Chapitre Vingt-Sept
27.
Point de vue de River
Je paie le chauffeur de taxi ce que je lui dois et sors du taxi.
-Monsieur, est-ce que je vous attends ou vous vous débrouillerez?
-Je me débrouillerai. Merci.
Je referme la portière et m'avance vers le bâtiment. Je m'arrête un peu. La simple vue de l'endroit suffit à me foutre les jetons. C'est imposant et le simple fait de savoir qu'il y a une tonne de criminels dangereux me terrifie. Je prends une inspiration et me décide quand même à y aller. Ça fait trois semaines que j'attends ce moment. Il faut dire que les visites sont autorisées qu'une seule fois par mois. J'espère juste que ce Killian a la permission de recevoir des visites...
Je rentre à l'intérieur et me dirige vers le comptoir. À ma surprise, il n'y a pas grand monde, ici.
-Bonjour... Je viens rendre visite à Killian McFly. Annonçais-je.
-McFly? Vous faites partie de sa famille?
-Non... Je suis... Une de ses connaissances. Inventais-je.
-Votre nom?
-River Banks.
-D'accord, remplissez ce formulaire et revenez me voir ensuite.
Je reçois ledit formulaire avec un stylo et vais m'asseoir. On m'y demande mes détails personnels, que je fournis sincèrement. La section du bas, c'est la raison pour laquelle je suis venu. Je réponds que c'est pour des formalités. Je retourne au comptoir et remets le formulaire. Après une vérification rapide, un bac est déposé sur le comptoir.
-Déposez ici tous vos objets tranchants, votre ceinture, des piercings si vous en avez et votre téléphone portable.
-Si j'ai une photo papier, je peux la garder sur moi?
J'ai décidé de prendre la photo de Scarlett plus jeune sur laquelle on la voit avec ce type. C'est juste pour me rappeler de qui il est.
-Oui. Mais elle ne doit pas être plus grande qu'une feuille normale.
Je hoche la tête et dépose dans le bac mon portable, mes clés, mon portefeuille (j'en garde la photo) et détache ma ceinture que je dépose dans le bac. On me guide par la suite pour une fouille corporelle rapide. Je passe à travers un scanner et un agent me tâte le corps (ce qui comprend même l'entrejambe, me rendant très mal à l'aise sur le coup) avant de valider. Ce n'est pas comme si je comptais lui refiler un canif pour le faire sortir de là...
On me dirige vers une pièce séparée en deux par un mur de verre. Comme dans les films. On m'escorte jusqu'à l'une des séparations et on m'invite.
-Il sera là dans quelques minutes, de l'autre côté de la vitre.
-D'accord, merci.
J'attends là à me tourner les pouces quand finalement, les prisonniers arrivent un par un et se placent dans leur séparation assignée. Finalement, je le vois. Il me regarde et fronce les sourcils. Il vient tout de même se placer face à moi. On se regarde quelques instants et je comprends mieux ce qui a pu pousser Scarlett dans ses bras. J'ai beau être hétéro, je ne peux nier qu'il dégage un certain charme. S'il n'était pas derrière cette vitre, j'aurais presque pu dire qu'il semble gentil.
Il finit par tendre sa main vers le téléphone et j'imite son geste. J'apporte le combiné à mon oreille. À cet instant, je ne sais vraiment plus quoi dire. Il engage la conversation.
-Je dois admettre que j'ai été vraiment très surpris d'apprendre qu'une de mes connaissances me rendait visite, surtout vu que je n'ai rien reçu depuis mon entrée ici. Mais maintenant, je constate que je ne t'ai jamais vu de toute ma vie. Tu veux bien me dire t'es qui, exactement?
-Je m'appelle River. Je suis ami avec ton... Ex...
-Oh, oui... Ma chère petite S... Elle va bien?
Je resserre ma prise sur le combiné.
-Ça t'intéresse réellement?
-C'est pas parce que je l'ai défigurée que je ne suis pas intéressé à savoir ce qu'elle est devenue.
Ah. Ouais, sympa, vu comme ça...
-Ça va, mais ça pourrait être mieux.
-Je vois, je vois. Il est vrai que je ne l'ai pas ratée, en même temps.
Je retire tout ce que j'ai pu penser à son sujet. Ce type est détestable.
-Bon, assez de causette. Qu'est-ce que tu fais ici, gamin? C'est elle qui t'a demandé de passer me voir?
-Non, je suis venu de moi-même. Elle ne sait pas que je suis ici.
-Pourquoi ça? J'ai l'air aussi intéressant? Écoute, j'ai le droit de sortir dans la cour une heure tous les jours et le reste du temps, je suis dans ma cellule. Ma vie est bien loin d'être passionnante, si tu veux savoir.
-Je m'en doute. Si je suis là, c'est pour te poser des questions sur... ce que tu lui as fait.
-Tu dois déjà savoir ce qui s'est passé, non?
-Évidemment... Mais je veux savoir pourquoi, surtout.
Il hausse un sourcil.
-C'est tout? C'est aussi simple que ça?
-Oui, explique-moi qu'est-ce qui a pu se passer pour que tu en arrives là.
Il souffle puis il hoche la tête.
-À ma dernière année de lycée, j'ai commencé à m'investir plus sérieusement dans un business de drogues. J'étais un petit vendeur depuis mon année de Sophomore, mais vraiment rien de sérieux. Seulement, j'ai réussi à faire mes preuves et je suis rapidement monté. Je ne m'entendais déjà plus très bien avec mes parents alors mes fournisseurs m'ont trouvé un appartement où je pouvais vivre par moi-même. Comme j'avais maintenant un meilleur "grade", il fallait aussi que j'élargisse ma base de clients. L'un de mes fournisseurs m'a donné l'idée d'user de mon charme pour tenter des filles et les faire basculer de sorte qu'elles deviennent tellement accro aux substances que je leur vendais. J'avais commencé pendant l'été, en faisant tomber des filles plus jeunes que moi. C'était nettement plus facile de les convaincre une fois qu'elles étaient amoureuses de moi. En suite, qu'importe si je les plaquais, elles étaient assez accro pour m'acheter n'importe quoi même en ayant le cœur brisé.
Je ne peux m'empêcher de trouver ce qu'il me dit effroyable. À quel point faut-il ne pas avoir de cœur pour faire ce genre de chose? Je resserre ma prise sur le téléphone de plus en plus.
-Et puis, je l'ai vue. Elle se trémoussait sur le terrain de foot dans le cadre de son audition pour intégrer l'équipe de cheerleading. En plus, elle faisait tout pour que JE puisse la remarquer. Elle me jetait sans cesse des regards. Face à tout ça... Elle était la cible idéale. Je l'ai alors approchée. J'ai fait semblant d'être intéressé par elle. De toute façon, fallait dire que même à 14 ans, elle était déjà vachement canon. Faire semblant de l'aimer n'était pas très difficile face à un beau corps. Je l'ai fait tomber pour moi, je l'ai exposée de plus en plus aux drogues en en prenant devant elle et en invitant mes amis à faire la même chose. Tu vois? J'en faisais juste assez pour lui donner l'impression qu'elle prenait cette décision d'elle-même.
Si cette vitre ne se trouvait pas entre nous, je pense que je lui aurais sauté à la gorge.
-Malheureusement pour moi, elle venait toujours plus vers moi. C'est là que j'ai compris qu'en plus d'aimer la drogue, elle ne pouvait plus se passer de moi. Je ne pouvais donc pas la plaquer comme je le faisais avec les autres. Je la gardais avec moi et j'en profitais aussi, quelques fois. Tu vois ce que je veux dire? J'avais une libido à soulager aussi et, je devais continuer à gagner de l'argent. Heureusement, elle était jolie, alors ça se faisait facilement. Je n'avais qu'à lui offrir un verre de quelque chose avec une pilule diluée pour l'assommer assez longtemps en présence de clients qui la voulaient pour gagner ce dont j'avais besoin.
-Tu... Tu me dis que tu vendais son corps? Tu la laissais se faire violer sous ton propre toit?
-Oui. Ça a beau être immoral, ça rapporte. J'avais besoin d'argent. De toute façon, je lui faisais croire qu'elle était infidèle, alors elle restait à mon chevet pour se faire pardonner. Toutes les fois! Elle était tellement naïve! C'était... Génial, c'est le mot. Par contre, ce n'était pas toujours suffisant. Elle a commencé à voler dans mes stocks. Elle pensait que je ne m'en rendais pas compte. Toutes les fois qu'elle se montrait trop chiante ou qu'elle s'exprimait un peu trop, quelques coups suffisaient. Je m'efforçais de ne pas toucher aux surfaces trop visibles, question qu'on ne suspecte rien. Je l'ai aussi poussée à s'isoler de ses proches. De cette façon, personne ne lui viendrait en aide et j'avais le champ libre.
-Tu... Tu es un monstre... Grognais-je.
-Oui, je sais, mais c'est pas grave. C'est pas comme si j'étais amoureux d'elle! Elle pouvait tout aussi bien sauter d'un pont que ça ne m'aurait rien fait.
Il s'arrête.
-Et puis... Survient cette soirée. Elle avait encore fouillé dans mes affaires. Seulement, cette fois, j'étais vraiment en pétard. Une fois de plus, j'ai commencé à la frapper, pour lui faire comprendre. Sauf qu'elle criait beaucoup plus fort que d'habitude. J'avais mon canif dans ma poche de jean, alors je m'en suis servi. Initialement, je voulais juste la blesser au ventre, je ne voulais pas la tuer parce que me débarrasser du corps par la suite aurait été trop difficile. Mais bon, cette fois-ci, les voisins ont appelé la police. Ils ont défoncé ma porte et j'ai été tellement surpris que ma main a dérapé. C'est ce qui a créé la cicatrice sur son visage. Ça, c'est le seul vrai accident. Tout le reste, c'était pleinement volontaire.
Il me fixe dans les yeux.
-Ça pouvait être elle comme ça pouvait être une autre pauvre fille. C'est tombé sur elle. Dommage, elle était jolie.
Je le vois sourire et ça m'enrage encore plus.
-Tu veux me faire croire que tu es fier de toi? Ton but c'est juste de me faire péter les plombs en ce moment, non?
-Tu m'as l'air intelligent, River. Mais tu veux vraiment le savoir? Je ne regrette pas mes actions. Même pas un peu.
-Tu es un vrai psychopathe. Un monstre.
-Oh, mais tu l'as déjà dit. Et ça te rend malade.
-Que tu sois un monstre?
-Oui, mais pas juste ça. Je le vois dans tes yeux.
Il rapproche sa figure de la vitre et ricane un peu.
-Ça te rend malade parce que tu n'arrives pas à saisir comment elle a pu s'intéresser à un minable comme moi et non à quelqu'un comme toi qui est, entre guillemets, si gentil, si touchant, si attachant, si... parfait! Ça te rend malade parce qu'aujourd'hui, celle que tu aimes n'est plus en mesure d'ouvrir son cœur à l'amour avec un grand a que tu lui portes parce que je l'ai tellement fissuré qu'il n'arrive plus à fonctionner comme il faut. Ça te rend malade parce que bien que je sois derrière ces barreaux et derrière cette vitre, tu ne pourras jamais lui offrir la vie qu'elle devrait avoir. Bien que je paye de ma vie ce que je lui ai fait, ça ne sera jamais assez parce qu'elle ne pourra plus jamais se laisser aller et se jeter corps et âme ver l'inconnu sans avoir peur du lendemain, sans se réveiller à cause des cris qu'elle pousse quand elle vit encore et encore la scène où je tue son essence, son âme. Et tout ça, ça te rend malade parce que tu ne pourras jamais lui rendre tout ce que je lui ai pris, et ce, peu importe les efforts que tu y mets.
Cette fois, j'abats mon poing contre la vitre. Elle ne casse pas et Killian n'a même pas cligné des yeux. Il devait s'y attendre.
-Tu...
-Oh, oui, je sais. Je suis un monstre. Et alors? Je suis bien loin d'être le seul. Ça ne me dérange pas plus que ça. Par contre, je ne peux pas dire la même chose de toi. Sur le coup, je me demande comment elle réagira quand elle apprendra que tu es venu me voir... Est-ce qu'elle est au courant du fait que tu sais ce que je lui ai fait? Ce n'est pas elle qui t'en as parlé, je me trompe?
-Ta gueule.
-Oh! Ça promet! C'est dommage que je ne puisse pas être là pour voir sa crise de colère... Qui se terminera par sa coupure de contact avec toi...
-SCARLETT NE FERA JAMAIS ÇA! M'écriais-je.
-Euh... Pardon? Me demande-t-il.
Cette fois, il a l'air complètement perdu. Je suis sûr que c'est encore un de ses coups pour me faire perdre la tête.
-Tu as bien dit "Scarlett"?
-Bah ouais. Tu n'es plus en mesure de te souvenir du nom de la fille à qui tu as complètement gâché la vie?
-Bien sûr que si, c'est ce que je dis.
-Je ne te suis pas.
-Pour faire simple: la fille que j'ai défiguré et dont la famille m'a envoyé pourrir ici ne s'appelle pas Scarlett.
J'écarquille les yeux. C'est quoi, ce bordel?
-Tu mens.
-Qu'est-ce que je gagne à mentir? Je suis déjà ici à ne rien faire de mes journées, sauf lire des bouquins.
-Tu essaies de me jouer dans la tête.
-Je t'assure que non. Pas cette fois.
Cette fois, je sors la photo de ma poche que je déplie. Je la colle sur la vitre avec ma main. J'en vois l'endos.
-On parle bien de cette fille-là?
Il hoche la tête.
-Elle ne s'appelle pas Scarlett. À ma connaissance, elle n'a pas de deuxième prénom. Cette fille, sur la photo, c'est Sasha Hyland. Et pour info, je sais qu'elle a un frère, mais elle n'a pas de sœur jumelle. Sinon, j'aurais tenté le coup avec elle aussi.
-Non... Impossible... Me dis-je pour moi-même.
Sasha.
Son nom serait Sasha.
Elle... Elle m'aurait menti?
-Et pourtant non.
-C'est bon, j'en ai assez.
Je repose le combiné et j'attends l'autorisation des gardes pour sortir de là, reprendre mes affaires et monter dans le premier taxi que je trouve. Cette fois, elle a intérêt à répondre.
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BOOM!
Et oui, je planifie cette révélation depuis le tout début! Je sais que vous n'avez rien vu venir du tout, malgré le fait que vous n'ayez jamais vu les proches (ni Isabella ni Austin) l'appeler par son nom complet!
À titre de rappel: Isabella l'a toujours appelée S et Austin Chat.
Même dans les flashbacks, ses parents et ses anciennes amies ne l'appellent pas par son nom. Vous pensiez que c'était assumé? Et bien pas du tout!
Sérieusement, si vous me dites que cette révélation ne vous a rien faite, je me tire d'ici.
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