Chapitre 7 « Je ferai de ta vie un enfer »
— Euh... c'est à dire que... Je ne suis pas vraiment blessée. J'ai simplement une fragilité à la cheville droite mais cela ne m'empêche pas de danser.
Je sentais tous mes muscles, tous mes nerfs se tendre les uns après les autres.
— Ah bon. On m'a parlé d'un accident pourtant. Tu as vu un médecin ?
— Oui, j'ai rien, pas de fracture, pas d'entorse.
C'était vrai. De toutes façons je savais d'ores et déjà qu'il était inutile de mentir à Solange, elle découvrait toujours la vérité.
— D'accord, est-ce qu'il y a un risque que cela empire ? Bon, le plus simple c'est que tu te fasses examiner demain à l'Opéra, nous verrons si l'on a besoin de trouver une remplaçante. Il est hors de question que tu risques une blessure sur scène ou que tu mettes ta carrière en l'air en détruisant ta cheville.
Non non non pas ça... Je savais déjà que le médecin dirait à Solange de ne pas me faire danser. Mon état empirait chaque jour, ma cheville avait gonflé et même si je m'efforçais de le cacher, j'avais de plus en plus de mal à marcher.
— Mais Solange... j'ai dansé une semaine avec ma cheville et je ne crois pas avoir été mauvaise... S'il vous plaît ne m'empêchez pas de terminer cette session.
— Maya, ta persévérance t'honore, j'admire ta détermination, être capable de danser toute une semaine comme tu l'as fait, avec un membre blessé, c'est très impressionnant. Mais c'est aussi complètement inconscient et irresponsable. Tu te rends compte que tu aurais pu t'effondrer sur scène ? Toute l'image de l'Opera de Paris repose sur toi quand tu danses ! Il y a quelque chose que tu n'as pas encore appris de toutes ces années et qui te manque cruellement pour devenir une étoile, c'est la patience.
J'accusai le coup. Le souffle coupé par le ton glacial utilisé par Solange.
— Je... ce n'est pas vrai, ça fait des années que j'a...
— Assez, me coupa-t-elle, demain tu verras le médecin et c'est tout.
Elle raccrocha et j'eus envie de lancer mon portable contre le mur de la chambre de Clémentine.
Les dents serrées, je maîtrisais l'envie d'hurler, de frapper Claire jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus jamais danser. Je savais qu'elle profiterait de ma faiblesse pour tenter de prendre ma place.
— AH LA SALOPE !
Et merde, j'avais hurlé.
Quelques secondes plus tard des coups résonnèrent contre la porte et Clem entra dans la pièce.
— Maya ? Ça va ?
— Ça a l'air d'aller ?
Elle secoua la tête et m'interrogea du regard, rapidement je lui racontais la situation.
— Mais c'est affreux ! s'exclama la brune, D'un autre côté c'est vrai que c'est dangereux de danser dans ces conditions, mais tu connais ton corps mieux que les autres, si tu penses qu'il peut le faire c'est qu'il peut, enfin j'imagine.
J'acquiesçai, c'était un risque à prendre, j'étais prête à tout pour être la meilleure.
— Allez viens boire un truc, ça va te détendre, les gars sont déjà à moitié bourrés ou défoncés.
Je la suivis hors de la chambre, mon énervement n'avait pas faibli. La rage bouillait en moi.
— Starf' mais dans ce squa on a que des meufs pas nettes c'est ouf, entre Clem qui chiale H24, Adèle qui s'en balec de tout, Camille qui boit comme un trou et maintenant Maya qui tape des crises d'hystérie, on est mal barrés les gars.
— Au pire Sneazz tu fermes ta gueule ? répondit Clémentine avec froideur.
Son ami fronça les sourcils, visiblement surpris qu'elle n'ait pas rit à sa blague, contrairement aux autres gars qui se marraient comme des baleines. Mes yeux se posèrent alors sur Hakim, et je me rappelait alors que tout était sa faute.
Avant que je n'aie eu le temps de me jeter sur lui pour lui arracher les yeux, Clem qui avait suivit mon regard attrapa mon bras.
— Arrête Maya.
— Toi, hurlai-je en le pointant du doigt, tout ça c'est ta faute. Mon pauvre gars t'es mort.
Je tentai de me dégager de la prise de Clémentine mais Ken se leva vivement pour attraper mes épaules.
— Oh ! Ça va pas non ?
Je ne le regardai pas, fixant Hakim avec toute ma haine, me débattant tant que je le pouvais sous le regard éberlué de tous les invités.
— Lâchez moi, je vais l'éclater ce fils de pute.
Aussitôt, Mékra se leva d'un bond, en même temps que Framal et se rua vers moi.
— Jure elle a dit quoi cette salope ?
Clem me lâcha et se précipita vers Hakim pour tenter de l'arrêter. Mais celui-ci l'écarta en la poussant violemment, sa carrure mince ne la retint pas et elle s'étala par terre.
Tout se passa très vite. Ken me lâcha instantanément, et, assassinant son pote du regard, bondit vers Clémentine. Hakim réduisit l'espace entre nous en saisissant ma mâchoire d'une main, il me fit reculer jusqu'à me plaquer contre le mur.
— Répète ça.
J'avais envie de lui cracher dessus. Je le haïssais tellement ce soir. Mon rêve était la seule chose qui m'importait, ma seule raison de vivre, de me lever le matin. Et lui, avec sa bagnole de merde, menaçait de détruire ce que j'avais de plus précieux.
— T'as raison, t'es peut-être pas un fils de pute, après tout c'est bas d'insulter la mère alors que dans l'histoire, c'est le fils le putain de connard.
Il était à deux doigts de m'en coller une, je le lisais dans son regard. Pourtant quelque chose l'en empêchait, un principe peut-être. Tout le monde était figé autour de nous, je sentais que les gars avaient limite envie qu'il me gifle.
Mais en fixant ses prunelles sombres avec violence, je compris qu'il ne me frapperait pas. J'en étais certaine, je connaissais trop bien le regard d'un homme qui s'apprête à cogner.
— J'ai pas peur de toi, soufflai-je, Tu fais ton gros dur, mais tu sais pas à qui tu t'attaques, je suis mille fois plus dure que toi.
Hakim fronça les sourcils et je sentis la prise de sa main sur ma mâchoire se resserrer imperceptiblement. Il ne m'impressionnait pas, même ce regard colérique, ses yeux sombres plongés dans les miens ne me faisaient pas ciller.
— J'te fais chialer en deux deux, tu te crois vraiment plus forte que moi ? Tu sais qui j'suis ? Tu crois que tu me fais flipper avec tes grands airs de danseuse de mes couilles ? Moi les ptits rats j'les bouffe.
Je ricanai et il serra le poing, je vis les muscles de sa mâchoire se contracter.
— Toi non plus tu sais pas qui j'suis, je crois. Tu me feras jamais pleurer, parce que je pleure jamais. Tu me prends pour une princesse fragile mais t'as tout faux, t'as mis mon rêve en péril et je te jure que si à cause de toi je ne suis pas promue étoile, je ferai de ta vie un enfer.
Je pouvais lire une certaine surprise dans son expression. Evidemment, une danseuse, qui aurait pu penser qu'une danseuse de ballet puisse avoir plus de caractère qu'un rappeur ?
— Maintenant lâche moi ou tu vas regretter dès maintenant de pas avoir roulé plus vite et que je sois pas morte.
Mais sa main ne quittait pas ma mâchoire. Je sentais son souffle contre mon visage et cela me dérangeait. Bon, je l'avais peut-être un peu sous-estimé, il ne laissait pas tomber facilement.
— Lâche moi, putain !
Ses yeux étaient fixés sur mon visage, il tentait de m'analyser, je détestais ça. J'avais horreur qu'on essaie de me comprendre.
— Hakim lâche là, tu sais très bien que c'est ta faute si elle est dans cet état.
Clem s'était relevée, elle repoussa Ken qui tentait de la maintenir contre lui. J'étais surprise qu'elle continue de prendre ma défense, visiblement les gars aussi.
Mais Hakim semblait pris dans une bulle. Sa main continuait de serrer ma mâchoire.
— Wesh c'est quoi le problème entre eux là ?
Apparement personne n'était au courant.
— Il l'a renversé avec sa voiture putain ! s'exclama Clem, À cause de lui elle ne peut plus danser ! C'est comme vous si vous vous retrouviez aphones en plein milieu de la tournée ! Elle vient d'avoir sa patronne ou je sais pas comment ça s'appelle, au téléphone et elle veut plus la laisser danser.
L'ambiance se détendit d'un coup autour de nous. Tous les mecs rejoignirent leur place comme si de rien était.
Même la prise d'Hakim perdit de l'intensité.
Ah, ils avaient peut-être compris que ma crise était un peu légitime.
— Je croyais que t'avais rien, murmura le barbu.
Il me lâcha. L'expression de son regard avait changé, il y avait moins de colère et quelque chose en plus, de l'inquiétude peut-être.
— Bah j'ai quelque chose et crois moi que si demain soir je danse pas, t'es dans la merde.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top