22. SMITH
Je me gare rapidement devant la salle de sport, et j'entre à l'intérieur pour voir que toute l'équipe attend bien sagement, assise au milieu sur des tapis. Ivan a toujours ses bandes sur les mains et ses gants sont posés près de lui. En voyant la place libre entre lui et l'un de ses amis, je m'assois sans plus attendre. C'est l'heure de la conversation importante et également, l'heure de voir par le futur, toujours plus haut.
Maintenant que je me sens bien, plus que bien, parce que Lucie est tout près de moi et qu'elle prend une place concrète pour moi, je suis prêt à voir au-dessus, à voir plus grand et plus clair. J'ai besoin de guérir ce petit garçon comme elle le dit, et rendre hommage à Jim en retapant cette grande salle. D'une certaine manière en prenant le flambeau, s'est apaiser une certaine colère en moi.
— Alors les jeunes, vous êtes prêts ? je demande.
— Plus que prêts, me répond Jack, je crois bien.
Je lui souris, content de voir et d'entendre cette motivation, qui autrefois m'alimentait nuit et jour. Un boxeur, un bon boxeur a besoin de cette motivation et de l'adrénaline pour faire face à tout et n'importe quoi. Tout compte pour un boxeur, mais surtout c'est deux choses qui se mêlent au courage.
— On a hâte de commencer à remettre sur pied cette salle. D'autant plus qu'elle a beaucoup de potentiel, suggère Avery.
J'observe l'intérieur, où des traces noirs de l'incendie restent accrochées au mur, encore. Le jour où le feu s'est déclaré, les pompiers étaient débordés et assez pressés. Alors lorsque les flammes ont été calmé et prises en charge, puis ensuite éteintes, le bâtiment est resté noir de suie pendant un long moment. Jusqu'à qu'avec des amis de Jim, de la ville, on s'arrange pour jeter les vieux débris qu'il restait et qu'on nettoie un minimum la façade. Quelques jours après Jim se faisait enterrer, et une partie de moi, avec.
— Ouais exactement, renchérit Dare. Cette salle est gigantesque, et puis je suis sûr qu'on pourrait construire une partie accueil pour suggérer différents programmes, ce genre de truc. Après on pourrait faire deux salles différentes, une avec la boxe et la musculation, et une autre avec des activités plutôt cardio comme de la zumba ou alors de la fitness. Diversifié, c'est plus de chance d'avoir un grand panel de client.
Je fronce les sourcils, en imaginant tous ces détails. Son projet est gigantesque mais il me plaît bien. En plus, il reste le bureau de Jim, là bas. La serrure est bloquée mais ça ne devrait pas poser problème. Si on réfléchit bien, les vestiaires qui donnent sur l'autre porte voisine, bloquée elle aussi, ne sont pas si mal. Il faudrait juste qu'on y fasse un tour pour voir.
— C'est le futur architecte qui parle en lui, se moque Ivan. Mais il n'a pas tord, la salle est grande et ce mur au milieu pourrait nous servir de délimitation pour deux salles.
Les souvenirs d'antan fusent. Je me rappelle de ce mur, que Jim appelait le mur des secrets. Comme la salle est séparée en deux sur la longueur, et que la salle derrière ce grand mur est bloquée elle aussi, par une porte en mauvaise état et une serrure minable, je ne sais même pas ce qui s'y cache et je n'ai même pas chercher à l'époque.
— Je pense qu'il faudrait demander à la ville une permission et sans oublier un plan bien engagé de cette salle. Je suis sûr qu'il y a pas mal de salle secrète dont on ne connaît même pas l'existence, lance Dare.
— Tu dois avoir raison Ivan, je sens l'architecte tout de suite, je ris.
Nous rions ensemble un petit moment, avant de faire un tour rapide de la salle. En tout, je compte quatre portes bloquées. Celle du bureau de Jim et des vestiaires donc, puis deux dans le mur secret. Pris d'une idée, je sors à l'extérieur pour voir si j'aperçois le mur. Je le regarde traverser à la perfection le milieu de la salle. Le hic, c'est que des palettes en bois et pleins de truc du genre, cachent l'intérieur de la pièce.
C'est vrai quand observant bien cette salle de sport, elle est immense et encore le mot est faible. Je souris rien qu'en pensant à la présence chaleureuse de Jim tous les jours. Je le revois encore passer la porte et nous saluer d'un sourire plein de gentillesse. Par contre, une fois passé les vestiaires, il se montrait tel un dur à cuir, qui voulait le meilleur avenir pour ses élèves.
— Je vais essayer de voir dans la semaine à venir pour les papiers nécessaires. On se retrouve ici, les jeunes ! je les salue poliment.
Il hoche tous la tête, et Ivan me suit jusqu'à la sortie.
— Pour la façade, je suis prêt à lui donner un petit coup de punch et pour l'intérieur aussi. Les tuyauteries seront bonnes à changer et puis je me chargerai de l'accueil à construire sur le côté, il y a de la place. Je connais pas mal de monde, enfin des amis, qui seront d'accord et partants. Par exemple, je sais que Alexandre, mon cousin, cherche une salle de sport où il pourrait exercer son métier de prof de fitness, si bien sûr l'idée de Dare te tente. Il a toujours pleins d'idées.
Je crois que je vais vraiment adorer ce mec, il en veut et cela se voit comme un nez au milieu de la figure.
— Au début quand je vous ai vu vous avancer vers moi, ce jour-là, et me parler de ce projet, je me suis demandé si je n'avais pas rêvé. Maintenant, je suis bien content de vous avoir rencontré. Les idées que vous avez, on en a bien besoin pour la suite, et pour les mains en plus, c'est d'accord. Mais avant, il va falloir convaincre la ville de ce projet.
— On viendra à la rescousse, t'inquiète pas, il m'assure.
Je lui tape un bon coup amical dans l'épaule.
— Tu veux devenir le prochain champion, non ?
Je pose cette question en toute innocence. Si ça se trouve, Ivan veut juste boxer dans un endroit qu'il sait familier et sans prise de tête. Peut-être qu'il a simplement envie de taper sur des punching-ball toute sa vie.
— C'est bien plus que ça, il lance tout bas.
J'intercepte dans ses yeux, une lueur grandissante et brillante.
— Je ne suis pas le meilleur des boxeurs, ni des athlètes, mais j'ai été formé par un des leurs. Jim avait un nom sur la scène, jeune et je compte bien le rendre éternel avec ce nouveau boulot.
— J'y compte bien, moi aussi. Bonne journée, Smith.
Il repart dans la salle, tandis que je reprends ma course jusqu'à mon appartement. A vrai dire, je marche plus que je ne cours. Une fois arrivé à l'appartement, il est presque sept heure du soir. Je vérifie ce que j'ai dans mon frigo, puis je me prépare une petite julienne de légume. Pendant que je mange, je zappe à la télévision jusqu'à me retrouver sur la chaine de sport. Je consulte les derniers match, et quand sonne vingt heure, j'appelle Lucie. Elle ne répond pas, si bien que je m'inquiète. J'essaie une deuxième fois, encore sa messagerie.
Quelques minutes passent sans que j'ai de nouvelles. J'allume une cigarette et me persuade de ne pas prendre la voiture pour aller voir par moi-même si elle va bien. Peut-être qu'elle prend simplement sa douche et qu'elle n'a pas pensé à amener son téléphone. C'est sûrement ça. Elle sait que je dois l'appeler. Elle le sait, je lui ai dit.
Je tire sur le bout de ma cigarette, avant qu'elle ne finisse dans le cendrier, puis j'attrape mon téléphone qui vient tout juste de vibrer. C'est un message de Lucie, où elle me dit être à l'hôpital et avoir eu plusieurs plaintes d'infirmière à cause de son téléphone. Je m'excuse platement, en lui souhaitant une bonne soirée et une bonne nuit. Elle me répond de même. J'hésite à lui envoyer le je t'aime qui continue à me démanger, mais je ne le fais pas. Je pose mon téléphone sur la table basse, et je laisse ma nuque s'abattre doucement sur le haut de mon canapé. Je soupire.
Je redoute tellement cette fin, mais je l'attend patiemment. Je veux qu'on puisse vivre en paix sans complications. J'aimerai qu'Alban n'ait jamais existé, ainsi que ces hommes qui en veulent à Lucie. J'aimerai une fin heureuse, mais j'ai un mauvais pressentiment. Et si tout ce qu'on a réussit à construire, les pas que nous avons fait l'un vers l'autre depuis son séjour à l'hôpital, partaient en vrille ?
•••
Après avoir pris mon petit déjeuner et m'être débarbouillé, je m'installe sur le siège de ma voiture et file pour l'hôpital. Une fois à l'intérieur, je demande la chambre de Paul, où je le vois allongé, les yeux figés sur le plafond. Je frappe quelques coups à sa porte et rentre sans faire trop de bruit. Paul ne me regarde pas, mais je sais qu'il me voit.
— Salut.
— Justement, je t'attendais, il rétorque. Je sais très bien que le médecin m'a dit de ne pas utiliser mon portable, mais je l'ai fait quand même. J'ai eu un message de ma mère qui disait qu'il restait une place pour moi, à la maison.
Je le considère en fronçant les sourcils. Je lui aurais bien proposé de venir squatter à l'appartement, mais je ne sais pas si c'est une bonne idée. D'autant plus que Lucie vient faire des petits tours maintenant. Enfin, je vais y veiller.
— Il se trouve que mon père est à l'hôpital, lui aussi. Mauvaise chute dans les escaliers, il m'informe. Je crois que j'ai besoin de prendre du recul avec toute cette histoire, et je vois bien que notre amitié a été bien endommagé, alors bon.
Je ne sais pas quoi dire, il a parfaitement raison. Notre amitié n'est plus la même, mais je suis sûr qu'un jour tout ira mieux. Mais le temps doit faire son affaire.
— Je repars pour le New Jersey à la fin de mon séjour. Je te fais entièrement confiance pour veiller sur Lucie, et puis j'ai toujours une petite oreille qui traîne chez Carter et cette immense embrouille qui gravite autour de ta bien-aimée.
Je rigole sans savoir pourquoi. Paul rit à son tour, avant de redevenir sérieux en grimaçant.
— J'ai remarqué que les filles choisissent toujours le plus mystérieux et le plus vilain des gars, quand elles ont le choix avec un gentil en face, il plaisante.
— Tu me traite de vilain, si je ne m'abuse ?
Il brasse l'air d'un coup de main, avant de remonter son lit avec l'aide de sa télécommande.
— Oui, un petit peu. Je suis content qu'elle t'ait choisi toi, parce que tu es l'homme de la situation. Aussi parce que je sais que sous cette dure carapace, tu es quelqu'un de bon et de bien. Tu reste mon meilleur ami, malgré tout ce bordel. J'ai été con, abrutis, je m'en excuse.
Ces mots me touchent et son sérieux aussi. Paul n'a jamais été du genre à étaler ses sentiments, tout comme moi d'ailleurs.
— Tu vas me manquer, comme tu m'as manqué pendant ces longs mois pourris passer avec ce trou du cul de Carter et sa clic. Mais je reviendrai très bientôt histoire de savoir si ces crevards sont hors jeu.
Je souris, le voilà enfin mon meilleur ami.
— Tu vas me manquer aussi, espèce de salaud, je balance.
— C'est une bonne chose, déjà. Bon, fais attention à ce Victor OK ? Toi aussi, tu pourrais servir de cible ! Et puis, je te conseille d'être prêt à tout moment. Pendant la semaine, j'ai écrit l'adresse de Carter, l'adresse de sa nouvelle planque et celle de ce Antoine. Quelque chose me dit que ça devrait te servir très bientôt.
Il attrape un petit papier sur sa table de nuit, et me le donne.
— Merci vieux et bon voyage. Bonjour à tes parents et à Tania, je lui souris.
— Euh, je ferai passer le message à Tania, seulement. Ma mère...c'est une autre histoire tu sais bien ?
Je secoue la tête avant de partir vers la porte et l'ouvrir.
— Ils rodent toujours. Méfie-toi du deal qu'a passé Alban avec Antoine et les autres. Quelque chose me dit que les choses vont mal finir et que les gentils dans l'histoire finissent toujours par être impliqués coûte que coûte.
Je prends son conseil avant de le saluer d'un mouvement de tête. Je plis le papier qu'il vient de me glisser dans la main, et le range dans la poche arrière de mon bermuda avec mon téléphone. Puis sans réfléchir une minute, je file à Phoenix, chez Lucie. Lorsque je sonne, je m'attends à la voir m'ouvrir, mais c'est sur George que je tombe. Son visage est plus terne et ses traits plus tirés, que d'ordinaire. Je ne relève pas, en me disant que cette fatigue a sûrement un rapport avec l'état de la mère de Lucie.
— Bonjour, je commence.
— Bonjour Smith, entre.
— Hum, vous pouvez m'appeler Samuel, je demande tout bas. Smith, c'est mon nom de famille.
George hausse une épaule.
— Très bien, Samuel, il sourit. Installe-toi dans le canapé ou à la table. Tu veux boire quelque chose ?
Je marque une pause. C'est bizarre que Lucie ne vienne toujours pas.
— Non merci, je n'ai pas soif. Lucie n'est pas là ?
George se pince les lèvres, geste qui ne fait qu'augmenter mon inquiétude à son égard. Les choses se seraient-elles mal passées avec sa mère, hier ? Peut-être qu'elle m'en aurait fait part si c'était le cas, ou peut-être bien que non.
— Elle dort encore, mais je présume qu'elle va se lever d'une minute à l'autre.
J'opine de la tête en m'asseyant autour de la table. George revient avec un café bien chaud, et s'assoit prêt de moi. La radio est allumée en fond, diffusant les informations. Comme demain, je reprends le travail et que j'espère parler de mon affaire à mon chef, j'écoute quelques instants ce qui se passe. Pas d'incendie à mon plus grand soulagement, apparemment.
— Je peux te poser une question, me questionne George.
— Bien sûr.
La dernière fois qu'il l'a fait, c'était pour me demander si j'aimais Lucie. S'il me la pose une seconde fois, maintenant, je dirais oui sans hésitation. Parce que c'est le cas aujourd'hui. Je suis amoureux d'elle et je ferai tout pour qu'elle n'ait jamais plus peur et pour qu'elle m'aime en retour.
— Comment trouves-tu ma fille en ce moment ?
Je fronce les sourcils pendant un instant, surpris par cette question.
— Je dirais qu'elle va bien, mais qu'elle a ses hauts et ses bas comme tout le monde. Les choses sont un peu compliquées en ce moment, mais j'essaie de la prendre en confiance.
Je ne réponds rien de plus. Je ne sais même pas si elle lui a informé de notre relation. En plus, George n'est pas au courant de toute cette histoire et ce n'est pas à moi de lui parler de ce genre de chose. C'est à Lucie de lui dire la vérité quant à notre rencontre, nos liens et aussi sur toute cette souffrance qui l'entoure.
— Très bien. Quand je suis rentrée hier, elle avait l'air dévasté, alors bon, il amorce en buvant une gorgée de son café.
— Peut-être que c'est en rapport avec la visite qu'elle a faite à sa mère ? j'interroge comme piste.
George se retourne vers moi, en ouvrant la bouche, visiblement surpris.
— C'est impossible qu'elle ait rendu visite à Christine, j'y étais toute la journée et je ne l'ai pas vu. Je pensais qu'elle était avec toi, et que quelque chose s'était passé, il m'expose.
Je comprends pas, Lucie m'aurait-elle menti ? J'essaie de me souvenir des éléments de la veille et je me souviens très bien que Lucie m'a dit être à l'hôpital en visite de sa mère. Mais George ne mentirait pas, puisque je sais parfaitement qu'il passe ses journées au chevet de sa femme, c'est Lucie elle-même qui m'en a fait part. Soudainement, notre conversation d'hier sur le fait qu'elle devrait porter plainte me revient en tête. Je soupire fortement, en me passant une main sur le visage.
Quel con.
— Que se passe t-il Samuel ?
— Hier, il se peut que j'ai blessé votre fille, je souffle.
— Il se peut ? Comment ça ? s'échauffe George.
Je serre les poings sous la table.
— Pas physiquement, je ne lui ferais jamais de mal sans m'en faire à moi-même si j'osais la toucher, je confis. Non, je pense que je l'ai blessé en lui demandant de porter plainte contre Alban. Je pensais bêtement qu'il s'agissait là d'une solution à tenter pour qu'elle oublie toute cette horreur qui gravite en elle. Je veux qu'il paie pour lui avoir fait subir toutes ces choses. Je veux le voir souffrir comme il l'a fait souffrir, vous comprenez ?
— Je comprends tout à fait, j'ai déjà essayé de ce côté là, mais elle refuse.
— Oui, mais c'est peut-être la meilleure solution à son mal-être. Je veux qu'elle aille mieux comme vous, je veux qu'elle oublie toute cette histoire horrible qui pèse sur elle. Je l'aime bon sang, alors je ne veux que son bien, mais elle continue à refuser.
George sourit silencieusement.
— Alors tu l'aimes ?
— Oui, je l'aime à en crever et parfois je crois qu'elle ne le voit pas, ou alors qu'elle ne veut pas le voir, je murmure.
George me donne une tape amicale dans le dos, avant d'aller déposer sa tasse dans l'évier. Il monte les escaliers doucement, avant de disparaître au premier étage. J'attends quelques minutes, et le voilà qui revient, accompagné de très près par Lucie encore en pyjama. Ses yeux sont légèrement gonflés et elle a l'air de paniqué quand elle m'aperçoit assis, là.
Je me lève aussitôt pour aller la serrer dans mes bras et l'embrasser sans gène. Maintenant que son père est au courant, je ne vois pas l'utilité de se cacher.
— Tu as bien dormi ?
— Moui, elle soupire. Je reviens.
— Attend ma chérie, nous avons quelque chose de très important dont nous devons parler tous les trois, s'attaque tendrement George.
Lucie fronce les sourcils, en me jetant un coup d'oeil. Je suis content que George m'apporte du soutien de ce côté là, mais je ne pensais pas qu'il allait s'y mettre maintenant.
— Assieds-toi, lui intime t-il.
Elle le fait, en prenant place sur la chaise prêt de moi. Je lui prend la main sous la table et attend que son père tranche et donne le premier coup.
— Ne le prend pas mal, ma puce, mais je suis d'accord avec Samuel.
Lucie serre ma main, tout en regardant étrangement son père. Je comprends qu'elle a compris de quoi il s'agit, mais elle a besoin de poser la question à son père. Celui-ci souffle un bon coup, sûrement aussi mal que moi, à devoir lui demander cette faveur. Mais il se lance dans la cage au lion, sans broncher, comme le fait un vrai père qui aime sa fille plus que tout au monde.
— Tu devrais sérieusement penser à porter plainte contre Alban, il repose. La dernière fois, j'ai accepté ton refus, mais j'ai vu l'horreur, les marques qu'il t'a faite, Lucie. Je vois et je souffre autant que toi, parce que cet homme a osé touché à mon bébé.
Lucie ne répond rien. Du coin l'oeil, je vois ses traits se tendre, et tout à coup, sa main lâche la mienne assez violemment. Je déglutis difficilement en priant au plus profond de moi, pour qu'elle reste calme et que ses crises ne viennent pas la bouffer toute crue. Sauf que je perds, comme à chaque fois. Lentement, Lucie se lève et se dirige vers la cuisine, mais heureusement — ou pas — son père arrive à l'intercepter avec sa voix suppliante.
— S'il te plaît, dis-moi que tu vas y réfléchir. Au moins, y réfléchir.
Lucie se retourne et je vois à quel point la colère déforme son visage. Je ne la reconnais plus, c'est comme si une inconnue se tenait devant nous. Je déteste voir le résultat des coups d'Alban sur sa personnalité, sur son âme, qui elle se débat pour sortir. Pour respirer.
— Ma puce ? tremble George.
Elle ne l'écoute pas, non, ses yeux rageurs sont bloqués sur moi. J'ai l'impression qu'elle aimerait me tuer, mais je fais preuve de sang froid. Je la laisse se rapprocher de moi, et me mettre la plus monumentale des gifles que je n'ai jamais connu. Ma joue me picote fortement, mais je ne fais rien, mise à part, la regarder, l'observer dans les yeux.
Dès qu'elle ouvre les lèvres, je sais que les paroles qui vont suivre, vont finir par m'achever. Je tiens bon.
— Pour qui tu te prends de remettre ça sur le tapis, avec mon père en plus ? On est ensemble depuis seulement une semaine, et encore je ne sais même pas si on peut appeler ça être ensemble ! Tu ne me connais pas, et tu oses me dire ce que je dois faire ! Ne t'avises plus de faire ça ! Toi qui te proclamais meilleur qu'Alban, fais-moi rire ! Tu es comme lui en me disant pareille chose ! elle hurle presque.
Mon coeur tombe au sol et rampe pour échapper au déluge qu'elle provoque en moi. Mais elle finit par le piétiner en disant les paroles suivantes d'une voix tranchante comme une lame d'acier.
— Je te déteste ! Au lieu de me sauver, tu m'enfonces au plus bas.
Les larmes dévastent ses joues en un torrent. J'aimerai avoir la force de me lever pour la rassurer, la prendre dans mes bras, la prier de me pardonner, ou que sais-je ; sauf que je suis cloué à ma chaise. Retenu par une force herculéenne.
— Toi, papa, je t'interdis d'appuyer une idée pareille ! Je t'interdis de faire comme la dernière fois et me supplier de faire ça ! Je ne veux plus jamais le revoir, le toucher et encore moins sentir sa présence, elle éclate en sanglot. De toute façon, il est trop tard pour faire une chose pareille !
George trouve la force de se rapprocher de sa fille, sans même la toucher. Lucie fait subitement face à une crise en s'écroulant par terre. Je bondis immédiatement de ma chaise pour m'accroupir sur le sol tout près d'elle. Elle pleure, se gratte le visage et balance ses jambes autour d'elle. Je la calme en prenant ses deux poignets, et en la chevauchant. Elle se débat, mais j'arrive à la stabiliser pour qu'elle puisse me regarder dans les yeux et y voir que je ne lui veux aucun mal.
— Tout va bien, Lucie, je la rassure.
— Non, elle lâche tout bas.
George me rejoint en posant ses deux genoux à terre de l'autre côté de son corps. Il caresse doucement son visage, pendant que Lucie presse les yeux comme si elle voulait échapper à quelque chose. Mon coeur saigne et explose, face à cette vision.
— Pourquoi il est trop tard, ma puce ?
Lucie hésite, mais elle finit par faire éclater la bombe, rasant tout sur notre passage.
— Alban est mort.
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Hello tout le monde ! Excusez-moi pour mon grand retard ! Si vous avez eu mon message sur mon profil, j'étais partie en week-end, et donc, je n'ai pas pu m'occuper de Samuel et Lucie, mais nous revoilà ! ;)
Alors, comment avez-vous trouvé ce chapitre haut en émotion ? Dîtes-moi tout !! Je vous attends dans les commentaires mes loulous !
Gros gros bisous ! Sarah.
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