8. Evil's den

Chapitre 8 – Evil's Den

Paris, 1482

Le temps était froid et maussade dans les rues de ce Paris du XVème siècle, le ciel était gris et menaçait de s'abattre sur les pavés glissants. Dans un coin sombre, au milieu des échoppes des boulangers qui sentaient le pain chaud, un homme, vêtu d'une sombre cape élimée cherchait à échapper au froid de cet hiver difficile. On ne pouvait guère plus qu'apercevoir sa maigre silhouette qui se détachait des murs sales, et ses cheveux bruns qui lui tombaient sur le front. C'était un homme en disgrâce, un déchu.

Ses souliers troués ne le préservaient pas du froid, et sa cape ne le protégeait même pas du vent. Se faufilant parmi les étales sans être vu, il chipa un morceau de pain qu'il fourra dans une de ses poches avant de disparaitre au coin d'une rue, s'enfonçant loin dans les ténèbres qui l'obscurcissaient. Il se traîna jusqu'au bout de la ruelle avant de se laisser tomber entre deux poubelles, sortant sa récolte, avec laquelle il devrait subsister jusqu'au lendemain.

Il menait désormais une vie bien triste et misérable. Qui aurait pu croire qu'un homme aussi éminent que lui puisse tomber aussi bas ? Sa chute avait été terrible, et il avait dû s'habituer à cette vie de bohème qu'il subissait à présent. Il n'avait rien à faire dans les rues, il était né pour gouverner. Il était un homme du Bien, un homme de Dieu. Un homme de foi et de loi, qui vivait auparavant pour la justice et l'aide aux autres. Il avait mené une lutte acharnée contre le Mal, et c'était ainsi qu'il terminait : amer et torturé.

Lui qui avait tant acté pour la justice, il se voyait tourné en ridicule, devenir comme ceux qu'il avait toujours abhorré – ceux contre qui il avait tant lutté. Obligé à voler son pain pour pouvoir survivre...

Après avoir terminé son maigre repas, il partit en quête d'un nouvel abri pour la nuit qui viendrait, déambulant parmi la population parisienne de cette triste époque. Chacun de ses abris étaient toujours découverts par la Garde Royale, qui luttait contre les bannis, comme lui. Il se devait souvent de changer de cachette, de fuir tout ce qui pouvait le nuire. C'était devenu son quotidien.

Il marcha ainsi tout au long de la journée, usant ses jambes frêles qui peinaient à le porter, élimant ses souliers. Il était épuisé quand il arriva près du cimetière – celui qui avait marqué sa débâcle. Il se laissa tomber au pied d'un arbre, près d'un mausolée, éreinté, en se disant qu'ici, au moins, il serait à l'abri du vent. Le soleil déclinait lentement sur l'horizon, baignant le cimetière de sa lueur orangée.

Il éclaira ainsi le visage tiré et brutalement vieilli de l'ancien archidiacre : Claude Frollo.

**

Storybrooke, de nos jours

Trois jours avaient passé depuis qu'Emma avait disparu. Trois longues et interminables journées qu'ils passaient à écumer différents lieux dans l'espoir de la retrouver. Killian pouvait compter le nombre d'heures pendant lesquelles il avait réussi à trouver le sommeil – bien malgré lui. Après son escapade dans la forêt, qui s'était étirée jusqu'au lendemain midi sans rencontrer de succès, il était rentré chez eux avec l'espoir vain que la jolie blonde y serait miraculeusement de retour. Son amertume fut grande quand, après avoir retourné la maison, il ne la trouva toujours pas.

A la vérité, il ne comprenait pas comment cela avait bien pu se produire. Il n'avait de cesse de tourner et de retourner les évènements dans sa tête, sans parvenir à trouver le moindre sens à ce qui s'était passé. Hyde avait visiblement cette faculté d'être insaisissable – sûrement autant qu'il était sans foi ni loi. Ils avaient en effet discuté avec le Docteur Henry Jekyll, qui leur avait expliqué ses recherches et travaux sur le dédoublement de la personnalité et la lutte constante qui habitait les hommes. Maintenant que le Docteur avait réussi à mettre au point son dernier sérum, qui permettait au Bien et au Mal de se séparer, Hyde possédait une identité propre et n'en était que plus indépendant.

Et c'était ce qui faisait peur au pirate. Il avait vu cet immonde Directeur dans le Monde des Histoires Oubliées, il avait subi sa violence, sa suffisance, sa cruauté... il n'en redoutait que plus ce qu'il était capable de faire à Emma. Pourquoi l'avait-il enlevée ? ça paraissait dénué de sens ! Elle était la Sauveuse, certes, et le fruit du Véritable Amour – mais comment ce malfrat aurait pu en être averti ? et en quoi cela pourrait lui être utile ?

Soudain, alors qu'il faisait les cent pas dans le salon de leur maison, il se rendit compte qu'il n'y avait qu'une seule manière pour que cet Edward Hyde soit au courant : Rumplestiltskin. Après tout, le Directeur avait affirmé connaître le crocodile, alors qu'ils étaient coincés dans son monde, il avait même cru que c'était ce lâche qui les avait envoyés.

La colère qui le consumait depuis ces trois derniers jours atteint un point tel qu'il s'arrêta devant la table avant de la renverser violemment sur le sol, bousculant les chaises disposées autour qui suivirent le mouvement. A bout de forces, tentant de se réprimer, il se laissa tomber sur un des sièges qui était resté debout et se prit la tête dans sa main, son coude posé sur un de ses genoux. Ça ne pouvait pas continuer, il allait devenir fou ! S'ils ne la retrouvaient pas rapidement, il...

A la vérité, il se sentait impuissant, ne sachant même pas ce qu'il pourrait faire pour calmer ce qui le brûlait de l'intérieur. Killian savait pertinemment que la colère et la revanche ne feraient pas avancer les choses – Emma le lui aurait sûrement dit, si elle avait été là. Mais il ne pouvait pas s'en empêcher. Il avait déjà perdu Milah, il avait déjà dû se séparer d'Emma trop de fois. C'était la séparation de trop. Il ne n'arrivait pas à faire face à cette douleur qui lui crevait le cœur sans pouvoir y faire quoi que ce soit.

Il n'y arrivait pas, sans elle.

**

A plusieurs lieux de cela, un homme, vêtu d'une simple redingote, était patiemment assis dans un canapé abîmé et éventré, une jambe repliée sur l'autre et son coude posé sur un des accoudoirs griffés. Son menton dans sa main, un air fou qui faisait penser que ses yeux étaient enfoncés dans leurs orbites, les cerclant de rouge, il réfléchissait au meilleur moyen d'obtenir ce qu'il voulait.

Très simplement, la capture de la Sauveuse lui permettait d'achever ses plans à Storybrooke sans avoir les héros dans les pattes, puisque ces derniers étaient bien trop occupés à la rechercher – en vain, à sa plus grande fierté. C'était un don qu'il semblait posséder, et cela lui réussissait plutôt bien, jusqu'ici. Il fallait aussi dire que compter la Méchante Reine parmi ses alliés avait été un avantage pour le moins inattendu.

Faire disparaître Emma Swan n'était qu'une partie de son plan, et cela faisait des années qu'il travaillait à élaborer ce qu'il avait en tête. Il n'allait certainement pas échouer maintenant. Il avait ainsi attendu trois jours que sa captive s'affaiblisse; il n'était passé la voir que deux fois pour lui donner un peu d'eau, car il avait besoin d'elle vivante – rien dans son plan, cependant, ne mentionnait qu'elle doive être en pleine forme.

Un sourire mauvais se dessina sur ses lèvres alors qu'il se décidait à se lever avant de se diriger en direction de la pièce attenante. Il suivit un petit couloir délabré et dont le plancher grinçait avant d'arriver devant une simple porte métallique fermée par un petit verrou. Impatient de mettre la suite de son plan à exécution, il la tira pour découvrir une pièce entièrement plongée dans le noir, qu'il alluma.

Au moment où la lumière emplit l'endroit, on put voir Emma, assise sur une chaise en bois comportant des accoudoirs. Elle était maintenue par des chaînes à gros maillons, accrochées à ses poignets et ses chevilles. Sa tête dodelinait sur son épaule, et sa peau était très pâle, du fait que la pièce avait notamment été plongée dans l'obscurité pendant trois jours. Elle ouvrit les yeux, cernés de rouge, au moment où la lumière se fit, clignant vivement des paupières et grimaçant face à la brutalité du geste. Elle posa son regard clair sur l'individu qui venait d'entrer.

Hyde se tenait devant elle, droit et fier, les mains derrière le dos. Il la dardait de ses yeux froids et mauvais, un air profondément calme sur le visage – mais un calme malsain, un de ceux qui annonçaient les quelques minutes avant une tempête.

- Emma Swan, dit-il dans un murmure en s'approchant lentement d'elle. Si tu savais depuis combien de temps j'attends ce moment... Je cherche quelqu'un comme toi depuis ce qui me semble être des siècles. Tu es l'ingrédient final, l'instrument de ma réussite.

- Qu'est-ce que vous voulez faire ? répondit Emma en le fixant d'un regard noir. Pourquoi vous avez besoin de moi ?

Hyde esquissa un sourire moqueur mais ne répondit pas, se contentant de la fixer. Il aimait cet air de résistance et de rébellion qu'elle arborait. Il ferma un instant les yeux, comme pour savourer ce moment, avant de s'avancer un peu plus, la touchant presque. Avec délectation, il se baissa légèrement pour pouvoir planter son regard dans le sien.

- J'ai besoin que tu coopères... avant que je ne t'élimine, s'exclama-t-il d'un ton joyeux, comme si la chose le réjouissait particulièrement – et c'était sûrement le cas. Vas-tu coopérer ?

Pour toute réponse, Emma releva un peu sa tête de manière à se trouver plus près de son visage, les traits brouillés par le manque de sommeil mais aussi par ce qui la caractérisait, à savoir une volonté à toute épreuve. Jamais elle ne se soumettrait à cet homme – qu'il la tue tout de suite, si c'était ce qu'il voulait. Car quelque chose lui disait que le plan de Hyde consistait en partie à éliminer de nombreux habitants de Storybrooke, et il était hors de question qu'elle s'associe à lui pour quelque forme que ce soit.

C'est pourquoi elle esquissa elle aussi un sourire, hypocrite, avant de lui cracher au visage.

- Jamais.

Hyde ferma brusquement les yeux, laissant un rictus envahir son visage, avant de se redresser. Qu'une femme, quelle qu'elle soit, ait osé lui faire cet affront relevait de l'inadmissible. Et avant qu'Emma ait pensé à avoir un mouvement de recul – bien que cela se serait avéré difficile – il lui asséna une gifle qui la fit pencher la tête sur le côté, ses cheveux lui tombant sur le visage. La douleur était cuisante.

L'homme eut une expression de haine et, d'une main, s'essuya le visage.

- Je réitère ma question : vas-tu coopérer ?

Elle releva la tête vers lui, ses yeux emplis de rage, mais ne répondit pas, se contentant d'un silence équivoque. Elle ne le laisserait pas gagner, et elle savait que lui n'abandonnerait pas. Elle n'avait plus qu'à compter sur sa famille, qui devait être en train de la chercher – Hyde avait dû trouver une très bonne planque, d'ailleurs, puisqu'ils n'étaient toujours pas là. Emma ne savait pas depuis combien de temps elle était retenue ici, cependant, elle n'avait aucune notion du temps qui passait.

- Très bien, répondit Hyde au bout d'un certain temps passé à l'observer.

Il fit alors un signe de la main à une personne qu'Emma ne pouvait pas voir, dissimulée derrière la porte. Ce ne fut que lorsqu'elle s'approcha que la blonde la reconnut, et elle ne put s'empêcher d'ouvrir la bouche, tant son effarement était grand.

- Regina ?

- C'est un peu informel, ce n'est pas ainsi qu'on s'adresse à une Reine. Pour toi c'est « Votre Majesté », répliqua ladite Regina en s'approchant lentement d'elle tandis que Hyde lui cédait sa place, retournant près de la porte.

Emma comprit alors. Vêtue d'un de ses majestueuses robes, du temps où elle était encore dans la Forêt Enchantée, c'était la Méchante Reine qui se tenait face à elle, avide de vengeance et elle s'était vraisemblablement associée à M. Hyde afin de l'assouvir. Elle n'était finalement pas morte, même alors que Regina lui avait arraché le cœur et réduit en poussières, lorsqu'ils étaient à New-York.

- Regina ne pourra jamais se débarrasser de moi, sourit la Reine d'un air cruel, comprenant où ses pensées l'avaient menée.

Elle tendit alors la main vers Emma et la plongea brusquement dans sa poitrine, la faisant hoqueter de surprise et de gêne. Elle retira ensuite sa main, en ressortant le cœur rouge et battant de la blonde, avant de se reculer à nouveau, restant cette fois dans son champ de vision.

- Si tu crois que je n'oserai pas te tuer, tu te trompes, dit Hyde en se mettant face à elle. Vas-tu donc faire ce que je te demande ?

- Vous pouvez me menacer, répondit-elle avec hargne, mais je ne vous aiderai pas !

- Et si c'était... ta famille, que je menaçais ? Qu'est-ce que tu en dis ? répliqua-t-il en haussant un sourcil.

Il sortit de sa poche arrière la même baguette avec laquelle il avait inhibé sa magie, lors de leur précédente rencontre.

- Mes Gardiens que vous avez neutralisés la dernière fois n'étaient rien comparé à ce que je leur réserve.

Emma était tétanisée. La menacer était une chose qu'elle pouvait supporter, menacer sa famille était différent. Elle voyait défiler les visages de sa mère, son père... d'Henry, de Neal... Killian, même Regina. Elle n'était même pas avec eux pour les protéger ! Elle ne pouvait pas le laisser faire.

- Je vois que tu commences à comprendre, susurra Hyde en voyant ses yeux s'écarquiller.

- Laissez-les tranquilles ! gronda-t-elle en tentant violemment de défaire ses liens.

Elle se concentra sur sa magie, tentant de la faire affluer dans ses paumes, en vain : elle était trop affaiblie pour ça.

- Tu n'es pas vraiment en mesure de répliquer, ni même de te battre. Je te pose une dernière fois la question : vas-tu faire ce que je te dis ?

- Plutôt crever ! cracha-t-elle en le regardant dans les yeux.

- Dans ce cas...

Et il sortit, entraînant Regina, qui tenait toujours son cœur dans sa main. Il revint quelques minutes après, tenant une seringue en métal remplie d'un liquide verdâtre. Revenant près d'Emma, il glissa ses doigts le long de son bras, presque sensuellement, en profitant pour caresser sa peau pâle en remontant sa manche au-dessus de son coude.

La blonde se débattit prestement, répugnée, se demandant ce qu'il comptait faire avec cette seringue et ce qu'elle contenait, avant qu'il ne plante l'aiguille dans son bras, lui injectant le liquide lentement. Elle frissonna violemment, le sérum contenu dans la piqure se répandant au rythme des battements de son cœur.

- Qu'est-ce que vous faites ?! s'exclama-t-elle avant qu'il se redresse, son aiguille vide à la main.

Hyde eut un sourire cruel avant de repartir. Il ferma la porte sans tirer le verrou et se retrouva face à la Méchante Reine, qui le regardait d'un air méfiant.

- Et maintenant ? demanda-t-elle à Hyde.

Le sourire de l'homme s'accentua un peu plus en guise de réponse.

Dans la pièce derrière lui, on entendit des hurlements d'effroi.

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