Nouvelle du Concours de @JusteViviana
Hello !
Suite à la suggestion de CinderWhite je poste le texte d'un concours (de JusteViviana) auquel j'ai participé et où je suis arrivée en 2e (j'en reviens toujours pas '-').
Thème : Clichés intéressants
Je vous laisse la découvrir (ou la redécouvrir ^0^) ! Enjoy ~
*****
Je m'appelle April et j'ai 16 ans. Je possède de longs cheveux noirs corbeau, toujours attachés, et des yeux verts. Je n'étais pas spécialement grande, et ma silhouette était plutôt normale : pas de seins semblable à des pastèques, ni de taille comparable à une guêpe et pas de postérieur rebondi. Je n'étais pas laide — personne ne l'était vraiment de toutes manières — mais il y avait des filles beaucoup plus jolies que moi.
C'était moi, April.
En ce moment, je marchais dans la rue, en direction de chez Suzy, ma meilleure amie. Je devais l'aider à faire ses devoirs et passer un peu de temps avec elle. J'étais heureuse de passer l'après-midi avec elle, et je ris légèrement à cette idée. Quand je fus arrivée devant la porte de sa maison, je frappai à la porte. Une jolie fille bronzée à la chevelure d'or m'ouvrit et elle me prit dans ses bras.
— Coucou ma chérie ! Tu vas bien ?
Je hochai de la tête et elle me sourit.
Suzy, ma meilleure amie était tout mon opposé. Extravertie, drôle et sexy. Tous les garçons se retournaient sur son passage, elle avait beaucoup d'amis et elle recevait de nombreuses propositions, autant pour des fêtes que pour sortir avec elle. Moi, de mon côté, j'étais plutôt introvertie et discrète. Je préfèrais le calme et les livres.
Je la suivis jusqu'à sa chambre. Je l'aidai avec ses devoirs lorsqu'elle ne comprenait pas et avançai les miens de mon côtés. Puis, quand nous eûmes chacune fini, nous nous allongeâmes sur son lit.
— Tu sais quoi ? Danny m'a fait une déclaration aujourd'hui !
— Ah oui ?
Elle acquiesça avec un grand sourire. Danny, ou plutôt Dan, était un élève de notre lycée qui étudiait dans le même collège que nous. Sa gentillesse, sa douceur et sa galanterie le faisait ressembler à un prince. Nous nous entendions très bien tous les trois et Suzy l'appréciait beaucoup.
— Et qu'est ce que tu as fais ?
— Je pouvais rien dire, j'étais vraiment surprise et il m'a juste dit d'y réfléchir. Mais je suis vraiment heureuse !
Je souris. Mon amie semblait être aux anges. J'étais sûre qu'elle allait lui répondre favorablement. Quel bonheur de la voir aussi guillerette !
— Et toi April ? Toujours aucun progrès avec ton amoureux secret ?
Mes joues chauffèrent et je sentis un peu de peine s'insinuer dans mon coeur. Je n'aimais pas parler de ça.
— Euh... Il ne me remarque toujours pas... Mais en même temps, c'est un peu normal, vu que je suis discrète...
Elle poussa un long soupir et elle me prit la main, tendrement.
— Oh, ma chérie, je suis désolée... Je peux peut être t'aider ? Enfin si je savais qui c'était...
Elle réfléchit et me demanda :
— C'est Nicolas, le bad boy du lycée dans lequel tu t'es cognée la semaine dernière ?
Je secouai vivement la tête.
— Alors, c'est Tristan, notre délégué ?
Je fis à nouveau le même signe de tête.
— Quentin ?
— Non...
Suzy souffla, exaspérée.
— Allez dit moi qui c'est !
— Non... Je suis désolée, mais je ne peux pas...
— Bon, très bien... Mais si jamais tu veux en parler, je suis là, hein.
Je hochai de la tête et lui fis un petit sourire. Puis nous parlâmes d'autre chose. Elle fit des blagues sur nos professeurs, qui me firent rire, et se lança dans des imitations. Puis, elle insulta copieusement Hannah, la peste blonde en plastique du lycée, maquillée comme un clown qui rabaissait constamment tous les élèves. Au bout d'un moment, elle se mit à me chatouiller, chatouilles que je lui rendis, et nos rires se mirent à résonner dans la pièce.
Notre après midi se résuma à cela : des conversations banales entrecoupées de fous rire et de grignotage. Un après midi génial et ordinaire chez ma meilleure amie. Vers vingt heure cependant je dûs rentrer chez moi. Suzy appela son père afin qu'il me ramène et elle nous accompagna afin de passer encore un petit instant avec moi. Quand nous fûmes arrivés, je descendis de la voiture et me penchai par la vitre pour lui faire la bise.
— Merci de m'avoir ramenée chez moi, Suzy.
— Mais de rien ma chérie ! C'est toi que je dois remercier pour m'avoir aidé à faire mes devoirs. Tu es vraiment trop mignonne et serviable !
— Non, c'était un plaisir pour moi...
— Tu es trop adorable. Allez, passe une bonne nuit. Bisous ! À demain !
Je souris timidement, et leur fit un signe de la main. Quand la voiture du père de ma meilleure amie se fut éloignée, je poussai un long soupir. Cette journée était terminée. Enfin je pouvais me relâcher. Arrivée dans le hall de ma résidence, je me dirigeais vers l'ascenseur en trottinant et appuyai sur le bouton pour l'appeler. Quand je fus à l'intérieur, je vis un jeune garçon de mon âge sortir du local poubelle et se diriger dans cette direction. "Le relâchement sera pour plus tard" pensais-je en retenant l'appareil afin qu'il puisse entrer.
— Euh... Bonsoir... soufflais-je en détournant le regard.
Il ne me répondit pas, ce qui me fit soupirer de dépit, mais aussi d'exaspération.
Ce jeune homme, je le connaissais bien. Shun Alley, 16 ans tout comme moi. Il vivait un étage au dessus du mien, mais il était également dans la même classe que moi. Il arrivait presque tout le temps en retard, et il manquait souvent les cours, surtout celui d'EPS, où il n'était jamais présent. Et pourtant, les professeurs ne lui disaient rien. Certains disaient qu'il séchait les cours pour faire on ne sait quoi et qu'il faisait chanter les professeurs avec des dossiers sur eux afin qu'ils ne lui disent rien. Je ne savais pas si ces rumeurs étaient en vraies ou pas, alors j'essayais de ne pas y faire attention. Dût à ses absences, il avait beaucoup de cours à rattrapper et, comme nous vivions près l'un de l'autre, j'étais chargée de lui apporter les devoirs. Je les lui laissais dans sa boîte aux lettres, avec toujours un petit mot de ma part. Malgré cela, il m'ignorait royalement, pire même, il me rabaissait quelques fois, me traitant d'hypocrite. Je ne savais pas ce que j'avais fait pour qu'il se comporte d'une telle manière avec moi, ni comment faire pour avoir une conversation normale avec lui. Son côté mystérieux et solitaire avait le don de me pétrifier, mais aussi de m'attirer irrésistiblement...
Soudain, une violente secousse fit tanguer l'ascenseur et les lumières vacillèrent un instant. Je me tins à la paroi de la boîte métallique en poussant un petit cri. Nous ne montions plus. Nous étions coincés.
Avec un calme olympien et une démarche nonchalante, Shun se dirigea vers le panel de commande de l'appareil et pressa le bouton d'appel. Après quelques secondes d'attente, une voix se fit entendre.
— Oui, qu'est ce qui se passe ? questionna le gardien de l'immeuble.
— Bonsoir monsieur, on est deux dans l'ascenseur et il s'est coincé.
Il était calme, posé, son ton était détaché. Le timbre grave et sexy de sa voix me donnait des palpitations.
— Très bien, ne paniquez pas, j'essaie d'appeler un réparateur et je vous recontacte.
— D'accord merci.
Après cette conversation, Shun se laissa glisser le long de la paroi métallique jusqu'au sol et poussa un soupir. Je me mis à le fixer. Ses cheveux bruns masquaient ses pupilles, d'une couleur dorée juste hypnotisante. Ses habits étaient noirs, jeans, tee-shirt et même ses baskets. La seule chose qui ressortait dans cet ensemble ténébreux était un collier doré auquel pendait un cristal brillant de mille feux. Différentes couleurs se mélangeaient et se reflétaient dans ce petit bijou. Il était justement en train jouer avec celui-ci. Je me concentrai à nouveau sur son visage. Sa tête était relevée et il semblait pensif. J'aurais aimé savoir à quoi il pensait. J'aurais aussi aimé briser le silence, un peu gênant, mais je ne savais pas comment m'y prendre. Je me mis donc à le fixer avec insistance, ou plutôt son bijou.
Il reflétait la lumière blanche de l'ascenseur et en déformait - ou décomposait plutôt - toutes les nuances. Je trouvais que cette petite pierre était une oeuvre d'art. Comment pouvait-on trouver de pareils joyaux dans la nature ? J'en avais vu en magasin, des cristaux comme ça. Pour certains, leur prix ne dépassait même pas vingt euros. Un prix si bas pour une beauté pareille ? Je trouvais que c'était dévaloriser une chose merveilleuse. Ceux qui l'achetaient le regardait quelques fois, puis au fil du temps oubliaient la magnificence de ce cristal. Et pourtant, moi, je pensais que c'était du gâchis. Finalement, on ne se rendait pas compte de la beauté des petites choses, enfermés dans notre petite routine. Un chant d'oiseau, la rosée du matin, un levé ou un couché de soleil, un bon repas, un enfant qui rit innocemment... Tant de petites choses merveilleuses que l'on ne prenait plus le temps de regarder, d'écouter ou de savourer.
— Pourquoi ?
" Hein ? Il m'avait parlé ? " Interrompant ma réflexion, je relevai la tête.
— Euh... " Pourquoi " quoi ? Soufflai-je.
— Pourquoi tu agis comme ça ?
Je me crispai, surprise par sa question. Je m'apprêtais à répondre, avant de me souvenir de la situation dans laquelle nous étions : enfermés dans une boîte en métal hermétiquement close. Je m'approchai de lui et, sous son regard interrogateur, je sortis mon téléphone et je me mis à taper frénétiquement sur mon écran. Après avoir fini, je le lui tendis.
« Si nous parlons trop, on va épuiser tout l'oxygène de l'habitacle. Mieux vaut juste respirer calmement pour l'économiser. On ne sait pas combien de temps on est coincés ici, et ce serait bien qu'on reste vivants tout de même. »
Il acquiesça et il prit son propre téléphone. Tout comme sa tenue, celui-ci était noir. Ses doigts tapèrent rapidement son portable puis il me tendis son appareil.
« Alors je vais te poser la question par écrit. Pourquoi tu agis comme ça ? Cruche et soumise aux autres... Beaucoup trop gentille, toujours trop serviable, même envers ceux qui sont exécrable avec toi... Pourtant, je sens que ce n'est pas sincère, que ça ne vient pas du coeur. Et ça, ça m'agace. Je haïs les hypocrites. Et pourtant, je sens aussi que tu n'as pas mauvais coeur, ce qui m'empêche de te détester. Alors j'aimerais savoir. Pourquoi cette hypocrisie ? »
Je me mis à le fixer. Je ne savais pas vraiment comment répondre. Franc jeu ou contournement ? Je me mis à réfléchir. J'appréciais Shun et je ne voulais pas lui mentir. Pourtant, cela impliquerait que je lui revèle mes raisons, qui étaient un peu gênantes. Alors que j'étais en pleine réflexion, une main s'abattit sur le côté de mon visage. Je sursautai et mes pupilles croisaient les siennes. Mon coeur se mit à cogner dans ma poitrine. Son regard était ancré sur moi et il était très sérieux. Je savais que son geste n'était que dans le but de me presser, pas pour m'effrayer ni pour jouer au bad boy ténébreux ou au macho comme Nicolas. C'était juste un moyen de pression. Je soupirai et commençai à taper sur mon clavier. Franc jeu alors.
« C'est pour un garçon que j'agis comme ça. »
Il fronça des sourcils. Je hochai de la tête, puis je me remis à écrire.
« Je veux être " gentille " et " mignonne " pour plaire à quelqu'un. Mais ça ne marche pas du tout. »
Il poussa un soupir.
« C'est sûr que si tu es si soumise et naïve, la personne se posera des questions comme par exemple : " Est-ce que je pourrais supporter une telle cruche ? ". Ce n'est pas étonnant de sa part. »
Je sentis un léger pincement dans la poitrine. Ses mots étaient plutôt durs.
« Mais si je change de comportement - que je me comporte normalement - trop brusquement, cela va paraître assez louche... Je n'ai pas envie que mes amis se retournent contre moi parce que je leur ai donné une fausse image de moi. »
Je l'entendis pousser un soupir, encore une fois.
« Si ce sont de vrais amis, ils ne te laisseront pas tomber. C'est vrai, quoi ! Un ami c'est quelqu'un qui te soutient tout le temps et plus particulièrement quand c'est difficile. Que serait un ami qui ne fait pas ça ? »
Je souris suite à son texte. J'adorais me poser des questions philosophiques, comme celle de l'amitié par exemple, et y réfléchir pendant des heures, surtout avec des amis. J'écrivis à mon tour une question :
« Pour toi un ami idéal, c'est quoi ? »
Je le vis hausser les sourcils, ne comprenant certainement pas le rapport entre notre discussion et cette question. Puis il se mit à réfléchir sérieusement avant de se mettre à tapoter son écran, plus lentement que tout à l'heure.
« En résumé, un ami idéal pour moi serait quelqu'un en qui je peux avoir une totale confiance et à qui je peux confier des secrets sans crainte. C'est une personne avec qui je peux passer beaucoup de temps, et une personne qui m'aide quand j'en ai besoin, mais qui sait respecter ma profonde intimité. Il faut qu'on ait quelques points en communs et qu'on accepte les goûts de l'autre s'ils sont différents.
Il faut qu'il accepte que j'ai d'autres amis, qu'il ne soit pas possessif en somme. Malgré tout, on devra passer beaucoup de temps ensemble, sans étouffer l'autre. De plus, il faudrait qu'il supporte toutes mes humeurs, positives ou négatives.
Il doit aussi comprendre mes choix, et les respecter, sauf s'il sent que c'est dangereux ou mauvais pour moi. Il doit savoir me conseiller si je suis dans la mauvaise voie, patiemment. Il doit aussi reconnaître ses torts s'il est en faute...
Et plein d'autres petites, mais importantes, choses.
Cependant, il faut que ça aille dans les deux sens, donc il faudrait que je puisse faire de même avec lui ou elle si je rencontrais, un jour, sait on jamais, cet ami idéal. »
Je fus émue par son aveu. Bien qu'étant court, il était plein de sentiments, de tristesse surtout. Shun avait besoin d'un vrai ami, je le devinais entre ses mots.
« Ta description est vraiment belle. Je dois avouer que j'attends les mêmes choses d'un ami à vrai dire. Mais tu l'as dis si simplement et de manière si ordonnée que ça prend une tournure très profonde... »
Ma main gauche se posa doucement sur sa droite. Je le sentis se crisper légèrement. Il ne devait pas avoir l'habitude de me voir si audacieuse. J'écrivis d'une main :
« La personne à qui je veux plaire est un garçon mystérieux et discret, surdoué. Nous avons les mêmes options et au vu de mes observations, je peux dire qu'il est impressionnant. Il est éloquent et a un esprit de meneur mais qui pourtant ne se manifeste pas souvent au vu de son caractère, plutôt taciturne. Il n'y a que au théâtre qu'il se relâche et agit comme cela.
Me disant que mon caractère têtu de garçonne allait le repousser immédiatement, j'ai essayé de me faire passer pour une gentille fille, à la fois prude et naïve, mais ça n'a fait qu'empirer les choses. Il est du genre à me dire que je suis une hypocrite d'une voix dure et glaciale et à m'ignorer comme si j'étais un poteau. Mais il est sûrement trop tard pour retirer le masque et agir " normalement ". Les gens me voient déjà comme la gentille et timide de service - alors que je ne suis pas timide, mais introvertie - et ils comptent sur moi pour certaines choses, alors je dois continuer jusqu'au bout, pour éviter de briser les relations que j'ai construit et décevoir les attentes... »
Je lui confiai tout. Mes sentiments pour lui - même si ce n'était pas dit de manière explicite, il devait s'en douter - et l'étau dans lequel je me trouvais à présent. Il poussa un autre soupir et commença à taper de sa main libre son texte.
« Who care ? C'est ta vie, ton caractère, tu ne peux pas les brimer à cause des autres. Il ne faut pas que tu sois prisonnière des attentes de tout le monde, tu dois décider de vivre ta vie comme toi tu l'entends. Et puis, des abrutis qui ne t'aiment pas au naturel, il y en aura des dizaines. Mais le plus important, c'est ceux qui t'aiment vraiment et qui resteront à tes côtés aussi longtemps qu'ils le peuvent. Vis ta vie, ne te cache pas, montre toi sous ton vrai jour et aie confiance en toi. Tu vivras plus sereine et heureuse de cette manière. Et il y aura forcément des personnes qui t'aimeront comme tu es, crois moi. »
Je levai la tête vers lui. Il me fit un petit sourire, très mignon. C'était la première fois que je voyais cette expression sur son visage, et il fallait dire que je l'aimais beaucoup. Alors que je composait un autre message pour répondre, une voix retentit dans l'habitacle.
— Bonsoir, c'est le gardien. J'ai trouvé un réparateur, mais il ne viendra pas avant quelques temps, environ une heure ou deux. Vous savez, un dimanche soir... Je suis désolé, mais vous allez devoir patienter.
Shun se leva, rompant ainsi notre contact physique et parla près du micro du tableau de contrôle.
— Merci infiniment, ça ira.
La communication fut coupée et il revint près de moi, assit en tailleur. Heureusement que l'ascenseur était plutôt grand ; on ne risquait pas de manquer d'oxygène, même si on parlait d'ailleurs...
— Si tu voyais le garçon à qui tu voulais plaire, quelle serait la première chose que tu lui dirais ? Bien sûr, au naturel.
Il avait prononcé cette phrase doucement, me regardant instamment. Je ne réfléchis pas très longtemps, y allant en improvisant.
— Tu sais, en vérité, je suis passionnée de rollers, de robots et de chevaliers. Tout ce que j'ai fait jusqu'à présent, le faux masque, c'était pour te plaire, ne sachant pas si tu allais apprécier la garçonne que je suis. Et maintenant que je suis au naturel, je veux te dire que je suis tombée complètement sous ton charme.
Il acquiesça avec le même sourire que tout à l'heure. Il me semblait même un petit peu gêné.
— Et la première chose que tu ferais ?
Cette fois ce fut à mon tour de sourire. Je portai ma main au niveau de mes cheveux et les détachai. Je me sentais plus libre et en confiance ainsi pour l'action que j'allais accomplir. Je me penchai vers lui et lorsque je fus à quelques centimètres de sa bouche je chuchotai :
— Je ferais ça.
Je réduisis le peu d'espace restant entre nous et nos lèvres se rencontrèrent. Jamais je n'avais eu autant d'audace. Mon coeur battait à tout rompre, et mes lèvres devinrent brûlantes. Les siennes, comparables à de la soie, caressaient les miennes avec une infinie douceur. Une agréable chaleur se répandit dans tout mon être et quelques larmes perlèrent au coins de mes yeux. Je ressentais enfin ce que les héroïnes de film ou de livre ressentaient quand elle embrassaient l'élu de leur coeur. Le frisson de bonheur qui parcourait l'échine, la chaleur qui montait dans tout le corps, cette impression de fièvre qui faisait tourner la tête, le coeur battant la chamade... Et les fameux papillons dans le ventre, que je décrirais plutôt comme une cascade déferlant et s'abattant avec violence dans mon estomac. Je redécouvrais la définition du bonheur. Quant à Shun, il ne se dérobait pas. Il profitait de ce baiser tout autant que moi, ce qui me confortait dans l'idée que ça ne lui déplaisait pas. Je rompus cet instant merveilleusement tendre et vivifiant et je murmurai à quelques centimètres de son visage :
— Je t'aime Shun. Depuis longtemps déjà. Je t'aime au point d'en souffrir.
Il plissa des yeux et m'observa un mélange d'émotions se lisant dans son regard noisette. Gêne, bonheur, surprise et un soupçon d'angoisse. Il poussa à nouveau un soupir et il passa un bras autour de mes épaules afin de m'attirer contre lui. Il déposa un léger baiser sur mon crâne et je compris qu'il avait accepté mes sentiments, rien qu'à ce geste adorable.
Nous restâmes blottis l'un contre l'autre, sans dire un mot, profitant de notre chaleur mutuelle. Je me sentais bien et pour rien au monde je ne voulais gâcher cet instant. Pourtant, je le fis car une question me brûlait les lèvres.
— Pourquoi tu es si souvent absent ?
Cela m'intriguait tellement, tous ces cours manqués... Il y eut quelques secondes qui passèrent avant qu'il ne prenne la parole.
— Pourquoi cette question ?
— Tout le monde au lycée, enfin dans notre classe, s'imagine que tu es un rebelle et que tu sèches tout le temps les cours...
— Et tu y crois ?
Son ton était légèrement froid. Je m'empressai de démentir.
— Non, absolument pas, mais c'est juste que j'aimerais savoir pourquoi. Tu sais, je me sens mal quand tu n'es pas là...
Je sentis son bras me serrer un peu plus fort contre lui.
— Est-ce que tu veux vraiment le savoir ?
À son ton, on sentait qu'il n'avait pas vraiment envie d'en parler. Malgré ma curiosité, je ne voulais pas le brusquer, le mettre en colère ou l'attrister. Alors je lui dis:
— Si tu ne veux pas, je respecte ta décision.
Un ange passa avant qu'il ne dise simplement :
— Merci.
Nous restâmes blottis l'un contre l'autre, sans rien nous dire après. La chaleur de ses bras et les battements rapides de son coeur me rassuraient et me donnaient l'impression que j'étais au paradis.
Au bout d'un moment, alors que je sommnolais un peu, l'ascenseur nous secoua avant de se mettre à redescendre. Nous étions enfin sauvés ! Shun m'aida à me mettre debout puis nous vîmes les portes de l'appareil s'ouvrir devant le gardien, et un autre homme, l'air profondément ennuyé.
— Je suis désolé pour tout le désagrément que vous avez dû subir.
— Non, ce n'est pas de votre faute. Et puis, ce n'était pas si désagréable en fin de compte.
Shun me lança un coup d'oeil, complice et je me sentis rougir. Le gardien sourit, mais ne fit aucun commentaire. Il raccompagna le réparateur devant l'immeuble tandis que nous montâmes vers nos paliers, en prenant les escaliers cette fois ci. Durant toute la montée, Shun me tint la main. Sa chaleur se répandait en moi via ce contact. Arrivés devant ma porte, il se tourna vers moi et il me fit un petit sourire.
— C'est ici que l'on se sépare.
Je hochai de la tête avant de répondre à son sourire.
— Alors, à demain !
Une ombre sembla passer sur son visage lorsque je lui dis cela.
— Oui... À demain.
J'allais lui demander la raison de son changement d'humeur, mais il s'en alla avant que je n'en ai eu le temps. Je poussai un soupir et je me tournai pour rentrer chez moi.
— Je t'aime April !
C'était Shun qui avait parlé. Je me retournai, mais il avait déjà disparu. Je souris et me dis que cette émotion fugace que j'avais vu sur son visage n'était rien du tout.
J'avais tort. J'aurais dû lui demander ce qui n'allait pas.
Le lendemain, il ne vint pas au lycée. Ni le jour d'après aussi. Il cessa de venir en cours, tout simplement. Il ne répondait pas quand je frappais chez lui, et il ne sortait plus de son appartement. J'étais dévastée et angoissé. Je ne savais pas ce qui lui était arrivé et je ne voyais pas de moyen de me renseigner. Les semaines passèrent, toujours rien. Suzy m'a conseillé de l'oublier. Mais je n'y parvenait pas. C'était au dessus de mes forces. Je ne comprenais rien de ce qui se passait, et personne ne pouvait m'aider. Le désespoir me gagnait un peu plus chaque jour.
Un jour, cependant, je reçus une lettre à mon intention dans la boîte. Il y avait tout simplement marqué mon prénom dessus. Dès que je fus chez moi, je l'ouvris et je commençai ma lecture.
« Chère April.
Je te prie instamment de me pardonner.
Je suis désolé de ne rien t'avoir dit. Je m'en veux de ne pas m'être confié à toi, cette nuit, dans l'ascenseur. Mais maintenant, je ne peux plus le faire de vive voix. Alors je t'ai écrit une lettre.
Pourquoi j'étais si souvent en retard, absent et ne participait à aucun cours d'EPS ? C'était parce que je souffrais d'une malformation cardiaque. Depuis tout petit. Je me soignais, j'essayais, mais les traitements sont difficiles à supporter, et mes médicaments, chers.
Mes parents étant morts vers mes quatres ans, je me suis retrouvé en foyer. Mais vers mes quatorze ans, j'ai décidé de demander à être émancipé, et ça m'a été accordé. Depuis, je vis seul, et je reçois la visite d'un tuteur, qui veille à ce que tout soit en ordre, des factures à mes bulletins de notes en passant par mes traitements. C'était lui qui s'occupait de ça, mais je l'avais entendu se disputer avec son supérieur à ce sujet. Même si une partie était remboursée, le reste devait être payé par eux, et ça faisait cher. Je ne voulais plus dépendre d'eux, et je ne voulais plus de ce traitement qui me pourrissait la vie. Alors je l'ai arrêté. Deux jours avant notre nuit dans l'ascenseur. Je commençais déjà à me sentir de plus en plus faible. Je savais que dans pas longtemps, j'allais rendre l'âme.
Ce qui n'était pas prévu, c'était cette panne et ce moment passé avec toi. Je n'avais aucune idée de tout ce que tu ressentais pour moi. Et puis, avec tout ça, je me suis rendu compte que tu étais une fille vraiment superbe. Je me suis mis à réfléchir, à me demander si je ne devais pas reprendre mes médicaments et mon traitement.
Mais j'ai été trop faible et lâche pour le faire. Je me souvenais de la difficulté que j'avais à le supporter, tout ça en attendant désespérément la greffe. Je n'avais plus d'espoir, je ne voulais plus continuer à vivre dans l'angoisse, en comptant les mois qui me restait à vivre. Je suis désolé.
Mais toi April, tu es toujours vivante. Je t'en supplie, vis pour toi même. Sois naturelle et ne fais pas attention à ceux qui te méprisent. N'oublie pas ce que je t'ai dit surtout. Il y aura toujours des gens pour te détester, mais il y en aura aussi qui t'aimeront. Comme moi même. Alors ne te retiens pas et profite à fond. Ne gâche pas la seule vie et la seule jeunesse que tu as. La seule chose que je veux te demander est de ne pas m'oublier. Bien sûr, ne brime pas tes sentiments à cause de moi, de tes souvenirs de moi. Passe à autre chose, fais ce qu'il te plaît, aime quelqu'un d'autre, fonde une famille heureuse et épanouie. Je ne te souhaite que ça. Mais s'il te plaît, ne m'oublie pas.
J'ai été heureux que cet ascenseur se bloque ce soir là. Avant, j'avais un immense poids sur le coeur, mais après, je me suis sentis plus léger, calme et serein. Je ne me serais jamais senti comme ça sans ton aide. Merci infiniment April.
Pour te remercier, j'ai glissé mon bien le plus précieux dans cette enveloppe. Il s'agit d'un collier, collier que je portais toujours d'ailleurs, que mes parents m'avaient donné. Je le gardais toujours avec moi, c'est comme un fragment de moi. Prends en soin.
Surtout April, vis une belle vie. Les sentiments que j'ai eu envers toi à partir de ce moment sont réels et forts, bien que toujours un peu confus. Je t’aime, n'en doute pas. Et même si après avoir lu cette lettre, tu te sens triste, abandonnée et malheureuse, ne te laisse pas abattre. Ça me ferait vraiment de la peine. Surmonte la tristesse que tu ressentiras à ce moment là. Je suis sûr que tu pourras le faire car tu es forte April.
Je crois en toi.
Adieu, April. Et n'oublie pas une chose.
Je t'aime ! »
Les larmes roulaient sur mes joues et un trou béant avait remplacé mon coeur. Je me ruais hors de chez moi et montai dans l'ascenseur. Une fois qu'il se fut mis en route, j'appuyai sur le bouton "Arrêt d'urgence" et m'effondrai au sol, ne retenant plus mes sanglots, tandis que l'ascenseur fut brutalement secoué. C'était ici que je m'étais confessée à lui, c'était ici qu'on avait passé notre premier vrai moment ensemble, mais aussi le dernier. Je relus la lettre encore et encore, à travers mes larmes, ne parveant pas à assimiler ce qu'il y avait écrit. Les mains tremblantes, je sortis son collier de l'enveloppe et le caressai du bout des doigts. Le cristal brillait encore de milles feux, comme ce soir là. Je l'enfilai doucement puis serrai la missive contre ma poitrine.
— Tes derniers mots me sont bien parvenus.
Après avoir reniflé plusieurs fois, je pris une grande inspiration et criai :
— Je t'aimerais toujours, Shun !
*°*°*°*°*°
J'enlevai mon casque de réalité virtuelle et poussai un long soupir tout en passant ma main dans mes cheveux.
— C'est pas vrai ! J'ai encore eu la mauvaise fin...
Jamais je n'avais rencontré un jeu de drague aussi prenant, réaliste et compliqué...
°*°*°*°*°
Yally
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