47. Fuir ou mourir
[ Evanescence - Going Under ]
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Les phares de ma voiture s'éteignent lorsque je coupe le moteur. La nuit est tombée durant le trajet de mon retour et je me demande ce que tu fais en ce moment. La peur de rentrer sans te trouver à la maison m'a hanté toute la journée au point de me rendre fou. Tu dois sûrement lire un livre, ou bien être déjà assoupie à cette heure-ci... L'envie de te rejoindre dans ce lit me conquit. Sans attendre plus longtemps, je retire le contact et saute de l'habitacle pour avancer à grandes foulées vers la porte d'entrée. Quand j'insère la clé dans la serrure et qu'une entrebâillure naît, je remarque un fâcheux détail. Mes doigts effleurent le cadran en bois creusé comme si quelqu'un avait tenté de forcer son ouverture.
Mon sang ne fait qu'un tour et se glace dans mes veines. Je franchis le seuil avec hâte et un séjour vide et plongé dans le noir m'accueille. Le silence suspect me paralyse aussitôt et m'engouffre dans un courant d'appréhension poignant.
- Allison ? Je crie avec l'espoir d'entendre ta voix.
Pour seule réponse, un bruit sourd me parvint de l'étage. Cette crainte se dissipe et je reprends le contrôle sur ce trou noir qui aspire chacune de mes pensées pour les détourner contre moi. Je claque la porte et avance dans le séjour et mon chemin s'arrête devant le spectacle qui prend place sous mes yeux. Une chaise est renversée sur le sol et un tisonnier se trouve abandonné à quelques mètres de la grande baie vitrée. Je comprends la supercherie et gravis les escaliers, la main crispée sur la rampe, tentant de contenir la déception qui se transforme en une masse informe d'amertume.
Tu as voulu me quitter...
Tu avais promis de rester à mes côtés pour l'éternité !
La première porte à laquelle tu ne dois pas avoir accès est entrouverte et un filet de lumière s'étend sur le parquet du couloir. Ma respiration s'emporte alors que je la pousse et que je fais face au prestige de ta bêtise. La pièce est complètement dévastée. Les biens les plus précieux que je possède, ces clichés de toi, sont arrachés des murs, déchirés et jonchent le sol comme de vulgaires déchets. Je jette un regard apeuré à mon étagère à souvenirs qui heureusement n'a pas subi le même sort.
Mon repère n'est plus qu'un tas de poussière.
Par ta faute.
Je pousse un hurlement de colère qui m'arrache les cordes vocales. Les murs de la maison vibrent. Une rage sans nom me fouette violemment et ma vision se teinte de rouge. Mes oreilles sifflent, mon coeur s'affole, le besoin de me venger m'anime au plus profond de mon être.
- Allison ! Menacé-je sans pitié. Qu'as-tu fait !
Mes pieds me guident vers la porte de la chambre et lorsque j'enclenche la poignée avec l'intention de te châtier, te faire comprendre la grosse erreur que tu viens de commettre et qui mérite une punition digne de ce nom, la clenche résiste.
- Ouvre cette porte immédiatement, ordonné-je la voix tremblante.
Tu ne bouges pas. Aucun bruit ne résonne derrière cette porte et ça ne fait qu'attiser cette tempête qui naît et se prépare à tout ravager sur son chemin.
- Non !
Oh grave erreur, je ne ferais pas ça si j'étais toi...
Tu ne me laisses pas le choix.
Mes poings s'abattent sur la surface à plusieurs reprises pour te témoigner mon humeur morbide. Un gémissement de peur transperce la paroi. Tu es terrifiée. Tant mieux. Tu ignores à quel point je suis mécontent. Tu ne te doutes même pas du sort que je te réserve. Tu vas goûter à cette pire facette de moi, celle que tu n'aurais jamais dû raviver. Dès lors que j'arriverai à défoncer cette porte derrière laquelle tu te caches comme une lâche, les choses vont changer.
Plus rien ne pourra te sauver de la fatalité que tu as causé.
- Ne me force pas à me répéter, Allison, sifflai-je à bout de patience.
- Laisse-moi ! Tu n'es qu'un psychopathe, pauvre malade !
Ta voix angélique me crie ces atrocités qui me fendent l'âme, me déchirent le coeur à vif. Tu n'imagines pas le mal que tu me fais lorsque tu me traites ainsi, comme si je n'étais qu'un détraqué. Tu ne comprends pas que je t'aime d'un amour cristallin. Les sentiments que tu provoques chez moi sont plus forts encore que l'importance que j'accorde à ma propre vie car sans toi, vivre n'a plus aucun sens.
Je suis une horrible personne. Je le sais. Mon âme est corrompue par mes péchés, ma conscience n'est que vices et souillure et pire que tout, je n'éprouve aucune culpabilité face à mes actes abominables. Rien ne me permettra de changer. Chaque jour je m'évertue à devenir un homme meilleur, pour toi, mais mon obsession me ramène toujours inlassablement au même point. Mes promesses se brisent face à la menace de te perdre. Je flanche et dès lors me condamne à répéter ce cercle vicieux dans lequel je m'enfonce et me réfugie pour fuir la réalité trop cruelle.
Celle où tu n'es plus avec moi.
Tu ne peux pas me condamner de ce châtiment mortel.
Pour toi, je ne suis qu'un monstre qui n'éprouve aucune émotion, ne possède rien de plus qu'un coeur de pierre.
Mais tu te trompes, car même les monstres rêvent d'amour.
Je ne veux pas revivre ces années plongées dans l'obsurité, la froideur et l'abandon. Seul. Rejeté de tous. Avec toi, je veux fonder une famille, élever un enfant dans l'amour, avec ses deux parents. Ne me délaisse pas à ton tour comme ma salope de mère. Accorde-moi une dernière chance pour te prouver que je suis celui qu'il te faut. Personne ne te témoignera autant d'amour que je le fais, personne ne te comprendra jamais de la manière dont je te connais...
Une larme solitaire perle au coin de mon œil, façonnée par la détresse infantile qui n'a cessé de croître durant toutes ces années. J'essuie rageusement ce signe de faiblesse pitoyable. La respiration lourde, je prends appui avec mes mains sur le mur, Je tente de me calmer et de ravaler cette douce souffrance que la vie m'inflige depuis ma venue au monde.
- Si tu parles de ces photos que tu n'étais pas censée voir, supposé-je plus sereinement, tu comprends maintenant la raison pour laquelle je t'avais strictement interdit d'entrer dans cette pièce. Je croyais pourtant avoir été clair, grogné-je. Mais si tu sors de cette pièce bien sagement, nous pourrons en parler et je te conseille vivement de suivre ma proposition si tu ne veux pas aggraver ton cas, car ma patience arrive à bouts de nerfs et je ne vais pas tarder à devenir très méchant.
Un coup de massue me frappe à nouveau lorsqu'une fois de plus je n'entends pas la porte s'ouvrir. Mes mains tremblent. Ma colère se diffuse dans mes veines. Mes pieds tapent le plancher frénétiquement. Le sang me monte à ma tête, qui elle menace d'exploser.
- Allez mon amour, j'insiste en pouffant face au ridicule de la situation. Tu sais que je t'aime. Je ne te ferai jamais de mal.
Mensonge.
- Tu n'as pas à me craindre. Sors de là que je puisse t'expliquer...
Je peux sentir la peur émaner de ton pauvre petit corps fragile.
Tu ne me crains pas seulement, tu es effrayée, épouvantée par ce lui que je suis...
Alors que tout ce que je voulais, c'était t'offrir cet amour, ce réconfort qui te manquait.
Un ricanement m'échappe. Puis un deuxième. Je pouffe de rire malgré moi. L'hilarité me gagne, se mêle à mes larmes, et je me tors de rire, le ventre plié et le visage rouge.
Tu penses encore pouvoir retourner en arrière.
Pouvoir m'échapper.
Ces pulsions s'affaiblissent et je retombe dans la réalité, le moment présent, alors que tu essaies de me quitter. Je ne peux pas te laisser faire. C'est trop tard.
- ALLISON !
Cette noirceur ressurgit et repousse complètement ma raison. Je n'aspire plus qu'à une seule chose : jouer. Mon instinct de prédateur se réveille. L'adrénaline coule dans mon sang. Je suis prêt à affronter chaque obstacle, abolir toutes mes règles et mes principes pour remporter cette partie.
- Si tu n'ouvres pas, je vais de voir défoncer cette porte.
Toujours rien...
Je prends ce silence comme un feu vert.
Que le jeu commence !
- Éloigne-toi de la porte et crois-moi, lorsque je me tiendrai en face de toi, tu regretteras ton choix.
Je recule, craque ma nuque, prends une grande inspiration et écrase mon pied contre cette foutue porte. Mes coups pleuvent, frappent le bois comme la foudre et grondent comme le tonnerre qui s'abat. La barrière s'effondre misérablement tandis que je me défoule. Le dernier coup de pied marque le renversement de la partie, ta chute pitoyable signée par la sentence qui t'attend.
- Allison !
Puis je te vois assise sur le rebord de la fenêtre, au bord du précipice. Des griffes s'enfoncent douloureusement dans ma chair et s'enroulent autour de ma gorge, la respiration suffocante, alors que tu confrontes la gravité. Je n'ai pas le temps de prononcer un mot de plus que ta silhouette se fait aspirer par le vide. La panique me muselle et je m'élance à ta poursuite, guidé par un mélange de peur et de rage.
Cours aussi vite que tu le peux et surtout ne t'arrête pas, car tu ne m'échapperas pas.
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Coucou !
J'espère que vous allez bien : )
N'hésitez pas à me donner vos retours sur ce chapitre !
A votre avis, que pensez vous qu'il va se passer ? Comme l'histoire va se finir d'après vous ?
Entendre vos théories serait sympa haha
Il ne reste plus que 4 chapitres, alors j'espère que vous êtes prêts à voir cette histoire enfin s'achever ; )
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