Chapitre 9

(média : Mary)

Chapitre 9

                Les semaines suivantes, j'ai été mis en quarantaine. Ni plus, ni moins. Pourtant, j'ai essayé de m'expliquer auprès de Nolan mais même lui n'a pas réussi à me comprendre. Celui qui d'habitude lit en moi comme dans un livre ouvert, même quand je suis un abruti fini, n'a pas réussi. La situation était donc grave. J'en avais conscience bien entendu mais... Je ne pouvais rien faire. A part peut-être demander une réunion au sommet !

                Une réunion au sommet, c'est très simple. L'un du trio envoie un sms aux deux autres en leur donnant seulement un lieu, une date et une heure. Le reste se fait sur place. Comme c'est en train de se dérouler ce samedi après-midi. Nolan et London sont assis de chaque côté d'une petite table dans le Starbucks où je travaille. Je leur ai demandé de venir ici, pendant ma pause comme ça, si ça se passe mal, je peux retourner bosser et m'occuper l'esprit.

« Bon, les gars ! » commencé-je, donnant l'impression que je suis plus confiant que je ne le suis réellement. « Quinze jours, c'est long ! »

« C'est long mais il semblerait que ce ne soit pas encore suffisant ! » m'affirme Nolan, en me regardant droit dans les yeux, les bras croisés sur son torse.

« Pardon ? Mais pourquoi ? »

                J'appuie les mains sur la table pour me baisser un peu à leur niveau.

« Pourquoi ? Mais pour t'excuser, bordel ! »

« M'excuser de quoi au juste ? »

« D'être un con, ça serait déjà un bon départ. »

« Ben excusez-moi mais je croyais qu'on... »

« Oh mais pas à nous ! » me coupe London. « Auprès de George. C'est lui que tu as blessé et insulté. »

« D'abord, je ne l'ai jamais insulté ! » rectifié-je, aussitôt en le pointant du doigt. « Jamais je ne me permettrais ça. Ensuite, je ne sais même pas ce que j'ai dit de mal... »

                Je me laisse tomber sur une chaise, bascule la tête en arrière et fixe longuement le plafond. A de très nombreuses reprises, j'ai repassé la discussion – le mot dispute serait peut-être plus approprié – dans ma tête mais je ne vois pas ce qui lui a fait pété un câble.

« Sérieux, mon étonnement n'était pas justifié ? »

« Je sais pas... » Chuchote Nolan. « Peut-être... Mais le problème, c'est que tu te sois tout de suite figuré qu'il était hétéro. »

« Mais ! » m'exclamé-je en me redressant pour faire face à mes amis. « Je me suis figuré de rien du tout. Depuis la première fois où je l'ai vu... Ou plutôt la première fois dont je me souvienne. »

« Hein ? C'est quoi cette histoire ? »

« Rien, rien... Depuis cet instant, à aucun moment, j'ai imaginé sa vie sexuelle parce que ça ne me concerne pas et que je m'en fous ! Comme la vôtre. A part avec toi, Nolan. Pas besoin d'imaginer vu que tu le faisais sous mon nez... » Maugréé-je de mauvaise humeur.

« Je ne le faisais pas sous ton nez ! » rétorque Nolan en fronçant les sourcils. « C'est juste toi qui entrais toujours dans les pièces où on... »

« Bref, on s'en fout. » stoppe la conversation London, sachant pertinemment qu'on s'éloigne du sujet premier. « Quelque chose a blessé George dans ta réaction et peu importe ce que c'est. Il mérite pas ça. Ça te fait rien qu'il soit parti comme ça ? »

                Je renifle et passe une main dans le cou, mal à l'aise.

« Bien sûr que ça m'ennuie. » avoué-je tout bas. « Je ne suis pas totalement insensible. Mais comment veux-tu que je fasse ? Son mec m'a dit de ne plus m'approcher de lui. » Je leur rappelle.

« Comme si ce genre de menaces te faisait quelque chose d'habitude ! »

                Nolan et London éclatent de rire et je ne peux m'empêcher de les imiter. Mon meilleur ami a raison. Les menaces ne m'ont jamais fait peur, peu importe qui me les fait.

« Tu iras le voir ? » me demande de but en blanc Nolan, une fois notre hilarité passée.

                Je hausse les épaules. Autant ce D.J. ne m'impressionne pas, autant le regard que George m'a lancé ce matin-là, me ferait presque flipper. Et puis que pourrais-je lui dire ? Je suis perdu mais même si j'aime la solitude, j'ai envie de retrouver mes potes. Alors je hoche la tête de haut en bas, leur faisant une promesse que je ne suis pas sûr de pouvoir tenir.

« Super ! Je compte sur toi. »

                Je me lève, voyant mon manager tapoter sur sa montre imaginaire dans ma direction.

« On sort ce soir ? » demandé-je.

                Ils se regardent rapidement avant que London confirme :

« Bien sûr. On a été invités à une fête. Tu viens avec nous ? »

                Je ne vais pas louper cette occasion. Mon manager, dans le dos de mes amis, commence à s'impatienter. Je lève les yeux au ciel.

« Je dois y aller. Vous m'envoyez un message pour me dire comment on fait. Bye. »

Tu parles d'une pause ! Je n'ai pas pu me reposer mais au moins, j'ai réussi à arranger les choses avec les gars et c'est le plus important.

🎶🎶🎶

Quand on arrive vers vingt-deux heures devant un immeuble que je ne connais absolument pas, je commence à me poser des questions. A quelle fête m'ont-ils traîné ? Avec eux, je me méfie. Ils sont capables de tout surtout si c'est pour me faire enrager. Je vérifie leur tenue auxquelles je n'avais pas fait attention et remarque qu'ils sont habillés dans le même style que moi. Si Nolan et moi avons opté pour un jean avec un T-shirt sous une veste en cuir, London, lui, a tout misé sur une chemise blanche à motifs et un gilet. Il a sacrément la classe.

« La fête ! » je prends la parole. « Elle est chez qui ? »

« Tu connais pas. » me souffle Nolan en tapant le code sur l'interphone de l'immeuble.

                Ils entrent et je les suis docilement. Je sais que je suis toujours en période d'essai avec les gars alors je fais profil bas. London appelle un ascenseur tandis que la porte du hall s'ouvre sur... Mary et George. Je détourne le regard et passe ma main dans les cheveux, les décoiffant au passage mais je n'y fais pas attention parce que je suis de toute façon dans la merde. J'aurais dû m'en douter. Sur ce coup, j'ai été stupide. Trop heureux de retrouver mes amis, je n'ai pas cherché plus loin et pourtant, le piège est là, à quelques mètres de moi.

« Vous êtes des crevards ! » sifflé-je entre les dents pour que les nouveaux arrivants ne m'entendent pas.

                Du coin de l'œil, je remarque que George s'est arrêté dans son avancée. Lui non plus n'était pas au courant de ma venue parce que à la vue de son poing qui se serre, je comprends que s'il l'avait su, il ne serait pas là à hésiter entre venir me coller un coup dans la tronche et partir de cet immeuble. Cependant, contre toute attente, il desserre sa main et nous rejoint rapidement en lançant joyeusement :

« Bonsoir !  »

                George passe à côté de moi, me frôlant mais ne fait aucun geste vers moi comme si je n'étais pas là. Comme si j'étais transparent et je déteste ça. Je n'aime pas être personne. Je préfère être détesté, être bousculé, être frappé qu'être ce gamin qu'on met dans un coin et qu'on oublie comme mon père faisait. Je déteste ça et tout de suite, je déteste que ce soit George qui me fasse ça. Je serre la mâchoire et ne dis rien parce que j'ai promis à Nolan et London de m'excuser auprès de George et même si je ne le ferai sans doute pas, il n'est pas question que je sois celui qui envenime les choses entre nous.

Il glisse un bras sur les épaules de London comme s'ils étaient de vieux amis alors que... J'y pense. Il y a encore un mois, personne ne m'avait parlé de ce George et aujourd'hui, tout le monde donne l'impression que c'est leur meilleur ami ? Comment ce mec s'y est pris ? Sérieusement... Je garde la tête légèrement baissée pendant qu'ils parlent tous les trois mais la colère explose complètement en moi.

Je m'apprête à faire demi-tour et à partir de ce hall, de cet immeuble, loin de mes meilleurs amis que je ne reconnais plus et de... George quand je sens une main se poser délicatement sur mon avant-bras. Je détourne le regard des gars et le pose sur Mary qui me fait un timide sourire. Je me fais violence pour le lui retourner mais je ne suis clairement pas d'humour à faire quoique ce soit d'autre que hurler ou frapper. Sans je comprenne pourquoi Mary passe son bras sous le mien et m'entraîne vers l'escalier alors que les portes de l'ascenseur s'ouvrent.

                Pendant l'ascension de la volée de marches jusqu'au premier étage, nous ne disons rien. Je ne suis pas un bavard et Mary semble être pareille, la timidité en plus. Mais je ne peux pas rester avec ce silence. Je pose ma main sur la sienne qui entoure mon bras et l'empêche gentiment de continuer. Elle se tourne vers moi et un de ses sourcils remontent pour me demander ce que je fabrique :

« Pourquoi ? » lui demandé-je.

« Parce qu'on m'a toujours dit qu'il fallait privilégier les escaliers aux ascenseurs dès que l'occasion se présentait. »

« Pourquoi ? » répété-je, n'ayant pas la réponse à ma réelle question.

                Elle baisse les yeux vers nos mains qui sont toujours l'une sur l'autre et m'avoue :

« J'ai vu que tu voulais partir et... Je ne pense pas que ce soit la chose à faire. Il... Tu ne détestes pas George que ce soit pour son orientation sexuelle ou pour votre dispute. Nolan me l'a dit. Et lui ne te déteste pas non plus malgré ce qu'il cherche à faire croire. »

                Je me doutais que je n'étais pas dans ses petits papiers depuis notre dispute mais l'entendre me fait un petit quelque chose et ça ne me plaît pas. Je renifle pour me donner une certaine contenance mais Mary n'y fait pas attention et poursuit :

« Donc ce n'est pas en t'enfuyant comme tu voulais le faire que vous allez pouvoir arranger les choses. »

« Je ne sais même pas... »

« Tu n'as rien dit. Tu n'as pas dit que c'était horrible d'être gay, tu ne l'as pas traité de tapette mais... Ta remarque sur le fait qu'il t'ait vu nu... »

« Mais... Imagine, tu te mets nue devant George ce soir et demain, il te dit qu'en fait, il aime les filles, ça te ferait pas bizarre à toi ? »

                Elle hausse les épaules. Une bien-pensante. Jamais elle n'avouera que ça la dérangerait parce que ce ne sont pas des choses qui se disent.

« Je ne dis pas que ça me dégoûte qu'il m'ait vu ou un truc du genre. » tenté-je de m'expliquer et pour une fois, j'ai l'impression de trouver les bons mots pour dire ce que je ressens. « D'ailleurs, aujourd'hui, on me proposerait un autre bain de minuit avec lui, j'accepterai. Le problème n'est pas là mais... Oui, ça m'a fait quelque chose de voir George et D.J. dans les bras l'un de l'autre. J'avais pas envie de vomir ou de leur cracher à la gueule, promis. C'était juste la surprise. »

                Pendant mon monologue, sans que je m'en rende compte, Mary a levé les yeux sur mon visage. Je vois qu'elle a un grand sourire aux lèvres.

« Alors pourquoi depuis deux semaines, tu n'es pas allé le voir pour lui dire ça tout simplement ? »

« Parce qu'il ne veut plus me parler. Tu as bien vu tout à l'heure ? Il a fait comme si je n'existais pas... »

« C'était pour te blesser et se protéger. »

                Je hausse les épaules, peu convaincu par cette explication.

« Je suis sûre que ça peut s'arranger entre vous, si vous faîtes un effort. Moi je vous aime bien, ça m'embêterait qu'on ne se voit plus. »

« Dis plutôt que tu aimes bien Nolan. » la taquiné-je en lui donnant une petite tape sur l'épaule. 

                Elle ricane avant de secouer la tête de droite à gauche. Elle me tire le bras et nous reprenons notre montée.

« C'était cool de te parler. Merci. » Murmuré-je juste avant notre arrivée au quatrième.

Elle me fait un clin d'œil et entre dans un appartement où la fête bat déjà son plein. J'hésite un instant puis lâche prise et me fond finalement dans la foule à mon tour.

🎶🎶🎶

Je suis une mauviette. Une grosse mauviette. Comme ces gamins de douze ans qui n'ose pas offrir une glace à la fille qui leur plaît. Et franchement, je me fais honte. J'ai passé la soirée à éviter George et putain, ce mec ne fait que bouger. J'ai visité l'appartement de long en large même la salle de bain et les deux chambres – endroits où des choses peu catholiques se passent et que j'aurais préféré ne pas voir. Sans mentir, je pourrais presque y vivre les yeux fermés. Mais maintenant, j'en ai marre parce que je n'ai pas profité de la soirée et encore moins de mes amis. C'est la merde et tout ça à cause de George. Ça ne peut plus durer. Sérieusement, ce n'est pas mon style de me cacher dans des chiottes pour éviter un mec. Alors je vais assumer et lui parler. Cette nouvelle décision est peut-être commandée par les deux ou trois – cinq ! – verres que j'ai bus cette dernière heure mais je m'en fous. Advienne que pourra...

                Je fais trois fois le tour de l'appartement mais je ne le vois nulle part. C'est quand je le cherche que je ne le trouve plus ? Ce gars se fout complètement de moi, je crois. Je regarde mon portable. Il n'est même pas minuit. Il ne peut pas être déjà parti, si ? Je repère de l'autre côté du salon, Nolan, London et Mary qui discutent, un verre à la main mais pas de trace de George. Sans réfléchir, je sors de l'appartement et regarde dans la cage d'escalier. Mais personne. Je grogne de mécontentement avant de donner un coup de pied dans la rambarde. Je jette un coup d'œil à mon portable que j'ai toujours à la main. J'hésite puis finalement, je compose son numéro. Cette fois, pas de message. Pas de mots écrits qu'on aura plus ou moins réfléchis avant. Une sonnerie. Deux. A la troisième, je commence à perdre espoir. Il est peut-être parti à une autre soirée. Loin de moi.

Puis à la quatrième, il décroche mais ne parle pas, pas même un « allo ? » bourré ou fatigué. Rien. Juste un léger souffle. Et comme un con, je ne sais pas quoi lui dire alors je m'assoie sur la marche la plus proche de moi et j'écoute sa respiration. Longuement. Des personnes passent à côté de moi en criant mais je n'y fais pas attention, je ferme les yeux et tente de garder ce lien, sentant mon cœur battre à tout rompre dans ma poitrine. J'avais presque oublié son existence à celui-ci. Je ricane à mes pensées puis je me rends compte du ridicule de la situation. C'est bizarre, vraiment trop bizarre de faire ce que nous faisons. Alors je me racle la gorge et bégaie difficilement :

« Je... Tu... Je suis vraiment désolé. »

                J'entends comme un soupir de soulagement avant un petit rire.

« Tu es où ? » lui demandé-je sans savoir pourquoi.

« Sur le balcon. » résonne enfin sa voix rauque à l'autre bout du combiné.

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Hey ! Je vous remercie sincèrement pour les réactions super positives au premier bonus. Et merci d'apprécier autant cette histoire. Je ne m'attendais pas du tout à ça.
Vous allez être contentes parce que je pense qu'on entre dans une partie de l'histoire qui va réellement vous plaire. J'espère que Louis et George ne vous décevront pas. Pas tout de suite en tout cas...
Encore merci et à bientôt !

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