2. Le parc mémorial de la paix
Il y avait une famille, nommée la famille Ishida qui habitait à Dinan en Bretagne. Ils étaient tous au courant d'absolument rien, au sujet de tout ce qui était étrange à leurs yeux. Ils vivaient donc parfaitement normalement. Personne ne se doutait de la moindre chose, Dieu merci. Car, un humain qui saurait des choses étrange au sujet de, quelque chose, serait une catastrophe pour ceux qui sont concernés. Ils menaient une vie calme, avec deux enfants, et un chien akita inu, nommé Hachi en mémoire du célèbre chien akita.
Du moins, jusqu'à présent.
Tout se passa ce jour même. Tout fût bouleversé, tout changea, la vie d'une seule et unique personne de la famille Ishida.
Le matin du dimanche 26 juin 2015, jour où commence cette histoire, Mme. Ishida se levait péniblement pour aller préparer le petit déjeuner. Il faisait simplement beau, et ensoleillé. Très caniculaire, même. Ils étaient au Japon, car ils avaient quitté l'école un peu plus tôt que prévu. Et, comme ils sont d'origine Japonaise, ils étaient tous partis dans leur grande maison, à Hiroshima, plus précisément, à la gare de Mukainada. Mme. Ishida, était une femme aux cheveux noirs, et aux yeux noirs perçants. Elle était assez petite, et mince. C'était une femme au caractère très strict.
À huit heures et quart, M. Ishida descendit de la chambre en baillant. C'était un homme de taille moyenne, aux cheveux noirs, yeux noirs, et des lunettes rectangulaires. Vous vous imaginez donc bien que leurs enfants auront les cheveux noirs, et des yeux noirs. Rien de plus simple que cela. Il avait les cheveux en bataille, et se grattait la tête d'un air ensommeillé. Il se dirigea vers la salle de bain, et se lava le visage avec de l'eau froide pour se réveiller. Puis, tout en se frottant les yeux, il ouvrit la porte en bois coulissante pour aller à la cuisine. Il faillit trébucher sur une boite en carton remplit de bouteille de jus d'Orange venu de Kashima, une petite île campagnarde très chaleureuse. Il préparait son café tandis que Mme. Ishida accourut vers lui. Elle lui murmura quelques mots, ce qui réveilla complètement M. Ishida, qui se précipita en hâte vers le couloir. Comme le couloir était très glissant, il manqua de tomber s'il ne s'était pas tenu contre le mur. Ses lunettes de travers, une pantoufle perdue, il courut vers la porte de la sortie. Il mit ses chaussures, manquant de tomber à plat ventre sur le sol en pierre. Il prit un gros cahier qui était posé sur la petite armoire de l'entrée, coulissa la porte et sortit de la maison. Il pressa le pas dans les quelques marches, ouvrit le petit portail d'une main, puis courut dans la rue vide du matin. Ici, même le matin était caniculaire. Mais le pire était l'humidité. La sueur lui coulait sur le front. Il tourna à gauche, puis prénétra le petit portail d'une maison. Il cria alors : « Gomen kudasai ! », ce qui signifiait " excusez-moi ! ". Quelques secondes plus tard, une voix lui répondit : "Oui ! ". Une vieille dame lui ouvrit alors la porte.
– Excusez-moi du retard, j'avais complètement oublié... articula M. Ishida.
– Non, non, ne vous inquiétez pas. De toute façon, si je n'étais pas là, vous auriez pu le mettre dans ma boîte aux lettres, répondit la souriante vieille dame.
Elle s'appelait Mme. Okamoto, et était la voisine des Ishida. Une personne très aimable, d'ailleurs comme tout le monde ici, toujours souriante.
– Voulez-vous boire quelque chose ? lui demanda-t-elle.
– Non merci, j'ai ma famille qui m'attend pour le petit déjeuner... balbutia M. Ishida.
– Bon, très bien, alors bon petit-déjeuner !
Sur ces mots, elle prit le cahier que lui tendait M. Ishida, tandis que celui-ci repartit en direction de la maison.
Dès qu'il ouvrit la porte de sa maison, il sentit soudainement l'air frais des climatisations.
– Ça fait du bien ! grommela-t-il en s'essuyant le visage avec une serviette froide.
Vers huit heures et demie, des rires résonnèrent du premier étage. Quelques minutes plus tard, deux enfants déboulèrent l'escalier en continuant à rire.
En ouvrant la porte coulissante de la cuisine, ils gloussèrent d'une même voix.
– Bonjour papa, bonjour maman !
– Bonjour !
La première était une fille d'environ treize ans, avec de grande lunettes noires et fines. Le deuxième, était un garçon du même âge, qui était un peu plus petit qu'elle. Il avait les cheveux en bataille, et il était mince, tout comme sa sœur. C'était Aria et Goro.
Après ce bref salut, ils se dirigèrent vers la salle de bains en courant.
– Petits babouins... Ils ne peuvent pas marcher ? s'esclaffa M. Ishida.
Dix minutes plus tard, les deux bambins se ruèrent au salon pour manger. Le garçon s'assit le premier, et fanfaronna : «Premier ! »
Mme. Ishida poussa un soupir mi-amusé, mi-exaspéré.
En ce moment, le débit de la rivière près de chez eux diminuait tellement qu'il n'y avait par endroit plus d'eau.
– Je n'ai jamais vu un juin aussi caniculaire, pesta la fille. La végétation était aussi sèche qu'une touffe d'herbe morte.
M. Ishida s'assit sur la chaise, un journal dans la main. Mme. Ishida posa sur la table quatre bols de riz, et une assiette de légumes. Il y avait, des tomates, des concombres, des poivrons, enfin, tout ce qui était bon. Alors qu'ils s'apprêtaient à manger, quelqu'un d'autre entra dans le salon : un chien, plus précisément un akita inu. Il était haut sur ses pattes, au regard doux et sage. Il s'assit devant la table, fixant sa famille.
– Bonjour Hachi ! Comment vas-tu ? demanda la fille en souriant.
En guise de réponse, le chien se redressa et s'approcha d'elle. Il se laissa caresser, puis se tourna vers le garçon, qui fit de même. Tandis que le chien s'approchait de M. Ishida, celui-ci, qui était absorbé dans son journal ne l'avait pas remarqué. Hachi pencha sa tête sur le côté, plissant les yeux. Il fini par aboyer, et le lecteur sursauta, tomba de sa chaise et renversa son verre d'eau qui se brisa au sol. Les lunettes de travers, et grimaçant, il se releva tant bien que mal.
– Hachi...
Il se rassit en grommelant, les yeux rivés sur son chien. Les deux jumeaux, étaient tordus de rire, tandis leur mère le foudroyait du regard en ramassant les morceaux de verres brisés. Elle caressa son chien, qui tenait dans sa gueule un torchon.
– Cette journée s'annonce à merveille dis-donc... Et toi, aide moi un peu, c'est ton verre, pas le mien !
Ce dernier posa son journal, toujours les yeux lançant des éclairs.
– Qu'il est intelligent, Hachi ! s'écria le garçon. Il nous dit bonjour tous les matins, et en plus il a compris que papa ne l'avait pas vu...
– C'est vrai ! gloussa sa sœur. Mais en même temps, c'est un akita inu ! Je te rappelle que l'on a nommé ce chien Hachi, comme le célèbre chien akita Hachi, intelligent et loyal envers son maître...
– C'est triste, comme histoire. Il ne comprenait que son maître était mort. Il l'a donc attendu tous les jours à la gare de Shibuya, jusqu'à sa mort...
– Certes, mais il a failli me faire transporter à l'hopital ! les coupa M. Ishida qui avait fini d'essuyer le parquet lisse.
– Tu n'aurais pas dû l'ignorer, c'est tout, trancha Mme. Ishida d'un ton sec.
Aria s'accroupit et tandis un bol rempli de croquettes à Hachi. Celui-ci tandis sa grande tête sur sa gamelle, et commença à manger.
– Aria, mange toi aussi si tu veux le promener, dis M. Ishida, la bouche remplit de riz. Enfin plutôt, tu dois le promener.
– Oh c'est bon papa, moi et Goro, on aime le promener, pas comme toi, gros feignant ! soupira la concernée.
– Comment ? lâcha son père.
– Rien... marmonna-t-elle.
– Exactement. Au fait, moi et votre mère, avons trouvé un nouveau bon collège pour vous, le collège de Vinci.
– Oh, et... Quelqu'un d'autre y va ?
– Non, je ne crois pas. On ira en voiture.
– Mais ça veut dire qu'on ne connaîtra personne ??
– Oui, mais je suis sûr que vous allez vous faire des nouveaux amis, non ? ajouta t-il en jetant un coup d'œil à Mme. Ishida comme pour lui demander de l'aide.
Celle-ci leva un sourcil en lui jetant un regard signifiant : "Je te l'avais dit !"
– Mais jamais je n'irais dans ce collège ! D'ailleurs, pourquoi doit-on changer de collège ! cria Goro qui s'était levé.
– Parce que c'est comme ça. L'autre collège n'était pas bien, vous le savez.
– Mais nous y étions pendant deux ans ! Ce n'est pas une raison pour...
– Ça suffit ! Ce n'est pas vous qui décidez où vous allez ! Alors maintenant, finissez de manger et toi Aria, va promener Hachi...
Les deux jumeaux s'observèrent un long moment et s'assirent, la mine sombre. Le reste du petit déjeuner se fit en silence, sauf pour leur chien qui s'étirait comme si de rien n'était.
Vers neuf heures et demie, Aria attacha la laisse à Hachi et sortit de la maison. Il faisait chaud, et des oiseaux voletaient dans le ciel bleu. Elle soupira, et commença à marcher le long du sentier étroit, les mains dans la poche. Les voitures roulaient juste à côté d'elle, étant donné qu'il n'y avait pas de trottoir. Hachi marchait devnat elle, la tête bien haute et reniflant l'air pour voir si des nouveaux arrivants ne s'étaient pas installés dans son territoire. Il ne s'arrêtait que lorsqu'il en avait réellement besoin, au plus grand bonheur de la famille. Cepandant, Aria n'avait guère envie de rentrer chez elle. Elle voulait sentir l'odeur de l'été, du soleil, rester ainsi à écouter le chant des cigales.
– Hachi, tu peux prendre autant de temps que tu veux. Je n'ai pas vraiment envie de rentrer à la maison... Tu comprends n'est-ce pas ? ajouta-t-elle en penchant sa tête vers son chien.
Hachi releva la tête en direction de sa maîtresse, et soutint son regard. Il remua sa queue, comme pour signifier qu'il avait parfaitement compris.
Tous les deux descendirent la pente sous la chaleur et l'odeur humide du Japon, passèrent devant une grande école primaire où des élèves s'entrainaient au base-ball, et se dirigèrent vers le "Sorajõyama kõen", un parc ressemblant à une petite île de forêt en plein milieu d'un petit rond-point. Le nom en japonais de ce parc signifie : " le parc des montagnes au dessus des nuages ". Il était assez grand, calme, et le meilleur était qu'il faisait moins chaud que dehors sous le soleil direct.
Ils longèrent le long d'un sentier protégé par les grandes branches des arbres, passèrent devant une grande superette où affluait du monde recherchant un endroit climatisé, traversèrent un passage piéton d'un pas rapide et se dirigèrent vers le grand parc. De temps à autres, Aria baissait la tête d'un mouvement vif pour saluer les passants qu'elle croisait sans pourtant s'arrêter. Les autres faisaient de même, sauf quelques personnes âgés qui discutaient en plein milieu du passage, portant des sacs en plastique remplits de produits alimentaires, sous leur chapeau d'été. Il faisait bien trop chaud pour s'attarder sous le soleil, le chants des cigales en prouvait la chaleur caniculaire.
Ils arrivèrent tant bien que mal à destination, et, avant de détacher Hachi pour monter la pente raide, elle s'arrêta devant un distributeur de boissons fraiches. Au Japon, on trouvait ces distributeurs un peu partout, enchantant Aria qui s'épuisait très facilement, le contraire de son chien qui pourait courir jusqu'à la France sans aucun problème. Elle tira de sa poche une pièce en argent très léger, une pièce de cent yen, l'équivalent de quatre-vingt quatre centimes. Elle observa les fausses bouteilles placés dans le distributeur, et appuya sur un bouton indiquant " disponible " sous une bouteille de Calpis, et mit la pièce de cent yen. Son chien observait sa maîtresse prendre la bouteille fraîche de Calpis d'un oeuil curieux.
Qu'est-ce que le Calpis ? Et bien, si vous avez envie de vous désaltérer pour surmonter la chaleur et l'humidité écrasantes du Japon pendant l'été, vous vous dirigerez sûrement vers la supérette ou le distributeur automatique de boissons. Et parmi les dizaines de bouteilles, vous tomberez à coup sûre sur une bouteille blanche à pois bleus, au contenu blanchâtre et trouble : c'est le Calpis, une boisson dont les japonais en rafolent. De l'eau, du lait écrémé en poudre et des acides lactiques, voilà tout ce que contient cette drôle de boisson non gazeuse. Mais le Calpis n'a pas le goût du lait, mais plutôt une saveur aigre-douce, très réconfortante et complètement désaltérante.
Aria en bu une bonne gorgée, avant de le renger dans son sac à dos. Elle fit signe à son compagnon de la suivre, et commença à marcher dans le sentier raide en soupirant. Hachi courût vers le haut de la pente terreuse, remuant sa grosse queue touffue d'un air joyeux. Il courait partout, essayant d'attraper quelques papillons qui voletaient au-dessus de lui. Le chant des cigales ne s'arrêtaient jamais au Japon, où que vous alliez. Mais cela fait du bien, pour tout le monde. Car à Meyrueis, jamais on aurait l'occasion d'entendre cela. Certes, on peut y voir une belle nature et des aigles, mais pas la musique naturelle de l'été.
Les chauds rayons qui transperçaient la voûte feuillue des arbres mouchetaient de lumière le pelage de Hachi. Il se tapit contre le sol pour mieux dissimuler sa robe orangée au milieu du vert des broussailles. Pas à pas, il se glissa dans les buissons : un oiseau dodu, picorait tranquillement sous un arbre. Hachi se tapit aussi bas que possible, et s'avança à pas de loup vers l'oiseau. Le chien huma l'air, et poussa le sol de ses puissantes pattes arrières avec force, se jetant sur sa proie avec satisfaction. Mais l'oiseau avait déjà décelé son odeur, et s'était envolé avant lui. Hachi rata sa proie de quelques longueurs et tomba dans un bruit assourdissant sur le sol terreux. Il s'ébroua d'un air frustré, sa queue battant l'air en colère.
Un peu plus tard, les deux amis se dirigèrent vers un endroit moins campagnarde. Ils traversèrent un pont où circulaient quelques voitures, et Aria fixa un long moment la rivière asséchée. Tandis qu'elle s'accoudait au-dessus de la rivière, elle remarqua rapidement que quelque chose brillait dans l'eau claire. La jeune fille pencha sa tête vers l'avant pour y voir plus clair. Elle sauta du pont, et atterrit sur le sol caillouteux, suivit de près par Hachi qui courra vers l'eau pour se mouiller les pattes, afin se rafraichir. Aria, elle, se contenta de le suivre des yeux. Puis, prudement, elle s'avança pour trouver la chose qui brillait dans l'eau. Oui, il y avait en effet quelque chose. Quelque chose qui ressemblait à un bracelet. Elle enleva ses chaussures et mit ses pieds dans l'eau. Ce n'est pas très propre pour s'y baigner, mais dès que son pied frola la surface froide de l'eau, la fraicheur l'enveloppa aussi soudainement qu'un éclair. Elle s'avança encore plus loin, avant de s'arrêter. Son pied avait touché quelque chose. Elle se pencha pour mieux voir. C'est belle et bien la chose. Elle s'accroupît, et plongea sa main pour prendre cet objet. Quand sa main attrapa la chose, elle se releva, et tendit sa main vers le ciel. Le soleil était aveuglant, mais elle pût ainsi voir ce que c'était. C'était un bracelet en or, où était gravé des motifs très précis. Il y avait même une courte phrase : "Nous régnons, nous conquérons.". Elle essaya donc de le mettre sur son poignet droit. Alors qu'elle l'avait à peine mis, le motif changea. À la place du sorte de gros chien, se trouvait à présent gravé un loup. Un magnifique loup. Il avait la crinière luisante. En tout petit, était gravé la phrase : "Jamais vaincu, toujours craint". Que signifiait donc cela ? Et d'ailleurs, depuis quand un bracelet change de motif comme ça ? Et puis, pourquoi un loup ? Certes, elle adorait les loups, mais elle n'en avait pas, et n'en avait presque jamais vu en vrai, sauf en images. Tellement mystérieux ! Aria frissonna. Elle avait eu, - pendant une fraction de secondes - , l'impression que cela était un mauvais signe. Elle finit par le rejeter dans l'eau, d'un regard soupsonneux.
Le vent chaud souffla, elle finit donc par appeler Hachi qui accouru vers elle aussitôt en remuant la queue.
Son sas à dos sur elle, et son chapeau d'été sur sa tête, ils allèrent vers la gare de Mukainada. Elle s'approcha du distributeur de tickets, et commença par appuyer sur " Mukainada station ". Puis, elle appuya sur l'icone d'une seule personne adulte, et leva la tête vers la longue carte des stations pour chercher la station de JR Hiroshima station. 190 ¥. Elle appuya donc sur " 380 ¥ ", pour aller-retour, et incéra l'argent demandé pour prendre les deux petits tickets roses sortis. Aria adressa un clin d'oeuil à son chien et passa le portail vers le quai. Le controleur qui se trouvait dans sa cabine lui lança un : " Bon voyage ! " en la saluant. Elle lui répondit par un sourire et attendit debout sur le quai, l'arrivé du train JR.
Quelques minutes plus tard, le train arriva à quai. Aria et Hachi s'approchèrent du wagon le plus proche, tandis que les portes s'ouvraient, accompagnées d'une petite mélodie. Ils laissèrent les personnes descendre, en attendant à droite, et montèrent enfin dans la train climatisé. Aria trouva une place assise près de la fenêtre, et Hachi se coucha sous ses pieds pour laisser de la place aux autres. La jeune voyageuse regarda défiler le paysage japonais d'un air mélancolique. Les batiments japonais défilaient devant ses yeux, quand soudain, une idée lui vint en tête.
– Hachi ! Ca te dirait qu'on aille au parc mémorial de la paix ? Ca fais longtemps que je n'y suis pas allée, et toi, tu n'y es jamais allé ! s'écria-t-elle, les yeux pétillants.
Hachi releva la tête, et remua la queue en signe aprobation.
– Un chien intelligent, tu en as. Moi aussi j'avais un Akita, lorsque j'étais jeune.
Aria se retourna vers la voix. Une vieille femme se tenait debout près d'elle. Elle avait une canne, et semblait être épuisée. Aria se dépêcha de prendre son sac à dos, génée, pour laisser l'ancienne s'asseoir.
– Merci beaucoup, jeune fille, sourit-t-elle.
L'ancienne s'assit lentement sur le siège en murmurant "aïe aïe aïe... "
– Est-ce que vous allez bien ? s'inquiéta-t-elle en se penchant vers la dame, son sac à dos dans ses mains.
La vieille dame lui sourit.
– Je vais bien, merci. C'est juste la vieillesse... Vous, les jeunes, avez de la chance d'avoir autant d'énergie.
Aria la fixa d'un regard amusé.
– C'est vrai.
« Mukainada Station, Mazda Honsha-mae... Mukainada Station, Mazda Honsha-mae... »
Le train s'arrêta bientôt. Alors que la jeune fille carressait Hachi, la vieille dame reprit :
– C'était pendant la seconde guerre mondiale, j'étais encore très jeune, comme toi... Moi et mon chien Akita, étions inséparable.
Aria s'arrêta net, et se tourna vers la dame pour l'écouter.
– Les jeunes d'aujourd'hui l'ont oublié, mais à mon époque, tout était si précieux... Je suis déjà allée une fois devant le dôme de Genbaku, avant que la bombe ne détruise tout. C'était extrémement moderne. Vraiment sublime. Hélas, à présent, il n'en reste qu'une ruine... Je crois avoir entendu que tu allais là-bas ? Je suis un peu sourde, vois-tu, questionna-t-elle à Aria.
Celle-ci se contenta d'hocher la tête lentement.
– Alors, pries aussi de ma part, si tu ne l'oublies pas. Ce serait très gentil de ta part. Te souviens-tu de la grande main tenant la flamme de la paix ? A chaque fois que je la voyais, je me rappelais sans cesse de la guerre. Lorsque l'alarme a été déclanchée, et qus tout a brulé d'un coup. Les gens qui se sont précipités dans la rivière pour tenter de s'en sortir sont tous morts, et mon chien est décédé à mes côtés, ensevelit sous les pierres, juste à côté de l'emplacement de la flamme.
Elle s'arrêta un moment, regardant au loin.
– Les chiens sont les meilleurs compagnons pour l'homme, crois moi. J'espère que Fuku court comme avant, au dessus des nuages, en paix... Tu regarderas le ciel, sous la flamme, et je suis sûre que tu le verras...
« Tenjingawa Station, Tenjingawa Station... »
– Prends bien soin de ton chien, conclua-t-elle en se relevant tant bien que mal de son siège. Elle lui sourit une dernière fois, avant de disparaître derrière la porte du train qui venait de se fermer. Le train repartit, laissant la vieille dame seule au bord du quai, l'air fragile.
Aria resta longtemps à contempler la vitre, mélancolique. Elle avait souvent entendu les doyens parler de la guerre, mais jamais elle n'en avait entendu parler de ce point de vue. Faisant du chien un héros. Les paroles de cette dame lui tournaient dans l'esprit. Soudain, elle vit le grand stade de base-ball d'Hiroshima. Aria ne comprenait pas vraiment les règles du jeu, mais regarder l'équipe Carp ( l'équipe de base-ball d'Hiroshima ) à la télé avec sa famille était toujours ludique.
« JR Hiroshima Station, JR Hiroshima Station... »
– Ah ! Viens Hachi, on descend.
Elle se leva, suivit de Hachi et se dirigea vers la porte, zigzagant entre les personnes debout du compartiment. Devant la porte, elle attendit que le train s'arrête en jetant dehors des regards stupéfiés : sur le quai, deux longues queues devant chaque porte du train se dessinaient de loin, tandis que les personnels de la grande gare se hâtaient de calmer les personnes attendant le train avec impatience. La jeune fille soupira, et tint la laisse de son chien aussi fortement qu'elle pu. Celui-ci foudroyait les queues d'un regard furtif, remuant sa queue touffue avec impatience.
Le train s'arrêta, trop brusquement au goût de l'étrangère, qui fulmina comme pour elle-même en s'accrochant tant bien que mal à la porte pour éviter, si possible, de rentrer chez elle avec une jambe en moins ou un chien écrasé sur son poid malgré sa légèreté. L'akita, lui, se contenta d'hérisser sa fourrure en se cramponant le plus possible au sol, avant de s'écraser contre sa jeune maîtresse qui ouvrait la porte. Cette dernière soupira et attrapa l'harnais de son chien pour le hisser loin du monde affluant au quai. Dès qu'elle passa devant la sixième personne attendant de monter dans le JR, tous ceux qui faisaient la queue se précipitèrent dans le wagon, en manquant de renverser Aria et son compagnon de route sans pitié.
Plus tard, lorsque l'alarme du train sonna bruyament, et que les personnels poussaient à l'intérieur du train les Japonais n'ayant pas réussit à avoir une place libre, ils se dirigèrent vers un banc à moitié libre. Un homme avec des lunettes et lisant un journal y était déjà, son chapeau en tissu beige sur la tête et une bouteille d'eau fraîche à côté de lui. Aria s'assit lentement sur le banc, et enleva son chapeau d'été pour s'éventer avec un éventail, dit Uchiwa, pour s'adosser contre le mur.
Le ciel était bleu, et les cigales ne cessaient de chanter leur même air d'été. Quelques oiseaux survolaient rapidement le ciel au dessus de la tête des personnes. La gare était bruyante, entre le brouhaha des personnes et les annonces, recouvrant de peu la cymbalisation des cigales. Le vent humide apportait encore plus de chaleur, et Aria finit par ressortir sa bouteille de Calpis pour en boire quasiment la moitié du contenu. L'homme assit à côté d'elle remua et leva ses yeux de son Asahi Shinbun.
– Il fait une chaleur écrasante, n'est-ce pas ? En plus de ça, entre les tifons qui nous cause que des dégats, et des séismes, nous ne sommes pas dans une vie calme, tu ne trouves pas ? dit-il d'un voix mi-enjoué, mi-sérieux.
Aria, qui était en train de reboucher sa bouteille, releva la tête et eu un léger sourire compatissant.
– Oh oui, mais pour moi, le pire est la chaleur caniculaire. Cepandant, les vacances sont tout de même supportable, grâce aux climatisations, et...
– Aux Kakigōri ?
– Exactement ! s'esclaffa-t-elle avec un large sourire.
– Lorsque j'étais petit, il n'y avait pas de climatisation, reprit l'homme. A l'école, on avait tous une bouteille d'eau glacée et un éventail... On revenait tous complètement noir, après les vacances ! Vous aussi, les enfants de cette époque, faisez toujours la course pour attraper le plus possible de cigales avec le filet ? questionna le vieil homme en s'essuyant le visage avec une serviette qui enveloppait il y a à peine quelques secondes la bouteille d'eau glacée.
– Oh, moi oui, je fais de temps en temps une petite chasse aux cigales, mais seule. Je n'habite pas au Japon, je ne sais donc pas pour la généralité...
– Où habites-tu ?
– A Meyrueis, en France. Ce n'est pas très connu, mais très beau. Mes parents sont Japonais, je rentre ainsi une fois tous les deux ans pour voir ma famille.
– En France ? Vous en avez, de la chance ! s'écria-t-il malgré son viel âge.
– Oui, avant je vivais à Paris, mais nous avons dû déménager.
– A Paris ? Vous aurez dû y rester, dans ce cas. Magnifique ville, non ?
– En effet, sûretout que je faisais de la musique. Et la France, c'est un très bon pays pour cela. Je faisais du piano au Consevatoire à Rayonnement Régional de Paris. J'adorais cette école, je n'avais pas envie de quitter Paris... Mais c'est ainsi. soupira Aria en repensant à ce souvenir.
« Il faudrait peut-être que j'y aille... » songea-t-elle soudainement. Elle se leva et salua le Japonais, tandis que Hachi s'ébrouait un peu plus loin en s'étirant.
Dès que la dernière porte automatique s'ouvrit devant eux, l'odeur humide du Japon et de l'été les enveloppa d'un coup, ainsi que le chant des cigales qui reprenait de plus belle. Aria pesta en traversant d'un pas rapide le parking devant la gare d'Hiroshima, mettant sur sa tête son chapeau d'un air anxieux. Elle avait l'impression de ne jamais pouvoir rester plus d'heure dehors sous les rayons écrasants du soleil, alors que les autres couraient même, ou se parlaient tranquillement sans se préocuper de la chaleur. Il fallait s'y habituer.
Aria et Hachi montèrent dans un bus menant à Kamiya-cho en courant, le rattrapant de justesse. Lorsqu'elle monta à l'intérieur, elle sentit l'air frais climatisé du bus l'envahir si soudainement qu'elle faillit tomber à la renverse. Elle prit le petit papier qui sortait de la toute petite machine où était écrit en gros : " Hiroshima station ", et alla s'asseoir au fond du bus. Elle regarda, émerveillée, la ville d'Hiroshima défiler devant ses yeux grand ouvert comme pour ne pas manquer une seule chose. Sans s'en rendre compte, elle avait ouvert la bouche, et son sac manqua de tomber sur le dos de Hachi qui semblait dormir. A côté d'elle, passait le petit tramwey vert, tandis d'autres voitures roulaient juste à côté du bus. Elle vit le Hondori, un quartier animé du centre-ville étant une galerie piétonne emblématique bordée de boutiques japonaises et internationales. Le soir, il est illuminé par les tavernes izakaya et des pubs occidental. Les bars à sushis et à nouilles ouvrent jusque très tard le soir. À proximité, Okonomimura réunit des restaurants enfumés servant les galettes grillées okonomiyaki, une spécialité d'Hiroshima, qu'Aria raffolait.
Le bus finit par arriver à destination, et Aria se leva pour aller à l'avant du bus, où le conducteur se trouvait. Elle inséra le petit ticket qu'elle avait reçu au tout début du voyage dans la toute petite machine qui se trouvait sur la porte du conducteur, et y lit " 190¥ ". Elle paya l'argent demandé, et descendit à gauche du bus, en remerciant le souriant conducteur.
Après quelques minutes de marche, ils virent devant eux le fameux Dome de Genbaku, le dôme ayant résisté à la bombe atomique durant la seconde guerre mondiale. Il semblait fragile, tandis que seule la structure y avait survécu. Ce dôme était la preuve de la cruauté de la guerre. Aria en eu le souffle coupé. La dernière fois qu'elle l'avait vu, elle n'avait seulement que sept ans. A cette époque, elle s'était contenté de voir un vieux bâtiment qui manquait de s'écrouler avec le vent, tout noircie. Mais à présent, elle ne le voyait plus du même point de vu. Toutes les personnes ayant été confronté à la guerre, tous ceux qui connaissaient ce dôme intact, tous les enfants et adultes ayant entendu l'alarme résonner, le jour où la chose fatale traversa le ciel du Japon pour tomber droit sur Hiroshima. Toutes ces personnes, n'ont jamais été oubliées. Le dôme a vécu, a vu tout ce qui est passé ce jour là. Il a témoigné l'histoire, il a souffert comme tous ceux qui ont succombé ce jour de catastrophe.
Aria tourna deux ou trois fois autour du dôme, avant de s'éloigner d'un pas lent pour traverser un des pont qui se situait à côté du Genbaku. Elle passa devant le monument de la paix des enfants, où beaucoup d'émotions s'empara d'elle à la vue de cette statue chargée d'histoire. Les milliers de grues en origami tout autour proviennent des 4 coins du monde et sont régulièrement changées. C'est un symbole de paix et d'espoir. Aria en avait accroché un lorsqu'elle était venue pour la première fois. Elle avança encore un peu et se retrouva en face du Monument Commémoratif De Hiroshima, Ville De Paix. Devant elle, se dressait le Pont de la paix, et enfin, la fameuse flamme éternelle de la paix. Elle se retint de pleurer sans savoir pourquoi, à la vue de cette flamme. Elle serait forte, comme cette flamme, comme ces milliers de grues venant de toute la planète, comme ce dôme ayant tout survécu. La jeune fille se fit cette promesse, venue de nulle part.
« Je serais forte. Comme cette flamme, comme ces milliers de grues venant de toute la planète, comme ce dôme ayant tout survécu. Je serais comme toutes les personnes ayant survécu à la bombe. »
Sans s'en rendre compte, elle était en position de prière, et avait la tête baissée. Après un court instant de répit, elle conclua :
« Fuku, je prie pour toi, et je te promets de tout faire pour que Hachi soit heureux. Chasse en paix, compte sur moi. »
Elle prit tout son temps pour prier, et elle finit par relever sa tête de nouveau vers la flamme qui dansait lentement dans les airs. Son regard monta vers le ciel, où quelques nuages dispersés couvraient le ciel bleu. Soudain, elle sursauta lorsqu'elle cru voir dans les nuages une forme familière : celui d'un chien. Aria eu un petit sourire triste.
– Fuku, je suis contente de te voir aussi joyeux, murmurra-t-elle, émue.
Soudain, quelque chose attira l'attention d'Aria au sol, dans l'eau claire du monument commémoratif. Son coeur bondit comme si quelqu'un l'avait frappé. Le bracelet ! Mais que faisait-t-il ici, loin de la rivière ?
Tremblante, elle prit dans ses mains blanches la mystérieuse chose et la rangea dans son sac. Elle s'en pré-occuperait plus tard.
L'été au Japon en 2015 restera toujours gravé dans sa mémoire. Le fait d'avoir vu une chose ayant bouleversé sa vie, elle ne l'oubliera jamais. Aria s'arrêta au retour à la Cloche de paix, qui est un rappel pour réfléchir sur la guerre et ses horreurs. Elle frappa à l'aide de la corde de toute ses forces la cloche suspendue avec le grand bout de bois. Le son de la cloche résonna dans les alentours, laissant le son s'évanouir au loin.
Souvenez-vous des victimes de la bombe atomique ici et priez pour la paix dans le monde, songea la prieuse en fermant les yeux.
Elle et son compagnon rentrèrent en tramway puis en JR à la maison, à contre coeur. Cepandant, une chose avait changé en Aria :
Jamais plus, elle ne verrait le monde sous un même point de vu. Le monde a bien changé, depuis deux générations. Mais une chose restera à jamais la même, quelque soit l'époque où l'on est. La force, et l'entraide. A plusieurs, on peut réussir même des choses qui paraîssent impossible. Rien est impossible, pour la force humaine ou animale, ensemble, on peut tout.
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