1 * Coup de foudre




Dix ans plus tard

Nous nous retrouvons dans la même voiture, poussant joyeusement la chansonnette. Nos diplômes enfin en poche, nous rejoignons un camp de vacances pour quelques semaines de repos bien méritées. À l'avant, le conducteur augmente le volume de la radio tandis que nous massacrons les paroles à l'arrière.

Nous y voilà. Ce moment où plus aucune étude ne me retient nulle part. Dans quelques mois, je serai vétérinaire, comme je l'ai toujours rêvé.

Face à nous se dresse le panneau d'entrée tant attendu. Rapidement, nous sortons du véhicule et regagnons l'accueil, récupérant les clefs de notre chalet. Tandis que nous nous dirigeons vers notre logement, j'observe avec émerveillement la piscine gigantesque et ses innombrables toboggans. Les allées boisées tapissées de sable et d'aiguilles de pin. Des cabanes logeant famille et amis. Des gens qui courent partout, certains plus bronzés que d'autres. Une senteur de monoï et de crème solaire.

Sincèrement ravie, je lâche un cri de surprise devant notre maison : un superbe chalet en bois avec une terrasse immense où se déroulerons nos soirées estivales. Nous investissons la maison et nous dépêchons de choisir nos chambres. Seulement, j'admire tellement ce qui s'offre à moi que je me retrouve avec la plus petite chambre... Qu'importe.

Un lit simple est collé à une fenêtre donnant sur la forêt, formant la frontière du camping. Une petite commode me fait office de rangement. J'entends mes amis rire, cet endroit respire déjà la joie. Souriante, je déballe ma valise. L'enthousiasme s'empare de moi : je n'ai jamais eu droit à des vacances comme celles-ci. Je compte bien en profiter !

— Agathe ! s'écrie Amandine, entrant dans ma petite pièce. Viens, nous allons tester la piscine.

Agathe, vingt-cinq ans et qui s'apprête à passer les meilleures vacances de sa vie.

Sans réfléchir plus longtemps, je lâche mes affaires, enfile mon maillot de bain fleuri et les suis. Je ne cherche plus à me cacher : ils ne me font aucune remarque et j'en ai assez de me justifier à tout bout de champ... Sur le chemin, je noue mes longs cheveux bruns en un chignon flou.

Mes quatre amis prévoient déjà ce que nous allons faire durant le prochain mois. Amandine, Élise et moi-même nous sommes rencontrées sur les bancs de l'université. Les garçons, Clément et Robin, se sont plus ou moins incrustés dans notre périple qui aurait dû être 100% féminin. Nous en parlions en cours et ils ont immédiatement insisté pour nous accompagner. Évidemment, nous les connaissions d'avant et les filles ont espoir de parvenir à les séduire.

Notre joyeuse troupe s'installe sur les transats.

J'ai grandi dans une famille modeste. Par conséquent, ce genre d'activité n'a jamais fait partie de mon quotidien, contrairement à mes camarades. Presque timidement, je mets les pieds dans l'eau, observant les autres plonger la tête la première. Le cœur battant, je me lance à mon tour, goûtant à cette liberté nouvelle.

Ces dernières années ont été guidées par mes études. Je ne pouvais pas me permettre de redoubler, les moyens financiers n'auraient pas suivi. J'ai tout donné et mes années ont été couronnées de succès. Grisée par cette fierté, je nage dans cette eau transparente, m'amusant avec mes collègues.

Nous ne savons pas encore si nous allons travailler dans la même ville, ni si nous continuerons à nous côtoyer. Alors, nous préférons jouir de l'instant présent. Le soleil à son zénith nous surplombe, comme s'il était en accord avec tout cela. Ses rayons caressent mes joues avec une chaleur appréciable. Un sourire immense étire mes joues.

— Nous y voilà, soupire Élise d'un air nostalgique. Dans deux mois, nous ne serons plus étudiants. Définitivement adultes.

— Ne pense pas à ça ! s'exclame Robin, l'éclaboussant.

Cette idée me terrifie. J'ai toujours été plus ou moins livrée à moi-même. Mes parents m'ont soutenue autant qu'ils pouvaient, je ne peux rien leur reprocher. À présent, je vais devoir prendre mes décisions et en être responsable. Un frisson me parcourt l'échine : ils n'ont pas l'air d'avoir conscience de la gravité de ce que cela engendre.

Pour autant, je décide d'oublier tous ces détails et de profiter à fond de ce repos plus que mérité.

Suis-je seulement capable de lâcher prise ?

Lui

Ils m'ont traîné ici de force. J'ai beau travailler d'arrache-pied toute l'année, je n'ai pas besoin de vacances. Je préfère m'oublier dans le boulot. Installés sur la terrasse, bières fraîches à la main, je remarque que des nouveaux voisins ont investi la maisonnette jouxtant la notre. Super.

— Tu comptes faire la gueule pendant tout le séjour ? s'agace un ami.

Je puise dans l'énergie qu'il me reste afin de lui offrir un sourire que j'espère convaincant. En réalité, je n'ai pas envie de gâcher ce moment à cause de mon caractère pourri. Attablés, nous grignotons tomates cerises, saucisson et chips afin un fond musical appréciable. Ça pourrait être pire, je l'avoue. Seulement, j'aurais largement préféré rester seul chez moi. Ils sont arrivés un matin, m'obligeant à les suivre. Je me suis exécuté, mais pas de gaieté de cœur...

Un groupe de jeunes s'approche gaiement. Trois filles et deux garçons. L'une d'entre elles paraît plus en retrait. N'écoutant qu'à moitié la discussion de mes colocataires, mon regard s'avère irrémédiablement attiré vers elle, sans que je comprenne réellement pourquoi. Elle n'est pas plus belle qu'une autre : brune, élancée, des fossettes, des yeux gris. Pourtant, je ne parviens pas à détacher mon regard de son visage. Mon cœur fait une embardée incontrôlable, comprenant avant ma tête.

— Ben alors, on a craqué sur la voisine ? s'amuse un de mes camarades.

Agacé, je lui fais signe de se taire, ne souhaitant pas qu'il effraie la fille et qu'elle s'en aille. Ils ricanent de leur côté mais je ne répond pas, trop concentré.

Fronçant les sourcils, je la dévisage une fois de plus. Pas très poli, j'en conviens. Ses amis rigolent ; elle sourit simplement. Tandis qu'ils rentrent tous dans la maison, elle s'assied sur la terrasse, observant les arbres. Troublé, je continue de la regarder à la dérobée. Lorsqu'elle pose son regard sur moi, sa serviette chute de son épaule, dévoilant son corps. Et je comprends.

Sous le choc, mon rythme cardiaque s'accélère et je me remémore ce souvenir particulier. Ça ne peut être qu'elle et personne d'autre. Ce détail me renverse le cœur violemment.

La brunette cligne des yeux, perturbée par mon regard insistant. Je m'empresse de me détourner, complètement chamboulé.

— C'est ce qu'on appelle un coup de foudre, s'esclaffe mon meilleur ami.

— Pas du tout, marmonné-je, piqué au vif.

Rien qu'à mon expression, il devine que je ne rigole pas. Même si je ne suis pas du genre très joyeux en temps général, il comprend que cette fille ne m'a pas rendu fou amoureux en un battement de cil. Qu'il y a autre chose.

Perdant mes moyens, je la cherche à nouveau sauf qu'elle a disparu. Je n'ai pas rêvé, je le sais pertinemment. Les garçons ne me taquinent plus. Je pourrais leur expliquer. Néanmoins, je n'en ai pas envie. Comme si cette information devait rester entre elle et moi.

Elle ne me connaît ni d'Adam ni d'Eve, mais il faut absolument que je lui parle. Comment l'approcher sans qu'elle me prenne pour un fou ? Je me suis peut-être trompé de personne. Seulement, je n'y crois pas une seule seconde : c'était trop flagrant. Mon corps n'aurait jamais réagi de la sorte avec quelqu'un d'autre.

Depuis tout ce temps, je n'ai jamais oublié. Et elle n'en sait absolument rien alors qu'elle se trouve à quelques mètres de moi.

Merde alors.

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Bonsoir !

Tout d'abord, je tenais à vous remercier pour le retour sur le prologue. Je suis si ravie de tous vous retrouver ici, même après tout ce temps ! Alors, merci :)

Ce premier chapitre met en place les personnages et vous met de suite dans l'intrigue... J'espère qu'il vous aura plu !

Bonne soirée,

Fantine

P.S. : comme d'habitude, je n'ai pas lésiné sur la lettre "A" dans mes prénoms, comme vous pourrez le constater plus tard ...

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