15. Dîner de famille
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La main sur la sonnette, j'hésitai un instant en vérifiant une dernière fois mon allure, puis me décidai enfin à sonner – chose complètement ridicule puisque c'était également chez moi. Je ne m'y sentais plus comme tel depuis que j'avais quitté le cocon familial. Sans trop avoir le choix, je m'étais rendue jusqu'ici à reculons. L'heure sur mon téléphone m'informa que je demeurais en retard de quelques minutes – un scandale pour ma mère – mais je possédais une bonne raison ; toute cette préparation pour tenter de ressembler à une fille plus raffinée, ce que je n'étais pas, me demandait plusieurs heures. Le résultat ne me convainquait pas mais je ne pensais pas pouvoir faire mieux. Pour l'occasion, j'avais enfilé une robe bleu nuit retrouvée au fond de mon placard et que je n'avais pas porté depuis plusieurs mois. Cela remontait sûrement au dernier dîner au restaurant où à la dernière réception que mes parents avaient organisé l'année dernière. Elle était ridiculement longue et me compressait affreusement.
Le claquement des talons de ma mère résonna de l'autre côté de la porte et le poids sur ma poitrine ne fit que s'amplifier. Elle apparut devant moi, ses cheveux blonds relevés en un chignon strict et vêtue d'une élégante robe, cintrée, qui lui arrivait sous le genou, noir comme à son habitude. Son regard souligné de ses sourcils parfaitement épilés et maquillés me jaugea au rayon X. Ma génitrice finit par se décaler pour me laisser entrer.
- Mon Dieux, s'écria ma mère. Arrange-moi cette coiffure ! commanda-t-elle en saisissant avec précipitation les mèches rebelles de ma queue de cheval avec cet air outré sur le visage.
Sous le regard sévère de ma génitrice, je plaquai comme je pus mes petits cheveux pour paraître plus présentable. Cela ne m'étonna guère. Pourtant, j'avais déjà fait de mon mieux pour lui ressembler : je portais une robe de snobe, m'étais attaché les cheveux et par dessus tout, j'avais fait un effort en me maquillant plus lourdement. Mon visage restait figé sous l'épaisse couche de fond de teint. Je grognai.
- Tu aurais pus faire un effort pour la tenue Allison, bon sang ! Tu vois bien que cette robe ne te va plus... Tu es trop boudinée là dedans ! Tu devrais faire plus attention à ton poids, I already told you !
Je ne répondis pas. Cela ne servait à rien.
- Je suis étonnée, moi qui pensais que tu allais nous faire faux bon encore une fois, s'exclama-t-elle en rebroussant chemin jusqu'au salon.
Décidément, mon procès avait déjà commencé et elle ne perdait pas de temps pour entamer sa longue liste de reproches. J'accrochai ma veste au porte manteaux à l'entrée et mon attention dériva vers le meuble où je réalisai que les quelques photos de moi furent retirées. Le fait que nous ne nous entendions pas, tellement je dus déménager, les décevait et ils en gardaient une certaine rancœur. Cependant, je n'imaginais pas la grandeur de celle-ci au point de me rayer de la famille.
Je rejoignis les autres dans le séjour, où le cadre utopique me donna l'envie de vomir. Nous étions tous réunis, comme une vraie famille ! Ma sœur se trouvait sur le canapé, son fiancé à ses côtés. Morgane portait une chemise blanche et un pantalon à pince sous son blazer beige assorti à ses escarpins, eux aussi de couleur neutre. Louis, également, transpirait l'argent rien qu'à la vue de sa tenue. Il arborait une chemise blanche et un pantalon en toile, accompagné de mocassins. Ses cheveux bruns étaient peignés soigneusement. Je compris instinctivement la raison pour laquelle ma mère me réprimandait sur mon apparence : je faisais tâche dans le décor. Mon père – dont les cheveux bruns viraient progressivement au gris – prononça mon nom avec surprise quand il me vit, ce qui incita ma sœur et mon beau-frère à se retourner. Il m'ouvrît ses bras, dans lesquels je me réfugiai un peu mal à l'aise. Notre étreinte – bien que distante – dura quelques secondes puis ma mère se racla la gorge.
- Le repas est bientôt prêt, prenez place à table.
Les deux hommes finirent leurs verres de rhum et morgane son cosmopolitan, puis nous prîmes place dans la salle à manger. Mon paternel s'assit en bout de table après avoir réajusté son costume, ma sœur à sa gauche ainsi que Louis. Je m'installai en face, regrettant déjà d'être venue. J'observai rapidement la pièce d'un coup d'œil, qui n'avait pas tellement changé depuis mon départ – mis à part peut-être deux nouveaux tableaux qui avaient trouvé leur place au mur. Sinon, elle restait vaste et sophistiqué, meublée par une grande table massive au centre, entourée de chaises en cuir noir. Un canapé du même style trônait en face d'un écran plat niché dans le mur en briques qui se mariait parfaitement avec les teintes chaudes des peintures. Une fausse cheminée, un bar à alcool, et un large escalier en marbre au fond de la pièce qui donnait sur l'étage : la définition de l'ostentation.
- Tu devrais venir nous voir plus souvent, entendis-je articuler mon père d'une voix aristocratique.
Je quittai ma rêverie dans un petit sursaut pour me reconcentrer sur lui.
- J'essaierai, mentis-je avec un sourire timide sachant pertinemment que ce ne serait pas le cas.
- Tu sais très bien qu'elle ne le fera pas, Stéphane, intervint ma mère qui émergea de la cuisine avec un saladier dans les mains.
Elle le déposa sur le bois ciré de la table et entreprit de remplir nos assiettes de salade verte. Morgane plongea ses yeux dans les miens, les sourcils froncés.
- Franchement, tu me déçois Allison. Tu devrais être plus reconnaissante envers papa et maman et te montrer moins dure avec eux...
La colère monta en moi, et je déglutis difficilement, pour la contenir. Je ne répliquai pas cependant, pour ne pas gâcher le dîner. Je préférais feindre que je n'entendais pas ses paroles. Morgane prenait toujours le parti de ma mère, elles étaient pareilles. Après son obsession pour les vêtements et tous ce qui touchait de près ou de loin au superficiel, sa deuxième passion demeurait de me rendre la vie impossible.
- Alors, comment se passe le lycée ? demanda innocemment ma génitrice en sachant pertinemment que cela allait provoquer une énième dispute. Tes notes ont augmenté, j'espère... ?
- Comme sur des roulettes, ironisai-je avec un sourire provocateur.
Elle soupira et je fus en mesure de voir la petite ride entre ses sourcils s'accentuer. J'enfournai une fourchette de salade dans ma bouche, trop pleine pour parler, et ainsi mettre fin à la discussion. Je perçus dans son regard de la détermination ; elle n'allait pas me laisser tranquille tant qu'elle n'aurait pas trouvé un sujet sur lequel me gronder. Sa frustration était flagrante.
- Tu as rencontré quelqu'un, c'est pour cette raison que tu ne viens pas nous voir, assura-t-elle comme si elle en avait la preuve.
Mon corps ne réagit plus pendant un instant et mon cerveau se déconnecta. Je restai la bouche entrouverte, confuse. Soudain, la lueur dans ses yeux m'indiqua qu'elle n'en savait rien mais essayait seulement de prêcher le faux pour savoir le vrai. Je me rendis à l'évidence qu'il était impossible qu'elle sache pour l'homme qui me harcelait alors que pourtant, j'avais l'impression que notre partie sexuelle était gravée sur mon front en grosses lettres capitales. Elle n'aurait pas pu nous apercevoir ensemble dans la mesure où le seul endroit où nous nous retrouvions – quand il le décidait plutôt – était mon appartement. En dehors de lui, je ne voyais personne d'autre et elle avait connaissance des personnes qui m'entouraient et savait que seul l'amitié nous reliait. Elle bluffait.
- Katie, arrête un peu voyons, me défendit mon père.
- Non Stéphane, je suis sûre qu'elle nous cache quelque chose !
Je blêmis car en effet, je portais un lourd secret. Cette cachotterie ne se résumait pas à une simple amourette de lycéens – dont ma mère demeurait totalement contre également et si jamais ils venaient à apprendre la vérité, il ne comprendraient pas. Ils me prendraient pour une folle et m'enfermeraient dans un hôpital psychiatrique !
- Non, je ne vois personne maman, plaidai-je.
Ses yeux marrons me scrutèrent. Elle me gratifia d'un hochement de tête lourd de sens : elle ne me croyait pas mais attendait de récolter plus d'arguments. Je devais me montrer prudente à l'avenir. Je continuai à jouer avec la nourriture dans mon assiette sans vraiment manifester d'appétit. Ma mère et Morgane échangeait sur les plans de la nouvelle maison qu'elle et Louis avaient acheté récemment, située elle aussi dans un quartier huppé de la capitale. L'excitation pouvait facilement se desceller dans la voix de ma sœur.
- On pense faire construire une extension qui donnerait sur le jardin et la piscine. Une sorte de salon extérieur, pour recevoir du monde lors des beaux jours, raconta ma sœur toute joyeuse.
- Exact. Mais on doit encore finaliser le dressing, et surtout la salle de cinéma, ajouta Louis.
Ma mère s'extasia devant tous ces merveilleux projets qu'entretenaient les deux tourtereaux. Des sujets banals suivirent comme la dernière soirée à laquelle s'était rendue Morgane – celle de son amie ou bien les derniers potins du quartier sur lesquels elles ne se privèrent pas de jacasser. J'essayais de garder le fil de la conversation mais tout ces commérages me donnait un mal de tête atroce.
Enfin, pour mon plus grand plaisir, ma mère servit le plat principal. Plus vite le repas serait fini, plus vite je pourrais décamper. Mon assiette fut remplie de gigot d'agneau, encore une chose que je détestais par-dessus tout mais qui faisait fureur auprès des snobes. De toute façon, je n'avais pas faim. Je retournais la nourriture à plusieurs reprises pour donner l'impression à ma mère que je mangeais et donc éviter une autre de ses remarques.
- Ce mois-ci, nous avons explosé les ventes, annonça fièrement mon père en faisant référence à son travail. Il faut croire que plus de monde que je ne le pensais souhaitent vivre plus confortablement et nous avons même vendu des demeures hors de prix à des étrangers, à un couple d'anglais, par exemple. Ils voulaient une habitation dans laquelle loger lors de leurs nombreux séjours en France.
Ma mère le félicita avec réjouissance.
- En tout cas, pour fêter ça, David et Eric m'ont proposé un soirée poker demain soir.
Cela sonnait comme une requête attendant l'approbation de ma mère, qu'elle lui donna. Elle pouvait bien le récompenser ; après tout, son salaire de secrétaire lui rapportait une somme convenable mais tous les excès luxueux qu'elle se permettait étaient grâce à mon père. Comme le dicton « la pomme ne tombe pas loin du tronc » l'exprimait, j'avais sa copie conforme en face de moi. Morgane demeurait sa digne héritière :
- J'ai complètement oublié de vous parler de l'incroyable cadeaux que m'a offert Louis pour nos deux ans ! Il m'a surprise avec la Jeep de mes rêves ! s'écria-t-elle en faisant de grands gestes exagérés pour montrer son enthousiasme.
Morgane sortit aussitôt son téléphone pour nous exposer des photos de son ton nouveau jouet, rose pétant ! Je grimaçai. Je ne savais pas bien si c'était sa voiture, ou bien celle de Barbie... En tout cas, elle ne passera pas inaperçue avec ça... Louis sourit tendrement à ma sœur, très content que son cadeau lui plaise. Ma mère, elle, fixait les clichés avec une once de jalousie que je remarquai. Cependant, elle se ravisa et s'en tint à complimenter son beau-fils pour les jolies attentions qu'il avait envers sa fille et était sans doute fière que sa fille ait choisi un homme de la bonne société.
Le comportement de ma sœur me décevait. Certes, j'étais habituée depuis le temps avec ma mère, mais le fait que Morgane se laissait entraîner dans cet univers superficiel, dominé par le pouvoir et l'argent dans un concours de circonstance de qui sera le plus riche, me chagrinait.
- Mange, ma chérie.
Je me retournai vers mon père et je vis de l'inquiétude dans ses yeux.
- Je n'ai pas gros appétit, dis-je.
- Tu as une mine affreuse, signala ma mère en me détaillant. Tu devrais prendre exemple sur ta sœur et prendre un peu plus soin de toi... Morgane pourrait t'accompagner t'acheter de nouveaux vêtements, proposa-t-elle aussitôt.
S'il y avait bien une chose que je ne voulais surtout pas vivre, c'était de faire les boutiques avec Morgane. Je l'imaginais déjà en train de se prélasser de magasins en magasins, avec une centaine de sacs en mains. Elle me forcerait à coup sûr à changer complètement de style pour arborer celui de la fille coincée ou de la bimbo de Malibu.
- Oh oui ! Cela me ferait énormément plaisir, répondit Morgane avec exaltation mais aussi avec un brin de mépris car cela la faisait se sentir supérieure et lui donnait l'occasion de me dévisager comme une pauvre petite chose.
- Non ! Je t'assure que je n'ai besoin de rien !
- Comme tu voudras, répliqua Katie avec une grimace.
Je me complaisais dans mon style vestimentaire, assez simple. Je n'aimais pas attirer l'attention des autres, je préférais le fondre dans la masse. J'apprenais chaque jour à passer au-delà des critiques, surtout quand celles-ci provenaient de ma famille. Je ne serai jamais bien pour eux, à moins de m'aligner dans le rang des poupées et je l'avais maintenant compris. J'avais arrêté tout effort.
- Tu sais Allison... Je trouve ça normal que tu ne trouves personne tant que tu restes comme telle. C'est dommage, renchérit Morgane, tu pourrais vraiment être une jolie fille. Je pense que tu as du potentiel mais qu'il faut l'exploiter !
La fourchette que je tenais dans ma main droite retomba sur le bord de mon assiette dans un fracas assourdissant et tout le monde se tut. Pour alléger l'ambiance, ma mère évoqua le mariage de ma sœur qui approchait à grands pas.
- D'ailleurs, tu as décidé pour les arrangements de fleurs depuis la dernière fois ?
- Oui, confirma Morgane. Je vais opter pour des roses blanches et roses. Ces teintes se marient bien avec le lieu et le thème. C'est assez simple mais ce choix reste pour moi une valeur sûre... Tant que j'y pense, il faudrait prévoir une date pour aller choisir la robe d'Allison et faire les derniers essayages de la mienne !
Ma mère acquiesça. Quelques discussions plus tard, elle débarrassa la table en rassemblant toutes nos assiettes. Ma sœur entreprit de l'aider et quand je lui proposai moi aussi un coup de main, elle refusa. Mon père profita de notre intimité éphémère pour entamer une conversation avec moi.
- Comment va Evan ? questionna-t-il curieux.
- Très bien.
- Je ne l'aime pas beaucoup, celui-là, stipula ma génitrice de retour avec le dessert.
Encore quelque chose qui ne m'étonnait pas. Evan et moi l'avions parfaitement remarqué. J'avouais de pas comprendre son hostilité envers lui. Elle déposa la tarte aux fruits au centre de la table et commença à la découper. Louis se leva de sa chaise et annonça d'une voix claire :
- Je pense que c'est l'heure d'annoncer la nouvelle.
Ma sœur l'imita et se retrouva debout. Les deux se regardaient avec un sourire complice, ce qui intrigua et retint toute l'attention de mes parents. Je les fixai, moi aussi, avec un mauvais pressentiment. Pas parce que je possédais le sentiment qu'ils allaient confesser quelque chose de triste, mais bien car cela paraissait être joyeux mais que bien souvent, le bonheur n'avait pas la même définition pour nous tous. Morgane triturait ses mains nerveusement et son fiancé enlaça la sienne pour la calmer.
Nous retenions tous notre souffle. Elle prit une grande inspiration et lâcha :
- Je suis enceinte !
Mes parents hurlèrent, surpris, surtout ma mère qui cria de joie avant de ne se jeter dans les bras de sa fille. J'observai immobile mon père faire une accolade à Louis et embrasser sa fille chérie, ma génitrice, fondre en larme en répétant que c'était le plus beau jour de sa vie et qu'elle allait enfin devenir mamie. Au fond de moi, j'éprouvais aussi de l'excitation et du bonheur, mais le choc de la nouvelle me laissa perplexe.
Une fois la surprise assimilée, le calme retomba peu à peu dans la pièce. Ma sœur se lança dans le récit de ses dernières semaines, comment elle avait su qu'elle était enceinte et la raison pour laquelle ils avaient gardé le secret jusqu'ici. Un des motifs demeurait son ventre qui s'arrondissait de jours en jours et que, d'ici quelques semaines lors de son mariage, elle ne pourrait plus le dissimuler. Suite à ça, ma mère me demanda de venir l'aider en cuisine et je m'exécutai. Elle me tira par le bras et me conduit dans un coin.
- Tu n'as pas l'air réjouie et heureuse de cette grossesse, m'accusa-t-elle les bras croisés. Même si ce n'est pas le cas, tu pourrais au moins faire semblant. Tu peux vraiment te montrer égoïste, Allison. I swear ! Tu n'es qu'une gamine qui joue les rebelles et parfois, j'aurais aimé avoir deux filles comme Morgane.
Les mots qu'elle venait de prononcer me touchèrent mais je n'en montrai rien. Elle fit volte-face et regagna le séjour comme si de rien n'était. Ma vue se troubla par des larmes qui menacèrent de couler mais je les réprimai. Je pris la direction de la salle de bain et m'enferma dans la pièce. Je fus prise de vertiges et je dus me retenir au mur pour ne pas m'écrouler. Des étourdissements, mon corps qui commençait à trembler, le poids sur ma poitrine... Je comprenais très bien ce qu'il m'arrivait. Je faisais une crise de panique. J'essayai de me calmer en prenant de grandes inspirations malgré mon impression de suffoquer. Je m'agrippai au lavabo et ouvris le robinet pour me passer de l'eau sur le visage.
Ma sœur était la fille parfaite aux yeux de mes parents. Elle excellait dans ses études et demeurait à présent avocate. Louis, son fiancé issu d'une famille aisée, deviendrait d'ici peu son mari. Ils avaient une jolie maison, seraient bientôt parents... Elle suivait le chemin tout tracé par ma mère, qui selon elle était signe de réussite, et deviendrait le sosie conforme de notre génitrice dans quelques années. Morgane possédait tous ce que je n'aurais jamais.
Je n'étais pas prête à sacrifier ma liberté.
Ce n'était pas tant cette constatation qui fut douloureuse, mais plutôt les paroles de ma mère. Elle m'avait avoué ce qu'elle pensait réellement de sa fille. J'étais consciente de ne pas avoir exprimé ma joie de façon très explicite mais cela ne signifiait pas que je ne demeurais pas pour autant heureuse de devenir tante. J'espérais seulement que ce petit être m'aimerait plus que sa mère, et qu'il ne verrait pas que mes mauvais côtés comme tous les autres. Peu importe ce que je faisais, ma mère ne remarquait que le mauvais en moi.
Quand je fus en meilleur forme, je retournai dans le séjour. Ma mère débouchait une bouteille de champagne pour célébrer l'évènement. Je me rassis à ma place en tâchant de rester discrète. Le couple continuait de parler de la grossesse et ma mère qui les écoutait, émerveillée, remplissait les flûtes une par une. Mon téléphone sonna et je décrochai. La voix d'Evan résonna à l'autre bout du fil :
- Je suis dans le coin, dit-t-il. J'arrive te porter secours !
Il raccrocha aussitôt sans même me laisser le temps de répliquer. Un sourire se dessina sur mes lèvres. Mon meilleur ami allait finalement me tirer d'affaire ! Quelques minutes plus tard, on toqua à la porte. Je me précipitai d'aller ouvrir. Evan se trouvait là, sur le palier, un rictus sur les lèvres. Je le pris dans mes bras pour le remercier. En entrant, il retira sa veste et me suivit jusqu'au séjour où il serra respectueusement la main de mon paternel.
- Evan, mon chou ! le salua Katherine hypocritement lorsqu'elle le vit.
Mon ami répondit avec autant de fausseté que celle dont faisait preuve ma mère et nous étouffâmes un rire complice. Ma mère ne sembla pas le notifier. Elle reprit son activité, en recherchant des inspirations pour le mariage sur internet avec ma sœur. Louis et mon père s'étaient isolés à l'extérieur pour discuter affaire. Je me tournai en direction d'Evan :
- Comment se fait-il que tu sois là ?
- Je n'étais pas loin et je me suis dit que j'allais te délivrer des griffes du lion, formula mon meilleur ami rapidement.
Il n'en dit pas plus. Le fameux secret qu'il souhaitait préserver me revint en tête et ma curiosité se réveilla. Je l'attrapai par la main et le conduisis jusqu'à l'étage. Je poussai la porte de mon ancienne chambre et j'eus la surprise de constater qu'une bonne partie de mes affaires avaient été retirées. Il ne restait plus que mon lit dans un coin de la pièce. Un bureau et de nombreux papiers occupaient tout l'espace et je compris que mon père comptait transformer cette pièce en un espace de travail. Evan parut aussi étonné que moi.
- Dis donc, ils n'ont pas attendu pour virer tous tes meubles !
J'observai les murs bleus de mon ancienne chambre. Je pris place sur mon lit où il me rejoignit. Mon silence parla pour moi.
- Alors, t'as encore eu le droit à ton procès ?
- Ce n'est rien de le dire ! confirmai-je en me laissant tomber sur le matelas. Tu ne devineras jamais... Morgane est enceinte !
Il grimaça.
- Une Morgane miniature ? Au secours ! ironisa mon meilleur ami, ce qui me fit pouffer.
Je gardai tout de même un petit air contrarié sur le visage qu'il parut apercevoir. Evan me chatouilla pour me réconforter, ce qui me déclencha une explosion de rires. Je dus le supplier pour qu'il arrête.
- Maintenant, je suis là, murmura-t-il comme une promesse.
Comme toujours, il surgissait au bon moment pour venir me délivrer.
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