Chapitre 5 (*)
AVERTISSEMENT : Scène explicite
Smith
Je me dirige vers ma chambre, pour espérer un peu de calme et un moment privé pour qu'enfin, je puisse me changer. C'est peine perdue l'autre petite emmerdeuse entre à l'intérieur, sur la pointe des pieds. En plus de ça, elle essaie de se faire silencieuse. Bon sang !
Pas plus tard que tout à l'heure, j'ai appelé les gars qui gèrent le tournoi et je me suis fait remettre à ma place, en plus des règles qu'ils m'ont rabâchées. À force je vais les connaître par cœur. Maintenant, je me retrouve avec cette fille sur le dos jusqu'à l'ultime combat. En même temps, comme ils me l'ont si gentiment expliqué — si on peut dire que gueuler est une jolie façon de parler — elle est plus en sécurité avec moi qu'à l'extérieur. Sur le coup, je n'ai même pas pensé à leur demander la raison pour laquelle elle a été choisie.
Lorsqu'elle s'arrête juste derrière moi, mon sang se glace à la minute. Elle a libre vue sur mes vilaines cicatrices et boursouflures qui m'entaillent tout le dos. Mon souffle s'intensifie alors que j'imagine son regard rempli de dégoût.
Quelque chose me dit que cette fille a un pouvoir hors du commun, et qu'elle pourrait en un seul regard savoir des choses sur moi, que je ne sais même pas moi-même. En plus, je me comporte bizarrement, à prendre des douches toutes les deux minutes. J'ai envie de fuir.
Subitement, je me retourne, le regard hargneux, la faisant légèrement sursauter.
— Qu'est-ce que tu me veux ?
J'ai cru comprendre que la conversation était terminée, tout à l'heure après son coup de fil.
— J'ai pas encore eu l'occasion de vraiment manger, je me disais que tu voulais peut-être... que tu voudrais petit-déjeuner... avec moi ? souffle-t-elle, hésitante.
C'est une blague. Je lui ai dit qu'il y avait tout ce qu'il fallait dans le frigo, et pas plus tard qu'une minute, elle tenait mon seul pot de glace à la vanille dans les mains. J'aurais dû lui interdire d'y toucher.
Je soupire un bon coup avant de passer à côté d'elle, sans lui adresser le moindre mot. Bien sûr, elle me suit comme un toutou suivrait son maître. Bon dieu, il va falloir que je redouble d'effort pour la garder avec moi.
— Dis, est-ce que tu comptes me garder enfermée dans ce trou à rat, pour toujours, ou j'ai le droit de sortir tant que j'accepte de vivre avec toi ? me lance-t-elle, timidement.
Je me retourne vers elle, prêt à faire exploser ma colère sur son joli visage d'ange. Lorsqu'elle aperçoit mes traits accablés par la rage, elle écarquille les yeux, en se reculant légèrement, comme si elle cherchait à s'échapper et à trouver du réconfort ailleurs que chez moi.
Je peux comprendre que cohabiter avec moi, n'est pas génial pour elle, mais c'est la seule solution pour la savoir en sécurité. J'ai réfléchi depuis le coup de fil passé aux gars, et la garder ici, est la meilleure façon pour que les choses se déroulent au mieux et que rien ne vienne me pendre à la gueule. Les jeux s'étant intensifiés depuis l'année dernière, elle a intérêt à faire gaffe. Surtout que mon adversaire va tout faire pour me faire perdre et que je mange la poussière. Il espère ça depuis toujours.
— Je vais te le dire une dernière fois, tu restes ici point barre.
— Donc, tu désires passer toutes tes journées et toutes tes nuits en ma compagnie ?
Elle sourit. Son sourire est faux et je déteste qu'on se moque de moi. Cette fille va me donner du fil à retordre, je le sens. Étrangement, je m'aperçois aimer ça. Si elle veut jouer avec moi, ce n'est pas un problème. C'est juste que les choses vont se corser pour elle.
— Pourquoi pas ? je rétorque, un air faussement joyeux.
Elle hausse les épaules, en s'asseyant sur l'un des tabourets qui font face à mon petit bar. Je soupire, puis je me dirige vers le frigo pour sortir du lait. Je prends ensuite un bol, que je pose devant Lucie, pour qu'elle puisse se servir en céréales. Elle ne tarde pas à faire son mélange et à prendre une grande cuillerée, tandis que je mords dans ma pomme.
— Alors comme ça, je ne suis qu'un butin ? C'est quoi cette histoire ?
Elle commence à s'impatienter et comme je la comprends. Elle n'en démordra pas la petite. Une vraie tête de mule. Le problème, c'est qu'elle me gave avec ses questions à la con, et auxquelles malheureusement, je vais devoir répondre. Pas de chance, ce matin, je ne suis pas d'humeur. Elle se heurte à un mur. Et puis, on m'a appris à toujours préserver un peu de suspens.
Elle attend patiemment, la tête penchée sur le côté. Finalement, en voyant que je ne dirais rien, elle soupire longuement, en serrant les dents.
— Tu ne me diras rien, c'est ça ?
— Enfin quelque chose que tu piges.
N'en pouvant plus de la voir devant moi, curieuse de tout, je me dirige vers mon canapé, dans lequel je me vautre tranquillement. Je jette tout de même un œil vers elle, en allumant la télévision. Lucie me reste de dos, pour mon plus grand bonheur. Je souffle. Ne plus entendre sa voix, est comme une bénédiction pour moi. Je n'ai jamais eu affaire à une fille aussi bavarde. Même Leah ne lui arrive pas à la cheville.
Il faut croire qu'elle est douée pour me surprendre et m'agacer.
— Il faudra bien que tu me le dises un jour !
Elle grogne en se tournant vers moi. Ses yeux lancent des éclairs. Je grogne à mon tour, en essayant de garder mon calme.
— J'ai une idée !
J'ai un mauvais pressentiment en regardant le sourire malicieux qui s'étend sur ses lèvres roses. Tout à coup, je la retrouve devant moi, les poings vissés sur ses hanches. Je reste silencieux, en attendant le cataclysme.
— Hum, voyons voir !
Elle se gratte le menton, les yeux levés vers le plafond. J'en profite pour la regarder dans mon vieux haut. Visiblement, elle n'a pas eu le temps de mettre un soutien-gorge. Ses seins se baladent d'une façon aguicheuse. Si aguicheuse que j'aimerais les prendre dans mes mains, ou ma bouche. Bien sûr, je n'en fais strictement rien, parce que je ne dois pas penser ce genre de chose à propos de cette fille.
Impossible.
Je relève les yeux sur son visage angélique et ses beaux cheveux blonds. J'ai beau la trouver chiante, elle a une chose qu'un homme remarque au premier abord, elle est jolie, d'une beauté naturelle.
— Si tu ne me dis pas tout de suite ce que je fais ici, avec toi, je pars d'ici que tu le veuilles ou non !
Elle hausse les épaules, prête à sortir les griffes. Malgré sa beauté, elle ne fait pas le poids. Je sens que je vais finir par la tuer, ou la barricader quelque part, pour ne plus entendre ses questions qui m'attaquent sans arrêt. Mon dieu, donnez-moi la force ! Cette fille me rend totalement dingo. Avec ses yeux furibonds, j'ai l'impression qu'elle veut me sauter dessus, et pas dans le sens que j'aimerais. On se croirait presque dans le jeu du chat et de la souris. À la fin, c'est moi qui gagnerai.
— Qu'on soit clairs tous les deux, si tu veux franchir cette porte, tu vas devoir me battre à la loyale, OK ?
En réaction, elle se met à rigoler. Fatigué, je baisse la tête et ferme les yeux pour échapper à ce cauchemar. Elle profite de mes quelques secondes d'inattention pour se sauver vers la porte. Je l'entends et je m'y étais préparé. Je lui laisse le temps d'avoir l'espoir de me tromper, avant d'avancer rapidement pour aller à sa rencontre.
Je la vois jouer avec la poignée. Les clefs ne sont pas sur la serrure et le fait de la voir tirer de toutes ses forces pour ouvrir la porte, me fait bien marrer.
— Tu ne m'auras pas. Maintenant, tiens-toi en place, et laisse-moi tranquille, j'énonce près d'elle.
Elle reste immobile comme pour m'amadouer, avant de reprendre là où elle en était. Putain, cette fille va me tuer avant que j'aie pu la tuer, tout compte fait.
— C'est ce qu'on va voir, gros nigaud ! Tu te crois intelligent, mais j'arriverai à savoir ce que je fiche vraiment ici. Oh, et j'aurai ma liberté.
Un sourire cocasse se dessine sur mes lèvres. Doucement, je place mes mains sur ses hanches pour la traîner jusqu'au canapé, histoire qu'elle puisse se calmer devant un programme. Têtue comme elle est, bien sûr, Lucie me griffe les bras et tente de me mordre. Je tiens bon, en riant. J'arrive tout de même à la balancer sur le canapé. Elle veut se relever, mais je la bloque en m'allongeant au-dessus de son corps frêle, mon bassin appuyant fortement sur le sien. Dans un mouvement vif, je bloque ses poignets d'une main, au-dessus de sa tête.
— Qu'est-ce que tu disais ?
Elle me fusille du regard, avant d'écarquiller les yeux, comme si elle se rendait compte de quelque chose d'affreux. Je fronce les sourcils, curieux. Mon regard se visse dans le sien. Tout à coup, je sens son corps trembler sous le mien. Je me souviens de ses paroles et qu'elle ne veut pas que je la touche. Je ne comprends pas pourquoi elle me repousse, non pas que je me trouve irrésistible, mais parce qu'une femme d'ordinaire aime le contact d'un homme. Ou vice-versa.
— Toi aussi, tu refuses de me répondre.
Elle ouvre la bouche, mais aucun son ne sort.
— Tu ne me diras pas pourquoi tu es comme ça, à chaque fois que je te touche ?
La question m'a échappé toute seule, mais c'est une vérité.
Lucie hoche la tête négativement, et je vois ses lèvres trembler. Une fois de plus, son visage rongé par la souffrance et la peur, me renvoie à des années en arrière, où ma mère arborait la même expression. Un pincement au cœur me vient immédiatement. Sauf que cette fois, je refuse de l'abandonner, ne pensant plus à notre conversation. Je fais en sorte de radoucir mon regard et laisse ma main droite se poser tout contre sa joue.
Sa respiration est lourde.
— Lucie.
Elle baisse la tête, en évitant soigneusement de croiser mon regard. Un électrochoc me fait revenir à la réalité. Il faudrait peut-être que je la laisse tranquille après tout ? On n'est pas amis, ni même proches. On est rien du tout, elle et moi. Je sais que mon devoir est de gagner ces combats pour qu'elle obtienne la liberté, mais c'est tout. C'est tout ce que j'ai à faire dans l'histoire. Ensuite, les choses redeviendront normales. Elle partira et je serais enfin seul. Toujours seul.
Nous sommes des inconnus.
En pensant à cette perspective, je me rappelle que le deuxième combat a lieu ce soir. Les deux premiers combats sont toujours plus rapprochés que les autres, il me semble.
— Hum... Kévin, tu m'écoutes ?
Sa petite voix me sort de ma torpeur. Je hausse les sourcils, un peu perdu. J'arrive à voir qu'elle me sourit timidement à présent et que la souffrance dans ses yeux à laisser place à autre chose. Je l'interroge du regard.
— Kévin ?
Kévin ? Ah oui, c'est comme ça qu'elle m'appelle désormais. Tout compte fait, c'est bien qu'elle ne sache pas mon vrai prénom, puisqu'elle n'a pas besoin de le savoir. Kévin. Je ferais mieux de m'en souvenir.
Je me baisse un peu plus vers elle, lorsque je vois quelque chose luire sur ses joues rondes. On dirait qu'elle a pleuré. Comment j'ai pu passer à côté de ça ? Je ne supporte pas les pleurs d'une femme et je viens juste d'en être la cause pour Lucie. Comme si on m'avait brûlé au plus profond de moi avec le souvenir de mon père, je me relève vivement sur mes deux pieds. Je lui tourne le dos.
J'entends la couverture qui couvre mon canapé faire du bruit sous ses mouvements, synonyme qu'elle est debout, juste derrière moi. Heureusement, j'ai mis un haut pour cacher toutes mes souffrances. J'attends patiemment qu'elle parte pour respirer, mais elle n'en fait rien. Elle reste plantée à quelques centimètres de moi.
— Où sont tes toilettes ?
Je souffle un bon coup, en serrant les poings contre mon torse. Les images meurtries de ma mémoire disparaissent rapidement.
— Au fond du couloir.
Elles disparaissent, mais laissent place à la culpabilité. Un sentiment que je n'ai ressenti jusqu'alors qu'envers ma mère.
Alors qu'elle s'apprête à partir, ma main trouve son poignet. J'y remarque de légères entailles cicatrisées, durant à peine trois secondes, avant de desserrer ma prise. La respiration de Lucie s'accélère encore plus, mais je la vois fermer les yeux pour lutter contre. Pour lui faire savoir que tout va bien — ce qui n'est pas dans mes habitudes avec une femme — je m'approche d'elle et pose ma main sur sa joue pour la deuxième fois en si peu de temps. Je me surprends moi-même avec ces gestes que je trouve cons, d'ordinaire.
Lucie ouvre instantanément ses jolis yeux clairs.
— On va faire un marché, toi et moi, d'accord ?
Je lui parle calmement, histoire que mon comportement et mes mots passent mieux. Elle plisse les yeux, en proie à une lutte sans merci. Son corps continue de trembler, mais ma caresse sur son poignet à l'air de l'apaiser.
— Encore un marché à la con, non ?
— Jamais avec moi, OK ?
Je monte tout de suite le ton. Je ne cesserai jamais de partir au quart de tour, quand je m'y attends le moins. Pas besoin de prendre de gants avec elle, j'en déduis.
— C'est quoi alors ? demande-t-elle, hésitante.
Je prends une grande inspiration. Il faut que je me casse tout de suite. Mon corps réagit trop bien au sien et je n'aime pas du tout ça. En plus, je n'aime pas cette fille. Ce n'est pas parce que sa souffrance me fait penser à celle de ma mère que je dois obligatoirement me rapprocher d'elle et encore moins la rassurer. Sauf que c'est inné chez moi. Bon dieu...
Je me recule un peu de son corps en lâchant sa joue. Puis, je me passe nerveusement la main dans mes cheveux en bataille.
— Tant que tu ne me diras pas pourquoi tu as peur de moi quand je te touche, je ne te dirais pas ce que tu fous là, et encore moins pourquoi je dois te garder contre mon plein gré. Puisque crois-moi, j'ai d'autres choses à faire que de jouer les baby-sitters.
Un éclair passe vite dans ses yeux.
— J'ai compris, lâche-moi ! se débat-elle.
Je la laisse courir vers les chiottes, pendant que moi, j'enfile des chaussures et une veste. Sans faire de bruit, je la rembarre dans mon appartement, et je prends la route pour rendre visite à Leah. Heureusement que Lucie m'a donné une bonne raison pour la laisser seule dans ce trou, pendant que moi, je prends du plaisir. Je suis sûr que j'aurai été incapable de la laisser malgré mon discours de chieur et mon envie de fuir loin d'elle, à cause de ma raison. Je sens que mes tripes pensent tout autre chose après toute la souffrance commune que j'ai pu ressentir.
Ce n'est pas le moment de ressentir les souvenirs et les sentiments.
Lorsque j'arrive devant l'appartement de Leah, je lui envoie un message pour l'avertir de mon arrivée. Aussitôt, la voilà sortie à son balcon, en petite tenue, un sourire sur le visage. Elle me fait signe de la main de monter, ce que je fais la seconde d'après. J'ai tellement envie de me soulager, même si l'image des larmes sur le joli visage de Lucie reste gravée sur ma rétine. Mon dieu, elle est toujours là au mauvais moment !
— Alors, on se sent seul tout à coup, sans Leah ?
Elle est furieuse contre moi, mais j'en ai rien à cirer.
Je m'approche d'elle, tout en la plaquant contre mon torse à l'aide de mes bras, pour ensuite écraser mes lèvres contre les siennes. En réponse à ma brutalité, elle enroule ses bras autour de mon cou, en me mordant la lèvre. Je grogne et fait durement heurter son dos contre le mur de l'entrée. Elle saute immédiatement dans un geste souple, et enroule ses longues jambes autour de mes hanches.
Toujours en l'embrassant, je ferme la porte d'un coup de pied. Pris d'une envie brutale, je me dirige vers le canapé, où je la jette. Elle se mord la lèvre en me regardant attentivement déboutonner mon pantalon.
— Retourne-toi, je grogne.
Je ne supporte pas de regarder cette garce dans les yeux.
Leah m'écoute et se met à quatre pattes sur le canapé, m'attendant patiemment, les fesses à l'air. Gourmand et surtout à bout de nerf, j'attrape le seul préservatif qui est coincé dans la poche arrière de mon pantalon avant de l'installer sur ma verge tendue. Une fois fait, je m'enfonce sans délicatesse et commence mes coups de butoir. J'aperçois Leah qui s'accroche à l'accoudoir.
— Oh bébé, plus vite, gémit-elle.
J'accélère mes coups de reins, en gardant une cadence assez soutenue, et lorsque j'atteins ma jouissance, je grogne bruyamment, en lui donnant un dernier coup de rein assez violent. Ensuite, je m'enlève en remontant vivement mon pantalon et pars jeter le préservatif usagé dans une de ses poubelles.
En regardant son appartement pendant une seconde, je me demande comment elle fait pour se payer ce luxe. Je ne me souviens pas avoir partagé quoique ce soit de sa vie privée avec elle. Je ne sais même pas si elle travaille, ce qui m'étonnerait beaucoup. Enfin, de toute façon, qu'est-ce que j'en ai à battre ? Tant qu'elle a un toit pour qu'on baise autre part que chez moi, je suis tranquille.
Je reviens vers elle, repu.
— Tu te sens mieux ?
Elle me regarde attentivement en enfilant sa culotte.
— Beaucoup mieux.
Je viens m'asseoir près d'elle, la mine grave. Lucie est toujours et encore dans ma tête, et elle refuse de s'en aller. Tout ce que j'espère, c'est qu'elle n'est pas en train de faire une connerie dans mon appartement. Putain, il serait peut-être temps que j'y aille ! Je me lève d'un bond, pour essayer de fuir Leah le plus vite possible, sans question. Mais malheureusement, j'échoue lamentablement.
— C'était qui cette fille, hier soir ?
— Le butin du combat.
Son sourire amer déchire le silence, révélant sa facette de garce, au grand jour. C'est pour ça que je n'aime pas vraiment parler avec elle. Elle est beaucoup trop spéciale dans ses propos et sa façon d'être. Mais il y a une chose que je ne peux pas lui enlever, c'est qu'elle est bonne au pieu, et très généreuse dans le genre gâterie.
— Tu devrais laisser Carter s'amuser avec elle. Je suis sûre qu'il serait ravi d'avoir un joujou pour la nuit, me souffle-t-elle au creux de l'oreille.
Bizarrement, je refuse de faire une telle chose. Inconsciemment, je l'ai refusé dès que je l'ai vu.
— Smith ?
— Ouais ?
Elle se rapproche de moi, et prend les pans de mon t-shirt, afin de pouvoir passer ses mains sous celui-ci. Je tressaille sans m'en rendre compte, lorsqu'elle passe ses ongles sur la cicatrice qui est présente sur mon ventre. Dans un automatisme, je la rejette pour qu'elle arrête de toucher mes marques horribles. Elles me répugnent. Elles font de moi une personne laide à l'extérieur comme à l'intérieur.
Leah me regarde discrètement en fronçant les sourcils, avant de sourire faussement.
Je la déteste.
— Tu penserais à l'éventualité de perdre ?
Tout de suite, je vois rouge. Je pense à l'éventualité d'avoir mal entendu plutôt, mais je sais pertinemment que c'est faux. De toute façon, c'est son mode de fonctionnement. Elle est garce jusqu'aux bouts des ongles et avec tout le monde. Je ne fais pas exception.
Je me relève, furieux.
— Jamais je ne te donnerais ce plaisir. D'ailleurs, je me casse, je dois me préparer pour ce soir.
Je me dirige vers sa porte d'entrée.
— Tu ne veux pas que je te fasse une autre petite gâterie, pour la route ? minaude-t-elle.
Je me retourne vers elle, le regard furieux, puis j'ouvre la porte pour me barrer vite d'ici. Une fois dans ma voiture, je démarre au quart de tour. Je repense aussitôt à Lucie. Je sais bien qu'elle n'a pas pu s'échapper, mais je ne sais pas ce qui se passe. J'ai comme l'impression qu'il est arrivé quelque chose. Que Leah n'a pas balancé cette question sans arrière-pensées.
Lorsque je me trouve devant mon immeuble, je monte les marches d'escaliers quatre par quatre, et j'arrive en trombe dans l'appartement. Je cherche Lucie, mais je ne la vois nul part dans la pièce du séjour. Je me dirige bientôt vers ma chambre, d'un pas décidé, pour la retrouver, recroquevillée dans un des coins de la pièce, le regard vide et les membres tremblants. Je m'approche doucement, jusqu'à arriver devant elle. Je me baisse et pose ma main sur son genou, dans un geste délicat. Tout de suite, elle pousse doucement ma main ailleurs.
— S'il te plaît, non.
Mes tripes se tordent et je n'arrive pas à me contrôler. Mes nerfs lâchent.
— Je ne te toucherais pas, Lucie. Promis.
Elle lève des yeux troublés sur moi.
— Pourquoi tu es comme ça ?
— Et toi, pourquoi tu n'étais pas là ?
Je ne sais pas quoi répondre.
— Qu'est-ce qui s'est passé ?
Je la vois déglutir anxieusement, comme si elle se précipitait dans la gueule du loup, ensuite.
— Un homme est venu... enfin, ils étaient plusieurs même, mais un seul a pris la parole. J'ai bien cru qu'il allait défoncer la porte, murmure-t-elle d'une voix perdue.
Je serre la mâchoire, tout en jurant tout bas. J'ai envie de frapper de toutes mes forces, de voir le sang s'exposer à mes yeux. Là, tout de suite. Les sanglots de Lucie me rappellent, eux, à la réalité.
Je pose la question, même si je pense connaître la réponse.
— Tu sais qui c'était ?
— Il s'est présenté sous le nom de Carter.
J'ai la rage. La putain de rage au ventre. J'aimerais cogner le mur, mais je m'abstiens. Lucie tremble comme une feuille, mais je ne la touche pas non plus. Pourtant, j'en ai aussi une putain d'envie. Je me contente seulement de lui demander :
— Tu n'as rien ?
— Non.
Je ferme les yeux, me forçant à ne pas faire de geste brusque. C'est elle qui me touche cette fois, de ses doigts froids. Je la regarde, en proie à un combat intérieur.
— J'ai peur.
Je fronce les sourcils en l'observant bien. Je ne veux pas qu'elle ait peur, je veux qu'elle se sente en sécurité. Bon pour ça, il faut peut-être que j'arrête de me comporter comme un con.
Tout à coup, tout s'éclaire là-haut, au fond de ma tête. La question de Leah me fait réfléchir et tourne en boucle. Carter est venu à mon appartement alors qu'il ne l'a jamais fait. Comme par hasard, lorsque je suis avec Leah, il vient, il en profite. Ça ne peut pas être un hasard.
Bon, je tire sûrement des conclusions trop hâtives, mais je les garde bien tapies dans l'ombre.
— Je suis là, Lucie.
— J'ai peur parce qu'il a dit que tu avais du souci à te faire.
Je grince des dents. Puisqu'elle me touche, je glisse doucement mon bras autour de sa nuque, en guettant toute réaction de sa part. Lucie ne dit rien, se laissant enfin aller à faire retomber la pression. Je la plaque tendrement contre mon torse, sa joue contre ma poitrine.
Tout en l'écoutant renifler dans un silence lourd, je me dis que c'est Carter qui devrait se faire du souci. Ce soir, il est mort.
****************
Coucou tout le monde ! J'espère que vous allez bien ? Alors comment avez-vous trouvé ce chapitre ? Entre comportement explosif, mais aussi un côté tendre que nous expose Smith, sans qu'on s'y attende ! Et alors que pensez-vous de la question mystérieuse de Leah et le passage de Carter à l'appartement ? Un hasard ?
Hâte d'avoir vos commentaires !
Rendez-vous au prochain chapitre ! :)
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