Chapitre 56 « Je sais ce qu'il faut faire »

Serait-ce encore un chapitre ?
Trop de productivité en ce moment.
Je vais même publier incessamment un bonus sur Avide Tempête.
Bonne lecture et plein de bisous.

❤️

Clémentine venait de me rejoindre, elle m'accompagnait pour mon rendez-vous avec les deux danseuses. Nous devions les retrouver dans un café et étions en avance. J'étais toujours incroyablement sur les nerfs.

— Mais enfin qu'est-ce qui t'arrive ? me demanda mon amie, Tu t'es pris la tête avec Mékra ?

C'était le moins qu'on puisse dire, je n'étais pas près de lui adresser la parole à celui-là.

— Ouais, entre autres. De toutes façons autant te le dire tout de suite, Lucie est enceinte et Idriss l'a larguée.

Clem s'étrangla avec son Perrier.

— QUOI ?

Elle me lança un regard incrédule, comme si elle s'attendait à ce que j'éclate de rire pour démentir mes propos.

— Fram a largué Lulu, elle a pas osé lui dire qu'elle était enceinte de trois mois. Je suis allée au studio pour le pourrir mais Hakim m'a sortie en me disant qu'il s'en battait les couilles de ma pote. Je te jure qu'il a pas interêt à se pointer chez moi ce soir.

La jeune femme papillona des paupières, l'air atterrée par la nouvelle.

— Attends quoi ? Putain mais j'en ai trop marre de ces mecs. Quand je pense que je vais me les coltiner toute ma vie parce que j'ai eu le malheur d'en épouser un... Non mais j'imagine même pas dans quel état doit être Idriss... Le pauvre.

Eh oh ! Tout le monde semblait oublier que la victime dans l'histoire c'était Lucie, si même Clem se mettait à défendre Framal, on n'allait pas s'en sortir. Mon amie sembla comprendre que je n'appréciais que moyennement le fait qu'elle s'apitoie sur son futur beau-frère.

— Écoute, je suis sûre qu'il va revenir vers elle. Même s'il y a fort à parier qu'il risque d'abord de paniquer, il est pas complètement con et surtout, il est bien entouré. Je connais Ken, il le laissera jamais abandonner un gosse dans la nature, même Hakim. Il a fait son gros daron devant les gars parce que ça l'a fait chier que tu fasses une scène, mais je suis sûre que derrière il a défoncé son frère. Ne soit pas trop dure avec lui, je pense qu'il se sent un peu coupable, parce que si Fram n'est pas bien en ce moment, c'est à cause de ce qu'il lui a dit la semaine dernière.

Au moment où elle disait ça, mon portable vibra dans ma poche, je le dégainai pour lire un message de ma meilleure amie.

Lucie : Idriss est chez moi, il pleure depuis vingt minutes. Je sais pas ce que t'as fait mais merci.

Je dirigeai l'écran vers le visage curieux de Clémentine qui ébaucha un sourire attendri. Mes nerfs se calmèrent un peu, au moins ces deux là pourraient s'expliquer.

— D'ici à ce qu'Hakim fasse pareil, plaisanta-t-elle.

Alors là, surement pas.

J'aurais détesté voir Haks pleurer, je crois que cela m'aurait mise profondément mal à l'aise. Et puis de toutes façons, ce n'était pas parce qu'Idriss était retourné chez Lucie que j'allais pardonner facilement à mon mec de m'avoir foutue à la porte comme si j'étais un type torché en boîte de nuit.

— Maya... Tu sais très bien comment vous êtes, fit Clem comme si elle avait entendu mes pensées, Je suis sûre qu'il est aussi vénère que toi et qu'en même temps vous pouvez pas vous empêcher de flipper à l'idée que l'autre vous en veuille à tout jamais. De vraies galères.

J'allais lui répondre qu'elle était complètement à côté de la plaque mais Léonore et Claire venaient d'arriver. Je saluai gentiment la première et ignorai la seconde qui ne s'en formalisa pas, elle avait l'air vraiment mal à l'aise.

Les deux danseuses s'installèrent et commandèrent un café, personne ne savait vraiment comment entamer la conversation. Finalement, mon modèle absolu en terme de danse, brisa la glace.

— Bon, on a lu tout ton thread sur twitter, on a aussi appris que tu avais porté plainte contre Benoit. Je pense qu'il est temps qu'on l'ouvre nous aussi.

D'un signe de tête, je l'invitai à poursuivre.

— Avant que je sois nommée étoile, Benoit m'a fait comprendre que si je couchai avec lui, il pourrait faciliter mon ascension. J'ai refusé, mais il a continué à me draguer de façon très lourde. Ça allait jusqu'à des attouchements lorsque nous dansions ensemble. Tu penses, c'était hyper facile étant donné qu'on est obligé d'avoir une très forte proximité avec notre partenaire. Enfin tu connais je vais pas te faire un dessin. Je m'en suis plainte à Solange, elle n'a strictement rien fait et m'a dit que si je n'étais pas contente de danser avec lui, elle pouvait me remplacer. J'étais jeune et j'avais un peu trop d'ambition, j'ai préféré laisser les choses ainsi jusqu'à ma nomination.

Estomaquée, j'observai Léonore sous un tout autre jour. Jamais je n'aurais pensé qu'elle ait pu subir le harcèlement de Benoit. C'était le genre de personne à qui tout avait l'air de réussir.

— Je suis prête à témoigner s'il faut, on peut pas laisser ce type continuer d'abuser de son pouvoir. Et surtout le laisser impuni. Claire a aussi des choses à dire et elle a découvert quelque chose de très intéressant.

La belle blonde fit signe à sa voisine de poursuivre. Claire n'osait pas lever les yeux vers moi, elle triturait fébrilement son sachet de sucre.

— J'étais amoureuse de Benoit... et quand il l'a compris il s'est servi de moi pour avoir Maya. C'était obsessionnel, je sais pas pourquoi dès qu'il t'a vue avec Hakim il est devenu fou. Une sorte de besoin maladif de t'arracher à lui. Enfin bref. Il m'a fait faire tout ce qu'il voulait, j'étais son objet jusqu'à ce qu'il trouve un moyen de t'avoir. Là il m'a lâchée comme une merde. Mais j'ai découvert quelque chose, j'ai compris pourquoi Solange le protégeait quoi qu'il arrive. Je les ai surpris dans son bureau, il couchait avec elle.

C'était une énorme blague. Alors là, si je m'attendais à une nouvelle pareille. C'était complètement incroyable.

Mon Dieu mais quel scandale !

— Je sais ce qu'il faut faire, dit Clémentine qui n'avait pas ouvert la bouche depuis l'arrivée des deux femmes.

Nous détournâmes toutes les trois les yeux vers elle.

— Un ou une journaliste de confiance. Une seule interview, un seul témoignage, un seul journal. Vous n'êtes pas obligées de révéler votre identité. Mais vous lâchez tout. Ce mec faut le détruire. Ensuite, vous allez pouvoir témoigner comme nous tous sur le dossier judiciaire. Ça avance très lentement, mais plus il y a de témoignages plus ça va être difficile pour lui de faire jouer ses relations. Ken connaît bien le milieu de la presse, il a donné un paquet d'interview, je vais lui demander de nous conseiller quelqu'un.

Il me semblait effectivement qu'au vu de ce que nous venions d'apprendre, c'était une bonne solution pour empêcher Benoit de retourner la situation.

Les deux danseuses acceptèrent finalement la proposition de Clémentine et après avoir discuté pendant plusieurs minutes, nous nous séparâmes.

— T'as pas envie d'appeler Haks ? me demanda Clem, Pour lui raconter.

Comment arrivait-elle à lire dans mes pensées ?

— Nan. Qu'il aille au diable.

Mon amie leva les yeux au ciel, absolument pas convaincue. En arrivant chez moi, je passai un bref coup de fil à Lucie pour lui raconter.

— C'est bien ce que je pensais, fit-elle, Benoit est une sombre merde, tu devrais écouter Le Vicieux de L'entourage, c'est vraiment son portrait craché.

J'acquiesçai, pour l'instant les rappeurs me couraient un peu sur le haricot.

— Comment ça va avec ton crétin des montagnes kabyles ? demandai-je tout de même.

— Et bien... il a débarqué chez moi en reniflant, il m'a dit qu'il était le roi des cons et qu'il m'aimait. Il m'a dit que certains gars pensaient que je lui avais fait un bébé dans le dos pour le garder, mais qu'il pouvait pas le croire et que même si on restait pas ensemble toute la vie, il serait toujours là pour son enfant.

Le ton mièvre de Lucie m'écœurait un peu. Pourvus qu'Hakim et moi ne soyons jamais comme ça.

— J'arrive pas à croire que tu sois enceinte. Comment tu vas faire pour la danse ?

Elle soupira, dans notre milieu c'était très compliqué de gérer une grossesse, cela signifiait s'absenter presque un an et avec le risque de ne pas retrouver son niveau.

— J'en ai parlé à Laure, la nouvelle maîtresse de ballet, elle m'a dit que c'était la vie, que ma place m'attendait parmi les premières danseuses. De ce côté là ça va, mais c'est surtout que ça va tellement me manquer...

Je la comprenais, cela faisait une quinzaine de jours que je ne me rendais plus à l'Opéra et je le vivais assez mal, même si je continuais de m'entraîner chez moi ou chez Hakim pour ne pas perdre ma souplesse, ce n'était pas pareil.

— Bon, appelle moi si tu as besoin de quoi que ce soit Lucette, je suis là pour toi tu sais.

Elle me remercia et après avoir raccroché, je me sentis un peu seule. Clem devait avoir retrouvé son fiancé, Lucie était avec Idriss, et moi... J'étais totalement inexpérimentée en ce qui concernait les relations amoureuses. Comment étions nous censés mettre fin à cette dispute ?

Je n'étais plus vraiment énervée contre Hakim, j'avais envie de le voir et j'appréhendais le fait de dormir seule.

Tout était toujours une question de premier pas.

Ne cède pas, comment faisais-tu quand il n'était pas dans ta vie ? me dit ma conscience.

Elle avait raison, c'était lui qui m'avait foutue à la porte.

Oui, mais tu as insulté son frère, en plus de l'avoir frappé, qu'aurais tu fais s'il avait fait de même avec Lucie ? me contredit mon coeur.

Il n'avait pas tort lui non plus.

Les mots de Clémentine me revenaient en mémoire, Hakim se sentait coupable par rapport à son frère et je savais qu'il avait détesté le fait que je me fasse remarquer devant les gars. Honnêtement, avec le recul, j'avais un peu honte de la scène que j'avais fait au studio.

Je décidai d'aller me coucher, un peu triste et déçue que la journée se termine ainsi.

Malheureusement, le même cirque se rejoua dans ma tête durant la nuit. Je rêvais d'enfermement, du visage et des mains de Benoit. J'ignorai pourquoi c'était la partie de son corps qui revenait tout le temps dans mes cauchemars. Ses longs doigts fins qui m'écœuraient, je les voyais sur moi, je les sentais sur moi, partout.

Dans un hoquet de dégoût je me réveillai avec la bille au fond de la gorge et les larmes aux yeux. Me rappelant l'absence d'Hakim, c'est sans réfléchir une seule seconde que je saisis mon portable sur ma table de nuit. Il était deux heures du matin, tant pis.

Il décrocha au troisième appel. Son silence au bout du fil m'indiqua qu'il attendait que ce soit moi qui parle.

— Hakim... murmurai-je simplement.

— J'arrive.

La course folle de mon cœur se calma en entendant sa voix. Il avait déjà raccroché et je m'empressai de me lever pour l'attendre sur le canapé. Les yeux fixés sur le mur en face de moi, je laissais défiler les minutes en m'imaginant ce qu'Hakim était en train de faire.

Quand la moitié du cadrant fût parcourue par la grande aiguille de l'horloge, je me dirigeai naturellement vers la porte d'entrée et le bruit de l'ouverture de l'ascenseur me parvînt. Mes doigts tremblant sur le loquet mirent quelques secondes avant de trouver la force tirer dessus.

Mon cœur se souleva violemment dans ma poitrine en découvrant le regard sombre d'Hakim sur le palier.

Un sanglot m'échappa et un flot de larmes dévalèrent mes joues.

— Je suis trop conne... Je sais pas comment on fait pour se réconcilier, j'ai jamais fait ça de ma vie, mais je ne suis plus fâchée contre toi et j'ai pas envie que tu le sois, parce que quand t'es pas là je fais des cauchemars et je suis malheureuse. Je crois que je suis censée m'excuser mais même ça j'ai du mal à le faire parce que je suis trop orgueilleuse. Je suis une handicapée des sentiments Haks, mais je sais que j'ai besoin de toi et c'est énorme pour moi de le reconnaître. Je déteste avoir l'air faible et là c'est pire que tout. Je suis pathétique et je me déteste.

Reniflant bruyamment, je rentrai dans l'appartement en laissant la porte ouverte.

Je rejoignis aussitôt mon lit en priant pour qu'il me suive, le bruit de la porte que l'on claque me parvint, puis je reconnus le pas du rappeur qui se dirigeait vers la chambre. Les sens en éveil malgré mes sanglots, je sentis le lit s'affaisser, entendis ses Nikes tomber au sol l'une après l'autre, puis le mouvement de ses vêtements glissant sur sa peau. Enfin, un courant d'air froid m'arracha un frisson lorsque la couette se souleva.

Mais bien vite, une chaleur intense emplit mon organisme lorsque les bras puissants d'Hakim se refermèrent autour de moi et que mon dos fut plaqué contre son torse.

— Je déteste quand tu pleures.

Ce simple chuchotement à mon oreille était suffisant, il signait la fin des hostilités, celle de mes cauchemars et le retour de mon sommeil.

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