22. Lucie
J'enfile mon manteau et mes chaussures de marche, pour aller accompagner mon père au parc. Il m'a expliqué, que ce petit tour lui ferait du bien après toutes ces tensions. J'aimerais bien lui demander ce qui a pu se passer dans la maison, lorsque j'étais à Mesa, mais je n'oserais jamais. Je pense que la semaine n'a pas dû être facile, puisque mon père a l'air épuisé. Il a des cernes sous les yeux, assez voyantes, et les bras tout ramollis. Je pense que j'irais voir ma mère, lorsque nous rentrerons de cette petite balade.
- Je suis content que tu viennes avec moi, ma puce. On pourrait se prendre une glace sur le chemin, comme on l'a toujours fait, hein ?
Son ton est si lasse et bas, que j'ai l'impression que mon père n'a pas l'air convaincu, que la glace soit une bonne idée dans ce cas là. Il n'allait jamais au parc, sauf quand Charlie et moi, l'obligions à venir avec nous. Et lorsqu'il faisait l'effort de nous tenir compagnie, le temps que ma mère prépare le dîner, il nous achetait une glace. Même deux parfois ! J'adorais ces sorties, pour être honnête, parce que c'était la seule chose qui nous rapprochait de nos parents. Mais le drame a surgit aussi vite qu'un coup de canon, cassant ce petit lien par la même occasion.
- Pourquoi pas ! Je pense que j'en prendrais une au citron cette fois ! je m'exclame, un sourire moyen sur le visage.
- C'est comme tu veux, Lucie. Je peux t'en acheter une deuxième si tu veux ? me demande t-il, en ouvrant la porte d'entrée.
- On verra ! je chuchote, en plaçant mon bras autour de sa taille.
Mon père passe alors son bras autour de ma nuque, pour que nos corps soient collés l'un à l'autre sur le côté. C'est donc comme ça, que nous partons à pied vers le petit parc qui fait le coin de notre rue. Nous croisons plusieurs personnes en train de courir, ou alors en train de rire à de mauvaises blagues. Tandis que nous marchons dans un silence apaisant, et sans conséquences. Ce genre de silence qui vous protège à chaque instant, de ce qui pourrait se passer. J'en profite alors pour ressasser la semaine que j'ai passé avec Smith. C'est fou ce que je n'ai pas vu le temps passer, même s'il y eu des hauts et des bas.
Je n'arrive pas à croire qu'il m'ait laissé partir. J'ai cru au fond de moi, qu'il ne me laisserais jamais cette opportunité, mais il l'a fait. Systématiquement quelque chose s'est glissé en moi, lorsque j'ai couru, sans même sentir sa présence près de moi. Quelque chose de fort, qui a renforcé cet espèce de lien, que j'ai tissé avec lui, ces derniers jours. Je me demande bien ce qu'il est en train de faire en ce moment. Peut-être que ma réaction était trop exagérée, mais savoir que tout cela avait été orchestré et que Smith le savait, m'a comme anéanti. J'avais presque confiance en lui. En fait non, j'avais confiance en lui. Mais j'ai eu tord de croire que nos "points communs" pouvaient nous lier et nous sauver mutuellement. J'ai cru qu'il était honnête avec moi.
- Alors, tu me parles de ce Kévin ? me demande soudainement, mon père.
Je rigole amèrement, en repensant à notre rencontre. Je crois bien l'avoir détester au début, tout comme lui me détestait d'ailleurs. Il a fallut que ma mère appelle aussi, pour prendre de mes nouvelles. Enfin plutôt pour m'engueuler de mon absence. J'ai choisi Kévin par automatisme. En plus de ça, ça lui allait bien. Mais je me suis trompée sur toute la ligne, puisqu'il s'appelle Samuel en vérité. Mais je crois qu'il n'aime pas vraiment son prénom...
- Tu as autant de chose à me dire, que ça ? plaisante mon père.
- Non, rien en fait, je souffle.
- Qu'est-ce qui ne va pas ? C'est finit entre vous ? Tu peux tout me dire ! s'exclame t-il.
- Tu vas trouver ça bête, mais ça n'a jamais commencé, je m'esclaffe. Et puis, il ne s'appelle pas vraiment Kévin.
Mon père me dévisage sagement, avant de soupirer lourdement. Je triture les petits bouts de peau au bord de mes ongles rongés, avant de me mordre la lèvre inférieure. Je suis un peu gênée qu'on ait cette conversation, mais je préfère l'avoir avec mon père que ma mère. Je sais que je peux lui faire confiance, et qu'il ne me jugera pas trop vite, au contraire de ma mère qui va démarrer au quart de tour, comme toujours.
Je souffle un bon coup, avant de me retourner vers le premier homme de ma vie.
- Bon, voilà, il s'appelle Smith. Enfin c'est son nom de famille, et il préfère que je l'appelle comme ça. Tout compte fait, je sais pas trop. (Je ris). Tout le monde l'appelle comme ça, alors je m'habitue. (Je marque un temps d'arrêt, réfléchissant à la suite). Ce n'est qu'un ami, et encore.
- Et encore quoi, Lucie ? s'inquiète mon père.
J'essaie de reprendre le cours de mes esprits, mais je suis perdue. Je me suis laissée aller dans cet engrenage à cause de ce jeu malsain dont je suis la victime. Dont je suis le putain de butin. J'aurais dû rester aux côtés de Smith, pour le soutenir et pour que cette boucle infernale cesse. Mais j'ai été lâche, et je le suis encore plus lorsque je vois dans quel état j'ai laissé mes parents. Je suis sûre qu'il va s'en sortir sans moi.
- Tout va bien ?
- Oui, oui. C'est seulement compliqué, mais c'est terminé, je glisse durement.
- Tu ne veux pas m'en dire plus sur ce Smith ? tique t-il. A quoi tu penses ?
Je pense à ce que j'ai fait, aux conséquences. Je pense à Smith. Je pense à ma mère qui a l'air si mal. Mais en premier lieu, je pense à ma vie qui va se jouer dans quelques minutes après cette conversation. Si j'ai laissé en plan Smith devant cette grande baraque remplie de gens bourrées, c'est seulement pour pouvoir cassé cet engrenage. Pour casser ce lien qui me retenait à Mesa. Et surtout pour faire taire ces voix qui me criaient que j'allais finir par tomber dans le mauvais camps, avec Carter.
- Tu n'as aucun souci à te faire, c'est bel et bien terminé.
- Mais de quoi, ma puce ? chuchote désespérément mon père.
Je ne réponds rien, tout en regardant l'arbre qui me fait face. Tout est terminé et demain je retournerais à la fac comme si rien de tout ça, ne c'était passé. Je ne suis le butin de personne, et ces combats illégaux n'ont jamais existé.
- J'aimerais bien avoir ma glace, papa ! Le glacier vient juste de s'installer, je me réjouis faussement.
Il se lève instinctivement du banc, et part en direction du glacier. Quelques minutes plus tard, il revient avec une glace saveur citron en main, et une autre à la pistache. Nous passons un moment à ne pas parler, laissant le silence nous prendre peu à peu. Lorsque le téléphone de mon père se mette à sonner. Celui ci se lève, avant même que j'ai pu entendre à qui il s'adressait.
Étant curieuse par rapport à ce coup de téléphone, je me lève le plus délicatement possible, afin de venir me placer non loin de mon père. De là, je peux entendre ce qu'il traficote avec son interlocuteur.
"Aujourd'hui ? Vraiment ? soupire mon père."
"Vous ne pouvez pas repousser les tests, s'il vous plaît ?"
"Pourquoi donc ? se moque mon père. Parce que ma fille est rentrée à la maison, et que je ne veux pas qu'elle s'inquiète pour sa mère une fois de plus ! Voilà pourquoi ! rugit-il."
"Très bien, nous arrivons dans une bonne heure, docteur, murmure t-il."
Je reste tétanisée, le regarde vide. Sans même savoir pourquoi, je sens une main se poser sur mon épaule avec tendresse. Soudainement, je me rends compte qu'il s'agit de mon père.
- Je suis désolée, ma puce.
- Des examens à passer, c'est ça ? Une fois de plus ? je respire.
Il me prend instantanément dans ses bras, en s'excusant pendant je ne sais combien de temps. Je sens même des larmes couler le long de ses joues. Des misérables larmes qui viennent brutalement, me piquer les yeux. Des images me viennent en tête, comme des piques. Je me souviens que ma mère allait faire des examens à l'hôpital de Phoenix. Mais elle en sortait toujours affaiblie, toujours plus effondrée. Et cette fois ci, j'ai un mauvais pressentiment.
**
- Tout le monde est bien attaché ? demande mon père, visiblement stressé.
Il tourne la tête vers moi, pour vérifier, puis tire sur la ceinture de ma mère pour s'en assurer lui même. Celle ci n'a d'ailleurs adresser aucune parole depuis que nous sommes rentrés de notre balade. Elle a dû pleurer. Je le vois sur son visage, dont les traits sont lourds.
Après trois quarts d'heure de trajet, nous arrivons enfin à l'hôpital du centre de Phoenix. La bile me monte à la gorge, mais je prends sur moi. Puisque cette fois, c'est à moi de prendre tout le courage. Je dois protéger mon père comme il l'a su le faire lorsque Charlie s'en est allé. Je dois être forte pour lui, pour mon frère, et surtout pour ma mère. Ma mère qui est plus que déboussolée. Cette fois ci, je ne flancherais pas.
Un homme en blouse blanche s'avance vers nous, un faux sourire plaqué sur son visage.
- Bonjour Monsieur et Mesdames, incline t-il la tête.
Je reste de marbre et écoute les explications qu'il a à nous donner, dans le plus grand des calmes. Ma mère qui se tient à mon père, a les yeux rivés vers la vitre qui donne sur le parking et l'autoroute. Je soupire un bon coup, avant de poser ma main sur le bras de celle ci. Elle est si froide, que j'ai l'impression de subir un électrochoc.
- Votre épouse va devoir rester ici plusieurs semaines, même plusieurs mois. Nous n'en savons rien, pour l'instant. Tant que les tests ne sont pas fait, la garantie que votre femme puisse rester chez elle, n'est pas tenue.
Tout d'un coup, le visage de mon père devient livide, comme si son flux sanguin s'était arrêté de fonctionner. Tandis que moi, mon coeur a cessé de battre. Ma mère ne tiendra pas des mois dans un hôpital, on le sait tous. Les crises sont encore plus fortes lorsqu'elle est enfermée dans une chambre. J'en ai déjà fait l'expérience quand j'étais plus jeune. Mon petit frère venait de mourir, et l'enterrement avait lieu le jour d'après, je me souviens très bien. C'est d'ailleurs à cette période que les médecins ont dessellé chez elle, une dépression nerveuse. A ce moment précis, elle faisait des tests pour savoir si elle devait rester en la compagnie des patients, ou chez nous. C'est là que la première grosse crise a lieu, et j'étais là, enfermée avec elle.
C'est la première fois que j'ai vraiment eu peur de ma mère.
- Je suis navré, mais c'est le nécessaire à faire. Du moins, si vous voulez qu'elle aille mieux, conclut-il.
A ce moment là, j'ai envie de lui crier dessus, et de lui certifier qu'elle n'ira pas mieux en étant avec eux. En prenant tout ces putains de médicaments à la con ! Mais je me rends compte, qu'elle ne sera pas mieux avec nous, même encore moins.
Je déclare forfait pour cette petite bataille, mais jamais je ne laisserais ma mère sombrer dans une autre dépression nerveuse.
- Très bien. Quand est-ce que nous pourrons la voir ? déclare mon père, abattu.
- Les week-ends seulement. C'est une règle que les hôpitaux de Phoenix ont mis en place depuis peu, nous avoue t-il. Marylène ! crie t-il.
Une jeune femme en blouse bleue s'avance vers nous, un sourire agréable sur le visage, qui nous procure ce sentiment de confiance.
- Bonjour, nous salue t-elle. Docteur, que puis-je faire pour vous ?
- Madame a besoin d'une chambre, et d'examen intensif. Vous pouvez gérer ça, pendant que je raccompagne ces proches aux portes de l'hôpital ? lui demande t-il, calmement.
La jeune femme s'approche de ma mère, et la prend gentiment par le bras, en lui murmurant des choses rassurantes. Puis avant que le docteur nous raccompagne dehors, la jeune infirmière tourne la tête vers moi, m'adressant un regard délicat, éteignant presque l'appréhension qui me ronge le coeur.
Sans un mot, nous quittons cet endroit de malheur, puis nous nous engouffrons dans la voiture de mon père. Dans un silence pesant, il démarre, et déglutit difficilement. J'aimerais le rassurer, mais j'ai du mal à garder mon calme. La dernière fois qu'ils ont pris ma mère en "cure", elle est revenue à la maison, froide et aigrie. Mais cette fois ci, j'ai bien peur que les conséquences soient bien pires.
- Tu devrais te reposer, ma puce.
- Non papa ! Cette fois, c'est toi qui va te reposer, je siffle d'une voix ferme.
Je réalise tout juste que, pendant que Smith se bat pour me protéger, moi, je dois aussi me battre. Mais pour protéger mon père et espérer retrouver la mère qui me souriait à longueur de journée.
A suivre...
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Coucou tous le monde !! Ouah, ça fait longtemps !! Ahah, j'espère que vous allez bien ? :)
Nouveau chapitre, que j'ai trouvé le temps d'écrire par petit bout, lorsque j'avais du temps libre ! Croyez moi, ça été difficile, et je m'excuse de l'attente que vous avez dû "subir" ! :)
Alors vous en pensez quoi ???? Dîtes moi tout !! Je veux tout savoir dans les moindres détails ! Puisque ce que je trouve que ce chapitre 22, nous montre un autre degré pour le titre "FIGHT" ! Un autre combat, en dehors de celui que Smith doit faire pour protéger Lucie, et celui que mène sa propre mère ! Eh oui, un autre combat s'ajoute, celui de Lucie pour ses parents !
Voilà voilà !!
Bisous mes amours !! Sarah !
PS : Désolée pour les fautes...
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