mais sa voix trahissant pourtant sa tension. La tradition veut qu'on la brise et qu'on la conserve, pour que rien ne puisse défaire ce qui a été fait. Lorsqu'un autre Chasseur d'Ombre de cette famille recevra sa première rune, la stèle de Rafael sera remplacée par la sienne, et ainsi de suite.

L'Argentin grimaça comme l'aurait fait son homologue vampire et tournoya autour de ses proches comme un rapace traquant sa proie. Max, lui, se grattait l'arrière de la corne comme d'autres auraient pu se mordre la lèvre, afin de s'empêcher de rire. Il savait, tout comme ses parents, que Rafael avait un caractère bien trempé, proche de celui de Raphaël Santiago. Magnus, plus particulièrement, gardait en mémoire bon nombre de dispute qu'il avait eu avec son fils aîné lorsqu'il était plus jeune, entre ses dix et ses treize ans, et qui avait tourné en de véritables explosions de sentiments et de cris, bien que vite interrompu par Max qui faisait pleuvoir la pluie sur eux jusqu'à ce qu'ils cessent. Pourtant, Rafael avait avant tout un tempérament protecteur envers ses proches. Il aurait décroché la lune et donné son cœur à n'importe quel membre de sa famille pour les voir souriants et heureux. Aussi, aucun des trois Lightwood-Bane ne doutait de la difficulté du Chasseur d'Ombre à garder un rôle sérieux alors que, tout ce qu'il désirait, c'était de se jeter dans les bras de ses oncles et tantes pour les retrouver. Le Nephilim se dirigea finalement vers le piano où il s'installa avec un regard qu'il voulait provocateur en direction de son parrain qui se tendit en serrant les poings dans son fauteuil. Alec sentit un élan de compassion pour son parabatai le traverser. Si Jace avait joué chaque jour à s'en faire saigner les doigts en sa mémoire lorsqu'il l'avait cru mort, c'était l'inverse concernant Rafael. Cela faisait plus d'un mois que le blond n'avait pas posé ses mains sur les touches noires et blanches pour faire chanter son instrument. Rafael, donc, commença à jouer quelques mélodies au hasard, sans jamais cesser de lâcher son parrain des yeux puis, alors, il mit son plan à exécution, accentuant la provocation à son paroxysme.

- A la claire fontaine.....

- Arrête..., intervint Jace en serrant les dents.

- M'en allant promener....

- Raphaël, arrête tout de suite....

- J'ai trouvé l'eau si belle que je m'y suis baigné..., continua le plus jeune sans cesser de jouer.

- Stop, ça suffit ! Hurla le blond en se levant d'un bon pour foncer droit sur le pianiste.

- Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierais...., souffla enfin Rafael en déposant le petit soldat de plomb que lui avait donné son parrain pendant son sommeil profond sur le piano. Papa..., l'appela-t-il doucement en lui souriant presque timidement.

Face à lui, Jace fondit brusquement en larme, les sanglots douloureux déchirant sa poitrine alors qu'il prenait son fils de cœur dans ses bras. Cessant de jouer, Rafael lui rendit son étreinte en pleurant à son tour. Magnus et Alec nouèrent leur doigts ensemble et observèrent la scène avec tendresse. Tous deux connaissaient le lien qui unissait Rafael à son parrain, et ils acceptaient pleinement que ce dernier fasse office de troisième père pour lui et ils n'avaient aucun problème concernant le fait que l'Argentin l'appelle papa. Jace était son parent, au même titre qu'eux, et ça leur allait amplement. Père et fils, donc, se retrouvèrent dans les larmes et le soulagement, se berçant l'un l'autre et fredonnant A la Claire Fontaine d'une voix basse et commune, soudée, nouée. Eux aussi avaient besoin de se retrouver, eux aussi avaient besoin de se prouver qu'ils étaient encore vivants, que tout allait bien, que plus jamais rien ne viendrait séparer et briser leur famille. Ils étaient plus forts que ça, bien plus forts. Les autres membres de leurs familles versèrent leurs propres larmes ainsi que Simon qui s'exclama, au milieu de cette paisible scène : "C'est vrai que je suis pas à genoux cette fois !", faisant éclater de rire les autres au travers de leurs larmes émues. Jace embrassa le front de son filleul et le laissa retrouver ses autres oncles et tantes à qui il avait, également, terriblement manqué. Une famille unie, une famille soudée, et pourtant une famille...

- Rafe, qu'est-ce qu'il s'est passé ? S'enquit Jem en se penchant en avant, les coudes sur ses genoux. Catarina et Tessa ont déterminé à tes blessures que tu as voulu mourir, est-ce que c'est vrai ?

- C'est...C'est vrai..., avoua le jeune homme d'un ton d'excuse.

...Une famille blessée, perdue. A l'aveux de leur fils, Magnus et Alec sentirent leurs larmes revenir dans leurs yeux, leur cœur se pinçant douloureusement. Où avaient-ils échoué ? Qu'avaient-ils fait de mal dans leur rôle de parent pour que leur fils aîné veuille se donner la mort. Max, quant à lui, sentit son pauvre cœur tomber en morceaux à ses pieds et il posa une main sur son ventre arrondi comme pour le protéger et protéger ses petits. Rafe avait voulu mourir alors qu'il avait juré le contraire, Rafe l'avait trahie, Rafael avait voulu mourir, Rafael l'avait abandonné, Rafael ne l'aimait plus, Rafael avait délaissé sa famille, leur famille, leurs enfants. Il se dégagea lentement des bras de son homme et se déplaça pour s'asseoir à l'autre bout du canapé. L'Argentin le regarda avec peine, sans comprendre sa réaction.

- Max...Corazon, qu'est-ce qu'il y a ? S'enquit-il désespérément en tendant une main pour caresser son ventre amoureusement.

- Non, lâcha le plus jeune d'un ton glacial. Je t'interdis de me toucher, de les toucher. Reste loin de moi...

- Mais...Max...S'il te plait, laisse-moi t'expliquer, c'est juste...S'il te plaît, implora-t-il encore en faisant un pas vers lui.

- Ne t'approche pas de moi ! Hurla le cadet en libérant ses larmes de peine et de colère sur ses joues devenues grises de chagrin. Tu nous as abandonné, tu as voulu mourir Rafael...Tu m'as menti, tu t'es servi de moi...Je ne veux plus que tu poses les mains sur moi, tu aurais dû y réfléchir avant de me prendre pour un con !

Les trois quart des adultes présents, dont Magnus, Alec et Ragnor, ainsi qu'Isabelle, écarquillèrent les yeux grands comme ceux de hiboux sous extasie. Jamais Max ne jurait, jamais Max ne se laissait aller à la colère. Son âme était pure et douce, pas rancunière. Et pourtant, Max pouvait le sentir. Sa réaction n'entachait en rien la pureté de son âme ou de sa magie, il était toujours le même, mais c'était son instinct qui parlait, son instinct qui rappelait étrangement les réactions de Magnus lorsqu'il portait encore son cadenas.

- Les bébés...chuchota Alec à son époux en réalisant ce qu'il se passait. Il n'y a pas que la blessure de Max, il y a celles de leurs enfants, eux aussi se sentent abandonnés, et ça renforce sa colère...ils sont trois contre un...Et il est plus puissant que toi, mon chat, il va faire beaucoup de dégâts si on ne...

- Trop tard, soupira Magnus en déglutissant difficilement, les yeux rivés sur ses enfants. Prépare toi à assister à la dispute du siècle, Sayang, et elle ne va pas être belle à voir...

En effet, sous les yeux ébahis et, même, effrayés, Max se tenait là, poings serrés, son être tout entier crépitant de magie aux volutes argentés qui grondaient dans l'air ambiant et qui,peu à peu, prirent une teinte rougeâtre, signe de sa colère et de son agacement. Sa peau, d'ordinaire bleu pétillante comme un ciel d'été, se retrouvait à présent prise d'une teinte de gris pâle comme de la brume un matin d'automne. Mêmes ses cornes semblaient perdre de leur éclat. Il aurait pu paraître plus effrayant encore, si seulement ses yeux, toujours aussi éclatants, n'avaient pas témoigné de toute la détresse qui habitait son cœur. Son époux, son frère, son meilleur ami, son parabatai, le père de ses enfants l'avait abandonné, délibérément. Rafael, lui, déglutit difficilement en reculant de quelques pas, ses yeux également embués de larmes de regret et de culpabilité qui ne cessait de s'accrocher à son cœur depuis son retour. L'Argentin réalisait à quel point son départ avait fait du mal à sa famille et même s'il l'avait fait pour ce qu'il estimait être une bonne cause, et une cause juste, il s'en voulait malgré tout d'avoir fait souffrir ses proches. Il tenta le tout pour le tout en voulant calmer son cher et tendre.

- Max...Corazon, s'il te plait, laisse moi t'expliquer...

- Il n'y a rien à expliquer !! Cria le plus jeune alors que ses larmes redoublaient et que sa magie claquait dans l'air comme un fouet prêt à frapper sa victime. Tu as voulu mourir ! Tu as dit que tu voulais revenir à la maison, tu m'as menti !!

- C'est vrai que j'ai dit ça, admit le Chasseur d'Ombre avec crainte, mais je ne t'ai jamais menti, je voulais vraiment revenir. Je ne me suis souvenu de ce qu'il s'est passé que quand je me suis réveillé, je te le jure...Je t'en prie essaie de me croire...

- Tu as voulu m'abandonner...Après tout ce qu'il s'est passé, toutes les difficultés qu'on a eu...J'ai appris à être un Chasseur d'Ombre pour toi, je porte des runes pour toi...Je t'ai offert mon coeur et toi tu l'as piétiné !! Hurla-t-il en laissant une vague de magie plus forte s'abattre sur son mari.

Rafael fut projeté contre le mur derrière lui et s'écroula au sol en gémissant lourdement. Magnus, inquiet, tenta de se lever pour rejoindre son fils aîné mais la magie de Max, indépendante et qui cherchait avant tout à protéger son propriétaire et les enfants qu'il portait en lui, dressa une barrière qui l'immobilisa dans le sofa où il se trouvait. L'Indonésien l'implora de se calmer, qu'il connaissait ce sentiment d'injustice mais que ce n'était pas la faute de Rafael, pas directement, il en était certain. Mais Max n'écoutait pas. Max n'avait que son chagrin en tête et sa magie prenait le dessus sur lui, son empathie douloureusement blessé se vengeant de ce qu'il s'était passé et qui leur avait fait du mal à tous. Rafael, lui, semblait incapable de se relever. Il aurait pu activer une rune de force, crier, hurler, mais non, rien, il restait simplement là, étendu à attendre que son mari lui assène le coup fatal. D'aucun ne savait quel spectacle était le plus pénible : la colère de Max, ou l'incapacité de leur fils, ce fils qui avait défié Raziel en personne, à se défendre face à l'homme qu'il aimait. Alec savait qu'il devait faire quelque chose, savait qu'il devait agir. Les coups de magie de Max pleuvaient autour de l'Argentin pour lui faire payer ce que son âme comprenait comme une trahison. Alors, comme son enfant s'était interposer entre Magnus et lui pour le sauver, le noiraud bondit en avant et se plaça à genoux devant son fils aîné, érigeant un bouclier avec sa magie, brillante d'une douce lueur vert émeraude, pour protéger son enfant des attaques répétées de son cadet, ses ailes l'englobant pour une protection supplémentaire.

- Max, stop ! S'il te plait ! Lui cria Magnus en désespoir de cause, voyant Alec et Rafael en mauvaise posture, ses larmes roulant librement sur ses joues. Hatiku je t'en prie ! Supplia-t-il dans un sanglot étranglé.

- Max, écoute moi, souffla Alec avec un calme olympien, sans jamais lâcher Rafael qui était venu se loger dans ses bras. Je sais ce que tu ressens, tu te sens trahis, tu as mal qu'on t'ai menti. J'ai menti moi aussi, tu te souviens ? Tu te souviens quand j'étais un Frère Silencieux ? Tu te rappelles de ce que tu m'as dit quand je suis revenu ? Tu ne m'as pas une seule fois reproché mon absence, même si elle t'a fait souffrir. Tu m'as simplement demandé de sauver Ayah parce qu'il ne voyait plus clair à travers sa douleur. C'est ce que je fais aujourd'hui avec toi, Max. Ne vis pas dans la colère mon coeur...Tu n'es pas comme ça...Je sais que tu as mal...Mais pense à la raison pour laquelle ça te fait autant souffrir...

Les larmes aux yeux, Max ferma ses paupières, les mots de son Dad le touchant en plein cœur. Fouillant dans son âme, il réalisa que ce qui nourrissait sa colère, c'était son amour. Son amour si fort, si puissant qu'il régissait sa vie à bien des égards. Rafael était l'amour de sa vie, son âme sœur, sa moitié et son tout. L'Argentin, de son côté, posa une main sur sa rune de mariage et transmit à son homme tout l'amour qui l'habitait, faisant tomber son cadet à genoux sous la force de ses émotions. Max fondit en larme sous le choc et, lorsque sa magie reflua, Rafael se précipita sur lui pour le prendre dans ses bras et le consoler. Il n'y avait aucune rancune, aucune colère dans ses gestes, simplement la volonté d'apaiser les tourments du plus jeune. Le sorcier à la peau bleue s'excusa mille fois pour ce qu'il venait de faire et le Nephilim le récompensa d'un baiser amoureux et tendre sur ses lèvres tièdes. Contre lui, l'immortel était inconsolable.

- Pourquoi...Pourquoi tu voulais nous laisser...? Pleura-t-il encore en se serrant contre lui pour garder sa chaleur.

- Je n'ai pas eu le choix...Il fallait que j'aide Dad...Il m'a dit qu'il allait mourir si je ne me sacrifiait pas à sa place, alors j'ai accepté, sans savoir que ce n'était qu'une Poussée Magique...Je te le jure, Corazon, je ne voulais pas t'abandonner, ni toi ni nos angelitos, je voulais juste aider Dad...Il avait promis que c'était la seule solution et...Et j'ai voulu le croire parce que j'avais réussi à négocier avec lui, il avait promis de ne plus s'en prendre à aucun d'entre nous...

- De qui tu parles, Pequeno ? S'enquit Magnus en serrant la main de son compagnon dans la sienne. Qui t'a dit de te sacrifier pour sauver Dad ?

- Asmodée..., souffla le Chasseur d'Ombre aux yeux chocolat en raffermissant sa prise sur son mari comme pour le protéger, une main placée en sécurité sur son ventre. Il est vivant....

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