Kei - Douzième Nuit (II-NL)

Première Nouvelle Lune.

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Cela faisait des heures que je crapahutais dans les fougères. La dernière fois que j'avais eu affaire à une forêt-chantante, c'était celle du Monstre et elle ne m'avait pas autant entravée... Les forêts-chantantes naissent sur des terres emplies de forces magiques. Je n'ai jamais bien compris d'où venait tout ça mais je savais qu'il en existait partout à travers le monde. On racontait qu'elles pouvaient se déplacer sur d'impressionnantes distances. La Forêt des Songes où je me trouvais accueillait un peuple magique il y a très longtemps. D'après mes sources, il s'agissait de fées mais aujourd'hui, elles étaient toutes parties. Même les elfes n'en voyaient plus, ils disaient qu'elles étaient toutes parties ailleurs, loin du monde terrestre. Mais si la forêt répondait à chacun de mes pas, c'était sûrement qu'elle cachait bien quelque chose. Ou quelqu'un. Après une énième vaine tentative pour retrouver mon chemin, je hurlai de rage.

"Je ne suis pas là en ennemi !"

Le silence se fit soudain pesant. Je pensais avoir déclenché quelque chose de probablement mauvais pour moi. Mais un oisaurelle se posa sur une branche à ma hauteur. Étrange. Je pensais qu'il s'agissait d'animaux légendaires ou disparus. Les arbres s'écartèrent, ouvrant une voie sous mes yeux. Sans attendre, je m'y élançai. Quelques enjambées plus loin, je découvris une petite maison de pierre ornée d'une cheminée par laquelle s'échappait une fumée ocre. Je n'eus pas le temps de frapper à la porte qu'une vieille femme encapuchonnée m'ouvrit et m'invita à entrer.

L'intérieur était exigu et mal éclairé. Elle remuait longuement la mixture de son chaudron posé au-dessus du feu puis remplit une fiole avant de revenir vers moi. La sorcière me tendit le breuvage et me demanda de le sentir. Je restai interdit avant de m'exécuter. Une odeur douce et fruité parvint à mes narines. Je ne parvenais pas à savoir ce que contenait la potion alors je finis par interroger mon hôtesse.

"Qu'est-ce que c'est ?

— De la lyssae. Enfin, en partie... Cela a toujours été difficile d'en trouver... Enfin, comme tu es venu jusqu'ici, j'imagine que c'est parce que tu l'as rencontrée à nouveau ?

— ... Vous saviez que j'allais venir ?

— La Petite Étoile est descendue de nouveau. Et tu l'as retrouvé. C'est bien pour savoir cela que tu es venu, Kei ?

— Comment vous...

— Lynae reviendra toujours. Pour toi. Tout comme tu reviendras toujours pour elle...

— Que vous-voulez dire ? Je reviendrais toujours pour elle ? Je... Je ne comprends pas. Mais... C'est vraiment elle ? Ce n'est pas juste... Une fille qui lui ressemble ?

— Hahaha ! Comme tu es amusant ! Tu l'as senti ! Tu le sais que c'est elle ! Pourquoi hésites-tu encore à y croire ? Elle est là. Elle est revenue. Et ses souvenirs reviennent. Peut-être que les tiens reviendront aussi, qui sait !

— Mais je n'ai rien oublié ! Toutes ces années, tous ces siècles de solitude ! Je m'en souviens ! Je me souviens de celui qui m'a empoisonné et que j'ai tué. Je me souviens de ceux que j'ai massacré. Je me souviens de ma vie avec elle ! Je me souviens de tout !

— De tout... De cette vie.

— Mais qu'est-ce que vous racontez ?

— Tu n'as pas toujours été vampire, Kei. Lynae t'attend. Alors qu'attends-tu pour la rejoindre ?"

J'étais perdu. Avais-je vraiment vécu plusieurs vies ? Et à chacune d'elle, j'aurais été à ses côtés ? Ce qui importait, c'était qu'elle était de retour. Cette espèce de sorcière mystique avait raison. Je devais rejoindre mon amour. En sortant de l'obscurité, je remarquai cependant une chose étrange. La main de cette femme ne comportait que trois doigts. Et ce n'était pas ceux d'un humain. Je ne fis aucune remarque mais elle vit mon regard.

"... Il y a bien longtemps que j'aurais dû partir... Je suis la dernière, ici..."

Je hochai lentement la tête. Ce n'était pas une fée mais... Je pensais qu'elle faisait partie d'une race très ancienne qui avait aujourd'hui complètement disparu. En quittant la forêt, je repensais à l'oisaurelle et à la lyssae. Cette forêt-chantante comportait des choses disparues. J'ignorais d'où elle venait mais il me semblait qu'elle avait protégé certaines espèces même à travers le temps. Peut-être avais-je tort.

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