33. Smith

En attendant que le gobelet se remplisse de café, je relis encore une fois le message que m'a envoyé Carter, cette nuit. Il est complètement timbré de m'avoir dit qu'il allait gagner le combat final, et qu'il savait déjà comment il allait faire. Je ne comprendrais jamais son envie d'être le mort, et en l'occurrence de se faire tuer par moi-même. Je commence sincèrement à croire qu'il souffre de violent trouble du comportement et de la mémoire. M'enfin bon, s'il veut que je le casse en deux, c'est son problème ; qu'il continu avec ses insinuations et le tour est joué.

Alors que j'allais emprunter une seconde fois cet saleté d'ascenseur, les portes s'ouvrent sur Lucie, le visage remplit de larmes et l'air effondré. Elle me pousse subitement, faisant tomber le café que j'avais prévu de lui donner, à terre. Je me tourne dans un mouvement vif, pour voir qu'elle marche à une allure rythmée vers la porte de sortie, et qu'une fois celle ci franchi, Lucie se met à courir. Mes pieds me démangent, me faisant marcher à toute vitesse, afin de rattraper Lucie, pour qu'elle ne fasse pas de bêtise.

- Monsieur, revenez ! crie une infirmière derrière moi.

- Pardonnez-moi, mais j'ai...j'ai mieux à faire, je grimace.

Je pousse la porte avec brutalité, avant de me mettre à courir. Courir vers où ? Je ne sais pas. Mais il ne faut surtout pas que je la laisse seule, dans un moment beaucoup trop émouvant de sa vie. Elle l'a dit tout à l'heure, et clairement. Lucie a besoin de moi à ses côtés. Je peux au moins faire ça, pour elle.

Je me précipite vers le parking, où son père à garer la voiture. Malheureusement, elle n'est pas ici. Je regarde alors au loin, les muscles tremblant. Et lorsque j'observe la route, j'arrive à repérer ses cheveux blonds qui se reflètent à travers toute cette lumière. Prêt à la rejoindre, je coure encore, vers elle, évitant soigneusement les voitures qui sortent du parking. J'arrive vers elle, quelques minutes plus tard. Ses épaules sont rythmées par des soubresauts, et je l'entends renifler ; synonyme qu'elle pleure. Je m'approche donc à petit pas, avant de poser délicatement ma main sur son épaule.

Lucie se retourne instantanément, enlevant celle ci, d'un geste vif. En me voyant, elle essuie brutalement ses larmes, et essaie en vain de respirer normalement. Mais, elle s'effondre de suite, pleurant à chaudes larmes. Je souffle un bon coup, avant de la prendre dans mes bras.

- Non, Smith. Je ne veux pas de ta pitié, se débat-elle.

Elle frappe mon torse à plusieurs reprises, avant d'étouffer un cri, en me mordant légèrement l'épaule. Je ne dis rien ; je me tais. Lucie n'a pas besoin de paroles pour la calmer, puisque je sais pertinemment que ça ne marchera pas. Toutes ces conneries n'ont pas marché pour moi, lorsque j'étais petit, et même à l'heure d'aujourd'hui. J'ai toujours cette haine qui bouillonne dans mes veines. Et Lucie l'aura à son tour, jusqu'à temps que sa mère guérisse enfin.

- Je suis fatiguée, elle souffle doucement.

Lucie se calme petit à petit, en posant ses mains sur mes omoplates, puis se serrant un peu plus contre mon corps. Je pose alors doucement, ma tête sur le haut de son crâne.

- J'en ai marre. Marre de tout, et de ma vie, elle soupire tristement.

Moi aussi, j'en ai marre. Marre de faire semblant que tout va bien, et que la vie est belle. Puisque c'est loin d'être le cas. Il suffit de voir les personnes qui nous sont proches. Elles sont chacune, touchées par des maladie incurables, ou des dépressions. Plein de choses qui vous pourries l'existence et vous dévore de l'intérieur.

- J'ai si mal au coeur, elle respire lentement. Je ne sais même plus ce que je fais, ni à quoi je pense.

Elle lève soudainement les yeux vers moi, me prenant de court. C'est la première fois que je vois ses yeux, qui d'habitude sont lumineux et rieurs, remplit de douleur, qui la consume peu à peu. Instinctivement, je me revois à l'âge de l'adolescence, étouffer mes cris dans mon oreiller, en entendant ma mère pleurer et supplier Dieu de lui ramener mon père. Que des saloperies ! Quand je pense qu'il revient après tant d'années, comme une fleur, espérant se faire pardonner. C'est un bon manipulateur, puisqu'il a réussit à obtenir le pardon de ma mère. A dire vrai, il l'avait depuis l'instant même où il a franchit le seuil de notre maison, pour rejoindre cette assistante de malheur.

- Tu crois que je deviens folle ? elle me demande, perdue.

J'esquisse un sourire, en prenant une de ses mèches blondes pour la remettre à sa place, derrière son oreille. Lucie ne cille pas, sérieuse. Elle attend désespérément que je lui donne une réponse. Sauf que je ne sais pas quoi dire face à cette interrogation des plus idiotes. Bien sûr que non, Lucie n'est pas folle. Elle est loin de l'être. Elle est seulement envahie par une forme de douleur, qu'elle va traîner pendant quelques temps, lorsqu'elle pensera à sa mère, dans sa chambre d'hôpital.

- Non Lucie, tu es loin d'être folle. Tu es triste, abattue, et c'est normal.

J'ai vraiment envie de la serrer encore dans mes bras, et de ne plus jamais la lâcher, en voyant cette adorable tête qu'elle me fait. Mais je contrôle mes pulsions, la regardant droit dans les yeux, un sourire sur le visage. Tandis qu'elle essaie de résister à ce tsunami qui tente de lui percer le coeur.

- Pourtant, j'ai l'impression que mon coeur va se briser sur le sol à tout moment, et que mon crâne va exploser, d'une minute à l'autre.

- J'ai ressenti ça aussi, lorsque ma mère a été diagnostiqué, je lui explique calmement.

Lucie me regarde tendrement, avant de passer ses mains tremblantes dans ses cheveux, et regarder le sol, le regard effrayé. J'essaie alors de reprendre notre contact visuel, mais en vain. Je suis en train de la perdre, la laissant aller dans un océan de douleurs et de tristesse.

J'avance subitement d'un pas vers elle, afin d'emprisonner ses mains dans les miennes. Puis je les monte vers ma bouche, pour y déposer de tendres baisers. En m'observant faire une chose pareille, j'ai l'impression d'avoir été contaminé et d'avoir perdu la tête. Jamais je n'ai été aussi proche d'une femme, hormis ma mère et ma cousine, Fanny, qui était plutôt une jolie petite fille fragile. Je me souviens qu'elle nous rendait souvent visite, lorsque mon père nous a quitté. On jouait ensemble dans le jardin, comme des enfants insouciants et rêveurs. Depuis je n'ai plus de nouvelles d'elle, ce qui me rend un peu triste parfois. Mais c'est la vie. La vie pure et dure ; surtout cruelle.

- Je ne vais pas m'en sortir, Smith, elle souffle rapidement.

Brutalement, Lucie se met à trembler fortement, essayant de reprendre son souffle. Je libère ses mains dans un geste vif, avant de poser les miennes sur ses joues, devenues pâles. Je panique, en la voyant faire une crise d'angoisse devant moi.

- Smith...j'arrive....plus...plus...

- Quoi ? je hurle, paniqué.

Lucie s'effondre au sol, ramenant ses jambes vers sa poitrine. Elle les tient fermentent, le souffle rapide, cherchant un point d'oxygène. Je lève alors la tête, afin de vérifier qu'il n'y a aucune voitures autour de nous, prêt à la soulever pour qu'elle aille voir un médecin, capable de contrôler sa crise. Mais elle s'agrippe à moi, le regard apeuré. Je me laisse alors glisser contre les rambardes du pont, sur lequel nous sommes depuis tout à l'heure. Lucie s'approche de moi, cherchant à tâtons, une de mes mains. Je la prends alors par la taille, pour la faire asseoir sur mes jambes, puis je dégage ses cheveux qui se sont collés sur son visage.

- Je ne veux plus aller dans cet hôpital plus jamais, elle pleure. Plus jamais, plus jamais, plus jamais, elle répète avec insistance.

- C'est d'accord, on n'y va plus. Je reste ici, avec toi, sur ce trottoir, je lui murmure pour la rassurer.

- Oui, rester ici avec toi, elle murmure en posant sa tête sur mon épaule.

Nous restons quelques minutes, ici, collés l'un à l'autre. Lorsque j'entends du bruit près de nous, ou plutôt des cris. Je me hisse pour voir de quoi il s'agit, et quand j'aperçois le visage de George, je suis soulagé. Il arrive, essoufflé et inquiet, accompagné de Julien, si j'ai bien retenu. 

- Que s'est-il passé ? lance t-il d'une voix tremblotante, avant de s'accroupir au sol.

Il me regarde pendant quelques secondes, esquissant un vague sourire, puis porte sa main sur la joue de Lucie, qui s'est assoupie. Il souffle, soulagé, avant de se relever.

- Encore une de ses crises d'angoisses, il soupire, impuissant.

- Je vais la ramener à la voiture, dis je tranquillement.

Son père hoche la tête, en intimant à Julien de le suivre. Ils s'en vont donc débarrer la voiture, tandis que j'essaie de me relever. Au bout de quelques secondes, en m'accrochant à la rambarde, j'arrive enfin à me relever, Lucie dans mes bras.

En chemin vers la voiture, je l'observe, les yeux fermés, le visage enfin serein et cette air paisible capturant tout son corps. Elle est tellement belle, lorsqu'on la regarde de cet angle. Tout comme ce matin, seulement vêtue d'un t-shirt. Lucie a réussi à me donner des frissons, provoquant un brasier au sein de mon corps. Je n'avais jamais vu des jambes aussi attirantes et brillantes. Au départ, j'ai cru rêver, mais non, elle était bel et bien devant moi. Un sourire sur les lèvres et cet air gêné, dessiné sur son visage d'ange.

Cette image restera à jamais gravée dans ma mémoire.

- Tu montes avec elle, derrière ? me questionne George.

- Euh, bien sûr.

Je l'installe alors sur les sièges arrières, avant de poser sa tête sur mes cuisses. George démarre la voiture, et prend la route, une allure lente. Le trajet se passe dans le plus grand des silences.

Quelques minutes plus tard, nous arrivons enfin chez eux. Julien nous salue, pour rentrer dans la maison voisine. Je lui fait alors un signe de tête, poliment, avant de prendre Lucie dans mes bras. Lorsque je franchis le seuil de la maison, je sens celle ci gigoter dans mes bras, serrant alors mon t-shirt dans ses poings.

- Amène la dans sa chambre, m'intime George, avant de se laisser tomber dans son canapé.

Il est a l'air tellement triste, que je ne sais pas quoi dire. J'acquiesce donc, d'un mouvement tête, avant de monter les escaliers, pour ensuite arriver dans sa chambre. Je la dépose avec une extrême délicatesse dans son lit, remontant le drap au dessus de son corps froid. Puis, je m'assois au bout de son lit, épuisé.

- Smith ? m'appelle Lucie, d'une toute petite voix.

Je m'approche, jusqu'à m'accroupir devant elle. Un sourire se dessine sur son visage, me donnant envie de sourire aussi, par la suite. Mais je reste tout de même inquiet, ma main posée sur la sienne, au dessus du drap.

- Oui ?

- Viens avec moi dans le lit, s'il te plaît, elle souffle. J'ai besoin de toi, j'ai l'impression d'être devenu un glaçon, tellement je suis gelée.

Je ris. Puis j'enlève mon pantalon et mon haut, pour ensuite me glisser à travers les draps soyeux de son lit. Soudainement, Lucie se retourne vers moi, pour se réfugier dans mes bras. Elle se colle contre mon torse, posant délicatement ses mains froides sur mes pectoraux. Un léger filet de frisson me parcourt l'échine, avant de venir réchauffer mon coeur. Je passe alors mes bras autour de son corps, puis je dépose un léger baiser sur son front.

- Reste près de moi, chuchote t-elle.

- Je suis là, Lucie. Je reste, comme tu es restée pour moi, je lui glisse au creux de l'oreille.

**

Lorsque j'ouvre les yeux, il est plus de deux heures de l'après midi. Le corps de Lucie est toujours collé au mien, s'emboîtant parfaitement, comme si nous étions en symbiose.Je reste quelques minutes à la contempler comme le grand idiot que je suis, avant de me lever de ce nid à chaleur. Je m'assois sur le bord de mon côté, lorsque je sens légèrement bouger le lit. J'ose alors me retourner, pour retrouver Lucie, assise elle aussi, au bord de son côté. Ça me fait subitement penser aux films à l'eau de rose, le moment où les deux amants ont fait une erreur, et qu'ils n'osent pas se regarder. J'ai cette même impression, là, maintenant.

Sans y faire plus attention, je me lève pour enfiler mon pantalon et mon haut, qui avait pris congé sur le sol. Puis je sors discrètement de la chambre, rejoignant la cuisine. Quelques minutes plus tard, Lucie rentre dans la cuisine. Elle s'assoit face à moi, se frottant les yeux.

- Nous devons repartir, c'est ça ? elle me demande, timidement.

- On peut rester ici cette nuit, si tu le souhaites, je lui propose.

- Non, il faut que tu te reposes, et que tu t'entraînes. Je m'en veux tellement de te traîner avec moi, alors que tu devrais être là bas pour te préparer. Alors il faut qu'on parte, et maintenant si possible. (Elle n'ose pas me regarder dans les yeux). Et puis, je reverrais bientôt ma mère. Il nous reste deux jours à tenir, souffle t-elle, comme si c'était un supplice.

- Comme tu veux, je lui réponds, d'une voix distante.

- Très bien, elle se mord la joue.

Lucie passe de l'autre côté, pour avertir son père, qui la serre avec force dans ses bras. Les idées ailleurs, je les rejoins, afin de serrer la main de George. Puis en un seul coup de vent, nous prenons la voiture. J'ai l'impression que ma vie sonne faux depuis quelques temps. Notre relation est devenu instable, amenant des moments merveilleux et doux, et d'autres plus froids et détestables. Je ne comprends plus rien. J'ai comme l'impression de perdre le contrôle, alors que j'aimerais l'avoir pour toujours.

Lucie tourne légèrement la tête vers moi, essayant de me dire quelque chose, mais elle se ravise. Refermant ainsi le livre de nos secrets. Soudant le vide de nos cœurs, qui n'attendent qu'une seule chose à présent : être libérés.

A suivre...

-------------------------------------

Coucou !! J'espère que vous allez bien ??

Je vous avoue que je suis un peu plus triste de voir petit à petit ce tome se refermer, pour en ouvrir un autre qui j'espère vous étonnera et saura vous transporter comme celui ci. Alors ce chapitre, comment l'avez vous trouvé ?? Vous voyez à quel point leur relation est difficile avec toutes ces choses qui leurs arrivent à tout les deux ?? Dîtes moi tout !!

(J'espère que mon histoire ne vous lasse pas avec tout ces sentiments contraires et ces bouleversements...)

Le chapitre 34 promet de faire de sérieux dégâts, si je fais bien mon travail. Alors tenez vous bien !

Bisous bisous !!

Petit note : Au prochain chapitre, j'espère vous présenter la nouvelle couverture !!

Plus que deux chapitres.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top