17. SMITH

Lorsque j'ouvre les yeux, je lis un peu plus de dix heure du soir, sur mon réveil. Je suis étonné qu'on ait dormi tout ce temps. Mais il faut dire, qu'après un massage aussi bon de la part de Lucie, et d'une violente crise de larme de ma part, le sommeil est exigé.

Visiblement, mon corps refuse de partir, jusqu'à ce que mon ventre se manifeste en gargouillant assez fort pour réveiller Lucie. Elle réprime un petit rire, avant de lever sa tête vers moi. Je me souviens qu'avant que je m'endorme pour de bon, Lucie était dos à moi, et non accrochée à moi. Maintenant, c'est le cas. Ses mains m'entourent la taille et sa tête repose sur mon torse, deux minutes avant que j'ose la sortir de son sommeil.

— Tu as faim, je vois, elle chantonne.

— Ouais, je pourrai manger n'importe quoi, je ris.

Soudainement, son regard ensommeillé change du tout au tout. Ses pupilles se mettent à briller créant une légère lueur qui danse au fond. Le désir l'assaille tout comme moi, mais je ne préfère pas tenter quoique soit. Maintenant que j'ai avoué ouvertement que j'étais amoureux d'elle, parce que c'est la vérité, je veux qu'elle accepte qu'on puisse éventuellement avoir un avenir tout les deux. Après tout, c'est notre combat. En équipe. En duo.

Je me lève immédiatement, une érection douloureuse se formant à l'intérieur de mon caleçon. En respirant un bon coup, je lui souris timidement avant de me diriger vers la cuisine. Lucie me rejoint dans les minutes qui suivent, toujours vêtue de sa robe. Elle s'approche de moi, et je sens bien qu'elle ne se sent pas forcément à l'aise dans celle-ci. C'est donc pour cela, que je lui propose une de mes chemises et un de mes caleçons. Lucie me remercie, et disparaît pour passer sous la douche.

J'entends la porte de la salle de bain s'ouvrir mais pas se fermer. Normal, puisque je vois Lucie réapparaître dans les secondes qui suivent. Je l'interroge en haussant les sourcils, amusé de la voir sautiller nerveusement sur ses deux pieds. Aussitôt, je réalise qu'on n'a presque pas échangé un mot depuis notre levé, à onze heure du soir, maintenant.

— Qu'est-ce qu'il y a Lucie ? je demande, suspicieux.

— Tu vas cuisiner ? elle me questionne, en se raclant la gorge.

Cette question m'étonne mais je choisis d'y répondre par un simple hochement de tête, interprété comme une réponse positive. Je m'apprêtais à faire un plat que j'aurai trouvé sur internet ou quelque chose comme cela, pour innover un peu. Parce que les pizzas et les pâtes, j'en ai un peu marre. Oh, et les sandwichs aussi. J'ai perdu un peu de muscles depuis quelques jours, et je crois que je vais devoir me dépenser un peu plus.

Je vais aller faire un tour dans la salle de gym de Jim et annoncé aux jeunes que je suis partant pour une nouvelle aventure avec eux. Après tout, ma mère m'a dit de ne rien me refuser et de vivre mes rêves quoiqu'il arrive. Ma vie c'est la boxe, depuis toujours, depuis que j'ai rencontré Jim. Je suis doué là dedans, et quelque chose me pousse à aider ces jeunes à persévérer dans ce sport. Je ne sais pas encore quoi, mais je vais le découvrir très bientôt en montant cette salle de sport avec eux. J'en suis persuadé.

— Je voudrai cuisiner avec toi, si cela ne te dérange pas. Depuis que je suis revenue de l'hôpital, c'est mon père qui cuisine pour moi, et j'aimerai me servir à nouveau de mes mains pour faire de bon petits plats. En plus, la nourriture absorbe toutes nos émotions négatives apparemment, elle me déclare.

Je ris pour la deuxième fois que je me suis levé, et Lucie me sourit pour la deuxième fois aussi. J'aime ses sourires bien plus que les mots qui sortent de ma bouche pour lui annoncer mes sentiments naissants.

— Pas de problème, je t'attends.

Elle sourit encore plus, en me regardant me diriger vers le canapé et m'y asseoir pour allumer la télévision. Je zappe jusqu'à tomber sur ma chaîne préférée, entièrement dédiée aux sports de combat. Je pourrai passer ma journée à visionner des combats de boxe, de kickboxing ou alors de taekwondo, rien que la beauté des gestes et pour commenter. C'est tellement intense de regarder la puissance des coups et l'immensité des corps. Mais beaucoup plus intense quand on le pratique, et j'avoue que l'adrénaline qu'on ressent la veille d'un combat et lors des dix premières minutes avant qu'on monte sur le ring, me manque terriblement. Parce que, soyons honnête, j'ai choisi la boxe pour toujours, parce qu'elle est ma canalisation et ma drogue dure, pendant que Lucie devient ma drogue douce.

J'entends l'eau coulée, pendant que je visionne plusieurs matchs de kickboxing. Je vois différents poids au niveau des hommes comme des femmes. C'est là que me vient une idée, une idée à laquelle j'aurai dû penser dès les premiers jours de ma rencontre avec Lucie. Pourtant, je l'ai bien amené à la salle, mais jamais je ne lui ai montré spécifiquement les coups qu'il faut porter en cas d'agression ou de défense. Demain, je l'amènerai à la salle, c'est décidé. En voyant ce que me dit Paul, des hommes veulent du mal à Lucie. Ce n'est pas Carter, ni Alban et encore moins le cerveau de l'affaire qui lui réclame son due. Mais ça ne saurait tarder.

— Me voilà !

La voix de Lucie me sort de mes pensées. Je tourne précipitamment la tête vers elle, pour lui sourire tranquillement. Mais mon visage devient plus sombre lorsque mes yeux se posent sur ses jambes nues et sur ma chemises qui laisse transparaître ses seins que j'aime tant. La dernière fois que nous avons fait l'amour, je ne me suis pas trop attardé sur eux, mais je promets que la prochaine fois , les choses seront totalement différentes. Le fait qu'elle ne porte pas de soutien gorge me fait déglutir difficilement et n'aide pas mon érection qui commençait à s'affaiblir. Elle est de nouveau au garde à vous et me supplie d'assouvir quelques petites choses. Mais je refuse, tant que Lucie ne m'a pas donné une réponse.

Je sais qu'on a couché ensemble deux fois, mais je ne veux pas que Lucie se sente rejetée à nouveau à cause de mon comportement, et que moi, je me retrouve frustré. Si on choisit de démarrer quelques chose, alors je serais sûr de moi, et moins dans la panique et elle aussi. Ce qui me fait penser qu'on a pas reparlé du fait qu'elle aurait pu tomber enceinte. Enfin, Lucie me l'aurait dit de toute façon.

— Alors, on prépare quoi ?

Pour la deuxième fois, encore, la voix de Lucie me sort de ma torpeur. Je me relève immédiatement avant de la rejoindre dans la cuisine. Je m'adosse en comptoir, en fixant mon regard dans le sien. De plus près, je remarque qu'elle ne porte plus son attelle. Lucie intercepte mon regard et me répond qu'elle n'a plus mal. Je hausse les épaules, pas vraiment convaincu.

— Qu'est-ce que tu aimes ? je lui pose.

Quand j'y pense, je vois que nous savons presque toutes les choses terribles et émouvantes que nous avons vécues sur l'un et l'autre, mais les choses les plus simples et quotidiennes, ça, on ne sait pas. En tout cas, je n'ai aucune idée de son plat préféré, ou alors de sa couleur préférée. Nous avons beaucoup de choses à récupérer et j'ai tout de suite l'impression d'y être allé un peu fort.

— J'aime à peu près tout, sauf les champignons, et aussi les fruits de mer. Mais je ne pense pas qu'on va préparer des homards ou alors des moules. Hein, Smith ? elle plaisante.

Je ricane avant de lui répondre négativement. Sans perdre de temps, je jette un oeil dans mon frigo, pour voir qu'il traine toute sorte de légume.

— Tu aimes tout, tu dis ?

— Ouais. Tu as fait ton choix ?

Je prends les légumes qui me tombent sous la main — courgettes, tomates, pommes de terre — avant de prendre des oignons et puis des poivrons pour mettre des couleurs. Lucie me regarde avec des grands yeux, en se tenant le ventre. Elle a sûrement faim comme moi, maintenant.

— Je m'occupe de peler les courgettes et puis les tomates ! elle m'annonce, enthousiaste.

— Très bien, je m'attaque aux pommes de terre, et aux poivrons.

Pendant plus de trois quart d'heure, Lucie s'affaire avec les courgettes et les tomates, tandis que moi, je m'occupe des pommes de terre et des poivrons. Après avoir fini, nous mettons le tout dans une de mes poêles, la plus grande que j'ai trouvé. Je fais cuir à feux doux en rajoutant un peu de crème fraîche, puis arrive le moment fatidique de s'occuper à couper les oignons. Lucie et moi, nous nous affrontons du regard. Je m'approche et m'assois près d'elle, autour du plan de travail.

Les oignons sont déjà sur la planche à découper, prêts à nous faire pleurer comme des madeleines. Apparemment personne de nous deux, n'a envie de s'y coller. Sûrement, parce qu'on a déjà pleuré pendant assez de temps et que les larmes sont aussi fatigantes que douces.

— Je propose un deal, brise Lucie.

Je me retourne vers elle.

— Je suis tout ouïe.

Elle ferme les yeux, avant de se mordre la lèvre, l'air de réfléchir. Soudain, elle se tourne ses beaux yeux vers les miens, un éclair de génie en tête, surmonté d'un sourire taquin.

— On en prend chacun un, et celui qui pleure en dernier peut exiger une chose de l'autre. Une vérité, n'importe quoi.

A ces mots, je suis déterminé à obtenir cette vérité et en profiter pour lui demander si elle aussi, en retour, elle est amoureuse de moi. Parce que son silence est pesant et j'aimerai être rassuré. Mais lorsque le défi commence, je sens qu'elle est forte et j'ai raison puisqu'elle gagne. Cependant, elle attend que la table soit dressée, le dîner prêt et que les douze coups sonnant minuit passe, pour me poser son ultime question.

— Quel est ton plus grand rêve ?

Je reste silencieux face à cette question. Jamais, je n'aurai pensé qu'elle me poserait cette question, parmi tant d'autres qu'elle aurait pu me poser aussi. En haussant les épaules, je pense.

— Comme tu as réalisé l'un des miens, j'aimerai faire pareil pour toi, elle ajoute, tout bas.

Je suis touché et mon coeur me le faire savoir en hurlant de bonheur. Je pose une main sur lui, et pose mes yeux dans ceux de Lucie, pleins de lueurs brillantes.

— Petit garçon, même ado, mon rêve a longtemps été reporté à mon père. Je rêvais de pouvoir offrir une autre vie à ma mère et surtout un autre mari. Je voulais avoir un autre père, prêt à me dévouer la plupart de son temps et tout son amour. Maintenant, c'est l'espoir que je guette. L'espoir de sortir la tête de l'eau et de pouvoir dépasser toutes les choses que je croyais impossibles, comme tomber amoureux, avoir des enfants, vivre avec la femme de ma vie jusqu'à la fin de mes jours, ou avoir des gens sur qui je puisse compter et qui m'aiment pour ce que je suis maintenant.

Lucie m'écoute attentivement. Nous n'avons pas encore touché à nos assiettes.

— Il est inutile que tu essaie de réaliser mon rêve, parce que tu le fait déjà. Depuis que tu es arrivé dans ma vie, elle est bien meilleure et j'en espère davantage maintenant. Mais chaque chose en son temps. La vie est courte et mérite d'être vécue à chaque seconde qui passe, mais parfois, il est bon de ne pas précipiter les choses. La flamme de l'espoir naît, grandit et ne se meure jamais, si on la tient assez fort contre son coeur. Aujourd'hui, elle grandit de plus en plus pour moi. Et je sais qu'on va se sortir la tête de l'eau, Lucie. Bientôt. C'est une promesse.

Elle reste silencieuse pendant  un temps, avant de prendre une première bouchée de notre repas. Lucie gémit en un murmure, avant de fermer les yeux et savourer. Je reste suspendu à ses lèvres, en espérant une réponse de sa part, mais je crois qu'il est encore trop tôt. Même si cela me déchire le coeur, je suis prêt à lui consacrer tout mon temps.

Je ne sais pas encore quel a été le déclic. Mais je sais, avec conviction, en ces jours, que je suis amoureux de Lucie. Léna avait raison. Notre proximité ou nos sourires, trahissaient nos sentiments. Peut être que Lucie ne s'en est pas rendue compte, comme moi. Peut être ne s'est-elle pas rendue compte qu'elle m'a eu avec son naturel, sa force et sa fragilité. Oui, elle m'a eu. Comme les flammes que je suis, elle a su les étouffé, et il ne reste plus qu'à les faire disparaître. Moi, je dois apprivoiser la belle colombe qu'elle est, pour qu'elle voit enfin ses sentiments. Les vrais. La vérité nue de son âme et son ressentiment.

Je me rends compte que Lucie, n'est pas brisée, elle est seulement perdue dans un énorme trou noir, sans issue, si ce n'est que ma main qui flotte au dessus. Non, elle n'est pas brisée. Non, elle est trop forte pour cela. Alban a réduit son coeur en miette, mais pas son âme, parce qu'elle est bien trop grande et invincible. Je viens de m'en rendre compte à l'instant où elle a choisi de me pardonner mes erreurs et à l'instant où sa main a guidé la mienne et sa bouche a touché la mienne. Elle n'est pas brisée, non. Son coeur oui, mais pas son âme. Son âme est intacte, et elle a seulement peur. Son âme a peur tout comme la mienne et son coeur bat pour elle. Pour qu'un jour, elle puisse retrouver la paix.

— C'est délicieux, murmure Lucie.

— Ouais, je réponds simplement.

Le repas est silencieux, mais ce n'est pas un silence gênant, au contraire, il est plein de vérité. Lucie me sourit parfois, mais je sais qu'elle sait que tout commence maintenant.

— Viens, je vais te mettre de la crème sur ton oeil et ta joue, me propose t-elle.

Je la suis jusqu'à la salle de bain et lui indique le tiroir où le tube de Biafine gît sur l'étagère. Elle la prend et dépose une noisette sur son index, puis la porte à mon oeil. Je suis soulagé, si bien que je laisse mes mains s'accrocher à la chemise blanche qu'elle porte, que j'ai envie d'arracher, là, tout de suite. Je me retiens et l'observe attentivement me masser avec la crème d'une autre manière. Bientôt vient mon tour avec sa joue. Nous sommes silencieux encore une fois. Lorsque j'ai fini et que Lucie sort de la salle de bain, j'entends sa voix atteindre les échos de mon coeur.

— Tu me donnes de l'espoir aussi, Smith.

Cette nuit, je choisis de dormir sur le canapé, uniquement pour ne pas être tenté par son corps et par mon besoin de me sentir enfouie au plus profond d'elle. Parce que je ressens le besoin d'être près d'elle, à présent. Et tout le temps. Ma mère était un phare qui brillait constamment pour les âmes en peines, et je crois que Lucie est le mien, de phare.

••••

Je me réveille en me levant doucement du canapé. Comme tous les matins, je décide d'aller courir après avoir mangé un petit quelque chose. Cette fois, je me fais un café et je me dirige vers ma chambre à petit pas. Si elle est réveillée, je ferais bien de lui proposer de venir courir avec moi, parce qu'elle aime ça. Mais lorsque je pousse la porte de ma chambre, je la vois étaler dans mon lit, serrant ma couette dans ses mains. Un sourire effleurent mes lèvres. Je reste pendant quelques minutes à la regarder et je regrette de ne pas avoir mon téléphone sous la main.

En secouant vivement la tête pour me remettre les idées en place, je prends mon short de sport et un haut sans manches. Puis, je déguerpis aussi vite que je peux, sans faire tomber la moindre des choses sur mon passage. Une fois la porte fermée derrière moi, je peux enfin souffler. Enfin, jusqu'à ce que je me rappelle la raison des pleurs de Lucie, la dernière fois que je l'ai ramené à l'appartement. J'ouvre pour la seconde fois ma porte d'entrée, pour lui laisser un petit mot qui va la rassurer. Lancé sur la route, je respire enfin.

Je cours pendant presque  plus d'une heure, et je m'arrête en voyant un vendeur de viennoiseries sur le bas de la route. Je m'approche en trottinant et je lui commande deux croissants et deux pains aux chocolats pour notre petit déjeuner. Comme je ne sais pas ce que préfère Lucie, je prends les deux. J'ai un plan B de cette façon.

Le sachet en main, je m'apprête à faire demi-tour, lorsque je pile net. Leah est juste devant moi, tout sourire. Toujours habillée d'une façon un peu trop dénudée, à la limite du vulgaire. Elle est aux bras d'un gars rempli de tatouage comme moi, sauf qu'il en a aussi autour du cou, et sur la pommette droite. Le mec a également les cheveux verts. Ils sont installés autour d'une terrasse avec d'autres gens aussi désinhibés les uns que les autres. Prêt à partir loin d'ici, je me retourne, mais j'entends des talons claquer sur le sol près de moi. La teigne arrive et je ne peux rien faire. Leah me dépasse et plante ses deux poings sur ses hanches. Dire qu'avant, je couchais avec elle et je réussissais à avoir envie d'elle. La blague.

Dès qu'elle ouvre la bouche, je regrette de ne pas avoir couru à la vitesse supérieure.

— Smith, voilà longtemps que je t'avais pas vu. Comment tu te portes depuis que tu es devenu un homme ? elle ricane. L'autre morveuse va bien depuis ta défaite ? Je suis au courant de ce qui se trame. Pas joli, tout ça. Son ex-mec voulait la récupérer. Il est violent en plus.

Ça me rend malade qu'une fille comme elle se permette de juger Lucie, rien que sur des rumeurs ou des dires. Mais ce qui me rend encore plus malade, c'est que les gens, les plus vils, les plus pathétiques et casse-couilles, savent tout d'une partie sombre et difficile du passé de Lucie qui est censée rester intime. Heureusement que personne ne sait que Leah a fait les trottoirs jusqu'à il y a quelques années, sinon ça ternirait son image. De toute façon, on sait tous que c'est une pute et qu'elle en joue, mais je me demande ce qu'elle raconte comme bobards à ses parents pétés de tune, à chaque fois qu'ils l'appellent pour prendre des nouvelles.

— Ta gueule Leah !

— Tu pourrais être un peu plus poli ! Comme tu es rangé maintenant, pareil à un parfait garçon, et pompier qui sauve des vies, la politesse devrait être dans tes cordes.

Je soupire. Elle adore amuser la bête quand elle est en cage et visiblement, elle obtient toujours ce qu'elle veut.

— Avec toi, il faut savoir parler de saloperie, Leah. Tu ne mérite pas ma politesse et encore moins mon respect, avec des tenues aussi flippantes.

Elle se trémousse un peu, en se regardant sous toutes les coutures. Vu le sourire coquin qu'elle me sort, Leah aime me provoquer de cette manière et espère encore de moi.

— Pourtant, mes vêtements, ou plutôt mes strings, tu aimais. Mais bon, ça doit être vrai ce qu'on raconte là-bas. Tu t'es fait embobiné par cette fille.

Je lève les yeux ciel, exaspéré. Je ne devrai même pas rester là, à l'écouter, mais apparemment, j'aime la voir se ridiculiser et passer pour une cruche.

— Dégage de ma route, je le répéterai pas une seconde fois.

— Une petite chose avant. Tu sais que cette fille en a rien à foutre de toi. Je parie qu'elle ne t'aimera jamais, avec tout ce que son brutal d'ex lui a fait vivre. Elle ne laissera plus jamais un homme l'a touché et si elle le fait, c'est par pitié. Elle vaut bien mieux que toi. C'est une enfant modèle, alors que toi, avec toutes les conneries que tu as fait, tu es bon pour une maison de redressement. Réfléchis sincèrement Smith. Pose toi la question importante. Est-ce qu'elle reste avec toi, seulement dans un but bien précis, ou alors est-ce qu'elle t'aime vraiment ? Il n'y a pas plus simple. Demande lui, je suis sûre qu'elle est comme toutes les autres gentilles filles. Elle prend ce qu'elle veut et puis elle jette.

Sur un petit sourire, elle repart vers la direction d'où elle est venue, et moi je m'empresse de courir et disparaître d'ici. Au fur à mesure que je foule le sol, mon coeur s'alourdit. Pendant un bref un instant, mon esprit s'emmêle les pinceaux et je commence à croire ce que me raconte Leah. Et si Lucie ne m'avait encore jamais répondu à propos de ses sentiments, justement parce qu'elle se sent coupable de se servir de moi pour soulager sa peine ? La seconde qui suit, je me traite de tout les noms d'oiseaux pour avoir pensé une telle chose d'elle. Lucie, une manipulatrice et hypocrite ? Jamais. Je n'en crois pas une seconde.

Mais il est vrai, qu'elle ne m'a pas répondu. Elle ne m'a pas non plus avoué qu'elle tombait amoureuse de moi, comme je tombe amoureux d'elle. Lucie m'a seulement certifié le fait qu'elle ait du mal et qu'elle va avoir du mal à se consacrer à un homme, dans les mois qui viennent, ce que je comprends tout à fait. Sauf que je ne crois pas me tromper dans ses paroles et son regard. Elle ressent forcément quelque chose à mon égard, comme au lac.

En arrivant devant mon immeuble, je me stoppe en posant mes mains sur mes genoux, et en inspirant un bon coup par la bouche. Puis je compose mon code avant de me tenir debout, droit comme un piquet, devant la porte de mon appartement. Tel un psychopathe, je colle mon oreille à plat sur la porte et j'entends soudain chantonner Lucie. Mon coeur bat plus vite et ma main trouve la portière. Cette fois-ci, je ne suis pas sûr de pouvoir résister à ne pas l'embrasser ou lui sauter dessus. J'ai besoin de ressentir le fait qu'elle ressent aussi quelque chose pour moi. Je dois. Je veux.

J'ouvre la porte doucement puis la referme dans la même optique, si bien que Lucie ne m'entend même pas entrer. Elle a l'air en forme et heureuse, en écoutant la musique à la télévision. D'ailleurs, on dirait qu'elle se prépare à faire cuir son petit déjeuner. A l'évidence, vu la boîte qui se trouve près d'elle, il s'agirait d'œufs.

Je m'avance doucement et aussitôt près d'elle, je pose mon sachet encore chaud sur le bar. Lucie se retourne immédiatement, portant ses mains à sa bouche. Encore une fois, elle ne porte pas son attelle et je ne trouve pas ça sérieux, mais je ne lui en fais pas part. Non, au lieu d'annoncer quoique ce se soit, je m'approche d'elle, jusqu'à poser mes mains affamées sur ses hanches pour la faire s'asseoir sur le plan de travail. Elle me fait les gros yeux, tout en tentant de garder son calme intact. Je n'aime pas voir la peur envahir ses yeux à cet instant.

— Smith, tout va bien ?

Je hoche simplement la tête, avant de me raviser et de l'entraîner avec moi, tout en l'embrassant sauvagement vers ma chambre. Sauf qu'on ne finit même pas le couloir. Je m'arrête entre temps pour la plaquer contre le mur. Lucie s'accroche d'une main à celui ci et de l'autre à mon épaule. Comme pour lui faire savoir mon envie irrépressible, je passe une de mes mains sous sa robe, qu'elle a visiblement préféré remettre ce matin. Lorsque ma main touche ses lèvres intimes, je suis surpris de ne voir ni dentelles, ni coton, m'empêcher de grimper plus loin. Lucie me sourit timidement, avant de balancer sa tête en arrière en se cognant légèrement quand mes doigts caressent lentement sa fente et son clitoris. De bas en haut. Doucement. Tout doucement.

Impatient et surtout intrépide, je glisse un doigt puis deux dans sa moiteur, tout en essayant de me débarrasser de mon short. Lucie halète contre moi au fur et à mesure que mon rythme s'accélère et elle finit par me mordre l'épaule en me soufflant d'accélérer. Au contraire, je diminue mon contact, parce que je n'ai aucune envie qu'elle jouisse de cette manière. Je veux être en elle à ce moment là.

Je retire mes doigts immédiatement et Lucie souffle en écarquillant les yeux. Il y a toujours cette inquiétude, cette peur, qui reste gravée au fond de ses pupilles. Ma main reste fortement crispée autour de ses reins, et j'ai peur de lui faire mal. Mais je ne peux pas m'arrêter, je veux ressentir ses sentiments, ses émotions quand c'est moi, qui suit là avec elle et qui lui fait l'amour.

Avec ma main libre, j'attrape bouton et braguette avant de faire tomber le tout au sol avec mon caleçon. Pendant un instant, je vois sa réticence nous étreindre l'un et l'autre. J'arrive à comprendre ce qu'elle essaie de me dire. Le préservatif.

J'hésite longuement en me disant que les choses seraient plus prudentes et que je ne suis pas à l'abri d'une crise à cause de cela. Mais d'un autre, je me dis qu'elle prend la pilule, que tout mes tests sont cleans et que mon besoin est bien trop important. On dirait que je suis dans la peau d'un malade émotionnel, qui cherche désespérément des réponses et à faire découvrir à sa partenaire la confiance qui règne entre eux et surtout, les sentiments forts qui existent dans l'air qu'ils respirent tout les deux.

Je prends les pans de sa robe, les remonte sur ses jolies cuisses que j'aurai envie de mordiller, puis j'avance doucement mon sexe vers l'entrée du sien. Elle est réceptive mais je sens qu'un degré de peur intercepte les courants. En la pénétrant en douceur, je sens ses parois internes, chaudes et mouillées se refermer sur mon érection. Je gémis en regardant Lucie droit dans les yeux. J'attends quelques secondes avant de lancer mon chrono, et j'en profite pour remettre une de ses mèches blondes qui a dû s'échapper de sa couette, derrière son oreille.

Lucie grimace un peu en me sentant bouger dans son intérieur de femme fait spécialement pour m'accueillir et je m'en veux tellement de la prendre sur le fait. Encore une fois, je suis égoïste et je cherche à la garder pour moi seul, qu'elle m'avoue elle aussi, m'aimer. Qu'elle accepte d'essayer. Je n'ai jamais eu de petite amie, et pourtant, j'en rêve maintenant avec Lucie. Mon dieu, ma vie a changé du tout au tout, et j'en suis bien content.

— Je te demande pardon, je murmure.

Je commence mes coups de reins, dans un rythme bestial, soutenu. Son dos heurte le mur à chaque fois que je la pénètre avec ardeur. J'entends les poum poum que traduisent notre désir et le sang battre dans mes oreilles. Je ne réponds plus de mes actes et à chaque fois, c'est plus brutal encore. Les paroles de Leah me revienne en tête et je pénètre durement. Lucie sort ses minuscules griffes pour les planter dans mon dos.

Je comprends en voyant mon comportement et son regard remplit de tristesse, que ce dont j'ai peur maintenant, c'est de souffrir une deuxième fois. Que Lucie ne m'aime pas et fasse semblant de me le faire croire, tout comme mon père. Je n'ai aucune raison de penser cela, mais cette peste de Leah a réussi à me foutre ce doute dans la tête.

— Smith, doucement, halète Lucie.

Je ralentie le mouvement, tout en nous sentant tout les deux proches de l'orgasme qui se prépare entre nos deux corps. J'embrasse Lucie, lentement et ensuite, durement. Je veux qu'elle puisse lire à travers moi. Je veux que son âme sache que c'est la mienne, sa lampe de survie dans le noir de sa douleur.

— Je me sens seul, je lance comme un fardeau.

Maintenant, je regrette amèrement mes choix de vivre seul toute ma vie. Je me demande comment je vais faire pour vivre après que la tornade Lucie ne dévaste mon coeur.

Doucement, je sens les mains de Lucie se glisser dans mes cheveux pour les caresser tendrement, dans un même aspect qu'un geste maternel. Je me détends tandis qu'elle pousse ses hanches contre les miennes. Quelques secondes plus tard, Lucie jouit et je la rejoins aussitôt dans cette osmose.

Je ne parle pas, j'ai honte de la façon dont je l'ai traité. Comme quoi les sentiments peuvent nous rendre fou, parsemé de quelques doutes. Lucie est silencieuse aussi, mais ses gestes témoignent de sa gentillesse et de sa capacité à comprendre les choses. Elle resserre ses jambes autour de ma taille, alors que je nous laisse tomber au sol, sans la moindres secousses.

— Regarde-moi, elle m'intime.

Sauf que je ne peux pas. Lever la tête et plonger mes yeux dans les siens, m'entraîne à voir tous les souvenirs atroces que j'ai pu éveillé chez elle. Je sais que Alban n'a pas été tendre avec elle, qu'il l'a même peut-être violé et c'est exactement ce je viens de faire. J'ai été fort, dur, et j'ai reporté ma frustration sur elle. Je voulais seulement qu'elle m'avoue être amoureuse, elle aussi. Qu'elle me dise quelque chose de franche au lieu de me laisser dans le blanc total.

— Regarde-moi, Samuel.

Lorsque j'entends mon prénom entier, le vrai, le véritable, sortir de sa bouche, des souvenirs de ma mère m'assaillent. Je la vois me demander de la regarder alors que je viens de faire une bêtise. Instinctivement, je lève la tête vers elle, et je la regarde, profondément. Cette fois, je n'ai pas fait de bêtise et ce n'est pas ma mère, mais je ressens cette même peine qui baigne dans ma poitrine.

Je ne demande qu'a être aimé.

C'est que je lui répétais à chaque fois que je voyais mon père m'ignorer en passant à côté de moi. Il m'arrivait de faire des bêtises à la maison, seulement pour avoir son attention. Je savais qu'en faisant ça, il me regarderait et il me parlerait. Peut-être serait-il en colère et peut-être qu'il lèverait la main sur moi ? Peu importe, gamin, je n'avais qu'une envie, qu'il m'aime comme n'importe quel père aime son fils. Puis, quand j'ai grandi, j'ai commencé à comprendre qu'il ne pouvait aimer qui que ce soit ou quoique ce soit. Que Frank était un homme immonde, qui ne méritait pas d'être aimer.

— Tu n'es pas seul, Samuel, elle parle tout bas.

Je ne réponds rien, j'écoute.

— Je suis là, moi. Et j'accepte.

Lucie remue nerveusement, mon sexe toujours enfouie profondément dans le sien. A ces mots, je crois rêver, mais son sourire me ramène à la réalité. Toujours son sourire. Alors, elle accepte d'essayer quelque chose avec moi ? Bon dieu, peut-être que toute cette souffrance possède enfin une bonne issue, une fin heureuse ? Il ne faut pas s'emballer trop vite, mais je ne peux pas être plus heureux.

Lucie se relève, attendant sûrement une réponse de ma part, mais je crois que j'ai perdu toutes paroles raisonnables et constructives, à cet instant précis. Je me lève à mon tour, une érection de plus. En voyant ça, Lucie se dépêche d'enlever sa robe et me révéler son corps nu. Ses seins fermes et ses tétons tout mignons et roses, appellent ma langue. Une décharge dévale la petite veine qui croule et parcourt ma queue. Le désir est palpable, pourtant nous restons là, à nous observer attentivement. Lucie regarde la moindre de mes traces, les moindres lignes de mon corps. Mes cicatrices, mes muscles soulignés, mais aussi ma joue meurtrie et mon oeil violacé. Moi, je m'attarde sur ses vergetures sur ses cuisses que je n'avais jamais vraiment pris le temps de voir, sur sa cicatrice à la hanche, sur son ventre plat et ses seins ronds et lourds d'envie et enfin sur son visage abîmé tout comme le mien. J'ai envie d'embrasser chaque partie qui constitue sa cicatrice qui traverse toute sa mâchoire. Bon sang, je suis vraiment amoureux et pour de bon.

— J'accepte d'essayer Smith, mais à une seule condition.

Je suis prêt à tout accepter du moment, qu'elle me laisse lui montrer l'intensité de mes sentiments et de mon coeur. Je veux qu'elle les voit prendre d'assaut les remparts de mon âme et les fils qui m'enserrent le coeur depuis si longtemps. Je veux voir jusqu'à quel point un être humain est capable d'en aimer un autre. Ce que ça fait de tomber amoureux, vraiment.

— Quoi ? je demande.

Elle ne cille pas, pas une seule seconde, mais par contre son tressautement au niveau de sa paupière droite, trahit son angoisse.

— Je ne te promets rien.

J'encaisse. Les promesses sont importantes, très importantes, mais je saurais m'en passer. Sans plus attendre, j'attrape Lucie par surprise et l'amène dans ma chambre. Là, je l'allonge sur mon lit, toujours au dessus de son corps.

— Maintenant, je vais te faire l'amour lentement et puis précisément. Je ne raterai aucuns détails, parce que bon sang,  je me sens heureux. Je suis abruti heureux.

Je commence à m'occuper de ses tétons qui chatouillent les miens impatients, j'adore le tableau que l'on trace tout les deux. Le contraste que ma peau tatouée reflète sur la sienne, encore vierge de toute innocence.

J'ai comme l'impression en la voyant gémir sous moi, me caresser avec imprécision et me regarder avec une certaine forme de vertige, que je commence seulement à vivre. Je commence ma vie.

Je commence ma vie dans un vrai hymne à l'amour et j'espère sincèrement que les mauvais moments sont désormais loin devant nous. Même si, j'en doute fort. Les problèmes ne sont jamais bien loin après tant de joie. Il faut savoir se méfier de l'eau qui dort en nos contrées. Le déluge est tout près.

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Coucou tout le monde ! Comment vous allez en cette période de fêtes de fin d'année ? Vous êtes prêt(e)s à rentrer dans une nouvelle année ? J'avoue que le temps est passé à une de ces vitesses, et j'ai du mal à croire que Noël c'est lundi ! ;)

Bon passons, j'espère que le chapitre vous a plu ? Malheureusement, vous voyez, les méchants ne sont vraiment pas très loin ! Bouh...

Dites moi tout ce que vous pensez ! Encore merci infiniment pour m'accompagner dans cette aventure, et de me motiver ! Je vous adore !!

Bisous bisous ! Si on ne se revoit pas avant pour un autre chapitre, JOYEUX NOËL tous le monde !! Bonne santé ! 💕

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