« J'en étais sûr ! »

À bout de souffle en train de courir sur un tapis me montrant des images de San Francisco comme si je faisais mon footing là-bas, et comme si ça rendait l'effort plus « agréable », Sébastien me tend ma serviette et arrête ma machine.

J'enlève toute la sueur de mon visage et des zones dont je ne soupçonnais même pas le potentiel transpirant avant d'engloutir l'eau fraiche de ma gourde en tentant de reprendre ma respiration.

— Tu es amoureuse de ton chieur, je te l'avais dit. Ça fait un peu mal de le savoir après s'être fait friendzonner, surtout si c'est un mec qui fait pleurer ma meilleure amie, donc je ne me prononcerais pas plus sur ton choix d'homme.

— Ch...Cheu... Je peux faire une pause ?

— Cinq minutes, après on bossera tes abdos.

— Haannn mais-

— C'est toi qui m'as dit « Ma mère s'inquiète pour ma santé et ça me saoule d'inquiéter ma mère donc je veux bien me mettre au sport une fois par semaine. » !

— Oui patron, réponds-je en faisant la moue.

Seb me fait son sourire le plus brillant, lui et sa nouvelle dentition parfaite le rendant...parfait, avant que je ne descende au rez-de-chaussée de la salle de sport. Je me rue vers un fauteuil et lorsque mes fesses touchent le cuir, je suis certaine de ne jamais pouvoir me relever de ma place même sous la contrainte.

Si j'ai décidé de pousser Sébastien à me coacher chaque dimanche matin c'est pour ma mère mais aussi pour moi qui galère de plus en plus à rentrer dans mes jeans... Et aussi pour l'infime espoir de voir Andréa s'entraîner.

Sauf qu'avec la venue de son cousin, il a décidé de ne pas passer, à mon plus grand désespoir.

*clic clic clic clic clic*

Je relève la tête, surprise d'entendre des bruits de clavier aussi fort dans une salle de sport lorsque mes yeux se posent sur une chevelure rousse que je commence à reconnaitre.

Tristan, en sweat et jogging mais avec un gros casque, en train de taper frénétiquement sur une série de touches d'un gros ordinateur portable avec un air si sérieux qu'il m'en ferait presque peur.

Je le vois froncer de plus en plus les sourcils avant de complètement se détendre, lever ses doigts du clavier et se relâcher dans son fauteuil, les yeux vers le plafond. Il passe sa main dans ses cheveux roux pour les frotter, retirant son casque par la même occasion, avant de remarquer enfin ma présence devant lui.

— Floriane ? Qu'est-ce que tu fais là ?

— C'est plutôt moi qui devrais te poser cette question, tu t'es cru au cybercafé ?

— Touché.

Je ne me peux m'empêcher de rougir un peu en entendant le rire de Tristan alors que je me rends compte que je suis de plus en plus à l'aise quand je lui parle. Contrairement à mes autres collègues, il ne semble pas hésité à me parler, n'est pas mal à l'aise et surtout j'arrive à être parfois spontanée en sa présence. Un peu comme avec Nina.

— Je profite de notre pass gratuit pour venir taxer le réseau wifi de la salle. C'est souvent l'enfer chez moi le dimanche matin jusqu'à l'heure du repas dominical. Mes parents viennent un dimanche sur deux envahir mon espace vital sans ma permission...

— Et Sarah en pense quoi de tes nombreuses fuites ?

— Elle s'en fiche et s'occupe de la petite furie rousse.

— C'est mignon ce surnom, « petite furie rousse ». Je ne t'avais jamais vu si heureux la dernière fois quand je vous ai croisé devant la boulangerie. Tu devrais sourire un peu plus au travail.

— Quand j'y serais heureux, oui. Je peux te retourner le même conseil.

J'aurais pu désapprouver s'il n'avait pas autant raison. Travailler chez Go Shape! alors que je ne crois pas aux propres mots que je diffuse sur les réseaux sociaux et à travers des affiches, c'est contradictoire. Certes j'aime avoir mon bureau, Jennifer, Nina et Patrick mais à part eux et Tristan, je n'ai pas beaucoup de conversation avec mes autres collègues.

— Feel.cie m'a fait une proposition lors de la soirée Start-up. J'hésite à partir chez eux.

— Leur siège social n'est pas à Nantes ? m'étonné-je. Ça ne va pas poser problème par rapport à ta famille ?

— Ils ont une branche à Paris. Et puis non, j'ai toujours fait ce que je voulais et quand j'ai une idée, je la suis jusqu'au bout.

Son air déterminé et sûr de lui me trouble un peu et me rappelle cette fois où il m'avait avoué tout sourire qu'il trouvait les produits Go Shape! « dégueulasse ».

La coïncidence veut que moi aussi j'aie été approché par Feel.cie, très intéressé par mon profil, mais je me suis contenté de prendre une carte de visite, rien de plus.

Je n'ai pas pensé à mon avenir... Qu'est-ce que je veux pour mon futur ?

« Hey Flo ! » s'écrie Sébastien en descendant les escaliers et en arrivant vers nous. Tristan se lève de son fauteuil par réflexe et lui tend la main pour la serrer en commençant à se présenter :

— Tristan Ferrer, je travaille avec Floriane chez Go Shape! en tant que développeur web.

— Sébast- Oh ce sweat-shirt ! POUR LA HORDE ! Tu es quelle race ? Quelle classe ? Niveau combien ?

— Tauren Druide niveau 120, et toi ?

— Elfe de sang Démoniste mais je me suis arrêté au niveau 80. WoW me prenait beaucoup trop de temps et-

— De quoi vous parlez, les gars ? interviens-je un peu perdue.

— World Of Warcraft, Flo ! me répond Seb tout sourire. Je t'avais fait tester quand on était au collège !

— C'est vrai ? me demande Tristan, son sourire s'élargissant. Tu étais une joueuse Floriane ?

— Euh... Disons que...

Sébastien retient son rire avant de me pointer du doigt pour se moquer de moi avant d'avouer un de mes secrets à mon collègue :

— Floriane elle a refusé de jouer à WoW parce qu'elle était à fond sur FlyFF, « Fly For Fun » ! Ahahah !

— Ta gueule Seb ! m'écrié-je toute rouge. C'était il y a hyper longtemps et puis j'aimais bien les graphismes et-

— Ne t'inquiète pas Floriane, moi aussi j'y ai joué un peu. Il ne faut pas avoir honte.

— Mais je n'ai pas honte !... Je crois ! Bref, de toute façon j'ai vite arrêté !

— Pourquoi ?

— Parce que Mickaël, son voisin de classe, s'est moqué d'elle alors qu'elle était amoureuse de lui. Il lui a dit qu'elle finirait sa vie toute seule devant son ordinateur, vierge et avec une centaine de chats. Du coup elle a tout lâché à partir de ce moment-là et s'est réfugiée dans les gâteaux au chocolat et le foodp-

Je donne un coup de coude à Sébastien qui en a bien trop dit à Tristan alors que ce dernier affiche une mine perplexe.

« C'est dommage. Vraiment dommage... » dit-il en me fixant de ses yeux verts et l'air déçu.

Qu'est-ce qui est dommage ? Qu'après une veste monumentale j'ai choisi la solution clichée pour m'en remettre, c'est-à-dire manger sans plus pouvoir m'arrêter ? Que ce genre de réflexion puéril d'enfant ai tant impacté ma vie que maintenant je suis obligé de me forcer à passer mes dimanches matins à la salle de sport ?

Oui, c'est dommage.

« Je monte continuer mes exercices. À demain au boulot, Tristan. »

Le rouquin ouvre la bouche pour dire quelque chose mais se rétracte en détournant le regard du mien. J'entends déjà Sébastien commencer à sympathiser avec lui alors que mon corps déjà fatigué ne réclame qu'une chose : du sucre et du gras.

Je sens mon portable vibrer dans la poche de mon jogging et sursaute presque en voyant le nom s'afficher sur mon écran à la réception du SMS :

« SOS, lady en détresse. Besoin d'un Ben et d'un Jerry pour arrêter les larmes. » - Nina

Alors ? Que pensez-vous de ce chapitre ? Des efforts de Flo en allant à la salle avec Seb ?

De la discussion avec Tristan ? De l'anecdote de Seb qui pourrait expliquer comment Floriane est allée vers le foodporn ? Et enfin, du SMS de détresse de Nina ?

Si ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à voter et donner votre avis en commentaire ! 

Photo foodporn du jour :