Chapitre 10
C'est à mon plus grand regret que je dus de nouveau partir, laisser le petit renard seul. J'avais si peur. Demain, c'était l'école. Et s'il lui arrivait quelque chose pendant mon absence ? J'avais la boule au ventre. J'avais plus peur pour mon renard que pour la rentrée, et mes devoirs non faits. Quand je m'en souvins, je jurai. Ce n'était pas comme si j'avais trois exercices de maths à faire...
Je me retournai, regardant une dernière fois pour cette journée la petite créature rousse, blanche et noire. Son pelage semblait briller comme de l'or sous les rayons du crépuscule. Une brume nocturne commençait à s'abattre sur la forêt, estompant les contours de l'animal. Le brouillard créait ainsi un fond en bokeh.
Je partis.
Après ma douche, je montai dans ma chambre et sortis mes affaires afin de faire mes exercices. Je n'avais pas la tête à réfléchir... Pour les maths. Je réfléchissais surtout à comment montrer la technique de chasse au petit renard...
Je mordillais mon stylo, devant la page quasi-vide de mon cahier. Je n'avais même pas lu l'énoncé. Je n'en lut que la moitié, et j'écrivis des chiffres au hasard, des calculs totalement infondés. Puis je rangeai le tout dans mon cartable, et je m'allongeai mon lit, regardant les ombres bleuâtres qui se reflétaient au plafond de la pièce.
***
Le lendemain, c'était l'enfer qui venait de m'emporter. L'école. Nous étions dans une galère, désormais, car nous devrions attendre presque deux mois avant les grandes vacances... Je rêvais déjà de jouer avec Filou, dans les champs baignés par la lueur du jour... Je nous imaginais courir sur la plage, le sable chaud. Oui, il y avait une plage, en contre-bas d'une grande falaise... Je n'y allais jamais seule. Mais, si j'étais avec lui... Alors je ne serais plus seule !
Je nous imaginais nous amuser dans les dunes, les monts sableux, et trottiner dans l'eau salée. Je nous voyais, assis, les vagues roulant jusqu'à nous, en train de regarder le soleil rouge comme le feu descendre et se faire aspirer par l'océan.
Oui. J'avais hâte. Je voulais y aller maintenant.
Puis je me souvins qu'il avait une famille. Je devais l'aider à la retrouver. Mais, avant tout, je devais lui apprendre à chasser ! Comme ça, il pourrait manger quand il voudrait. Peut-être ôterait-il la vie de certains animaux... Certes. Je voulais que Filou survive.
Le temps passait longuement. Je m'ennuyais tellement en cours, alors je dessinais un renard sur mon cahier. Il fallait l'avouer, le dessin était moche et enfantin, mais ça me plaisait. Je sursautai lorsque le professeur m'interpella et me demanda d'aller au tableau... Pour corriger l'un des exercices de maths.
Je crus que je n'en allais jamais sortir vivante, mais le professeur pensa que je n'avais seulement pas compris la leçon. Heureusement !
***
Je regardais l'horizon, tentant de trouver mon renard. Oui, il était à moi, à cette époque, aussi bien que je possédais Nyx.
J'aimais la pression qui montait lorsque je l'attendais. L'enthousiasme de le voir soudainement apparaître. L'adrénaline qui me disait : Est-il toujours en vie ?
J'avais peur, j'étais joyeuse, j'étais patiente, j'étais pressée, j'étais angoissée, j'étais heureuse, tout ça à la fois. Tant de sentiments et d'émotions passaient et se relayaient dans mon cerveau, si bien que je ne savais plus ce que je pensais. Tout ce qui m'importait, c'était de le retrouver. C'était mon secret.
La main contre l'écorce du vieux sycomore, j'attendais. Enfin, il arriva. Je lui donnai donc de la viande, et il remuait légèrement la queue à la façon de notre chien. Pourtant, Filou était un renard. Le revoir me ravissait. Je passai ma main sur son dos, ma peau aspirant toute la douceur de son poil.
— Eh, salut Filou ! Tu es tellement mignon...
Le renard redressa la tête et me dévisagea de ses yeux marrons.
— Tu te souviens, hier, j'ai dis que je t'apprendrais à chasser !
Filou me répondit d'un petit cri aigu.
— Regarde, je vais te montrer !
Alors je me levai, et, comme un enfant hystérique, je me mis à sauter, comme une grenouille, les mains les premières sur le sol, faisant mine de plonger ma tête dans la terre. Filou, lui, me regardait bizarrement, comme si j'étais soudainement devenue un extra-terrestre à ses yeux.
— Tu dois sauter, la tête la première dans la terre, et attraper ta proie avec tes crocs !
Je continuais, regardant Filou d'un air joueur. Le petit renard me suivit, la tête inclinée, la langue pendante, les yeux brillants. Il se mit simplement à sautiller autour de mes mains, grattant le sol avec ses pattes. De la poussière voletait, et il finit par mordiller ma peau. Je gémis, car ses petits crocs étaient très pointus.
— Non ! Tu fais mal !
Je me remis à bondir, et le renard continua simplement à sautiller en creusant et en poussant des petites mimiques. Au final, je m'assis, tandis qu'il continuait à chercher ma main de la gueule.
— Il faut que je trouve un autre moyen de te montrer la technique de chasse...
Filou poussa ma main du bout du nez, me léchant la paume, les oreilles rabattues. J'en profitai donc pour lui grattouiller le poitrail.
— Ne t'inquiètes pas. Je vais trouver la solution.
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