24 - Anti-cernes

« Olala ma chérie ! Est-ce que tu veux mon anti-cernes ? »

Je fais non de la tête et observe mon reflet attentivement dans un des miroirs des loges des mannequins. La playlist « Feel Good » résonne dans tout l'espace et les maquilleuses, les techniciens, bref, tout le monde est en forme. Tout le monde sauf moi qui tire une tronche pas possible.

Et Andréa qui garde son air supérieur malgré les quelques faux sourires qu'il fait aux autres.

Seulement habillé d'un t-shirt gris dévoilant ses bras musclés et d'un jean brut, il relève ses lunettes avant de passer sa main dans sa tignasse et d'ordonner quelque chose à un technicien.

La journée va être longue... et tendue.

Je n'ai reparlé à Andréa que de manière très professionnelle et les seuls échanges réels que nous ayons eus concernaient des questions techniques et des choix artistiques pour nos affiches.

Bref, que des points où nous nous prenons la tête à cause de son perfectionnisme et son envie de tout diriger.

Je hais Andréa Simon, je hais Andréa Simon, je hais Andréa Simon...

La matinée s'est déroulée sans accroc, toute l'équipe est partie déjeuner et moi je déambule sur le décor toute seule, mon smartphone collé à mon oreille. En pleine discussion avec un responsable d'une chaine de restaurant haut de gamme qui aimerait que Floover assiste à leur grande ouverture, histoire de donner un coup de « jeune » à la chaine, lorsque le déclic d'un appareil photo m'immobilise.

Andréa est là, derrière son objectif et dans le noir alors que je suis en pleine lumière devant un fond turquoise au motif fleuri. Je continue ma conversation en l'ignorant alors que le bruit continue, rythmant doucement ma déambulation.

Lorsque je raccroche, les déclics s'arrêtent tout comme ma respiration. Je commence à sortir du décor et me rapproche d'Andréa qui ne réagit pas et se contente de me regarder avec son air dédaigneux. Je suis assez proche de lui pour qu'en un instant tout bascule entre nous, que tout vole en éclat de la bonne ou mauvaise façon.

J'arrive déjà à sentir son odeur et ses yeux perçants lorsque j'entends mon prénom au loin mais je ne bouge pas pour autant.

« Flo ! » s'écrie la voix que je reconnais être celle de Nina, « J'étais en rendez-vous à l'extérieur et je me suis dit qu'on pourrait manger ens- ».

Je n'arrive pas à décoller mes yeux de ceux d'Andréa, comme si nous étions en pleine bataille de regard et que le premier à s'écraser prouvait qu'il était le plus nul de nous deux... Mais c'est finalement lui qui détourne les yeux en soupirant et en emportant son appareil avant de saluer brièvement ma collègue et de rejoindre le reste du staff.

Je pousse un soupir de soulagement alors que le sourire de mon amie s'étire dangereusement.

— C'était quoi ça ? me demande-t-elle d'une voix mielleuse.

— Quoi ?

— Toute cette tension entre vous deux ! J'étais limite gênée et à deux doigts de me tirer en pensant que vous le feriez là, à même le sol !

— Ça ne va pas Nina...

— Je te jure qu'il y a un truc entre vous ! Un truc puissant et électrique ! Vous m'avez ignoré avec tellement de violence et d'irrespect !

C'est vrai qu'habituellement, quand Nina arrive quelque part tout le monde même moi la regarde et l'écoute. Alors pourquoi pas cette fois ? Et pourquoi même Andréa n'a pas réagi ?

« Viens, on va déjeuner et tu vas me parler de la tension sexuelle entre toi et le désagréable Andréa Simon ! » dit-elle en m'entrainant hors du studio.

Quelques minutes après, nous nous retrouvons à l'intérieur d'une brasserie, presque en face du studio, deux salades devant nous. J'aurais voulu prendre beaucoup plus consistant mais ma mauvaise humeur de ces derniers jours commence à déteindre sur mon appétit qui n'est pas au top de sa forme.

J'essaie d'esquiver au maximum le sujet « Andréa » en parlant de Sébastien, de notre discussion d'hier soir, de ses envies, etc. Et ça me fait tellement de bien.

Je n'ai jamais eu d'amie fille à qui me confier comme cela et Nina est vraiment à l'écoute des gens. Une femme parfaite, enfin presque.

Je remarque qu'elle surveille régulièrement son téléphone et ne tarde pas à me douter de quelque chose.

— Dis Nina, tu attends un message en particulier ?

— Hein ? répond-elle distraitement. Non euh... enfin Patrick devait m'envoyer...

— T'envoyer quoi ? demandé-je avec un petit sourire.

— Alors, avec monsieur Simon ? s'exclame-t-elle pour changer de sujet.

Hm. Ce n'est peut-être pas le moment de parler de notre patron alors...

— Vu tous les aveux que tu m'as fait, il fallait bien qu'un jour on en arrive l-

— TU AS COUCHÉ AVEC LUI ?! s'écrie-t-elle alors que je plaque mes mains sur sa bouche.

— Chut ! Il y a peut-être des membres de l'équipe ici !

— QUAND ? OÙ ? DEPUIS QUAND ? ÇA DURE ? Pourquoi tu ne me dis ça que maintenant ?!

Je tente de la calmer avant de tout lui raconter mais en éludant les moments « Floover », même si cela crée des incohérences dans mon récit. Je parle du passage où il a balancé mon téléphone en arrière pour mieux me retenir, de ses mots sur mon corps qu'il trouve « magnifique », de l'after chez lui après la fameuse soirée « Start-up », des morsures/suçons dans mon cou, etc. Jusqu'à parler du « râteau » qu'il m'a mis il y a quelques jours.

— Il est quand même venu jusqu'au bureau sans la certitude que tu y sois pour venir t'apporter à manger... Il est mordu ?

— Non, il m'a mordu.

— Ahah très drôle !

— Mais même pas, c'est juste un sadique qui a de rares moments de bontés. Il aimerait que je tombe amoureuse de lui pour mieux me briser et se sentir puissant. Avoir le contrôle sur moi.

— Ah d'accord... En tout cas, vu comment vous vous êtes regardé, il ne l'a pas le contrôle. Vous êtes encore en train de vous battre pour savoir qui dominera l'autre.

— Alors que quand on couche ensemble...Hm.

— Je vois, je vois... la cravate ?

— Pourquoi, toi tu... ?

— On alterne.

— AH AH !

Piégée ! J'ai réussi à piéger Nina !

— Alors tu couches encore avec Patrick ! m'exclamé-je fier de moi jusqu'à ce qu'elle mette sa main devant ma bouche. Pourquoi ?!

— Il se trouve que... les circonstances font que... Je n'en sais rien moi ! Un midi il est venu dans mon bureau, on a parlé de mon dernier dossier et je ne sais pas, il dégageait une de ces auras de confiance. Et ce petit air qu'il prend quand il est fier de lui, avec sa barbe de trois jours ! J'ai attrapé sa cravate d'un coup puis, comme si mon cerveau était revenu, je l'ai relâché.

— Putain Nina... Tu as joué ton poste en faisant ça. Harcèlement sexuel au travail... Et alors ?

— Et alors c'est lui qui m'a attrapé et qui m'a prise sur mon bureau.

— ARGH NINA ! Je ne voulais pas savoir ça ! Plus jamais je ne viens dans ton bureau !

— Ce n'était vraiment pas conventionnel et si la DRH était rentrée à ce moment-là... On aurait vraiment eu de gros problèmes !

— Argh, attends que je chasse cette image de vous deux... Mais du coup, vous êtes quoi ?

— On est rien. Je te rappelle qu'il est marié...

— Mais ça va se reproduire ?

— Normalement non. Enfin si j'en ai envie, je forcerais le destin. Comme toi avec Andréa.

— Hein ?

— Si tu veux recoucher avec lui, tu vas devoir faire quelque chose ! Par exemple, ouvre les boutons de ton chemisier ! Tu as une poitrine généreuse alors profites-en ! Et puis détache moi ces cheveux, ils sont magnifiques quand ils bouclent un peu, attends que je t'arrange ça. Ah oui ! Je vais te passer mon anti-cernes aussi ! Et puis...

Nina continue à m'arranger, sans me demander mon avis, mais la voir si heureuse me fait sourire à mon tour. Nous sommes tous un peu sur les nerfs en ce moment alors avoir une amie comme elle, c'est inespéré pour une fille comme moi.

Après notre repas et sa mini-séance pour m'arranger, Nina me laisse retourner à mon shooting et je sens déjà les effets de la transformation exprès grâce aux regards bien plus insistant de mes camarades de la gente masculine.

« Floriane ! Est-ce que tu peux me dire si cette photo conv- »

Andréa laisse sa phrase en suspens en me détaillant de haut en bas avant de poursuivre. Ce petit moment grâce à « l'amélioration express pour chopper Andréa Simon » laisse dessiner un petit sourire sur mon visage alors que je me rapproche de son appareil sur pied.

Je me penche du plus sensuellement que je peux alors qu'il est derrière moi avant d'approuver son choix et de retourner faire ce que j'ai à faire.

J'ai l'impression de sentir son regard brûlant sur moi à mesure que je m'éloigne.

YES !.. Pourquoi je fais ça en fait ? Parce qu'il a fait mal à mon égo ? Parce qu'il est un bon coup et que je veux le garder sous la main ? Parce que ça me plait d'avoir une relation explosive ?

Peut-être que Nina a raison, peut-être que c'est la colère, la tension perpétuelle qui nous pousse à embrasser les mauvaises personnes...

Floriane Maillard, tu vas te venger du râteau d'Andréa Simon et tu vas bien le chopper s'il te plait !



Alors ? Que pensez-vous de l'amitié Flo/Nina ? Du plan prévu pour "chopper" Andréa ? Et de la relation Nina/Patrick qui continue malgré son côté très risqué et immoral ?

J'espère que ce chapitre vous a plu et si c'est le cas n'hésitez pas à voter et donner votre avis en commentaire !

Photo foodporn du jour :

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