CALLISTO
Encore deux ans plus tard.
Eden dort.
Bon, vous me direz, jusque-là tout va bien. Sauf que non, tout ne va pas bien – et je ne supporte pas qu'il arrive à dormir alors que moi non.
Aussi, prise d'un élan d'agacement, je lui claque une énorme pichenette sur le front. Il se réveille en sursaut tandis que je rive mes yeux sur l'écran de mon téléphone, qui illumine notre chambre de sa lumière bleue.
— Bah alors chéri, t'es réveillé ? murmuré-je d'une fausse voix doucereuse.
Paumé, Eden se redresse en grommelant des paroles intelligibles. Ses cheveux sont en bataille et il a une marque rouge sur la pommette à cause de l'oreiller, juste au-dessus de sa barbe. Instantanément, ma colère s'efface.
Être en colère contre un type aussi beau même lorsqu'il est réveillé en pleine nuit, c'est tout bonnement impossible.
— Je crois que j'ai fait un cauchemar, dit-il d'une voix rauque encore semi endormie. Mais tu ne dors pas, toi ?
— Non. Je vérifie que tout est prêt pour demain.
Sur ce, Eden pousse un immense soupir en se rallongeant sur le dos. Je ne sais pas si c'est son cycle de sommeil perturbé ou moi qui le rend le plus fatigué, là tout de suite. Je ne crois pas que j'ai envie de le savoir.
— Tout va être parfait, OK ? Sauf toi qui va être épuisée si tu ne t'endors pas tout de suite.
Je lui lance un regard noir en croisant les bras sur ma poitrine, boudeuse.
— Ma sœur se marie alors tout doit être plus que parfait. Ça doit être la fête du siècle, celle à laquelle les gens penseront toujours quand on leur dira : « eh, c'était quoi le plus beau mariage auquel vous êtes allés ? ».
Eden arque un sourcil amusé.
— Si tu le dis. En tout cas, on se réveillera plus tôt demain s'il le faut mais s'il te plaît, éteins moi ça. Il faut que tu dormes.
Je laisse échapper un sourire résigné avant de déposer mon téléphone sur ma table de chevet, juste après l'avoir mis en mode avion. Ensuite, je m'allonge sur le côté et Eden ne tarde pas à se rapprocher le plus possible de moi, son front tout près du mien.
— Ton ventre prend toute la place, murmure-t-il.
Même sans le voir, je sais qu'il sourit. J'adore le fait que je le connaisse maintenant si bien que même à l'aveugle, je sais exactement la tête qu'il fait.
— Désolée.
Sa grande main rejoint alors mon ventre et se pose sous mon nombril avec une douceur infinie. Il trace lentement de petits cercles et je ferme les paupières, apaisée.
Tout va bien dans ma vie. En fait, tout va tellement bien que j'ai parfois peur qu'on me foute une claque, qu'on rallume les lumières et qu'on me crie à l'oreille : « eh bah non, c'était une blague ! ».
Pour fêter nos deux ans de relation, Eden et moi sommes partis un mois en road-trip au Sri Lanka. C'est là-bas qu'il m'a demandée en mariage et, sur un coup de tête, que nous nous sommes mariés sur la plage. On a d'abord pensé le faire en France et puis finalement, j'ai réalisé que je voulais que ce soit fait tout de suite. C'est comme si tout à coup, me réveiller un jour de plus sans être officiellement sa femme m'était soudain devenu impensable.
J'avais juste des fleurs dans les cheveux et il portait une chemise blanche toute simple mais pourtant, tout était parfait. Le soir, quand j'ai enfin pu lui enlever cette foutue chemise, je n'ai pas arrêté de regarder son tatouage. Les neuf petites lettres du f o r e l s k e t marqué sur son torse avaient toujours autant de sens, même plusieurs années après.
En tout cas, on n'a pas chômé pendant ce voyage parce que seulement un mois plus tard, j'apprenais que j'étais enceinte. Boum.
Quand j'ai vu que le test était positif, j'ai poussé un cri si strident que plus aucun verre n'a survécu au choc dans l'appartement. Ensuite, j'ai attendu qu'Eden rentre de la piscine dans laquelle il donne des cours et je lui ai flanqué le test sous le nez, comme ça, sans le moindre tact - vous me connaissez, ce n'est pas ma spécialité. Il a écarquillé les yeux, ouvert la bouche, refermé la bouche. Il l'a rouverte, a cherché ses mots, ne les a pas trouvés, refermé la bouche. Puis, sans prévenir, il a fondu sur moi et on s'est serrés dans les bras pendant des heures, des larmes de joie glissant sur nos joues.
Nous avons décidé de ne pas demander le sexe du bébé, simplement parce que nous souhaitons garder la surprise. Sa chambre est dans les tons de blanc, de beige et de marron et on l'appelle juste « toi » ou « bébé » pour l'instant. Eden pense que ce sera une fille, moi un garçon. On verra bien le jour J.
Dans tous les cas, nous sommes tous les deux d'accord pour dire que notre voyage au Sri Lanka a été la meilleure idée de nos vies. Cependant, ma mère nous a détesté de tout son être de nous être mariés ainsi sans cérémonie traditionnelle. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle est autant investie dans celui de Camélia, qui a lieu demain.
Évidemment, quand ma petite sœur m'a annoncé que Clément lui avait fait sa demande, j'ai pleuré – d'abord parce que j'étais folle de joie, mais aussi parce que j'ai vite compris que j'allais avoir du mal à trouver une robe à ma taille en étant enceinte.
Ensuite, c'était surtout parce que Clément m'a dit qu'on allait officiellement devenir frère et sœur. Au secours.
En tout cas, j'ai tout fait pour essayer d'aider Cam a préparer ce mariage. En tant que témoin, je suis censée ramener les bagues – j'ai essayé de la convaincre que me confier une tâche aussi importante était de la folie, mais elle n'a rien voulu entendre. Je la soupçonne tout de même d'avoir mis de fausses bagues dans la boîte qu'elle m'a remis - juste au cas où je la perdrais.
En tout cas, vous l'aurez compris : la vie n'a jamais été aussi belle.
— Dis, j'ai oublié de te dire quelque chose, murmuré-je soudain en voyant qu'Eden commence à se rendormir.
Il papillonne des paupières en marmonnant un « hmh ? » interrogatif, sa main toujours sur mon ventre. Il a les doigts chauds et son sang palpite à travers sa peau.
— On a été présélectionnés pour gagner un Wattys, annoncé-je, tout sourire.
Je m'attends alors à ce qu'il se réveille, me crie que c'est génial et m'embrasse à pleine bouche... mais non. Eden ne bouge pas, et il a même l'audace de pousser un ronflement.
— Eh ! m'exclamai-je en lui faisant une nouvelle pichenette sur le front. T'as entendu ce que je viens de dire ?
Cette fois-ci, mon mari se réveille. Il passe son bras autour de ma taille et niche sa tête dans mon cou, humant mon odeur.
— Oui. Oui, j'ai entendu, et je suis trop content.
— Et tu ronfles, toi, quand t'es content ?
Eden rit contre mon cou, m'envoyant de petites décharges électriques en plein cœur. Je crois que définitivement, je ne me lasserai jamais de ce son.
— C'est parce que c'était l'année dernière qu'on a été présélectionnés, chérie, répond-t-il ensuite.
Je secoue la tête. Sérieusement, il me prend vraiment pour un boulet ou quoi ?
— Je sais, et on l'est aussi cette année.
Cette fois-ci, Eden se réveille pour de bon. J'aperçois son regard surpris dans le noir quand il se recule pour me sonder des yeux avant de rétorquer :
— Hein ? Mais t'es sûre ?
Je lui souris, passant une main dans ses cheveux.
— Oui.
— Merde alors, c'est génial ! s'écrie-t-il d'un seul coup.
Il me serre contre lui avec force, me transmettant sa joie. Le voir aussi heureux de cette nouvelle me fait sincèrement chaud au cœur. Je sais qu'il a été déçu que nous n'ayons pas gagné l'année dernière et voir qu'il a déjà oublié ce désagrément me remplit d'une joie indescriptible.
— Je suis trop fière de nous, lui glissé-je alors.
Il se calme légèrement, me caressant la joue.
— Moi aussi. On fait une sacrée équipe.
Nous nous regardons en souriant.
J'aime cet homme plus que tout au monde. Il est drôle, intelligent, protecteur, gentil. Il est aussi honnête et fait toujours ce qui est juste, il me fait passer avant tout le reste et prend soin de moi. Il aime sa famille plus que tout, il est respectueux, généreux, doué avec les enfants. J'aime tout chez-lui, même ses défauts – sauf le fait qu'il aime le réglisse, ça, j'avoue, j'ai du mal.
J'aime ses petites anecdotes débiles. J'aime les fossettes qui se creusent sur ses joues quand il sourit. J'aime sa façon de me regarder, son air joyeux quand il parle de moi et la fierté qui se cache dans ses yeux gris quand il parle de ce que nous avons construit.
J'aime notre bébé. J'aime notre mariage. J'aime notre appartement. J'aime notre vie.
Merde, j'aime tellement ce type que je pourrais en crever.
Alors, un peu parce que dire tout ça à voix haute serait trop long mais surtout parce qu'il sait déjà tout, je me contente simplement de murmurer :
— Je t'aime.
Son pouce descend le long de ma mâchoire et un sourire éclot sur ses lèvres. Alors, tout simplement, je sais qu'il a pensé aux mêmes choses que moi.
— Je t'aime aussi.
∞
Voilà, c'est officiel... Forelsket est préselectionnée aux Wattys 2022 !
Promis je ne vous fait pas de blague (même si ça peut y ressembler lol). Préselectionnée deux années de suite, non mais vous y croyez vous??????
le sentiment qui domine le plus chez-moi depuis que je l'ai appris est la fierté. une fierté énorme, intense et indescriptible qui m'a tiré les larmes parce que purée, we made it. je ne sais même pas comment exprimer à quel point j'ai été touchée et contente de voir qu'on était capables de passer de nouveau cette étape ensemble.
callisto et eden ont été et seront toujours une partie de moi, principalement parce qu'ils ont réussi à figer les rêves, les espoirs et la personnalité de la maelys du premier confinement de 2020. je suis fière de cette fille et de tout ce qu'elle a réussi à construire en deux ans (avoir son bac, être prise dans l'école de ses rêves, vivre dans deux pays étrangers, réaliser ses rêves et encore plein d'autres trucs trop cool as a real bo$$y girl).
cette préselection, c'est en quelques sortes un merci que je lui glisse. merci d'avoir tenu le coup. merci d'avoir osé ouvrir ton coeur. merci d'avoir posé ces mots, merci d'avoir créé ces personnages, merci d'avoir écrit ce roman. <3
encore une fois, je sais que vous n'êtes pas impliqués dans le processus des wattys et qu'être préselectionnée ou même peut-être gagner un wattys n'aura, en définitive, aucun rapport avec vous mais je pense que vous dire merci est tout de même la moindre des choses.
merci de continuer à faire vivre ce roman même depuis que je l'ai terminé. merci pour vos votes, vos commentaires, vos dm adorables et vos mots gentils sur mon profil. j'ai l'impression que plus les années passent et moins parler autour de moi de mes romans me fait peur. je commence à croire que je peux réaliser mes rêves... ou plutôt : je commence enfin à croire que je vais tout faire pour les réaliser et qu'au moins, je n'aurais jamais de regrets.
alors voilà, Forelsket est présélectionnée une deuxième fois pour les Wattys 2022. c'est toujours pour de vrai, et mon roman va peut-être gagner un Wattys. je n'espère pas spécialement gagner (bien que ce serait complètement fou et que j'en serai bien sûr trop trop trop contente) et rien que d'avoir été préselectionnée, je suis simplement et réellement heureuse.
merci encore, pour tout. vous le savez et c'est cliché mais j'adore encore et toujours cette phrase : vous resterez à jamais ma plus belle histoire, quoi qu'il arrive. <3
surtout prenez soin de vous, c'est le plus important et vous le méritez. je vous aime très très très fort,
-mae.
PS : si vous vous demandez, je nourris encore et toujours une putain d'addiction à Eden (je sais, c'est très grave à ce stade, au secours)
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