29. Funérailles
[ Band of Horses - The Funeral ]
✘ ✘ ✘
Il était temps de lui faire mes adieux.
Le vent soufflait dans mes cheveux et je resserrai les pans de ma veste. Les nuages gris qui recouvraient le ciel se joignaient à la situation morose. Les pieds fermement plantés dans le sol, mes jambes menaçaient pourtant de s'écrouler. Mon âme était vide et depuis son départ, plus rien n'avait de sens. Mon coeur s'était brisé en morceaux et certaines pièces resteraient manquantes à tout jamais. Je vivais chaque seconde de ma vie dénuée de sentiments. La joie, la peur, toutes ces émotions humaines... je ne les ressentais plus. Le jour où elle s'était éteinte, j'étais morte aussi. Aucun mot ne pouvait décrire ce trou béant dans ma poitrine ; cet trou noir qui aspirait tout sur son passage.
J'assistais au jour le plus douloureux de ma vie, d'un air passif, comme si le film de ma propre existence se déroulait juste sous mes yeux sans que je ne puisse agir.
Perdre un être cher était de loin la plus douloureuse expérience que j'avais eu à expérimenter. Notre famille s'était effondrée. L'idée qu'elle soit morte – que la vie ait quitté son corps –, je ne le concevais pas. C'était le genre de choses qui n'arrivaient qu'aux autres jusqu'à ce qu'un jour, ça vous tombe dessus. La vie demeurait si courte... Elle pouvait s'arrêter à tout moment, sans prévenir. Je venais de perdre la seule figure maternelle que je possédais. Je ne reverrai plus jamais ma mère et ses habituelles robes formelles. Elle ne me sermonnera plus jamais sur ma tenue ou ma coupe de cheveux. Je devais être dans un cauchemar et bientôt, je me réveillerai et tout ça n'aura été qu'un songe. Je ne peux pas avoir perdu ma mère !
Je voulais me réveiller et la prendre dans mes bras.
Je voulais qu'elle m'embrasse comme elle le faisait quand j'étais petite.
J'aimerais tellement...
Une larme dégringola le long de ma joue et vint s'abattre sur l'herbe. Les bras de mon père se resserrèrent autour de mes épaules pour m'apporter soutien. Depuis ce jour-là, quatre jours s'étaient écoulés. Les quatre pires jours de ma vie durant lesquels je n'avais pas trouvé le sommeil. Chaque nuit lorsque je fermais les yeux, le visage de ma mère hantait mon esprit et alors cette douleur se réveillait pour ne plus repartir. Mon père ne détenait plus son habituelle joie de vivre et sur son visage, je ne voyais plus l'ombre d'un sourire. Ses yeux exprimaient la plus grande peine du monde. Il aimait ma mère autant qu'un homme doté d'un cœur puisse en être capable. Il essayait en vain de rester fort et ne pas exposer ses faiblesses mais la mort de sa femme ne l'affectait pas moins.
Mes yeux se posèrent une dernière fois sur le cercueil qui renfermait le corps de ma mère, ce corps qui un jour abritait son cœur battant. La cérémonie funéraire en son honneur terminée, il était temps de l'enterrer. Ce fut probablement le moment le plus difficile jusqu'ici ; lui dire au revoir pour la dernière fois et rendre son corps à la nature. Elle ne vivrait à présent plus que dans les esprits.
Morgane s'approcha lentement du trou creusé, ses larmes baignant ses joues, et s'accroupît pour saisir une rose blanche. Après quelques mots soufflés à l'intention de ma mère, elle y jeta la fleur. Ses mains se posèrent sur son ventre arrondi et un poids me pesa sur la poitrine à la pensée que notre mère ne connaîtra jamais son petit-fils. Un silence mordant régnait, déchiré par ses gémissements de souffrance et ses supplices. Je tentai de me contenir alors qu'à l'intérieur, mon cœur saignait. Louis la rejoignit et fit de même, puis ma sœur s'effondra dans ses bras. Elle s'agrippait à sa veste alors que celui-ci essayait en vain de la réconforter. Mon père se détacha de moi et s'avança lui aussi à son tour. Dans ce même rituel sacré, il rendit un dernier hommage à sa femme.
Des tremblements s'emparèrent de moi lorsque je m'avançai vers le cercueil. Je le fixai un instant, enfui à quelques mètres dans ce trou profond et mon cœur se serra. Les regards de mes proches se posèrent sur moi. Je me penchai pour attraper une rose blanche. Une épine me piqua et une goutte de sang apparut à la surface de mon doigt. Mes lèvres murmurèrent un faible « pardon » puis je me résignai à abandonner cette rose, emportant avec elle toute ma peine et mes regrets.
Durant quelques minutes encore, nous restâmes debout à chérir ces derniers moments. Les yeux rivés devant moi, je sentis la main de mon père s'emparer de la mienne. Une nouvelle page se tournait dans ma vie. Elle avait pris un tournant tragique et la douleur restera sans doute éternelle, mais je savais qu'un jour, je devrais l'accepter pour me reconstruire. Franchir cette étape ensemble ne serait pas sans impact et j'espérais que cela renforcera notre famille. Je souhaitais être près d'eux et leur dire à quel point je les aimais, pour ne pas commettre une deuxième fois la même erreur.
Quand de fines gouttes de pluie commencèrent à tomber, mon père décida de rentrer. Ma sœur et son époux le suivirent mais je ne me sentais pas encore prête à partir.
- Je vous rejoins, dis-je à mon père alors qu'ils s'éloignaient.
À présent, il ne restait plus que moi devant sa tombe. Je contournai le trou pour m'asseoir près de la pierre gravée à son nom. Je restai muette quelques secondes, jouant avec l'herbe avant d'entreprendre de me décharger du poids sur ma poitrine.
- Les obsèques ont été magnifiques, lui racontai-je imaginant qu'elle pouvait m'entendre. J'espère que tu as aimé et que tu ne m'en veux pas de ne pas avoir prononcé de discours.
L'idée de parler à une tombe me paraissait auparavant ridicule mais il se trouvait que j'avais terriblement besoin de me confier à elle. Je comprenais maintenant pourquoi les gens le faisaient. La pluie, dont les gouttes se mêlaient à mes larmes, s'intensifia et mes cheveux finirent par devenir trempés.
- Je pense que je ne serais jamais prête à te laisser partir mais je peux au moins essayer...
L'herbe se transforma peu à peu en boue qui vint tâcher mes genoux mais je m'en fichais. Tout ce qui comptait était de poser des mots sur ce que je ressentais. Peut-être que cela m'aiderait à faire face à ce chagrin sans frontières...
« Maman, si tu savais comment j'aurais voulu être à la hauteur. Je n'ai pas toujours été une fille parfaite et tu espérais bien plus de moi. Même si nous étions très différentes et qu'il nous arrivait très souvent de nous disputer, saches que je t'aimais plus que tout. Tu pensais probablement que je te détestais et c'est compréhensif. Je ne te témoignais pas assez d'amour. Je passe mon temps à repousser les gens. Je me croyais forte mais en réalité, j'avais désespérément besoin de ma mère... ( mes sanglots redoublèrent et je pris quelques secondes pour me calmer ). Je regrette tellement que nous nous soyons quittées de cette manière, je voudrais pouvoir te dire au revoir et te partager tous mes regrets. On m'a souvent répété : ce n'est que quand on perd quelqu'un qu'on comprend sa valeur. J'en comprends à présent le sens. Perdre une personne qu'on aime est douloureux et par la suite, on regrette de ne pas avoir saisis la chance de le lui dire tant qu'il en était encore temps. Alors je te le dis maintenant ; je t'aime maman. Tu resteras dans mon coeur chaque jour et ton image immortelle continuera à vivre dans mon esprit. J'espère que tu veilles sur moi de là-haut et peut-être qu'un jour, je pourrais te rejoindre dans l'au-delà pour te dire tout ça. »
***
Le vestibule de la maison demeurait rempli de monde qui allaient et venaient. Certains étaient des membres proches de la famille et d'autres me semblaient inconnus. Tous étaient vêtus de noir et faisaient acte de présence pour nous apporter leur soutien. Dressée à l'entrée de celui-ci, je saluais chacun des invités qui se présentaient, serrant des mains et acceptant les accolades que l'on m'offrait. Malgré mon chagrin, je m'efforçais d'afficher un maigre sourire pour donner l'impression que je tenais le coup même si dans le fond, il ne me restait plus rien.
Parmi les invités qui pénétrèrent dans la maison familiale, la mère de Louis se dirigea vers moi. Dans son habituel ensemble en tweed, elle avança jusqu'à moi et me serra aussitôt dans ses bras. Son parfum me chatouilla désagréablement les narines et elle me chuchota les mêmes paroles censées me réconforter dont me gratifiait chaque personne. Celles dont je ne comptais plus le nombre de fois auxquelles j'en avais eu le droit. Celles qui ne compensaient pas la perte d'un proche.
— Allison, ma chérie. Je suis tellement désolée pour ta mère, articula-t-elle en prenant en coupe mon visage pour le détailler. Toutes mes condoléances.
— Merci Monique, répondis-je avec un faux sourire en luttant contre ma tristesse.
Elle me contourna pour aller retrouver mon père dans le séjour. Ma sœur se trouvait dans la cuisine et préparait des cafés accompagnés de petits biscuits à servir tandis que mon géniteur échangeait avec notre famille. Attendre dans le vestibule et écouter sans cesse ces paroles fades me fatiguait mais je préférais largement cette situation que rejoindre les autres dans la salle à manger pour entendre la conversation qui se profilait autour de ma mère. Donc je continuais à accueillir les gens de mon mieux, perdue dans mes pensées de temps à autres, lorsque la silhouette de Liam franchit le pas de la porte. Je crus rêver pendant un instant mais sa présence se révéla bien réelle lorsqu'il se posta devant moi.
— Tu ne devrais pas être ici, soufflai-je dans la mesure où je n'avais pas même invité mes amis, sauf Evan qui demeurait un cas à part.
— Je suis désolé, s'excusa-t-il en plongeant ses yeux bleus dans les miens, mais quand j'ai appris la nouvelle j'ai ressenti le besoin de te voir. J'espère que tu ne m'en veux pas de débarquer ici sans y être convié.
Après réflexion, cela ne me dérangeait pas plus que ça de le voir ici. Il faisait preuve de gentillesse comparé aux autres fois. Même si au bord de leur piscine, il s'était comporté de façon détestable, tout le monde avait le droit à une seconde chance et même si je n'envisageais plus rien avec lui, nous pouvions au moins être amis.
— Aucun problème, tu peux rester si tu veux. Et puis te voir me fait plaisir.
Il gloussa et m'étreignit à son tour. Ses bras musclés s'enroulèrent autour de mon dos et m'offrirent un sentiment de protection. Pressée contre son torse, je laissai quelques larmes tracer leur route et s'échouer sur sa chemise noire. Il se contenta de me bercer quelques minutes puis lorsque je fus calmée de mes émotions, il se détacha doucement de mon corps.
— Je sais que je me suis montré insupportable ces derniers temps mais c'est seulement parce que tu me manquais, avoua-t-il en se grattant nerveusement la mâchoire. Pour tout te dire, je regrette affreusement de t'avoir trompé, chaque jour de ma vie. Cependant, je respecte ta décision légitime de ne pas vouloir me laisser une autre chance après ma trahison.
— Je n'aurai plus jamais confiance en toi, affirmai-je avec peine.
— C'est pour cela que je te promets de ne plus te pousser à bout comme j'ai pu le faire dans le passé. Notre histoire est finie de ton côté et je l'ai bien compris. Je veux simplement être là pour toi, si tu me le permets.
Il saisit mes mains dans les siennes et les pressa légèrement.
— Toutes mes condoléances pour ta mère. C'était une femme formidable, je n'en doute pas.
— Allison ! intervint une voix familière dans le dos de Liam.
Je vis Evan se précipiter vers moi et bousculer Liam pour me prendre aussitôt dans les bras. Cette situation me surprit en sachant la façon dont nous nous étions en quelques sortes disputés au lycée. Depuis l'incident, il avait essayé de m'appeler mais je n'avais répondu à aucun des messages de mes amis. Disons que j'avais juste besoin de quelques jours pour faire face aux évènements et affronter cette douleur immense. En aucun cas je ne lui en voulais. Je me sentais vraiment coupable de sa mine encore défigurée et des mensonges que j'accumulais au fil du temps et dans lesquels je me noyais.
— J'étais inquiet, tu n'as répondu à aucun de mes appels ! Je suis tellement désolé Alli.
Au coin de ses yeux brillaient des larmes et l'une d'elles coula le long de sa joue. Ses sourcils prirent cet air anxieux que je connaissais si bien et je ne pus résister plus longtemps à cette bouille d'ange. Mon regard s'orienta vers Liam à quelques mètres en retrait, toujours en train d'observer la scène. Lorsque mon meilleur ami fit de même, une grimace se dessina sur son visage et il perdit le contrôle.
— Qu'est-ce que tu fais là ? Je ne pense pas que Allison t'ait invité pourtant, cracha-t-il durement en se rapprochant de sa cible.
Les muscles de sa mâchoire se contractèrent tandis que Liam paraissait serein comme s'il savait qu'Evan ne faisait pas le poids face à lui. Sur le visage de mon ex-copain s'afficha un sourire provocateur, ce qui fit redoubler mon ami de colère.
— Pas besoin de sortir les crocs avec moi, le nargua Liam. Tu ne me fais pas peur. Ce n'est pas à toi de décider de ma présence ici ou non.
— Dégage de là ! articula mon meilleur ami, la voix tremblante de colère mais d'un ton assez bas pour ne pas créer de drame.
Je les regardais se quereller sans vraiment savoir qui défendre car si je me positionnais du côté de Liam, mon meilleur ami m'en voudrait probablement. D'un autre côté, je ne souhaitais pas que celui-ci parte.
— On ne dirait pas qu'Allison est du même avis, n'est-ce pas ?
Ses yeux cherchèrent les miens et ils attendirent tous les deux une réponse.
— Laisse tomber Evan, soufflai-je en lui attrapant le bras. Il n'est pas là en tant qu'ennemi, il désire simplement me soutenir, de même pour toi. Je vous demande de ne pas créer de problèmes, pas aujourd'hui et surtout pas ici, s'il vous plaît.
— Tu peux compter sur moi, répondit Liam tout en me contournant pour se diriger vers le séjour.
— Depuis quand tu lui as pardonné ? s'étonna Evan avec une touche d'animosité dans la voix.
— Je ne lui pardonne rien du tout. Entre nous, il n'y aura plus jamais rien et je lui ai bien fait comprendre la nature de notre relation. C'est simplement que je pense que nous pouvons rester amis tout de même...
Mon meilleur ami ne semblait pas convaincu de cette idée et peut-être un peu jaloux mais dans le contexte actuel, il ne tenait pas à me contredire.
— La mort de ma mère m'a appris une chose : la vie est trop courte pour la passer à détester des gens. Alors mets ta rancune de côté et profites simplement de chaque instant, le sermonnai-je gentiment.
— Je vais essayer, il me promit contre son gré.
Je laissai tomber mon poste d'hôte et me dirigeai vers la cuisine, mon meilleur ami sur les talons. Au moment où je pénétrai à l'intérieur, Morgane sortait des cookies du four. Elle déposa le plateau encore chaud sur le comptoir et Evan vola un gâteau qu'il fourra dans sa bouche.
— Tu as besoin d'aide ? demandai-je à ma sœur face à l'épuisement qui marquait les traits de son visage.
— Non, c'était la dernière fournée. Je vais rejoindre les autres, dit-elle en s'éloignant avec une assiette de cookies à la main.
Derrière le comptoir, mon meilleur ami me tendit un biscuit que je croquai à pleine dents. Durant ces quelques jours, le chagrin m'avait coupé l'appétit et de ce fait, j'avais perdu quelques kilos involontairement, bien que cela ne fut pas pour me déplaire. Heureusement, petit à petit, je retrouver l'appétit.
— Comment vas-tu ?
— Comme quelqu'un qui vient de perdre sa mère, déterminai-je avec sarcasme, la seule arme qui me restait pour affronter ce deuil et ne pas me morfondre dans les tréfonds de ma tristesse.
— Je ne sais pas vraiment quoi te dire... Je ne suis pas très bon pour réconforter les gens. Alors dis-moi ce que je peux faire pour toi et je ferai de mon mieux.
— Tu pourrais commencer par partir, par exemple, déclara Liam en rentrant dans la cuisine.
Il ouvrit le réfrigérateur et en sortit une bouteille d'eau. Il appuya nonchalamment ses coudes sur le comptoir en marbre et fixa Evan d'un air supérieur.
—Dis-moi... Tu dois en avoir marre de toujours prendre mes restes, non ?
Le visage de mon meilleur ami se déforma si bien que je ne le reconnus pas. Il n'attendit pas une seconde de plus pour bondir sur mon ex-copain et lui décrocher un coup de poing. Un cri de stupeur m'échappa tandis que je me jetai sur eux pour tenter de les séparer. Liam se releva, plaqua mon meilleur ami au sol puis le roua de coups. Je demeurais trop faible face à eux et incapable de les séparer.
— Arrêtez tout de suite ! je criai en espérant qu'ils allaient m'écouter.
— Je vais te tuer ! protesta Evan fou de rage à l'intention de son ennemi.
Mon ex-copain n'y allait pas de main morte et le visage déjà mutilé de mon meilleur ami s'empirait progressivement. Liam détenait l'ascendant et plus rien ne semblait pourvoir l'arrêter. La haine émanait de son regard comme s'il avait attendu sa vengeance depuis un long moment. J'agrippai alors le bras de celui-ci pour le faire lâcher sa prise mais je fus projetée en arrière et ma tête se cogna contre le coin du comptoir. Une douleur vive apparut à cet endroit mais je n'y prêtai pas attention, bien trop occupée à séparer ces deux idiots.
Mes cris finirent finalement par attirer mon père jusqu'ici. Il attrapa le brun par le col de son visage pour laisser la chance à mon meilleur ami de se relever. Liam se débattit pour se soustraire de l'emprise de mon géniteur qui semblait furieux.
— Ce ne sont pas des manières, jeunes hommes ! Cette cérémonie est en l'honneur de ma défunte femme, ce n'est pas une cour de récréation. C'est le premier et dernier avertissement.
Mon père dévisagea tour à tour les deux bagarreurs puis repartit vers le salon. Evan semblait calmé malgré que je lus en lui une certaine colère qui menaçait d'éclater à tout moment, comme une bombe à retardement. Je demeurais très déçue de leurs attitudes. Ils n'étaient même pas capables de se maîtriser l'espace d'une soirée. Liam qui certifiait pourtant avoir changé, me prouvait le contraire dans la façon dont il provoquait Evan qui celui-ci, tombait systématiquement dans son piège.
— Liam tu ferais mieux de partir, annonçai-je d'un ton ferme. Toi aussi, Evan, ajoutai-je lorsque je voyais que celui-ci affichait une mine fière. Vous me décevez beaucoup. Vous m'aviez pourtant promis de bien vous tenir.
- Allison... tenta le blond.
- J'ai dit : DEHORS !
Mon ex-copain tenta de protester mais je ne leur laissai aucune chance d'échapper à leur sort. Ils prirent alors le chemin de la sortie. Je restai un instant seule, dans la cuisine, pour me remettre de mes émotions. Je ne détenais aucune envie de rester ici, entourée de tous ces gens, alors je me précipitai vers l'escalier en marbre, traversant le séjour bondé de monde. J'ignorai les quelques voix qui m'appelaient et fuis à l'étage. Ma route continua vers la salle de bain plongée dans le noir, dans le but de me débarbouiller. Une faible lumière filtrait à travers les rideaux. Je me tenais devant le miroir et inspectais mon reflet. Je ne percevais plus qu'une fille dont la vie devenait trop douloureuse pour être vécue. Je n'aurais jamais voulu avoir à porter cette robe noire et simuler que tout allait bien. Que je tenais le coup. Que mon cœur n'était pas en miettes...
Un bruit surgit derrière moi et dans le reflet de la glace, la carrure de l'homme vêtu de noir se dessina. Il portait un jean sombre et un gilet à capuche noir. Pour la première fois sa tenue s'accordait au dress code et il avait dû entrer sans problème dans la maison. Sans cultiver la curiosité. Les voix à l'étage inférieur résonnaient au loin mais dans cette pièce, le silence écrasant flottait dans l'air. Il s'approcha lentement de moi et sans un mot, me serra dans ses bras. Je me réfugiai dans son parfum familier, son étreinte réconfortante et son amour inconditionnel. Je me libérai, évacuant toutes les larmes restantes, sans en avoir honte.
Lorsqu'il se détacha de moi après plusieurs minutes, son index releva mon menton et il fondit sur mes lèvres. Nos bouches s'étreignirent dans une danse endiablée en signe de pardon. Il recueillait chacune de mes souffrances, pansait chacune de mes blessures et recollait chaque morceau de mon âme. Je goûtai à ses lèvres qui parurent différentes, comme si la douleur du moment rendait ce baiser d'autant plus désespéré. Mes dents mordirent sa lèvre inférieure et je savourai ce sentiment d'acharnement et de désillusion. Puis tel un mirage, il disparut à nouveau dans l'obscurité en me laissant seule face à ces murs qui semblaient s'écrouler tout autour de moi.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top