J'ai rêvé de nous, hier soir.
J'ai rêvé de nous, hier soir. Une ville, un hiver. Un hiver ensoleillé que le froid n'arrivait pas à rendre moins tendre. Un hiver ensoleillé qu'une lumière de glace pénétrait. Un hiver ensoleillé qui faisait de ce jour agréable.
J'ai rêvé de nous, hier soir. Devant un cinéma, j'attendais. Cette robe, ah ! que cette robe m'allait merveilleusement. Faite d'un velours vert. Nouée à la taille. Ceinturée au-dessus de mes flancs. Cette robe ravissait mon corps. La coupe moulait mes hanches développées et écrasait mon ventre rond. La ceinture, nouée autour de moi, comme un ruban autour d'un cadeau, resserrait ma taille dans un délicieux mouvement. Sans faire exprès, inconsciemment, cette ceinture pleine de manières innocentes, semblait guider le chemin de tes mains. Elle donnait à ma taille l'œil aguicheur et l'air bavard qui disait d'une voix vide, d'une voix subalterne, d'une voix trainante : « Prend-moi. » Voilà une robe qui aimait discuter. Elle disait ce que je voulais que tu entendes. Sur cette robe, j'avais posé un manteau. Mes pieds marchaient avec de petits talons. Eh ! quelle allure ils me donnaient ! Celle des reines ! De Cléopâtre piquée par un cobra, de Didon en proie aux flammes, de Marie-Antoinette montant elle-même sur l'échafaud. Ils me donnaient l'allure grande et audacieuse. L'allure d'une femme qu'un homme aime.
J'ai rêvé de nous, hier soir. Le ciel voyeur, rayonnant au-dessus de ma tête, comme l'auréole de chérubins réconciliés avec l'éternité, partageait mon enthousiasme. Les nuages s'écartaient, le bleu éclatait, le firmament s'éclairait. Le voilà qui arrive ! Je te vis ! soudainement, pénétrer dans la ville. La foule te chiffonnait un peu ; tu resserrais les pans de ton manteau sur ton torse, tu contractais tes doigts dans un poing blanc, tu froissais ton nez. Je te vis mais tu ne me vis pas. Je souriais mais tu faisais la grimace. Je restais immobile et tu avançais. Tu avançais vers moi. Devant le cinéma. Tu me vis, tu me souris, tu m'approchas. Le ciel voyeur, rayonnant au-dessus de nos têtes, comme le jour des premiers jours, des premiers printemps, des premières terres, témoignait devant Dieu de nos amours. Il rayonnait et disait : « Dieu, entend ta création ! Tu m'as divisé en sept, collé à la terre et rendu infini. Dieu, entend ta création ! Tu m'as fait témoin de ces êtres. Je dis donc qu'ils s'aiment ! Qu'ils s'aiment ! que tu les as séparés un jour qui n'existe plus mais dont leurs cœurs gardent la cicatrice. Tu les as séparés un jour qui n'existe plus et qu'ils te remercient d'avoir abrégé. Tu les as séparés un jour qui n'existe plus parce que tu as fait tomber la nuit dessus. Moi, témoin de tous les jours, j'ai vu les larmes coulaient sur les joues de ce garçon. Moi, témoin de toutes les nuits, j'ai entendu les lamentations que te hurlaient les douces lèvres de cette fille. Maintenant, Dieu a choisi de les unir. Ce que Dieu décide, mortel ne peut l'empêcher. Voilà ces êtes réunis et moi, témoin encore, je sais qu'ils s'aiment. Comme rarement amour a été sur terre. » Le vent soufflait, il emportait les murmures du ciel et j'entendais ces mots.
J'ai rêvé de nous, hier soir. Tu venais à moi. Les mains dans les poches et le sourire aux lèvres. Tu venais à moi. Tins ma taille d'une main et posas tes lèvres sur ma joue. Mon cœur ! oh ! mon cœur fut douloureux. Le bonheur était nouveau ; il m'était étrange. Chaque fois donc, il me piquait le cœur. Réveillait une ancienne blessure. La blessure de notre ancienne séparation. Celle qui avait arraché mon cœur au tien et découpé nos âmes produites à partir de la même essence.
J'ai rêvé de nous, hier soir. Nous allions au cinéma et tu étais en retard.
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