12. SMITH

"C'est dégoûtant [...] comme tout..."

**

J'ouvre difficilement les yeux, pour voir trois visages penchés au dessus du mien. Je crois bien qu'il s'agit de Léna, Dany et Lucas.

- Il ouvre les yeux, s'exclame Léna, je crois.

Une quatrième personne se positionne au dessus de moi, une lampe à la main, persistant à me faire ouvrir les yeux. J'ai la vague impression qu'il s'agit de Max, puisque j'entends son grognement familier envahir la pièce, tout à coup. Il chuchote des choses que je n'arrive pas à percevoir, ni à entendre. Mon corps est en compote ; une sensation de picotement incessant, me bombarde les muscles. Ma joue me fait atrocement mal, pareil pour mon visage tout entier, tout compte fait. Je dois ressembler à un monstre, avec toutes ses éraflures, que j'arrive à sentir en bougeant mon bras et mes doigts, sur ma peau toute cabossée.

Je ne me souviens plus dire rien. Bien sûr, j'ai joué au con pour avoir toutes ces merdes sur le visage. Mais plus rien ne vient en tête, à part le corps inerte de ma mère sur ce lit d'hôpital, et ses dernières paroles, qui remuent mon cerveaux dans tout les sens. Elles me martèlent le corps, dans les moindres recoins, n'oubliant surtout pas de piquer mes nerfs sensibles. Mon coeur va finir par exploser.

- Il bouge, merde ! hurle subitement Dany, près de mon oreille.

Les ondes se transmettent dans mon secteur auditif, me faisant légèrement grimacer. Les autres s'avancent vers moi, les sourcils haussés, et le visage reprenant vaguement des couleurs.

- Fermez là, je les averti.

- Le revoilà parmi nous, plaisante Max.

Ils se mettent tous à rire, en me regardant, un air idiots dessinés sur chacun de leurs visages. Ils rigolent tandis que mon coeur se brise de plus en plus. J'aurais aimé rester endormi, pour ne plus à avoir à penser à ma mère. La femme qui retenait ma vie, celle qui possédait le fil, qui faisait battre mon petit coeur. Celle qui m'a tout appris, malgré un connard de père absent, et un appartement pas très grand.

D'ailleurs, en parlant de l'appartement, je devrais envisager de déménager quelques part. Je ne m'y sentirais plus jamais, aussi serein qu'avant. La présence de ma mère ne cessera jamais de flotter entre ces murs blancs, et ce canapé tout pourri, sur lequel j'ai passé toutes mes nuits. Avant qu'elle tombe malade. Avant qu'elle ne me quitte pour de bon.

- Qu'est-ce qui t'a pris dans ce bar, Samuel ? me demande délicatement, Léna.

Je ne réponds rien, et me concentre sur mes muscles tout endoloris. D'un mouvement assuré et lent, je me relève ; mes pieds se posant légèrement sur le sol. Mes yeux découvrent la pièce dans laquelle nous sommes, me laissant croire qu'il s'agit d'une infirmerie. Mais où ? Putain où ?

Heureusement, Max revient en ouvrant la porte de cette pièce, me laissant entrevoir un camion de pompier, de l'autre côté de ces murs. Nous sommes donc à la caserne, et quelle heure est-il, bon sang ? Pendant combien de temps, je me suis retrouvé à patauger dans un océan tout noir ?

- Tu vas me répondre, insiste Léna.

- Fout moi la paix, Léna, je réponds maladroitement.

Je n'ai jamais été aussi méchant et aussi impoli avec Léna. Mais ça n'a pas l'air de la déranger plus que ça. Heureusement, puisque ce n'est pas mon jour, aujourd'hui. Les jours ne seront plus jamais les mêmes, et je resterais comme un vulgaire légume, affalé dans mon canapé, sans rien faire. Sauf qu'il me faudra bouger le doigt pour allumer, éteindre, changer de chaîne, pour la télévision ; et utiliser ma main entière pour saisir mon verre plein et la bouteille de Wiski.

- Oh, tu m'écoutes ! elle claque des doigts, juste devant mes yeux.

Dany, Lucas et Max ont quitté la pièce, et je ne m'en suis même pas rendu compte. J'aurais préféré qu'ils restent, tout compte fait. J'ai comme l'impression que Léna va me cuisiner, jusqu'à ce qu'elle ait ces petites informations qu'elle convoite tant. Fais chier, c'est pas le moment ! En fait, tous ce que j'ai envie de faire pour le moment, c'est de retrouver mon père et lui fracasser le crâne contre le trottoir, devant l'hôpital même. Et après ça, me bourrer la gueule jusqu'à plonger dans un coma éthylique, très profond. Un coma qui m'achèverait sur le coup. Puisque après tout, je ne compte plus pour personne.

- Bon Samuel, je m'en contre fou de tes états d'âme, ok ? elle bouge les mains dans tout les sens. Je veux juste savoir pourquoi tu as agit comme un con dans ce bar ? Putain, il aurait pu te démonter, merde ! Tu es boxeur, d'accord, mais on trouve toujours meilleur que soit, c'est comme ça.

Léna a l'air vraiment en colère, vu le pli qui s'est installé entre ses deux sourcils, et qui s'accentue lorsqu'elle me parle comme si elle me faisait la morale. Sauf qu'elle n'est pas ma mère ! La mienne est morte, il y a quelques heures !

- Je n'ai rien à te dire, ni de comptes à te rendre ! je me lève, furieusement.

Léna vient se poster devant moi, en marchant à toute allure, les bras croisés sur sa poitrine. Je ne sais pas si je suis encore bourré, mais n'empêche, elle doit avoir de beaux seins. Tout comme Lucie, d'ailleurs. Lucie, qui elle non plus, ne veut pas de moi.

Merde, c'est l'alcool qui s'accroche désespérément à mes veines et mes vaisseaux sanguins, qui parle en ce moment. C'est lui qui prend possession de chacune de mes pensées !

- Moi, qui croyais que tu ne ferais jamais de mal à une mouche, que quelqu'un de doux se cachait derrière ce visage dur à cuire, pff. Sûrement qu'il existe une personne douce et en manque d'affection, dans ton petit toi, mais elle ne s'est pas encore réveillée, elle baisse le ton. J'aimerais juste comprendre pourquoi, Samuel. Je sais, je suis chiante, mais j'ai toujours été comme ça. Je m'implique, même lorsqu'il ne s'agit pas de moi.

- Bas, tu devrais songer à arrêter ! je siffle froidement.

Je n'ai aucune envie de lui parler de ce qui s'est passé, il y a quelques instants. Je n'ai pas envie de voir la pitié briller dans ses yeux. Non, j'ai trop vu cette garce de pitié s'emparer des regards tournés vers moi et ma mère.

- C'est toi, qui devrais songer à t'ouvrir plus, et cesser de te recroqueviller ! elle grogne, plus fort.

Je pose ma main tremblante sur la poignée de la porte, et avant de sortir de cette atmosphère pesante, je me retourne vers Léna. Ses poings sont serrés, le long de son corps. Elle est en rogne, c'est sûr.

- Fais donc équipe avec Lucas, je lance. Avec vos thérapies à deux balle, vous risquez d'aller loin !

Je claque la porte, en adressant un regard assassin à l'intention de Dany et Lucas, qui sont restés collés au camion de pompier, ne ratant pas une miette de notre conversation. Puis je pars sans rien dire, le coeur en lambeau. J'ai besoin de quelqu'un pour arrêter cet incendie qui me bousille tout le corps. Mais personne n'est là. Personne.

Lorsque je sors de la caserne, je grogne de frustration. Ma voitures n'est pas garée devant. Ils ont dû la laisser là bas, pour être sûr que je ne la touche pas avant que je sois totalement sobre. Dommage, un accident de la route c'est pas plus mal.

L'alcool continue de me prendre aux tripes et de contrôler chacune de mes pensées, me transformant en une énorme boule négative.

Je reprends tranquillement ma route, menant jusqu'à mon appartement, qui était aussi le sien, le notre. Le froid me pique violemment la poitrine, un sanglot glisse délicatement sur ma joue lisse. Mon haut est déchiré sur le haut de mon torse, laissant apparent mon tatouage. Je le déteste maintenant, qu'il n'a plus de sens. Il n'avait du sens qu'avec ma mère, à mes côtés.

J'arrive en titubant à moitié, devant mon immeuble. Je tape le code, avant de pousser la porte, avec beaucoup de mal. J'arrive après quelques minutes, dans mon appartement. Aussitôt, je me dirige vers ma cuisine où je range secrètement mes bouteilles d'alcool. Je sors de la vodka, qui va sûrement m'aider à tenir. Je me sers plusieurs verres, je ne sais même plus combien. Je ne serais dire combien de larmes ont coulés sur mon visage, également. Mais c'est peut être semblable à un torrent.

- Quel petit merdeux, je suis ! Pas étonnant que tout le monde finisse par me quitter, on dirait que j'ai la peste ! je hurle en levant mon verre à travers mon salon, seul.

Je bois tout d'un coup, en manquant de m'étouffer.

- Je suis maudis !

Je trébuche soudainement, et tombe sur mon canapé. Mon verre vient s'exploser contre le sol, laissant des bouts de verre partout sur le celui ci. Bien sûr, mes pieds viennent se tordre à l'intérieur de cet amas, les faisant saigner. Je regarde, d'une vue moyenne, l'état de mes pieds. En tout cas, ce n'est pas beau à voir. C'est dégoûtant, comme la bile qui me submerge d'un seul coup, comme l'abandon de ma mère, comme la gueule de mon père, comme le message de Lucie juste avant de partir comme une voleuse, comme Paul et son air complètement faux lorsqu'il est désolé, comme les cheveux de Leah, comme les propos de Pamela, comme le rire de Carter, comme tout.

Je m'allonge, droit comme un piquet, sur mon canapé. Puis je ramène mes mains derrière ma tête, pour la surélever. Mes yeux me font atrocement mal ; c'est comme si j'entendais quelques vaisseaux péter à l'intérieur. Des petites étoiles viennent brutalement envahir ma vue, provoquant une étrange sensation de fourmillement, sous ma poitrine. Alors que je pense prendre mon verre remplit de vodka pure, je grogne. Je l'ai cassé, nom de dieu !

J'aimerais me relever pour m'en servir un autre, et cette fois ci, d'un bon cognac, mais je n'ai pas envie de bouger. J'attrape donc le paquet de cigarettes, que j'ai piqué dans ma boîte à gants, avant d'en sortir une. Mon briquet en main, j'allume celle ci. Lorsque la fumée emplit mes poumons, je respire tranquillement.

J'en fume, deux, trois, non quatre, peut être même cinq, comme ça. Puis la brûlure qui entaille mon coeur au plus profond de mes sentiments et mes émotions, se désenfle un petit peu. Vraiment un petit peu. Mais assez pour que je trouve enfin le sommeil. Un sommeil salvateur, réparateur. A moitié, seulement.

Puis je dors.

Je sombre dans une autre dimension, où la douleur s'efface et où le sourire de ma mère persiste du début jusqu'à la fin. Sans jamais me perdre. Sans jamais m'abandonner.

**

J'ouvre les yeux, une sale migraine, me prenant tout l'hémisphère Nord de mon crâne. Quelle plaie ! Je reste quelques temps à respirer l'air, qui me fait mal. Mes yeux fixent ce plafond, les souvenirs se perdant dans tout les sens. Des souvenirs vieux de plusieurs années en arrières. Ou seulement de quelques semaines, avant. Tout dépend de ce que je laisse entrer et sortir de mon esprit, qui vagabonde comme il en a envie, à partir de maintenant.

Après avoir fermer les yeux quelques secondes, pour ressentir chacune des sensations qu'apportent ces souvenirs, je me lève difficilement, faisant craquer mes jambes, ma hanche, mon cou et mes doigts également. J'ai l'impression que je vais m'effondrer, pour qu'il ne reste que quelques miettes de mon corps, éparpillées sur le sol de mon salon.

En marchant, je passe devant un miroir. Mes yeux me regardent sans vraiment le faire. J'ai l'air d'avoir mordu la poussière comme toujours, mais avec plus de violence. Ces traces d'impacts et de sang, me donnent une affreuse mine. Mes pieds se dirigent d'eux même vers ma salle de bain, pour que je puisse me laver le visage, éponger mon sang séché, et nettoyer toutes mes vilaines plaies.

- Putain, j'ai vraiment déconné, je me souffle tout bas.

Soudainement, on frappe à la porte. Je traîne des pieds jusqu'à celle ci, me demandant de qui s'agit-il. En tout cas, il est vraiment suicidaire, et encore plus ce matin. J'ouvre la porte, avant de fixer les yeux rouges d'un homme que j'ai croisé quelques fois, qui me fracasse encore plus le coeur, me rappelant sa fille, instantanément.

- Bonjour Smith, il avance timidement, en se grattant la nuque.

- Bonjour, George.

Il ouvre la bouche plusieurs fois, comme s'il voulait me dire quelque chose, mais il se ravise à chaque fois. Je le laisse donc entrer à l'intérieur de l'appartement, et prendre place sur le canapé. Il fronce les sourcils, en cherchant désespéramment quelque chose ou quelqu'un du regard.

- C'est à propos ? je demande, anxieux.

J'ai peur qu'il soit arrivé quelque chose à Lucie, par rapport à sa mère, ou même à George. Il a l'air si ailleurs, si anxieux, comme moi.

- De Lucie. Elle n'est pas avec vous ? il me demande, inquiet.

Je fronce instantanément les sourcils.

- Non, j'hésite. Je pensais qu'elle était revenue chez vous, depuis.

- Ah non.

Sa voix est tremblante et la tension ne cesse d'augmenter dans la pièce. Je ne comprends plus rien, essayant de me repasser en boucle, les événements qui ont eu lieu avant qu'elle parte. Oh non ! Merde ! C'est impossible. Pourquoi elle ne serait pas chez eux ?

Soudainement, mon coeur balance.

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Coucou !! Comment allez vous ? Je m'excuse ! C'est vraiment atroce ce que je vous ai fait ! Deux ou trois semaines sans nouvelle de la part de Smith ou de Lucie ! 😔😫 Pardon, pardon, pardon !

Je vous avoue que je suis un peu perdue, entre tout vos avis. En particulier sur le comportement de Lucie, que vous avez du mal à comprendre, ce que je comprends tout à fait en fait. Mais, j'avais fait ça, en partie parce que Lucie est quelqu'un d'altruiste, ça vous le savez, que c'est son première amour, et qu'aussi, elle se fait manipuler par Alban. Lucie sait des choses que vous ne savez pas sur Alban, c'est pour ça qu'elle reste chez eux tranquillement, et qu'elle tente désespéramment de l'aider pour son futur. Mais il y a beaucoup d'arguments des deux côtés qui s'opposent, donc bon. Je vais y réfléchir plus sincèrement, puisque j'avoue que je suis un peu secouée. Mais merci beaucoup pour vos commentaires sincères, qui m'aident ! ;)

Autrement, comment avez vous trouvé ce chapitre ?? Le mystère à la fin, sonne un peu les retrouvailles non ? (Je sais que c'est long, mais ne vous en faîtes pas !) Dîtes moi tout, c'est vachement important pour moi !

Désolée pour les fautes, je voulais le poster assez vite...

Bisous xx

PS : Il y aura bientôt une autre histoire, dans la même optique, qui sera publier sur mon compte.

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