4. SMITH
Les trois jours passent assez vite, à conduire et à faire des pauses de quelques heures. Léna a choisi ma compagnie pour ce voyage, au lieu de celle de Lucas. Je crois que ce qu'il lui a dit, ne lui a pas plu. Je peux la comprendre, mais sur le coup, je rejoins Lucas. Elle montrait clairement qu'il l'intéressait et puis elle m'en a déjà touché deux mots. Alors, je ne comprends pas non plus ce changement brutal. Elle, seule, le sait. Mais apparemment, elle résiste et persiste à rester renfermée sur ce sujet.
Pendant les jours qui ont suivi l'hospitalisation de Lucie, ils sont restés auprès de moi, et je ne les remercierais jamais assez pour ce qu'ils ont fait. Ces jours n'ont pas été de tout repos pour eux non plus, puisqu'un fantôme de leur passé persistait à les persécuter pendant ce laps de temps, tout comme moi.
— Je t'ai entendu parler au téléphone, en pleine nuit, ce matin, amorce Léna. C'était Lucie ?
Je hoche simplement la tête en guise de réponse, et elle reste silencieuse. J'ai l'impression que derrière son silence sans faille, elle sait. Comme s'il elle ressentait la même douleur, que je peux ressentir, que Lucie ressent en ce moment, et que Lucas a ressenti par le passé. Je le sens. Léna a dû vivre un truc moche dans son passé comme nous tous, mais elle a une capacité à cacher ses émotions dévastatrices beaucoup plus efficace et forte que nous autres. Je me demande bien comment elle fait.
Je lui jette un regard en biais, pour voir qu'elle est encore une fois plongée dans son portable, et qu'elle se mord nerveusement les ongles. J'aimerai bien savoir ce qu'elle regarde depuis des jours sur ce truc, mais je sais qu'elle ne me le dira pas. Elle est bien trop dans la réserve sur ce côté. J'ai appris à le comprendre et à l'observer pendant cette période sombre. Ses yeux retenaient tout ces tourments qui la hantaient, et les dévoraient un par un, pour qu'ils disparaissent loin.
— Un cauchemar, pas vrai ?
Sa voix est plus forte. Cette fois, elle lâche son portable, même si elle le garde à porter de main.
— Oui, encore et toujours.
Je soupire, en enclenchant mon clignotant à droite pour prendre la sortie qui va nous guider tout droit vers Mesa. Léna repose sa tête sur son bras, dont le coude est fixé sur l'embrasure de la vitre. Ses yeux sombres sont figés sur la route, qui défile machinalement sous nos regards.
Après quelques secondes de silence, elle pose une main rassurante sur la mienne, qui est restée sur la boîte de vitesse. Je m'entends laisser échapper un petit soupir. Je sens que Léna va m'être précieuse dans cette étape difficile que Lucie va devoir surmonter. Et que je vais surmonter à mon tour.
— Je pourrais lui parler, si tu veux. Les cauchemars c'est aussi mon rayon, elle lance sur un ton monocorde.
Elle ne dit rien de plus, et nos souffles restent en suspens. Je savais bien qu'elle cachait quelque chose de triste sous sa carapace, mais elle refuse encore de m'avouer la nature de cet épisode qui a bercé un moment de sa vie. Elle reste évasive, comme me l'a clairement dit Lucas, en tentant une énième tentative pour qu'elle crache le morceau et qu'elle lui fasse part de son blocage.
— Je pense que ça lui ferait du bien, effectivement. Mais laisse-moi préparer les choses avant. Je te l'ai dit, elle vient au Bal des Pompiers, mais uniquement pour me faire plaisir, on dirait. Je n'aime pas cette sensation de l'avoir obligé, je grimace.
Le Bal a lieu demain soir, et apparemment c'est une tradition dans la caserne depuis des années. Il faut y amener un cavalier ou une cavalière. Sans réfléchir, Lucie m'est apparue comme un choix évident. Mais, je pense qu'elle a accepté sous le coup de la contrainte, et je commence à culpabiliser. Bon, si elle ne veut vraiment pas y aller, nous n'irons pas. On peut très bien passer une soirée tranquille, ou ne pas se voir, si elle veut être seule.
— Je pense que c'est une très bonne idée que tu lui ais proposé d'assister au Bal avec toi, en tant que cavalière. Elle t'aura comme pilier, et ça lui permettra de se re-familiariser avec le monde extérieur. Elle en a besoin pour avancer, et elle besoin de toi aussi.
Je souffle un bon coup, elle a raison. Notre conversation se termine par un hochement de tête. Lorsque nous arrivons à Mesa, je me dirige vers la caserne, pour la déposer devant comme elle me l'a demandé. Malgré mes protestations, parce qu'il est très tard, et qu'il fait sombre, Léna têtue comme une mule, a choisi de m'ignorer.
Elle grogne un bon coup, en regardant encore une fois son portable. Cette fois-ci, je ne laisse pas passer. Je me penche vers elle, en m'arrêtant devant notre lieu de travail.
— Dany ne peut pas venir me chercher puisqu'il est sorti boire un verre avec une jeune femme très appétissante, je cite. Toi, je ne veux pas que tu me conduises jusqu'à chez moi, parce que tu dois absolument te reposer et cette décision n'est pas à discuter, attention. Et puis, seul Lucas sait où j'habite. Tout tombe mal, mais c'est plutôt bien parce qu'il n'a pas oublié de me proposer de me ramener chez moi.
Je lève les yeux ciel, que cette fille est compliquée. En la voyant s'échauffer, en mordant toujours un peu plus les peaux qui dépassent autour de chacun de ses ongles, je lui arrache la main de la bouche, pour la capturer dans la mienne. Léna me fusille du regard.
— Laisse-le te ramener. S'il y a un problème entre vous, alors parlez-en. Il faut que vous mettiez les choses au claires, Léna. Il faut que tu lui dises que tu préfères que vous restiez amis, ou je sais pas, moi. Dis-lui ce que tu as sur le coeur.
Elle me sourit sournoisement.
— Tu rejoins notre cercle privé de grands parleurs. Je suis contente pour toi, et je dois avouer que tu as peut être raison. De toute manière, je comptais sur lui.
En voyant la voiture de Lucas s'arrêter derrière la mienne, Léna descend en claquant assez fort la potière. Puis, elle baisse la tête pour pouvoir me voir et me dire quelque chose.
— Merci, et bonne nuit mon champion ! elle rit.
Je ne sais pas, mais elle a pris l'habitude de m'appeler ainsi, et j'aime bien l'idée.
— Bonne nuit Léna, et pas de bagarre, hein ?
Elle porte deux de ses doigts à son front avant de les envoyer vers moi, comme signe de salue. Je lui fais la même chose, avant de la regarder monter dans la belle Berline noire de Lucas. Une fois que c'est le cas, je roule jusqu'à mon appartement, pour me réfugier dans mon lit, non sans avoir envoyé un petit message à Lucie. Elle ne me répond pas, et je prends cela comme un bon signe. Elle dort sans doute, et je vais faire de même.
Je m'installe dans mon lit, après avoir pris une bonne douche rafraîchissante et avoir suivi les soins pour mes tatouages, à la lettre. Et c'est seulement là, que j'autorise à mon coeur de s'ouvrir et de s'écrouler dans mon être. La nuit va être longue comme toutes les autres avant celle ci. C'est pour cette raison, qu'avant de fermer les yeux pour de bon, j'observe la belle colombe tatouée sur ma peau. Lucie est avec moi. De cette manière, en me répétant ses mots, je m'endors.
Lucie est avec moi.
Elle est avec moi.
Avec moi.
Moi.
•••••
Je me réveille de bonne humeur, étrangement, ce matin. Je me prépare un café et des tartines de confiture. Mais malheureusement, ma bonne humeur disparaît presque aussitôt. Mon père m'appelle une fois, je refuse de le prendre, il va me ruiner la journée. En plus, je dois rejoindre George et Lucie. Ils ont prévu de se balader un peu aujourd'hui, et ils m'ont convié. J'ai bien senti que l'idée ne venait pas de Lucie, mais c'est une très bonne idée. En plus, ce soir, il y a le Bal.
Il me rappelle une autre fois. Puis une deuxième fois. Bon, je décroche enfin. Il ne manque pas de me faire la morale au lieu de me saluer poliment, comme le ferait une personne normale. Enfin, j'ai oublié qu'il n'en est pas une. Cet un enfoiré qui a tabassé sa femme pendant des années, jusqu'au sang.
— Dépêche-toi de mettre quelque chose de présentable, l'avocat de ta mère nous attend dans une petite heure.
Je commence à bouillir de l'intérieur, tout en me disant qu'il aurait pu m'avertir hier. Je n'en fais pas plus de cas, je n'ai pas la tête à m'engueuler avec lui. Surtout, qu'il va tout faire pour avoir le dernier mot. J'acquiesce docilement, avant de lui demander l'adresse de ce fameux M. Marreti. Une fois, que je l'ai entré dans mon portable, je ne m'éternise pas. Pas d'au revoir, mais une simple respiration.
Je m'affaire à trouver une chemise blanche propre dans ma penderie et un jeans foncé, qui donne plus d'allure que mon short de sport et mes chaussettes blanches. J'enfile ensuite des baskets Nike, vieilles de quelques années, mais bon, elles feront leur impression.
Sans perdre une minute, je me mets en route jusqu'au cabinet qui se trouve entre Mesa et Phoenix. Je reconnais au premier coup d'oeil la voiture de luxe de mon père. Il est sûrement déjà à l'intérieur, en train de m'attendre. Comment se sent-il ? Moi, je me sens mal. Mon coeur bat brutalement contre ma poitrine, et cherche désespérément à être rassuré. Je prends immédiatement une minute, après avoir coupé le moteur. Le silence me berce.
Je prends une grande inspiration, en me répétant que ce n'est pas la fin, que c'est seulement le début d'une meilleure vie pour elle. Pour ma mère. Oui, maintenant, j'en suis sûr. Elle sera mieux là-haut. Elle sera en paix, et mon père ne pourra plus jamais lui faire du mal délibérément. Il ne pourra plus jamais l'approcher, ni lui parler, ni même la toucher. Rien que pour ça, je suis content. Mais un tout petit peu.
Après avoir souri en pensant à ma mère qui doit m'observer de là-haut, si elle le peut, je descends enfin pour affronter la réalité du monde cruel. Celui où les gens finissent par mourir de toute chose, un jour ou l'autre. Il y en a qui ont plus de chance, que d'autres. Et puis, il y a cette illusion que nous donne la vie. Les gens l'aime, mais je me demande bien pourquoi. La vie est cruelle, elle nous en fait baver, et puis, elle n'est pas éternelle, au contraire de la mort. Peut être que ma mère acceptait son sort, peut être qu'elle n'avait pas peur, parce qu'elle savait que son existence serait bien meilleure après avoir donné pour les autres.
Peut-être. Si c'est le cas, je pourrai la comprendre un jour.
Je pousse les portes de ce grand bâtiment, et je remarque mon père qui est assis à l'entrée. Il me voit arriver, et immédiatement, il se lève en me faisant un signe de tête. Moi, je ne fais que le regarder.
Le cauchemar sera terminé après cela. Je n'aurai pas à le revoir ou à le croiser. Il sortira définitivement de ma vie, c'est ce que je veux. J'aurai même voulu qu'il m'abandonne à ma naissance au lieu de nous battre tout les deux, pour s'occuper et pour éliminer toute sa colère déplacée.
Un homme en costume, s'avance soudain vers nous, avant de nous serrer la main respectivement et de nous amener vers son cabinet. L'endroit me donne l'impression de suffoquer, et j'ai tout de suite envie de repartir. Mais cette étape est très importante pour moi, très importante pour mon âme scindée en deux. C'est un pas vers sa reconstruction.
Je m'assois dans la chaise qui me fait face, près de Frank. Je déteste cette proximité, mais je me dis, qu'il s'agit seulement de quelques petites heures. Après, je ne le verrai pas avant que les choses tournent au ralenti. M. Marreti ouvre un dossier devant nous, et nous montre un copie du testament de ma mère, qu'il glisse vers nous sur la surface plane du bureau. Je n'ai même pas le temps de voir ce qu'il y a marqué dessus, mon père se précipite pour le prendre. Je soupire, en croisant les bras sur ma chemise. Elle est un peu froissée, mais elle fait présentable comme le voulait mon père.
— Je vais lire avec vous, les souhaits de votre ex-épouse et votre mère, nous déclare l'avocat, d'une voix monocorde.
Je me demande comment elle faisait pour se payer un avocat, alors qu'on avait pas vraiment les moyens à l'époque. Mais cette question me paraît futile, l'instant d'après, lorsque je la coince dans un coin de ma tête. J'y reviendrais peut être plus tard, ou peut être pas. Après tout, c'est personnel.
— Elle a précisé dans son testament, qu'elle voulait une petite cérémonie sans trop de monde, juste ceux qu'il faut. Sa sœur et son mari avec leur fille, et les personnes importantes. Également, votre mère et ex-épouse, monsieur, a dit vouloir que la chanson «Safe Inside» de James Arthur, soit diffusée lors de la cérémonie à l'église. Et j'ajoute qu'elle a déclaré d'une voix basse, ce jour là, que son fils comprendrait son choix lorsqu'il entendrait les paroles.
Je reste muet tout du long, en écoutant attentivement ce qu'il me dit. Il est très sérieux et parle lentement pour être bien sûr que nous comprenions. Il ajoute que mon père est libéré de sa pension alimentaire et familiale. J'ai envie de rire à ce moment précis, mais je me retiens. Il ne versait presque rien à ma mère, alors qu'elle lui avait tout donné pendant des années. Sa seule façon de se faire pardonner avait de revenir dans nos vies comme une fleur et lui expliquer en détail les raisons de son entêtement à nous quitter. Mais avait-il expliqué en détail pourquoi il l'a battait, pourquoi il nous battait ? Je ne sais pas. Tout ce je sais, c'est qu'elle lui avait pardonné et que moi, non. Jamais. Il n'était qu'une mauvaise herbe pour moi.
— Oh, elle vous a laissé une lettre, monsieur.
Sur ces mots, il sort un bout de papier bleu, qui est plié au moins en quatre. Je l'attrape d'une main tremblante après avoir pris une inspiration silencieuse. J'aperçois mon père m'observer d'un oeil aiguisé, avant de poser la feuille sur le bureau. Je refuse de lire sa lettre devant l'homme qui ne méritait pas de partager sa vie. Aussitôt, je la glisse dans une des poches de mon jeans.
La procédure suit son cours, nous signons un tas de papier, avant de parler des dates qui ont été fixé par les pompes funèbres. La cérémonie a lieu dans l'église de Mesa, où ma mère est née, et l'enterrement se fait dans le cimetière de cette même ville. Elle a vécu son enfance ici, ses meilleurs moments comme les pires, elle y a vu son fils grandir et son amour se transformer en enfer. Elle a tout fait ici, et elle veut mettre fin à cette vie, ici également.
Nous sortons au bout de deux heures, après avoir bien discuté avec l'avocat, mais jamais nous n'avons parlé Frank et moi, même lorsque nous avons quitté tout les deux les lieux. Je l'ai regardé quitter le grand parking en faisant chauffer le moteur de luxe de sa voiture de riche. Puis, c'est seulement à ce moment là que je me suis autorisée à ouvrir cette fameuse lettre, son souvenir personnel.
Je prends immédiatement d'une main tremblante le papier bleu, et hume le parfum fruité que ma mère aimait tant avant. Je me rappelle l'avoir souvent vu le porter, tout le temps. Même dans les jours sombres. Il allait partout où elle allait.
Mon coeur rampe dans ma poitrine, tandis que je déplie la feuille, qui est bien pliée en quatre. Je reconnais l'écriture ronde et appliquée de ma mère. J'aperçois même un tâche sèche sur le coin du papier, comme si elle avait pleuré en écrivant ces quelques mots. Ce qui ne m'étonnerait pas.
Mon fils,
Je t'aime et je suis fière de toi. Tu le sais au fond, tu le sais dans ton âme. Je t'ai toujours aimé mon petit bonhomme et je m'en veux tellement de t'avoir fait souffrir. Tu sais, j'ai accepté le fait que tu t'éloignais de plus en plus de moi, chaque jour. Mais j'aimerai que tu comprennes quelque chose. Je voulais te sache que ton père n'avait pas de raison de me battre et de te battre, mais il souffrait. Il a souffert à cause d'un mal-entendu et à cause de son entêtement. Tu lui ressemble pour cela. Écoute bien, enfin,surtout lis-bien. Notre souffrance s'est faite sur un mal entendu. Le premier soir où il m'a frappé, pour la première fois, c'est parce qu'il avait détesté que tu reviennes comme un gosse hargneux. Il ne supportait pas, et puis, il me répétait sans cesse que c'était ma faute, que je l'avais trahi. Mais seulement c'était faux. A l'époque, il ne voulait pas être père, parce qu'il refusait de devenir comme le sien, qui était violent pour un rien avec sa mère. Il m'en a raconté de vilaines choses, Samuel. Je l'aimais et j'étais prête à ce sacrifice. Mais un jour, on ne sait pas correctement protégé, et tu es arrivé. C'était le plus jour de ma vie, et celui de ton père aussi. Crois le ou non, il a pleuré et t'a pris dans ses bras pour te bercer. Je pensais que tout irai bien, mais le drame est arrivé quand tu as commencé à grandir et que ta grand mère est morte soudainement. Frank n'était plus le même et ne faisait que répéter sans cesse qu'il deviendrait comme son père, qu'il était trop tard. Mais à force de se le répéter, il est devenu exactement pareil. Il est parti, il nous a quitté pour notre bien. Il en avait assez de souffrir. Il est tombé sur cette fille, et tout s'est passé très vite. J'ai souffert, mais ça tout toujours été lui. Et toi. Toi...
N'aie pas peur d'avoir des enfants, de fonder une famille, Samuel. Tu ne deviendras pas comme ton père, puisqu'au contraire de lui, tu as eu la chance d'hériter d'un grand coeur. Exploite-le, ouvre-le, découvre les choix de l'amour et n'aie pas peur de te tromper mon grand. Je serai toujours là pour t'aider, gravée sur ta peau et ton coeur. Sois heureux, Samuel. Ne néglige rien, essaie tout. Tombe et relève toi autant de fois qu'il te faudra. La vie est un combat constant, mais ça tu le sais déjà mon boxeur !
Réalise tes rêves et ne te dis jamais non.
Je t'aime,
Maman.
Les larmes coulent à flot, les vannes s'ouvrent et je ne peux pas m'arrêter de gigoter, de haïr mon père malgré le fait que ma mère ait toujours voulu le défendre. Il aurait pu ne pas devenir comme son père, mais il l'a choisi et il a gâché nos vies. Je ne pourrai jamais lui pardonner, je ne pourrai jamais plus lui parler, le voir près de moi. C'est un monstre, et je ne suis pas lui. Je ne serais jamais lui, parce que je ne veux pas, et parce que je vais me battre.
En épongeant mes larmes abondantes, je dépose un léger baiser sur la feuille bleue, adresser à ma mère.
— Je t'aime maman, plus que tu ne le crois, et plus que tu ne le verras jamais.
Je regarde un instant le ciel bleu se peindre sous mes yeux, et je deviens fous. Je pleure comme un bébé, en laissant la douleur me submerger en silence. Je pleure mon âme en peine, mais aussi ma joie de pouvoir garder le souvenir le plus précieux que je pourrai avoir de ma mère. Elle a écrit qu'elle était fière de moi, et c'est la plus belle chose que je n'ai jamais lu de sa main. Moi aussi, je suis fier d'elle. Elle a été la meilleure mère que j'aurai pu espérer. La meilleure en tout point.
Après avoir reniflé péniblement et avoir essuyé grossièrement mon visage, j'ai pris la route vers Phoenix. George m'attendait impatiemment depuis maintenant un jour, comme il me l'avait confié au téléphone.
Je suis heureux de voir que je suis important à ses yeux. Parce qu'il est la seule figure paternelle à laquelle je peux me raccrocher désespéramment. C'est le père idéal, et Lucie a tout l'or du monde avec lui. J'aurai aimé la même chose. Mais la vie tourne forcément au cauchemar pour un truc, un jour ou l'autre. Rien n'est parfait.
Lorsque j'arrive devant chez eux, je n'ai pas à frapper, puisque George m'attend sur le perron, une bière fraîche entre les mains. Je souris fièrement, avant de lui rendre son accolade et d'entrer à l'intérieur de la maison. J'aperçois Lucie assise sur une balançoire, les yeux dans le vague. Elle se balance avec ses pieds, qui sont restés ancré au sol. Sa tête est posée sur les cordes qui maintiennent le tout, et ses cheveux sont relâchés dans le vent. J'aime quand elle a les cheveux longs, c'est authentique.
George me fait asseoir dans la salle à manger, alors qu'il va se chercher du jus du fruit dans leur frigo. Je prends une gorgée de ma bière, toujours en observant les mouvements légers de Lucie.
— Elle m'a dit pour le Bal des Pompiers, ce soir, il sourit. J'avoue qu'elle est très nerveuse et ailleurs ces temps-ci, mais je sens que c'est bien pour elle, qu'elle sorte ce soir, avec toi.
— Je voulais qu'elle voit un peu de monde pour qu'elle essaie de vaincre ses craintes. Je ne sais pas si elle désire vraiment y aller, et je ne veux vraiment pas l'y obliger.
George pose sur son regard aimant sur sa fille, avant de revenir sur moi. Son sourire n'a pas bougé d'un poil.
— Elle t'attendait pour que vous alliez lui acheter une tenue pour ce soir. Elle n'a plus rien, et elle m'a parlé d'un magasin à Scottsdale qu'elle avait particulièrement aimé.
La journée que nous avons passé me défile rapidement devant les yeux, lorsque soudain, je sens une présence juste derrière moi. Je me retourne et je vois Lucie, me sourire doucement. Instantanément, elle prend place à côté de son père. Je n'avais pas vu de loin, mais elle porte un haut à manches longues. Sûrement pour cacher ses cicatrices. Mon coeur bondit à cette simple pensée.
Lucie ne me regarde pas, elle resserre nerveusement le bout de ses manches dans ses poings. Le silence est lourd et pesant.
— J'ai du bricolage à faire dans le garage, je vais vous laisser, déclare George. Pour la balade, il faudra voir cela un autre jour, il ajoute en nous faisant un clin d'oeil.
Puis, sans aucune réponse autre que mon sourire, George quitte la pièce. Lucie ne réagit pas tout de suite. Mais j'ai enfin le droit de croiser ses yeux vides et tristes, lorsque je pose ma main sur la sienne. Elle la retire vivement, avant de s'excuser nerveusement.
— Si tu ne veux pas y aller, on...
— Non ! elle lance fortement, en se triturant le bout des doigts. On va y aller, Smith. Tu ne vas pas toujours te priver pour moi, et puis de toute façon, si je reste ici, je sens que mon coeur va dessécher.
Je réagis instinctivement à ses paroles qui me prennent aux tripes. Elle souffre et je dois l'aider à affronter cette mauvaise passe. Je lui ai promis. Alors, je me lève d'un bond, en glissant mes doigts entre les siens et en silence, je l'entraîne à l'intérieur de ma voiture tout droit vers Scottsdale pour lui trouver sa tenue. Je la lui payerai, même.
— Merci Samuel, elle souffle pendant la route.
Je retiens mon souffle pendant quelques secondes, en attrapant ensuite sa main dans la mienne pour la serrer le plus fort que je peux. Lucie ne la retire pas cette fois. Non, elle respire.
On s'arrête dans les magasins où elle avait flâné, la dernière fois. Je me fais une joie de la voir toucher à tout, mais mon coeur ne résiste pas lorsqu'il sent son malaise présent. Les pièces qu'elle choisit sont toutes couvertes. Après plusieurs essayages, elle prend un slim vert taille haute, avec une chemise blanche à manches longues, qui blouse un peu et des converses blanches. Même si elle ne porte pas de robe incandescentes ni de talons vertigineux, elle est belle. Je ne manque pas de lui faire remarquer en lui murmurant à l'oreille que je la trouve magnifique dans cette tenue, tout en embrassant la veine qui palpite sur son cou. Lucie s'empourpre, et me demande si j'ai pris de la drogue avant de venir ici. Je lui dis en toute sincérité que j'ai eu un rendez vous avec l'avocat de ma mère pour son testament, elle me répète constamment qu'elle est désolée pour tout. Même lorsque nous nous arrêtons pour manger un bout sur le bord de la route.
Je la rassure en lui disant que ce n'est pas à elle d'être désolée mais bien à moi, pour avoir échoué dans tout jusqu'à maintenant. C'est bien moi, qui suis arrivé en retard, ou qui joue à l'idiot avec ceux que j'aime. Elle me sourit faiblement, comme réponse, avant de me rassurer à sa façon, en retour.
— Oui, mais au moins, tu es arrivé, elle me lance, triste.
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Coucou !! Comment allez-vous ? Moi, super, je suis très inspirée ces jours-ci. J'ai déjà créé les 8 tomes en entier. Bon le tome 1 et 2 sont déjà fait. Les idées du 3, sont couchées sur le papier et la fin approximative est faite. Pour le 4ème tome, j'ai pleins d'idées qui me trottent en tête, et elles sont aussi couchées sur le papier, et la fin approximative aussi. Pareil pour le 5ème tome, qui voit sa fin et son épilogue prendre forme. Je sais, je suis un peu folle. Pour les tomes 6, 7 et 8, les personnages sont présents, quelques dialogues sont mis, et je peux d'or et déjà vous dire, qu'il s'agira d'une suite comme je vous l'avais dit, et que vous retrouverez Lucie et Smith. Je n'en dis pas plus, mais je suis vraiment contente de voir que l'histoire prend beaucoup plus de forme et plus de place que je l'aurai cru grâce à vous. Merci infiniment !!
Alors comment avez-vous trouvé ce chapitre ?? Je sais, il n'est pas joyeux, et les chapitres à venir ne sont pas prêts d'être joyeux aussi. Ils sont plutôt moroses, mais une chose positive, c'est que nos deux personnages se rapprochent de plus en plus, du moins, normalement. Vous avez enfin le plaisir de les retrouver ensemble. Bon, dîtes moi tout mes loulous !! Les commentaires sont très importants pour moi ! Aller, je radote !
Je préfère vous prévenir, vous avez assisté à la mort de la mère de Smith, vous allez assisté maintenant à sa cérémonie et à son enterrement, c'est pour cela que les chapitres prochains seront loin d'être agréable pour vous, et pour moi. La mère de Lucie ne va pas beaucoup mieux dans ce tome, non plus. Accrochez-vous ! (Peut-être que dans quelques chapitres je vous offrirai les deux personnages que vous verrez grandir dans le tome 6. Cela vous dit de savoir ? Même si je suis sûre que vous avez des idées.)
En tout cas, préparez-vous à des nouvelles arrivées et aussi à des...départs...
Bisous !
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