9. Demander pardon
[ Trading Yesterday - Shattered ]
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De toute la journée, je n'avais fait que dormir, regarder des épisodes de séries, puis me rendormir. Certainement qu'avoir la conscience au repos m'aidait à oublier ces dernières vingt-quatre heures. J'avais pris soin de fermer toutes les fenêtres et les portes pour m'assurer qu'il ne demeurait aucune chance que l'homme mystère puisse s'introduire dans l'appartement. D'autant plus que l'idée de rester seule ce soir ne me rassurait pas. J'espérais que Zayn ne rentrerait pas trop tard. Pour le moment, mon corps perlait de sueur et je ressentis l'envie de me rafraîchir alors je m'emparai d'une nuisette en satin noir et de sous- vêtements et me dirigeai vers la salle de bain.
Je fis couler l'eau et rentrai dans la baignoire après m'être déshabillée. J'ajoutai une pastille pour créer de la mousse. La chaleur détendit mes muscles et la pression sur mes épaules redescendit peu à peu. Je savourais cet instant de calme et de sérénité. Je plongeai la tête sous l'eau, ce qui fit office de barrière et ne laissa transpercer aucun son, avec le sentiment d'être coupée du monde comme si plus rien n'avait d'importance. Quand je fus à court d'oxygène, je remontai à la surface et repris mon souffle.
Une bonne dizaine de minutes plus tard, j'attrapai une serviette que j'enroulai autour de mon corps et enjambai la baignoire. Je retirais le bouchon au fond pour évacuer l'eau. Je me relevai et quand mon regard croisa le reflet du miroir, un cri de surprise m'échappa. Derrière moi se tenait l'homme, son habituelle capuche rabattue sur son visage. Je me retournai en me pressant contre le coin du lavabo, effrayée. Il progressa dans ma direction.
- Allez-vous en ! Partez ! hurlai-je hystérique, les larmes aux yeux.
Mon cœur battait à tout rompre. Je pensais au départ rêver car il n'y avait aucune chance qu'il ait réussi à pénétrer dans l'appartement. La porte était condamnée à double tour et les fenêtres, closes. Un rêve – jusqu'à ce qu'il fit glisser ses doigts le long de ma clavicule et alors là, tout prit son sens.
- Non ! Ne me touchez pas ! m'époumonai-je plus férocement.
Je gesticulais dans tout les sens, en ne manquant pas de le pousser et de lui envoyer mes poings sur son torse. L'homme ne recula pas d'un centimètre. Il resta étonnement calme. Il captura tout de même mes poignets de ses larges mains pour que je cesse mes coups. Je tentai de me libérer mais me considérai vaincue.
- Laissez-moi tranquille... répétai-je à bout de force jusqu'à ce que ma voix se brise dans le silence.
Epuisée, je fondis en pleurs et me cachai le visage de mes mains. Je me laissai aller contre son torse lorsqu'il m'entraîna dans une étreinte forcée. Une main se perdit dans ma chevelure et l'autre entama des mouvements circulaires dans mon dos. Des larmes ruisselèrent le long de mes joues pour venir s'abattre sur son pull et je ne les retenais plus. Il me serra un peu plus fort contre lui, comme par peur de me perdre. Je ne savais plus combien de temps nous étions restés dans cette position, mais quand il rompit ce contact, un vide s'empara de moi. Dans d'autres circonstances, j'aurais pu trouver ça mignon, si seulement cette preuve d'affection ne reposait pas sur une relation aussi malsaine et obsessionnelle.
Mon regard resta ancré sur le sol, perdu, un peu comme je l'étais en ce moment. Il plaça un doigt sous mon menton pour me faire relever la tête. Me pommettes toujours humides, il les essuya avec son pouce. Un reniflement peu élégant m'échappa. Le rouge me monta aux joues en considérant l'accoutrement que j'arborais ; une simple serviette blanche, dévoilant mes cuisses ainsi que la naissance de ma poitrine. Je resserrai l'étoffe où mes doigts restèrent crispés.
- Pardonne-moi, Allison.
Ces mots suffirent à attirer toute mon intention et je plongeai à présent mes yeux dans l'obscurité qui demeurait sous sa capuche. Mon expression devait trahir mon incompréhension. Je n'aurais jamais cru capable cet homme de s'excuser. Je ne savais pas non plus, à quel évènement en particulier il faisait référence...
De s'être comporté comme un vrai psychopathe la nuit dernière, ou de m'espionner jour et nuit jusqu'à me rendre la vie impossible ?
- Je sais que j'y suis allé un peu fort hier, avoua-t-il comme si j'allais comprendre sa démarche et éprouver ne serait-ce qu'une once de compassion, mais je ne regrette rien. Il fallait que tu comprennes ce qui t'attendait une bonne fois pour toute, si tu ne m'écoutais pas.
Le ton de sa voix me paraissait être sincère mais des excuses, ce n'était pas assez. Ce que je voulais, c'était qu'il me fiche la paix. Son attitude obsessionnelle et destructrice m'empêchait de respirer. Je retenais mon souffle en apnée, depuis qu'il était entré dans ma vie et il se démenait à rendre ma vie plus imbuvable chaque jour.
- Il fallait y penser avant, murmurai-je avec un arrière goût amer dans la bouche.
- Je ne veux plus que tu me craignes, Allison. Je veux susciter autre chose que de la peur chez toi, tu comprends ? J'aimerais tellement que tu acceptes de recevoir tout l'amour que je te porte... Mais pour ça, il faudra que tu y mettes du tien. Cela peut être dur, mais pas si tu fais en sorte que tout se passe bien, expliqua le prédateur en caressant la marque qu'il m'avait infligé.
Il appelait ce sentiment de l'amour ? Moi, une obsession maladive ! Je n'arrivais pas à comprendre comment on pouvait commencer à pister, menacer et harceler une personne. Pourquoi ne pas agir comme une personne normale et aborder les gens sans capuche, ni chantage ? Il fallait être atteint pour avoir ce comportement digne d'un vrai psychopathe. Cette situation ressemblait au remake d'un mauvais film d'horreur.
S'il m'aimait comme il le prétendait, il ne m'aurait pas fait subir toute cette pression depuis tout ce temps. Je savais une chose : on ne blessait pas les gens qu'on aimait. J'en avais eu la confirmation avec mes parents, ou bien ma sœur, qui ne cessaient de me rendre la vie dure. Ils saisissaient chaque occasion pour me faire comprendre que je ne demeurais pas à la hauteur et ce n'était pas de l'amour.
- De l'amour ? Je ne pense même pas que vous sachiez ce que veut dire ce mot, objectai-je.
- Détrompe-toi, dit-il en pinçant mes joues. À la minute où je t'ai aperçu, j'ai su que tu étais faite pour moi. Avec ces lèvres pulpeuses, qui épouseraient à merveille les miennes, s'extasia-t-il en pressant son pouce sur ma lèvre inférieure. Je t'ai aimé à la seconde où je t'ai remarqué ett je n'ai cessé de te désirer, secrètement, depuis tout ce temps...
Depuis tout ce temps ? À combien de temps faisait-il référence ?
Il s'empara d'une chose par dessus mon épaule, et me brandit ma nuisette devant les yeux.
- Habille-toi, ordonna-t-il en me la refilant dans les bras.
Je le regardai s'éloigner pour me laisser toute l'intimité dont je nécessitais quand il s'arrêta et articula :
- Ne t'attends plus à des excuses à l'avenir, prévint-il froidement. Demander pardon ne figure pas dans mes habitudes. Prends ça comme un acte de bonté.
Je refermai la porte dans son dos et me réservai quelques minutes pour souffler. Je revêtis mon pyjama et regagnai ma chambre avec appréhension. L'homme attendait sagement dans la pièce, assis sur mon lit, et feuilletait un roman posé sur ma table de chevet. Je restai debout devant lui, perplexe. Il le reposa et se leva pour se rapprocher de moi. Il ne se priva pas de détailler mon corps et un rictus malicieux se dessina au coin de ses lèvres, m'indiquant que ce qu'il voyait lui plaisait.
Aussi peu probable que cela puisse paraître, ses paroles diminuaient la crainte que j'éprouvais à son égard. Certes, sa motivation restait douteuse et sa démarche, contestable, mais si pour lui ce qu'il ressentait se rapprochait à l'amour, il ne franchirait jamais la limite et ne me ferait jamais de mal à proprement parler. Cet espoir me laissait l'occasion de feindre un rapprochement, découvrir qui se cachait derrière cette capuche et ainsi mettre fin à mes tourments.
Il fit volte-face et repoussa un morceau de la couverture de mon lit et m'indiqua d'un mouvement de tête de m'approcher. Je rentrai dans les draps et il rabattu la couette sur moi. Je sentis son souffle chaud s'abattre dans mon cou. Ses doigts palpèrent ma nuque et il réduisit la distance en déposant ses lèvres humides sur mon front. Je dus prendre sur moi pour ne pas le repousser. Il se releva et me borda avec affection.
- Demain, je veux que tu ailles en cours, commanda-t-il un doigt accusateur pointé dans ma direction. Hors de question que tu rates une journée de plus. Je me suis bien fait comprendre, Allison ?
Je répondis positivement, même si cela ne figurait pas dans mes plans. Je comptais rester encore un peu à l'appartement pour me reposer. Cependant, je ne désirais pas protester et donc attiser sa colère. Aujourd'hui je lui obéissais mais demain, je me vengerai.
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