Arrestation

  L'air était frais. Une douce musique s'écoulait dans la pièce aux meubles XVIIe, aux grands rideaux tirés. Quelques bruits de rue se faisaient entendre à travers la fenêtre. Deux individus échangeaient fort dehors. Le parquet craquait de temps à autre, bien que je sois confortablement installé dans le fauteuil. Il n'y avait personne, mise à part une voisine à l'étage balayant le sol.

  Je lisais. L'ouvrage n'était pas célèbre, ni même son auteur, mais il était fascinant. Les mots mêlaient à la fois tragédie et espoir.

  L'après-midi avançait lentement, jusqu'à ce que des pas lourds retentissent au rez-de-chaussée. Plusieurs hommes se déplaçaient lentement mais sûrement, dans un silence profond. Un fracas sourd ébranla les murs. Toujours sans bruit, les hommes empruntèrent les escaliers, l'un d'entre eux s'étant éclipsé. Il me semblait que la famille vivant à l'étage inférieur était à l'intérieur. Pourtant, on n'entendit pas un mot.

  En comprenant que les pas s'approchaient, je fermai mon livre. Je savais que je n'étais pas en bonne position. Des rumeurs couraient déjà depuis quelques temps dans le quartier. Mes voisins avaient dû me dénoncer. Et maintenant, les Allemands arrivaient.

  Soudainement, on frappa à la porte. Il était trop tard. Je décidai alors de me cacher dans le placard à balai. Je n'avais plus le temps de réfléchir. Les coups à l'entrée reprirent. Puis, d'un seul coup, la porte s'ouvrit et tomba lourdement au sol. Des voix approchaient. Ils avaient compris que l'appartement n'était pas vide. Malheureusement, j'avais oublié de couper la musique.

  Pendant de longues minutes, les hommes se déplacèrent à travers le logis. Ma respiration était saccadée, mon rythme cardiaque s'accéléra. J'étais paralysé.

  Brusquement, la porte du placard s'ouvrit. Deux hommes en uniforme gris s'avancèrent et me prirent par le col. L'un d'eux prononça quelques mots à ses collègues pour les prévenir. Une demi-douzaine de soldats m'encadra. Ils me firent monter dans leur voiture. Je ne pouvais opposer aucune résistance, j'étais pétrifié par la peur.

  Puis tout se passa très vite. La voiture se dirigea à la gare où était massée une foule énorme. Je sortis de l'habitacle, toujours aux côtés des soldats. Ils me poussèrent dans un wagon où une trentaine de personnes était enfermée. Les enfants pleuraient, les femmes tentaient en vain de les consoler ; les hommes, eux, se taisaient.

  À peine quelques secondes passèrent et les portes furent closes. Un long sifflement annonça le départ. Mais nul n'en connaissait la destination.

  Le trajet était long mais il nous laissait à tous un peu de temps pour nous préparer à la suite. Certains semblaient avoir compris et regardaient tristement le sol. D'autres étaient complètement déboussolés et cherchaient à tout prix à comprendre. Quant à moi, je savais. Mais je n'étais pas capable de l'admettre. Ma vie était monotone et pourtant j'y tenais. À présent, tout basculait. Et j'étais contraint de l'accepter sans m'y opposer. Accepter la fin.    

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Une petite nouvelle sur la Seconde Guerre mondiale que j'ai rédigé pour l'un de mes examens blancs. C'est avec plaisir que je la partage avec vous !

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