Chapitre 39 « Toi et moi, faut qu'on parle. »

Bonne nouvelle, il y aura deux chapitres aujourd'hui, parce que je suis super sympa, super productive et que vous êtes les meilleurs donc j'ai envie de vous mettre bien.
À ce soir et bonne lecture.

Bisous partout.
❤️

Soit Hakim n'avait pas été mis au courant, soit il s'en foutait, mais une chose était sûre, il n'avait pas réagi. Pourquoi en étais-je déçue ? C'était ce qu'il y avait de mieux après tout, il m'avait oubliée, il ne se mettrait pas en danger pour moi.

Mais au fond, je savais pourquoi cela me blessait, c'était parce que pendant ce temps, je continuais de subir les sévices de Benoit pour le protéger. Pourtant, même si l'on m'avait dit qu'il me détestait ou qu'il était totalement passé à autre chose, j'aurais continué. Rien ne m'aurait fait changer d'avis. Je me disais que peut-être que Benoit allait finir par se lasser de moi, de mon corps, de coucher avec une femme qui n'y prenait aucun plaisir et qui se contentait d'attendre patiemment qu'il ait finit. Mais j'avais l'impression que plus il se rendait compte qu'il avait beau posséder mon corps, mon coeur lui ne lui appartiendrait jamais, plus il devenait avide de contrôle sur moi. Cela devenait clairement intenable, il m'appelait n'importe quand, me suivait, me questionnait tout le temps pour savoir où j'étais ce que je faisais, même au point de vue sexuel, c'était de pire en pire, de plus en plus souvent, de plus en plus dégradant. J'étais sa chose.

Très étrangement, Claire avait changé du tout au tout, elle ne parlait plus à personne, y compris à Benoit et ne me lançait même plus de piques ou de regards narquois, elle avait au contraire l'air très effacée et je trouvais ça plutôt étrange.

Lucie ne m'adressait plus la parole depuis qu'elle avait vu Benoit m'embrasser, je supposais qu'elle pensait que j'étais totalement consentante et je ne comprenais pas comment elle pouvait croire cela. Mais ce n'était pas plus mal, mon secret restait bien gardé. Cependant j'avais besoin d'elle, sinon j'allais littéralement perdre pied et finir comme ma mère ou ma soeur.

La mort, j'y avais pensé plus d'une fois, mais j'étais bien trop fière pour cela, personne ne réussirait à m'abattre suffisamment pour me conduire au suicide. J'étais plus forte que cela. Alors je me saoulais, c'était peut être pathétique, mais l'alcool était mon seul réconfort et Dieu savait que seule sa brûlure dans ma gorge parvenait à adoucir un peu celle de mon coeur.

Les semaines devenaient des mois et rien ne changeait. Dans le courant du mois de novembre, alors que Benoit était à New-York et me laissait un peu de répit, je finis par aller trouver Lucie qui me manquait plus que quiconque.

— Lucie, commençai-je alors qu'elle nouait ses pointes autour de ses chevilles.

Pas de réponse, mais je n'allais pas lâcher l'affaire.

— Lucie s'il te plait, j'ai... j'ai besoin de toi.

Ma voix encore plus rauque que d'habitude et mon ton suppliant durent la toucher car elle finit par relever les yeux vers moi.

— Qu'est-ce que tu veux Maya ? Ne pas écouter mes conseils ?

— Non... J'ai besoin que tu me sortes de ce monde de merde, juste un soir.

C'était sorti tout seul, ses sourcils s'arquèrent et elle m'adressa un regard surpris.

— Ok, mais deux conditions.

J'opinai du chef.

— Tout ce que tu veux.

— Tu ne protestes pas, tu me suis et c'est tout, et, tu as interdiction de mentir de toute la soirée. Soit tu te tais, soit tu dis la vérité. Compris ?

Ok ça allait être compliqué mais j'acceptai, trop heureuse de ressentir un peu de chaleur humaine.

Nous allâmes nous entraîner, puis elle m'annonça que nous sortions après la représentation du soir.

En effet, après le ballet où je livrais une performance tout à fait correcte, elle m'entraîna vers le métro.

Au fur et à mesure que je voyais les stations défiler, je commençai à m'inquiéter. Le quatorzième arrondissement n'était pas anodin.
Quand nous nous retrouvâmes devant l'immeuble de Clem et que j'entendis le bruit d'une soirée à son étage, je me stoppai net.

C'était la pire idée du siècle.

— C'est mort.

— J'ai dit quoi Maya. C'est les 25 ans de Clémentine, tu viens et tu discutes pas.

Je fronçai les sourcils.

— Mais l'anniversaire de Clem, c'était début Octobre.

— Oui, mais les mecs étaient éparpillés partout alors on a pas pu faire de grosse soirée.

La mort dans l'âme, je suivis Lucie dans l'immeuble. Elle entra chez Clem sans frapper, c'était une habituée maintenant.

Je pensais qu'il y aurait beaucoup de monde, je m'étais trompée. Ils étaient seulement une vingtaine dans l'appartement et mon arrivée fut loin de passer inaperçue.

— MAYA J'Y CROIS PAS !

Avant que je n'aie eu le temps de comprendre ce qui m'arrivait, deux bras fins passèrent autour de mes épaules et je me retrouvais le nez dans une épaisse tignasse brune.

Elle m'avait tellement manqué.

— Joyeux anniversaire, soufflai-je.

Quand elle se détacha de moi, elle avait les yeux humides. Toujours plus Clémentine...

— Tu peux pas savoir comme ça me fait plaisir que tu sois venue.

— Tu m'as manqué.

Elle écarquilla les yeux en m'entendant lui avouer cela et me serra une deuxième fois dans ses bras.

Mon Dieu que Benoit me semblait loin.

Après l'avoir lâchée, mon regard parcourut les invités. Tout le monde avait l'air plus ou moins de n'avoir absolument rien contre moi, sauf Idriss qui avait une moue plutôt dubitative. Et puis...

Mon cœur s'arrêta à l'instant où mon regard rencontra le sien.

À l'autre bout de la pièce, il était adossé au mur, une bière à la main. Casquette camouflage enfoncée sur la tête, sweat-shirt SZR et jean, la mâchoire serrée, il n'avait pas changé d'un poil et j'aimais bien sa dégaine.

— Hakim, murmurai-je.

Une bonne dizaine de mètres nous séparaient, il y a avait un brouhaha monstre en plus de la musique dans l'appartement, mais je sus qu'il avait lu son prénom sur mes lèvres. Il ferma les yeux une dizaine de secondes puis les détourna pour se concentrer sur le type au bob qui lui parlait.

Clem me tira vers les autres, mais j'avais un peu l'impression d'être dans une autre dimension, tout le monde parlait autour de moi me posait des questions tandis que je répondais par monosyllabes. Je luttais contre l'envie permanente de jeter un regard dans la direction d'Hakim, il fallait que je m'interdise tout contact avec lui, c'était aussi le protéger.

Au bout d'un moment, Ken vint s'installer à côté de moi il avait l'air d'avoir pas mal de choses à me dire.

— Toi et moi, faut qu'on parle.

Euh d'accord.

Je lui répondis par un signe de tête.

— On va marcher ? me proposa-t-il.

Surprise, je jetai un regard vers Clémentine qui se chamaillait avec Mohammed.

— T'inquiète pour Clem.

J'opinai et nous nous levâmes, Clémentine m'adressa un clin d'œil en me voyant suivre son fiancé vers la porte.

— Sah vous donnez dans l'échangisme maintenant ? railla Sneazz.

Il se prit une violente claque derrière la tête.

— Ta gueule, Moh.

— C'est bon, je voulais juste savoir si y avait moy' de participer. Enfin pas avec toi Mandarine, t'es trop méchante. Ken par contre...

Il adressa un clin d'œil charmeur à son pote qui lui envoya un baiser en retour.

— Tu sais très bien que mon corps t'appartient, chéri, répondit-il.

Clémentine leva les yeux au ciel.

— Bon bah j'ai plus qu'à me faire Maya.

Les deux mecs se tournèrent vers elle avec un éclair lubrique dans les prunelles et j'éclatai de rire.

Oh mon Dieu. Je n'avais pas ri depuis des siècles.

La main de Ken se posa sur mon épaule pour me signifier qu'il était temps de sortir et je le suivis dans la rue.

— On marche jusqu'à Montparnasse et on revient au calme ? proposa-t-il.

— Euh ouais, si tu veux.

Il m'adressa un petit sourire bienveillant. Même s'il avait tendance à m'agacer, Ken avait vraiment l'air de quelqu'un de profondément gentil et pas dans le sens benêt du terme.

— Fram m'a raconté, dit-il simplement.

Ah...

Je ne répondis pas.

— On a décidé de pas le dire à Mékra, ça sert à rien qu'il fasse une folie.

Hakim ne savait donc rien, j'étais soulagée.

— Merci, soufflai-je.

— C'est pas pour toi qu'on le fait, c'est pour lui.

Le ton de sa voix restait doux, il ne m'engueulait pas, il m'informait juste.

— Je sais, c'est pour ça que je te dis merci.

Ken m'adressa un regard surpris, il ne s'attendait sans doute pas à ce que je m'inquiète d'Hakim. Pourtant s'il savait que tous mes mauvais choix récents n'avaient été faits que pour cette raison, il ne serait pas aussi étonné.

— On sait pas exactement c'qui c'est passé entre vous, mais on sait qu'il avait le seum de ouf pendant quelques semaines. Je connais mon frère. Quand il commence à être aussi bresson et alcoolique c'est que ça va pas. Je pense que t'étais vraiment importante pour lui.

— Ken, je...

Il me coupa d'un signe de main.

— Attends, laisse moi finir. Je suis pas en train de te reprocher de l'avoir quitté ou je ne sais quoi. Vous êtes grands, vous aviez sûrement vos raisons. Ce que je m'explique pas, c'est comment tu peux passer d'Haks à un enculé pareil. En plus je vais pas te mentir Maya, t'as une mine épouvantable, ça se voit à des milliers de kilomètres que t'es pas heureuse. Tu pues encore plus le seum que Clem quand je l'ai rencontrée.

Je fermai les yeux, Ken était un fin observateur, Clem me l'avait dit plus d'une fois. J'avais promis à Lucie de ne pas mentir ce soir, elle n'était pas là pour vérifier, mais je refusais de la trahir.

— Je ne fréquente pas Benoit par plaisir. Non je ne suis pas heureuse, mais il faut que je le fasse. Je te demande pas de valider ça ou quoi. Mais crois moi, j'ai une très bonne raison de le faire, malheureusement je ne peux pas t'en dire plus. S'il te plaît Ken ne dit rien à Hakim, je ne supporterais pas qu'il le sache.

Le grec me lança un regard de biais, j'avais attisé sa curiosité, et Dieu savait qu'elle était maladive.

— Tu l'aimes ?

Je sursautai en entendant cette question.

— Benoit ? Non bien sûr que non.

Mais il leva les yeux au ciel et secoua la tête.

— Non, putain, Mékra bien sûr.

Tais toi ! me hurla ma salope de conscience.

— Je... je sais pas, soufflai-je, j'ai jamais aimé. Enfin autrement qu'en amitié.

Ken sourit, il n'avait pas l'air de se contenter de cette réponse.

— Je t'ai pas demandé si tu avais déjà aimé quelqu'un. Je t'ai demandé si tu aimais Hakim.

Si je me taisais, il prendrait ça pour un oui, c'était soit la vérité soit rien en fait, j'avais promis à Lucie.

— Je... euh... Désolée Ken, je peux pas dire ça à voix haute.

— Pourquoi ? demanda-t-il amusé, ça va changer quoi si c'est ce que tu ressens. Je vais pas le répéter hein.

Je soupirai.

— Parce que j'ai besoin de me mentir à moi même, pour tenir le coup.

Il parut soudain très bien comprendre ce que je voulais dire, car il hocha la tête.

— Ok, j'arrête de te faire chier avec ça, mais Maya, je te parle d'expérience. Plus on essaie de refouler des sentiments, plus ils deviennent forts et ça devient invivable.

— Je sais, murmurai-je, c'est déjà invivable.

Le rappeur me sourit tristement, c'était la première fois que je me sentais en phase avec lui. Je l'avais toujours trouvé trop sensible, mais finalement je trouvais plutôt agréable de discuter avec lui.

Nous parlâmes un long moment de plein d'autres choses, Hakim m'avait dit de parler de ma sœur avec lui et je le fis. Je fus très surprise par les conseils judicieux qu'il me donna.

Quand nous revînmes chez Clem, l'ambiance était très détendue. Bourrés ou défoncés, les garçons rappaient ou se racontaient des anecdotes. Les filles sur leurs genoux, ou la tête posée sur leur épaule.

Je me rendis compte que je les aimais tous beaucoup. Le temps d'un soir, j'avais oublié l'enfer qu'était devenu mon quotidien.

— Allez, on rentre, annonça Lucie au bout d'une petite heure.

Je me levai en même temps qu'elle.

— Je vous ramène, annonça Idriss, Haks bouge toi on y va.

Oh la mauvaise idée.

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