19. Privation et dépendance

[ Bring Me The Horizon - Can You Feel My Heart ]

• Hello ! Je reviens après un petit moment d'absence, plus motivée que jamais ! Je voulais juste vous remercier pour les 2k de lectures <3 Et je vous annonce également que j'ai officiellement dépassé la barrière des 50 000 mots ! Nous sommes au tiers de l'histoire et j'ai hâte de vous faire découvrir la suite ! Bonne lecture !!

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Quatre jours. Quatre longues journées depuis que l'homme m'avait dispensé de ses visites quotidiennes. Le temps me parut terriblement lent et l'attente, interminable. Chaque soir, je me retrouvais à espérer le sentir près de moi, lorsque je tâterai l'autre côté du lit. Seulement un vide, béant et chimérique, ne m'accueillait dans ces draps froids. Il était présent dans chacun de mes rêves, comme si le manque me rongeait les entrailles et creusait des trous dans mon âme que seul lui demeurait apte à combler. Depuis quelques nuits, je veillais à laisser ma porte ouverte avec toujours ce désire qu'il revienne au plus vite, malgré que la peur qu'il y renonce me tiraillait constamment.

Dans le passé, quand toute cette histoire avait débuté, je me serais sentie soulagée de ne plus avoir cet homme qui me harcelait. Je souhaitais m'en débarrasser. Échapper à son contrôle. Mon premier plan avait lamentablement échoué et le second, j'en étais moi-même la cause. Mes sentiments, du moins... Ils avaient altéré ma vision sur la situation et je me retrouvais dépourvue de toute raison. Mon cœur me criait ce besoin inlassable de le sentir, de le toucher... Qu'il soit mien.

Lorsque je le découvris ce jour-là campé sur mon lit, mon cœur s'arrêta de battre le temps d'un instant. Mes yeux se recouvrirent d'un voile brillant et je ne pus contenir l'émotion qui me submergea. Un mélange de soulagement et de rage tourbillonnait en moi et je restai là, devant lui, sans bouger. Durant les premiers jours, mon sentiment d'être perdue me faisait ne désirer qu'une chose : son retour. Au fil du temps, j'avais nourris une colère envers lui, pour m'avoir abandonnée à son tour, alors qu'il me répétait que je demeurais ce qu'il détenait de plus cher. Donc, en écoutant cette part de moi furieuse, je le contournai et me réfugiai à l'extérieur sur mon petit balcon.

En rentrant en cette fin d'après-midi, bien qu'une infime once d'espoir persistait, je ne m'attendais pas le moins du monde à ce qu'il daigne enfin à se montrer. Mon premier réflexe fut de vouloir lui sauter dans les bras, pour m'assurer de sa chair sous mes doigts, et que tout ça demeurait bien réel mais je n'envisageais que la possibilité de l'ignorer, guidée aveuglément par ma rancune. Je chopai son paquet sur la rembarde et en extirpai une cigarette que je coinçai entre me lèvres. Avec son briquet à proximité, je l'allumai. Quand la fumée arriva à ma gorge, je me retins de pousser une quinte de toux pour rester crédible. Toute ma frustration s'évapora dans le ciel, en même temps que je recrachais la fumée. Je ne fus pas surprise de le discerner derrière moi car je l'avais aperçu me suivre du regard un peu plus tôt avec trouble, lorsque j'avais royalement pris soin de ne lui adresser aucun mot.

Il bondit sur moi et m'arracha la cigarette dont j'inhalais le poison, simplement pour l'énerver. Je ne fumais pas et à vrai dire, cela ne m'avait jamais attiré. Je savais qu'il n'approuverait pas cette idée et c'était bien ce qui me plaisait. Je souhaitais lui rendre la monnaie de sa pièce. Il méritait encore pire pour toutes ces blessures qu'il m'avait infligé au moment où j'avais le plus besoin de lui. Je possédais une irrésistible envie d'égaliser nos positions, même si je fus presque certaine qu'il n'existait pas égale douleur à celle que je renfermais et dont je ne pouvais me soustraire. Ma clope finit écrasée sous la semelle de sa chaussure, accompagnée de grognements agacés.

Mon attention toujours rivée droit devant moi, la mâchoire crispée, je retournai dans ma chambre en le bousculant de l'épaule au passage. Je m'allongeai sur mon matelas contre la tête de lit, les jambes tendues et croisées, et m'emparai du livre trônant sur ma table de nuit que j'ouvris à une page au hasard pour simuler mon occupation. Je le vis du coin de l'oeil se poster face à moi, appuyé contre mon bureau, les bras et les jambes croisés. Je sentais mes joues brûler sous son regard. L'homme m'observa pendant un court instant avant de prendre la parole.

- As-tu fini de jouer à l'enfant, Allison ?

Je ne répondis pas et ne relevai pas non plus les yeux de mon bouquin.

- Tu comptes rester muette ? s'impatienta-t-il.

Je parcourais les lignes sans même lire ce qui y était écrit. Toute ma concentration se dirigeait vers ma détermination à le négliger à mon tour. Je tournai une page et soupirai bruyamment pour marquer mon exaspération.

- Mademoiselle va m'ignorer encore longtemps ? il cracha enfin pour me faire réagir.

- Aussi longtemps que je le voudrais, affirmai-je avec détachement.

Sa patience arriva à bout car il se déplaça d'un pas rapide pour venir me chevaucher. Je contenais ma peur, le souffle démesuré, pour ne pas trahir ma faiblesse. D'une main, il empoigna ma chevelure pour me forcer à relever la tête vers lui. Je gardai les yeux baissés par fierté.

- Ne me parles pas comme ça ! Je crois que tu oublies à qui tu t'adresses, cracha-t-il d'une voix basse mais remplie de colère.

Je déglutis difficilement quand il me relâcha. Ma vue se troubla mais je ravalai ma tristesse pour ne pas lui laisser ce plaisir. Je me levai en abandonnant le livre sur mon lit et sortis de la pièce. Je foulai le sol à grandes enjambées jusqu'à rejoindre la cuisine pour me servir de l'eau. Ma main trembla lorsque je portai le verre à mes lèvres, dont j'en avalai une longue gorgée. Ma bouche sèche reprit vie après quelques secondes. Mon corps refusait de bouger et je restai là, cinq minutes de plus, le temps nécessaire pour reprendre mes esprits et me préparer à l'affronter.

Quand je regagnai la chambre, mon téléphone dont l'écran s'allumait m'interpella. Je le saisis sur mon bureau et ouvris les notifications. Elles venaient toutes de ma génitrice, sans exception.

« Ma chérie, pourquoi tu ne me rappelles pas ? »

« Réponds-moi... »

« Tu m'en veux toujours ? »

Les messages se succédaient, tous similaires les uns aux autres. Je ne pris pas la peine de tous les lire et les effaçai sans remords. Dos à lui, j'entendis le sommier craquer et ses pas traîner sur le parquet. Un frisson familier me parcoura l'échine tandis que je sentis ses doigts froids retracer la courbe de mon cou. Il prit soin de décaler mes cheveux avant de déposer un baiser tiède sur ma nuque.

- Tu vas finir par me dire ce qui te prend depuis quelques jours, exigea l'homme plus calmement. Devrais-je employer une autre manière pour te faire cracher le morceau ? Je pense pourtant t'avoir laissé assez de temps... ,chuchota-t-il au creux de mon oreille suavement.

J'hochai la tête négativement.

- Bien.

Ses mains dévièrent jusqu'à mes hanches qu'il agrippa possessivement. Aussitôt, la sensation de sa peau contre la mienne me fit oublier toutes mes résolutions. Elles partirent en fumée au moment où il pressa son corps contre le mien. Je soupirai d'aise en le sentant aussi proche, tant j'en avais souvent rêvé ces derniers jours.

- Ce sont les messages de ta mère, qui te mettent dans cet état là ? il supposa d'une voix claire.

Mes mots restèrent en suspend dans ma gorge tant ses paroles me choquèrent. Je n'y croyais pas ! Il attendit ma réponse qui ne vint pas de suite. Je pris un instant pour assimiler cette information, qu'il n'était pas censé connaître. Encore une fois, il empiétait sur ma vie privée. Je vis rouge.

- T'as fouillé dans mon téléphone !

Je lui criai ce reproche en pleine face, ou du moins, à la capuche rabattu sur son visage. À cet instant, j'aurais tout donné pour voir son visage mais je pouvais parier que ses traits devaient se tendre et sa mâchoire, se crisper.

- Baisses d'un ton, tu veux ! Et ne fais pas l'offusquée, je sais tout de toi... Maintenant, réponds à ma question, ordonna-t-il sereinement. Ne me mens pas cette fois. C'est à cause d'elle ?

Ma main partit automatiquement d'elle-même et vint rencontrer sa joue. Je le frappai au visage et sa tête fut déportée légèrement vers la droite sous la violence de l'impact. J'avais conscience de réagir de façon brutale, mais je voulais lui administrer chacune des souffrances que j'avais pu ressentir à cause de lui. Depuis le début, jusqu'à ce moment précis. Malheureusement, sa capuche amortit le coup, bien que je réussis à atteindre sa joue. Il s'empressa de réajuster son accoutrement dans le but de préserver son identité. Je ne me contrôlais plus et déversais toute la rage que je contenais en moi ces derniers temps.

- Putain ! J'hallucine, vas te faire foutre ! m'insurgeai-je encore.

L'homme ne bougea pas d'un poil tandis que je lui martelais le torse. Il supporta tous mes coups, en restant stoïque face à moi. Il encaissa mes insultes, mes cris, mes excès de rage sans pour autant me retenir. J'éprouvais le besoin irrépressible d'évacuer ces sentiments qui s'entremêlaient, se tordaient et m'étouffaient tel un nœud dans ma poitrine.

- Dégage de chez moi, espèce de psychopathe ! Je ne veux plus te revoir ici ! Jamais !

Je continuais de hurler, de me révolter, de m'exprimer et le fait qu'il ne réagisse pas me fit redoubler de colère. Je sortis définitivement de mes gonds. Je m'écartai, reculai pour instaurer de la distance entre nous comme pour me protéger de lui. Il incarnait ma plus grande peur mais demeurait aussi mon point d'ancrage. Il était à la fois la cause et le remède à cette souffrance logée dans ma poitrine. Je le détestais autant que j'avais besoin de lui. Cette constatation me fit frissonner.

- Fous le camp, sinon j'appelle les flics !

En un clin d'œil, il se retrouva près de moi. Quand j'essayai de faire encore un pas en arrière, je manquai de basculer en sentant la bordure du lit au niveau de ma jambe. Sa respiration s'accéléra considérablement et je compris qu'il tentait de se maîtriser. Je crus pendant un instant qu'il ne ferait rien, jusqu'à ce qu'il m'empoigne par l'avant-bras avec force. Je grimaçai de douleur. L'homme me tira avec désinvolture et me plaqua d'un coup sec contre le mur de ma chambre. Sous le choc, mon crâne heurta la paroi dans un bruit sourd. Des picotement se firent ressentir dans cette partie là de mon corps et je ne doutais pas de l'énorme bosse dont j'écoperai probablement demain. Sa patience parut trouver ses limites car il satura mes poignets de ses mains pour m'empêcher toute autre mouvement.

- Rentre-toi bien dans le crâne une fois pour toute que tu m'appartiens, Allison. Plus vite tu t'y feras, mieux ce sera, souffla-t-il tellement près de moi que je pouvais respirer son parfum qui me chatouillait les narines.

- Je te conseille vivement de me lâcher, articulai-je durement.

La pression sur mes poignets s'affaiblit peu à peu. Je ne bougeai cependant pas, le corps encore paralysé par la crainte. L'homme arpenta la chambre nerveusement après m'avoir libéré. Ma lèvre inférieure tremblait au même rythme que les battements de mon coeur. Dans un premier temps, je demeurais effrayée par ces pulsions dont il faisait preuve et qui menaçaient quiconque qui se trouvait sur son chemin. Ensuite, je perçus aussitôt une once de culpabilité dans la manière dont il foulait le sol, l'air tracassé. Je pouvais déchiffrer tous les regrets qu'il entassait lorsqu'il laissait libre cours à sa colère. Il soufflait constamment le chaud et le froid et cela me rendait dingue. Je compris que mon comportement le désemparait. Il ignorait comment réagir. Chaque fois que je le contredisais, il utilisait la force. Il souhaitait que j'aie peur de lui, que je le craigne. Je savais qu'il n'oserait jamais me faire de mal pour autant. Ce n'était qu'une illusion. Cette frayeur qu'il voulait que j'entretienne à son égard n'existait pas. Il s'en servait pour acquérir mon obéissance.

Le corps flasque, je me rassis sur le matelas, dos à lui. Ne pouvant plus me contenir plus longtemps, une larme roula sur ma joue silencieusement. Puis une autre. J'éclatai en sanglots.

- Que s'est-il passé, reprit-il d'une douceur déconcertante.

- Rien, dis-je.

- Allison.

Son ton dur me dissuada de le contredire à nouveau. J'essuyai mes larmes avec la manche de mon pull et repris d'une voix plus distincte et maîtrisée :

- Une énième dispute avec ma mère...

Ce n'était pas la première fois que ma mère me disait de telles atrocités. La différence était que d'habitude, je n'y portais aucun intérêt. Je m'efforçais de passer à côté mais cette fois-ci, ce fut la goutte de trop. Je restais sa fille et entendre de tels propos de la bouche de sa mère ne pouvait qu'être blessant. Une part de moi ne pouvait pas s'empêcher de croire à cette vérité. Peut-être que j'étais réellement ainsi, que les gens me voyaient également tel qu'elle me décrivait... Égoïste.

L'homme vint se poster à mes pieds, accroupis. Je pus ressentir la rage émaner de chacun de ses pores. Ses mains capturèrent les miennes et il en caressa le dos délicatement afin de me réconforter tandis que je continuais de déverser un flot important de larmes. Je tentais en vain de cacher mon visage humide dans mon épaule. J'avais honte de me montrer aussi faible, aussi fragile... Mais je ne pouvais pas exprimer le bien fou que me procurait le fait d'évacuer mes peurs et mes angoisses.

- Qu'a-t-elle dit ? m'interrogea mon protecteur sur les nerfs.

J'échappai un rire, irritée par toutes ces questions. Rien qu'y penser me mettait dans un affreux état, alors poser des mots dessus, je m'en sentais incapable. Je désirais juste tout oublier et tirer une croix dessus mais je savais que l'homme ne lâcherait pas l'affaire aussi facilement.

- Elle me déteste. C'est bon, tu es content ? répondis-je avec insolence.

Par souffrance, je ressentais le besoin de m'en prendre à quelqu'un. De trouver une cible pour lui rejeter toute cette douleur. Ses mains se détachèrent des miennes pour venir se poser à plat sur mes cuisses. Il les pressa légèrement pour attirer mon attention.

- Regarde-moi, Allison, ordonna-t-il d'un ton sec.

Je fis ce qu'il me demandait. Un sacré paradoxe, au vu de sa capuche qui m'empêchait justement de faire réellement ce qu'il exigeait. Je fixai tout de même le tissu noir. Bien que je me concentrais pour tarir mes larmes, je n'y parvins pas. Cette pression descendait et broyait mes intestins au fur et à mesures que les secondes passaient. Je gémis de douleur.

- Allison...

- J'ai mal, dis-je en me tordant.

- Respire, me souffla-t-il.

- J'y arrive pas... essayai-je d'articuler entre deux suffocations.

J'ai tellement mal...

Ces symptômes ne m'étaient pas inconnus. Je savais reconnaître une crise d'angoisse lorsque cela m'arrivait. J'en étais souvent spectatrice car je n'avais jamais trouvé un moyen de les arrêter et donc, je ne faisais qu'attendre la fin. Je me contentais d'encaisser les coups qu'un être imaginaire semblait m'administrer. Dans l'estomac, dans les jambes, tout mon corps y passait. Une force incontrôlable paraissait m'étrangler, me lacérer le cou avec une corde pour me contraindre à la mort.

- J'arrive plus à respirer... J'ai l'impression que je vais mourir, m'effondrai-je le souffle coupé.

J'ai tellement mal...

- Tu ne vas pas mourir, déclara-t-il en encadrant mon visage. Tu fais simplement une crise d'angoisse. Commence par te calmer...

J'essayais de parler mais ma voix restait bloquée. Cette boule de désespoir qui m'obstruait la gorge m'étouffait peu à peu. Bientôt, l'air ne parvint plus à rentrer dans mes poumons et je paniquai. Je me forçai à inspirer de grandes bouffées d'air, malgré que cette masse informe faisait toujours barrière dans ma gorge.

- C'est bien. Inspire, dit-il en reproduisant le geste, puis expire. Imites-moi. Essaie de caler ta respiration sur la mienne.

Je ne vais pas y arriver, j'ai beaucoup trop mal...

Au bout de quelques minutes, je parvins à retrouver un rythme cardiaque décent, ainsi qu'un souffle régulier. Il me laissa un instant pour me calmer et quand il jugea que c'était bon, il satura mon menton entre son index et son pouce. Le silence se rabattut dans la pièce mais je pouvais affirmer qu'il ne me laisserait pas m'en tirer indemne.

- Pourquoi l'écoutes-tu ?

Je baissai les yeux. La raison était qu'elle demeurait tout simplement ma mère, rien de plus. J'avais toujours cru en tout ce qu'elle me disait. D'une certaine manière, j'avais toujours essayé de faire en sorte de lui plaire, de la rendre fière de moi, ou simplement souhaité entendre des compliments prononcés de sa bouche à mon égard.

- Parce qu'elle l'a toujours répété, murmurai-je. Je déteste cette part de moi mais c'est ce que je suis : un monstre, confiai-je en reprenant les mots de ma génitrice. Je suis égoïste.

Il pinça mes joues pour me reprendre à l'ordre.

- Je ne veux plus t'entendre dire ça, compris ? Tu n'es pas un monstre ! Tout le monde à une part d'ombre, et tu es loin d'être la pire, assura l'homme.

- Comment tu peux en être si sûr ?

- Pour la simple et bonne raison que tu as le diable devant toi.

Mon pouls devint anormalement rapide lorsqu'il prononça cette phrase. Je l'avais déjà envisagé dans le passé comme un prédateur, mais jamais je ne crus que l'obscurité qui régnait en lui fut égal à celle du diable. Je le percevais plutôt comme mon sauveur. Mon repère. Il était le seul à comprendre qui j'étais vraiment, à l'intérieur... Il connaissait mes plus sombres secrets et ne me jugeait pas. Dans un sens, nous étions pareils. Je l'acceptais et par dessus tout, je l'aimais, malgré ses vices.

- Il est plus moi-même que je ne le suis. De quoi que soient faites nos âmes...

- ... La sienne et la mienne sont pareilles, il termina à mon plus grand étonnement.

Je lui souris. Le déchirement dans ma poitrine se refermait lentement, grâce à lui. Une fois de plus, il m'avait secouru. Je portai nos mains entrelacées à ma bouche pour y déposer un baiser sur la sienne. Ce simple geste parut lui plaire énormément. Il se releva et observa un moment le paysage par la porte-fenêtre avant de briser à nouveau le silence.

- Comment va ta tête ? s'inquiéta-t-il soudainement.

- Je vais bien, garantis-je.

- Laisse-moi voir ça de plus près.

Il s'approcha et tâta la zone avec culpabilité. Ses doigts s'immiscèrent dans mon cuir-chevelu à la recherche d'une potentielle bosse qu'il ne parut pas trouver. Son soulagement fut perceptible à cette constatation. J'eus l'impression d'être une enfant, ce qui ne me plut pas vraiment. Je le repoussai, en lui affirmant une nouvelle fois que je me tenais bien.

- Je voulais en être certain, dit-il en caressant ma bouche de son pouce.

Même si ces dernières minutes réussirent à me faire changer d'avis, je n'avais pas encore complètement oublié le fait qu'il ait pu me laisser seule aussi longtemps. Je voulais lui faire savoir à quel point cela m'avait blessée, à quel point son absence m'était insupportable, combien j'avais besoin de lui...

- Je pensais que tu ne reviendrait plus, confiai-je avec chagrin.

Il s'immobilisa un instant, puis releva ma tête.

- Tu pensais sincèrement que j'allais pouvoir te laisser aussi facilement ? Jamais, tu m'entends ? Jamais je ne te laisserai repartir... Tu es à moi, à présent.

Ses paroles me rassuraient mais cette crainte viscérale qu'il change un jour de décision, persistait au fond de moi. Un matin, il se réveillera et se rendra compte qu'il y a un tas d'autres filles, toutes plus belles les unes que les autres, et il partira. Il rompra sa promesse. Car les promesses sont faites pour être brisées, car sinon, quel est l'intérêt de jurer sur une chose dont tu sais pertinemment que tu tiendras parole ?

- Ne m'abandonne pas encore une fois, je t'en supplie...

Je fermai les yeux et il m'embrassa passionnément. Nos lèvres qui fusionnaient étaient comme une douce musique réparatrice. À l'instant où elles rentraient en contact, tous mes maux s'estompaient. Il ne restait que le moment présent. Lui et moi, aussi toxique que notre relation pouvait l'être. Je savourai d'autant plus le goût de la déchéance, tant qu'il en était encore temps. Toutes les bonnes choses avaient une fin et le souffle court, il rompit le lien.

- Concernant ta mère, je ne veux plus que tu la vois. Je ne permettrai jamais à quiconque de blesser ce qui m'appartient. D'autant plus la femme que j'aime, continua-t-il en reprenant la conversation là où elle s'était arrêtée.

- C'est ma mère ! Tu ne peux pas tout contrôler, je...

Il mit un terme à mes protestations d'un doigt sur ma bouche. Je le dévisageai.

- Allison, ne me forces pas à me répéter. D'accord, mon amour ? Je ne laisserai personne te traiter ainsi. Si quelqu'un ose te faire du mal, il en paiera les conséquences. Ne doutes plus jamais de toi. Tu es la plus pure et merveilleuse femme dont je puisse rêver.

Les lèvres humides de mon ange noir trouvèrent leur place sur mon front, tandis qu'il me serrait contre son corps, m'emportant dans ses ténèbres avec lui.


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