36. LUCIE

Aujourd'hui, j'ai rendez-vous pour le petit déjeuner avec Charlotte, Vic, Armand et Basile ainsi que quelques personnes de mon cours de psychologie.

J'ai eu quelques semaines pour me remettre dans le bain, et dans mes cours. Des cours que j'avoue avoir oublié, mais je dois dire que ce début d'année se place plutôt bien. Je me sens bien. J'essaie de ne pas penser à ce que j'ai laissé derrière moi. De temps en temps, je me souviens, mais je chasse immédiatement ces souvenirs. Tous les jours, j'ai un appel de mon père et des nouvelles de ma mère, qui est plongée dans un profond coma. Samuel, lui aussi, m'envoie des messages que je qualifierais de quotidien.

En rentrant dans la cafétéria près de la fac, j'aperçois que tous le monde est attablés au fond de la grande salle. J'entends rire et parler fort. Soudainement, un sourire se place sur mon visage. J'aime lorsque tous le monde est de bonne humeur et que tout se passe bien. J'ai besoin que tout soit normal. Plus que tout, maintenant.

D'ailleurs, en parlant de bonne humeur, je pense à ces premières semaines que j'ai passé en compagnie de mes colocataires. Vraiment charmants. Ils sont géniaux, et il faut dire qu'avec eux, pas de prise de tête. Surtout avec Victorielle, qui laisse tout couler. En plus, Basile se rajoute des fois, pour nous embêter ou nous taquiner. A eux deux, il nous forme un très beau duo, tantôt chieur, tantôt rieur.

Une fois à la hauteur de tout ce petit monde, je mime un baiser déposé sur ma paume, pour tous le monde. Armand l'attrape de sa main, pour le poser sur sa joue, avant de me faire un petit clin d'œil. Au début, j'ai cru qu'il craquait pour moi, chose qui aurait été gênante puisque mon coeur est déjà pris, mais fort heureusement, il agit toujours de cette façon quand il respecte et aime beaucoup la personne — en tant qu'ami — donc je n'ai pas de souci à me faire.

— Viens t'asseoir, Belle aux bois dormants, plaisante Vic.

Oui, ils m'ont donné ce surnom affectif — pas que je ressemble à la Princesse Aurore, quoique... — parce que je suis toujours la dernière levée et que d'après eux, j'ai une bouille de petite marmotte au moment précis où je traverse la porte qui ouvre sur la cuisine. C'est le lieu de tous nos repas matinaux. Normalement. Ce matin, il faut croire qu'ils avaient envie d'autre chose, ou d'innover tout simplement.

Je m'assois près de Vic, qui a commandé un petit déjeuner copieux, d'après son assiette. Il s'agit de deux œufs sur le plat ornés de tranches de bacon et de pain grillé. Le tout accompagné d'un café bien fumant, qui éveille mes papilles.

— Ne t'inquiète pas, on t'a pris un café, me chuchote Vic, qui voit que je zieute sur son précieux breuvage. Par contre pour le menu, libre à toi.

Je lui souris radieusement, avant de me débarrasser de mon manteau. Même s'il fait toujours une de ces chaleur dehors, je prends mes précautions avec une petite veste en jean. C'est léger.

— J'ai pas très faim ce matin, je grimace.

— C'est à cause de l'oral sur un sujet personnel qu'on doit présenter devant toutes les premières et deuxièmes années de Master, ce matin ? m'interroge Basile.

Je déglutis en hochant hâtivement la tête. J'avais eu le temps de le passer l'année dernière, et de voir à quel point s'était stressant de passer devant autant de monde. Je me souviens encore de mon sujet. J'avais choisi de traiter sur les maladies psychologiques en tout genre. C'était assez varié. Aujourd'hui, j'ai choisi de discuter autour d'un sujet important, les causes pouvant amener un trouble psychologique chez une personne qui avant se présentait saine d'esprit, si je puis dire.

— On a déjà passé cette épreuve, Lucie. Tu avais assuré, alors cette fois, sera encore meilleure. Comme une bombe en pleine explosion, s'explique Charlotte.

Je ris nerveusement. J'aimerai bien la croire, mais la boule au creux de mon ventre ne cesse d'augmenter et surtout, elle refuse de partir.

— Si ça peut te rassurer, j'ai la trouille moi aussi, complète Basile.

Je compatis.

— Surtout qu'il devient rouge comme une écrevisse lorsqu'il est gêné, se moque gentiment Armand. J'ai vraiment hâte de voir ta tête lorsque tu vas nous expliquer ton stage que tu as effectué dans l'hôpital psychiatrique, où un gars a failli te transpercer la main avec une fourchette.

Basile rit sous la contrainte, avant de mettre une petite tape à son ami, derrière le crâne. Cette vision me fait sourire. Basile est aussi svelte qu'élégant, alors que Armand me fait penser à Samuel, avec son impressionnante carrure et son tatouage tribale sur le biceps droit. Ils sont diamétralement opposés ces deux-là, mais pourtant, rien ne leur empêche d'être meilleurs amis, et c'est vraiment génial.

— Arrête de te moquer, ce gars là, dont tu parles, avait vraiment des problèmes et je cherchais juste à l'aider. Et puis, c'est pas un souvenir que j'ai envie de garder, tu vois, se défend Basile.

Armand lui présente son poing pour que Basile le tape avec le sien, ce qu'il finit par faire après avoir poussé un soupir.

— Tu peux pas rivaliser contre moi, Blas, comme je ne peux pas m'empêcher de t'embêter, rétorque Armand.

Basile lui fait la grimace, tandis que Armand lève les yeux au ciel. C'est fou ce qu'ils sont mignons tout les deux.

— C'est beaux l'amour ! s'extasie Charlotte.

— Ta gueule ! il réprime en coeur.

Je ne peux m'empêcher de laisser un léger rire traverser mes lèvres. Après quoi, mon café arrive enfin. Je le bois d'une traite, tout en discutant avec Pauline et Gaëtan, deux élèves de mon cours, qui eux aussi vont passer devant plus de trois cent personnes. Pendant notre discussion, j'apprends que Pauline s'est épanchée sur les conséquences de maladies psychologiques sur le corps et le cerveaux. Gaëtan, lui, choisit quelque chose de plus complexe encore. Il part sur les racines de la psychologie, avec la théorie de Freud. J'avoue que leurs sujets sont très intéressants, et complémentaires avec tout ce que les élèves de première année vont présenter.

Sans réfléchir, je regarde ma montre qui affiche dix heure. Dans quelques minutes, la scène sera exposée et le public prêt à ouvrir grand ses oreilles. Rien qu'en me disant pareille chose, je sens mon palpitant accélérer méchamment le rythme.

— Ma foi, j'ai bien mangé, s'exclame Armand.

— De toute façon, tu as toujours été un glouton, et en plus, toi, tu n'as pas d'oral en vue ! Tique Basile.

Armand ronchonne et renchérit. Je n'écoute plus, tellement accaparée par mon texte qui défile dans ma tête comme s'il défilait devant mes yeux. J'entends seulement la voix lointaine de Victorielle qui se moque d'eux, en clamant le beau couple qu'ils forment. Encore une fois, les garçons répondent en coeur.

Quelques minutes plus tard, nous sortons de la cafétéria et prenons la route pour la fac. Les minutes défilent et juste avant de rentrer dans l'impressionnant amphithéâtre, je sens mon téléphone sonné à travers mon sac. Je me stoppe en chemin, m'accordant quelques secondes pour savoir qui m'a envoyé un message à cette heure. J'espère qu'il ne s'agit de rien de grave. Ce n'est surtout pas le moment.

Avant même de regarder le destinataire du message, je mets mon téléphone sur silencieux. Ensuite, je pose mes yeux sur ce qui m'intéresse vraiment. Je suis surprise mais heureuse, lorsque je vois le surnom de Samuel s'afficher. J'ouvre précipitamment le message, en voyant les élèves se précipiter à l'intérieur de l'amphithéâtre, prêts pour cette séance.

SAMUEL LE BOYFRIEND SEXY : Je sais qu'on s'est déjà souhaité une bonne journée, mais jusqu'alors, j'ignorais que tu avais un oral devant près de trois cent personnes, ce matin. Enfin bref, tout ça pour te dire gros merde Lucie. Défonce tout !

Mon sourire s'amplifie et je sens la boule d'angoisse logée dans mon ventre, légèrement diminuer. Alors que je ferme mon téléphone et que je m'apprête enfin à rentrer, mon écran s'allume. Je viens juste de recevoir un appel de Samuel. D'ailleurs, il m'a laissé un message vocal. Je fronce instantanément les sourcils.

J'inspire l'heure. Il me reste seulement trois minutes. J'ai le temps. En vitesse, j'écoute le message vocal qu'il m'a laissé. J'arrive à entendre la voix de Dany ainsi que de Lucas, qui me souhaitent tout les deux merde pour mon oral, puis arrive la voix de Samuel, que j'ai tant rêvé depuis quelques jours. Il m'embrasse fort, avant de me chuchoter les trois mots qui éveillent au plus profond mon coeur. Ceux que je lis parfois sur mon téléphone, mais qui n'ont aucun goût comparé à la façon dont il les prononce. Et lorsque j'entends mon nom les accompagner, je gémis presque. On dirait qu'il fait l'amour à mon prénom.

Sa voix m'avait terriblement manqué, et je sais que c'est entièrement de ma faute. Mais j'essaie à tout prix de laisser les émotions trop forte loin de moi, c'est pour cela, que je ne réponds pas à ses appels.

Je me ressaisis en éteignant carrément mon téléphone, puis je passe les portes, pile à l'heure. Une minute de plus et c'était cuit. Je vais m'asseoir près de Basile, qui révise son plan et ses feuilles.

— Tout va bien, Lucie ? il me demande, inquiet.

Je fronce les sourcils.

— Oui, pourquoi ?

— Tu pleures, il m'annonce doucement.

Je hausse les épaules, l'air de rien, en épongeant mes larmes. Pendant un instant, j'observe mes mains qui portent la trace d'une trop forte émotion; un flash-back de tous les moments que j'ai pu passer avec Samuel et également avec ses amis me revenant. Je suffoque intérieurement, le chagrin essayant de me rattraper. Fort heureusement, il n'y arrive pas, puisque Basile est là pour me rappeler à l'ordre.

— C'est ton tour, Lucie.

Je souffle un bon coup, avant de me lever. Tous les regards sont rivés sur moi. J'ai le trac, mais j'inspire toujours un peu plus, et purge mon courage dans les messages d'encouragements que j'ai eu, ainsi qu'à l'intérieur du regard de mes amis.

Je tremble un peu au début, mais mon oral se déroule comme je l'ai souhaité, et c'est seulement lorsque des applaudissements me parviennent que j'expire de toutes mes forces.

**

La journée se finit enfin. Accompagnée de Basile, nous empruntons le chemin de la sortie, soulagés l'un et l'autre. Lorsque je passe le patio, je ne vois même pas Charlotte arriver et me prendre dans ses bras. Elle me félicite. Je la remercie en retour tout en repensant au message de Samuel.

Quand elle me relâche, je plisse les yeux tout en la regardant. C'est à ce moment là, qu'elle se vend elle-même. Son sourire est trop éblouissant et taquin.

— C'est toi qui a prévenu Samuel de mon oral, hein ? je plaisante. Coquine, va !

— Écoute, je me suis dis que tout soutien ne ferait pas de mal. Désolée, elle fait la moue.

Je lui souris affectueusement, avant de passer un bras autour de sa taille pour un câlin.

— Merci.

Aussitôt, elle passe son bras autour de mes épaules, tout en marchant vers sa voiture. Pour les trajets, on a choisi deux voitures. Je monte souvent avec Charlotte et Victorielle, puis les gars ensemble. Ce soir, on dirait que Vic a décidé de monter avec Basile et que Armand va se retrouver tout seul à l'arrière avec nous.

— Tu as été époustouflante, tu sais. Je te l'avais bien dit de ne pas t'en faire, Lucie.

Je lève les yeux au ciel, avant de déposer mes lèvres sur sa joue. Elle glousse, avant de prendre ses clefs de voiture et d'enclencher l'ouverture de celle ci. Armand m'ouvre ma portière.

— Mademoiselle, il me salue.

Je secoue la tête, un sourire se dessinant sur mon visage.

— Bon, ne sois pas trop galant Armand, elle va prendre la grosse tête, rit Charlotte en démarrant.

— Avoue que tu es simplement jalouse, sourit ce dernier.

Elle lui envoie un regard noir dans le rétroviseur, tandis que je ricane de mon côté. Le trajet se passe dans la bonne humeur, ainsi que le retour dans l'appartement. Les garçons se mettent à jouer à la PS4. Victorielle ne tarde pas à les rejoindre pour une partie de foot. Charlotte, elle, part travailler dans sa chambre. Pendant un bref instant, j'hésite. J'ai bien avancé sur mes cours et j'ai un temps d'avance. La saison d'athlétisme va bientôt commencer, et mon corps n'est pas encore prêt.

Rapidement, j'enfile une brassière de sport, un jogging et un gilet. Les baskets aux pieds, je file vers l'entrée de l'appartement. J'attrape vite fait mon téléphone et une paire d'écouteur qui traîne sur le meuble à chaussure.

— Tu appelles au cas où, hein, s'exclame Armand.

Je fais un signe de tête, avant de prendre la porte. Une fois à l'air frais, je respire à plein poumons, puis je m'élance. Je cours en rythme, en veillant bien sur mon souffle. Durant mon parcours, je croise certains coureurs qui m'accordent un signe ou alors un sourire. Au bout d'une heure, je décide de faire une petite pause, et de seulement marcher.

En levant les yeux, je reconnais cet endroit, il m'est familier. L'immeuble qui se distingue sous mes yeux, fait écho à mes souvenirs. Mon regard, de lui-même, s'élève jusqu'à la dernière vision que j'ai de lui. Un flash-back me cloue au sol, et j'en tremble. Mon souffle est court et mes jambes ankylosées. Je ne peux pas bouger, pourtant c'est tout ce que je demande. J'ai tellement peur de revoir son visage se peindre à sa fenêtre. Heureusement, ça n'arrivera pas. Plus jamais.

Une fois mon souffle retrouvé, j'avance, les yeux toujours rivés à cette fenêtre recouverte d'un rideau. J'avance, j'avance, jusqu'à soudain me percuter contre quelque chose. Aussitôt je me rattrape à des bras musclés. On dirait plutôt que je me suis heurtée à quelqu'un. Morte de honte, je m'excuse en bredouillant. En relevant petit à petit les yeux, j'arrive à voir qu'il s'agit d'un agent de police. Encore plus la honte.

— Il n'y a pas de mal, rétorque t-il, d'une voix rauque. Vous habitez ici ?

Je bloque pendant un petit instant, puis sans réfléchir, je réponds.

— J'ai habité ici, oui.

J'aimerai me ressaisir, me taper pour avoir dit pareille connerie. Il faudrait que j'oublie tout.

— Connaissiez-vous Alban Milton ? m'interroge l'agent.

Je souffle un bon coup, avant de hocher la tête...négativement.

— Très bien, il conclue. Si vous apprenez quelque chose au sujet de cet étudiant, par quelqu'un de votre entourage qui le connaît, venez au poste de police.

Je secoue la tête, prise de vertige.

— Que s'est-il passé ? je pose, sans me retenir.

— Il s'agit là d'informations confidentielles, je ne peux vous dire que le stricte nécessaire que tout le monde raconte dans les rues. Ici, les gens sont très curieux. C'est un peu comme le téléphone arabe, mais par chance il y a d'honnêtes gens.

Mon menton tremble, mais il ne paraît pas y faire attention.

— Alban Milton était un jeune étudiant en droit, habitant au dernier étage. Il a été retrouvé mort il y a moins d'un mois, dans son appartement. Nous avons attribué une enquête, puisque sa mort reste très vague et très étrange. Nous avons quelques réticences quant aux hypothèses qui ont été soulevé. Bref, nous cherchons le plus d'informations possibles sur ce jeune homme.

— D'accord, j'arrive à répondre.

Alban est mort, il a été tué. Par Victor.

— Bonne fin de journée, il me salue avec sa casquette bleue.

Je reprends ma course, un poids sur le coeur. Le souffle court, ma poitrine se bloque. Je ne peux plus faire un pas de plus. C'est comme si j'étais clouée par le sol à cause de cette culpabilité qui me suit depuis tant d'années. Une culpabilité qui s'est intensifiée depuis quelques mois.

D'abord, il y a Alban qui refait surface dans ma vie, avec sa folie. Puis, mes sentiments pour Samuel, qui me frappent de plus en plus. Ensuite, la mort de Alban et le message véridique de Victor qui m'achèvent. Et finalement, mon départ, ma rupture avec Samuel et l'adieu à ma mère. Tout me retombe dessus. C'est comme si je crevais en tournant le dos à cet agent.

Samuel doit soigner le petit garçon en lui, et moi, la femme tourmentée, triste et battue. Prise d'un courage indomptable, je serre fort les poings et retourne sur mes pas. Avant que l'agent ne puisse rentrer dans sa voiture pour partir loin d'ici, je pose ma main sur son épaule. Celui-ci fronce les sourcils, légèrement surpris de me revoir aussi vite, puis il me sourit. Il a compris en un seul regard, la culpabilité qui me ronge et les secrets que mon coeur a longtemps voulu garder au plus profond.

Il est temps maintenant que tout explose.

Je monte dans sa voiture sans un mot, et lui devant son volant, sans aucune paroles à mon égard. Le trajet se fait vite et lorsque la façade du bâtiment de la police New Yorkaise se peint sous mes yeux, je sens comme une bulle de soulagement éclater autour de moi.

Je le suis, parcourant certains couloirs, avant de rentrer dans une pièce. La pièce où tout va se jouer.

— Asseyez-vous, m'intime t-il.

Je m'assois face à lui. Lui, qui fait quelques manipulations sur son ordinateur, sûrement pour trouver une nouvelle déposition vierge, qui ne restera certainement pas longtemps vierge. C'est le moment tant attendu. Samuel et mon père avaient raison. Il est temps que j'en parle. Je ne dois plus me taire.

— Vous voulez boire quelque chose, un verre d'eau ou alors un café, avant qu'on commence ? me propose t-il.

Je secoue la tête, avant de relever la main. Il m'accorde quelques minutes, le temps que j'envoie un message à mes colocataires et amis, pour ne pas qu'ils s'inquiètent de mon retard. Je leur dis simplement que je me suis arrêté dans un bar pour boire un verre.

— Vous êtes prête ?

Je secoue la tête pour une seconde fois, avant de prendre une grande inspiration.

— Comment vous appelez-vous ? commence t-il.

Je déglutis.

— Je m'appelle Lucie Dawson. Je suis étudiante en psychologie, et je connaissais bien Alban Milton.

Il hoche la tête, en pianotant calmement sur son clavier. J'essaie de garder mon calme, mes ongles s'enfonçant petit à petit de les paumes de mess main.

— Comment connaissiez-vous Alban Milton ?

Je serre les dents. Il faut que ça sorte. Maintenant.

— Je le connaissais parce qu'il a été mon petit copain. Oui, il a été mon petit copain, mais on s'est séparé, je précise.

Ma voix est lourde, mais elle ne tremble pas.

— Pourquoi ça ?

— Parce qu'il était violent. Lorsqu'il avait trop bu, il me tapait. Il était jaloux et possessif. Pour un rien, pour un regard de trop, ou un geste déplacé, il levait la main. Oui, il trouvait tout le temps un prétexte. Parfois même, il abusait de moi, sexuellement, mais...

Je me ravise en me grattant nerveusement la gorge.

— Il m'insultait parfois. J'ai tenté de mettre fin à mes jours, mais j'ai survécu. J'ai essayé de remonter la pente, et comme une idiote, j'ai cru à ses promesses et à son pardon. Puis, un jour, ça été la fois de trop, je l'ai quitté pour de bon.

L'agent tape chacun de mes mots sur son ordinateur. Le bruit de ses doigts sur le clavier rythme mon histoire. L'histoire de ma vie.

— Sauf qu'un beau jour, il m'a retrouvé, m'a séquestré. Je n'ai pas prévenu la police, parce que c'était bien trop dangereux, et parce que c'était vain. De nos jours, qui aide une femme battue dans l'ordre ? Qui plaide en faveur d'une femme battue qui a tué son mari parce qu'elle mourrait à petit feu ? Personne.

Je ravale ma salive avec difficulté.

— Je suis restée avec lui, j'ai espéré le guérir, mais il était déjà trop tard. Il a tenté de me tuer, parce que je le quittais une deuxième fois. Il était sous l'emprise de drogue ou alors d'alcool, je ne me rappelle pas bien de ce moment. A vrai dire, j'essaie de l'effacer de ma mémoire. Vous pouvez comprendre, n'est-ce pas ?

— Votre ex-petit copain a été retrouvé mort dans son appartement, une seringue prêt de lui, et un garrot mal foutu au bras, dont une marque suspecte sur le cou. Pensez-vous qu'il a voulu se suicider ? Pensez-vous qu'il a voulu mettre fin à ses jours, parce que vous n'étiez plus là, à ses côtés ?

Je desserre les poings, en passant discrètement ma langue sur ma lèvre supérieure. Je manque de salive, ma bouche est trop sèche.

— Je suis partie et je ne l'ai plus revu. Mise à part quelques messages venant de lui. Il avait l'air malheureux, mais je suis aux regrets de vous dire que, Alban Milton, ne s'est pas suicidé. On l'a plutôt poussé dans une spirale mortelle.

L'agent se penche sur son bureau, pour paraître plus proche de moi, et plus intimidant encore.

— Et comment le savez-vous ? Votre raisonnement pourraient expliquer certaines marques louches retrouvées sur son corps.

Je ne réfléchis même pas une seconde, je veux que ce cauchemar se termine et vite.

— Parce que je sais qui l'a tué.

••••••••••••••••••••••••••

Recoucou tout le monde !! Voilà un autre chapitre que je souhaite vous publier pour vous laisser dans le doute, dans l'interrogation...

Alors qu'en pensez-vous ? Que pensez-vous de l'aveu de Lucie ? A t-elle bien fait son affaire ? J'ai hâte d'avoir vos impressions en commentaires ! Dîtes moi tout !!!!

Bisous

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top