Chapitre 11 « Tu me fais des câlins maintenant ? »
Maux de crâne au réveil, cuite la veille.
J'ouvris les yeux en cherchant l'objet qui m'avait réveillée, mon portable.
Un appel entrant de Clémentine. Sachant ce qu'Hakim m'avait dit la veille, je ne voulais pas prendre de risques en l'ignorant.
Hakim.
J'identifiai aussitôt l'autre bruit qui me perturbait dans mon sommeil. Un ronflement.
Tout en décrochant je m'aperçus que j'étais avachie sur l'épaule du rappeur qui dormait sur mon canapé, cuvant sa bouteille de Jack descendue la veille.
Beurk.
— Maya, Dieu Merci tu décroches.
J'éloignai brusquement mon téléphone de mon oreille, tentant de me lever malgré mon plâtre. J'actionnai le haut parleur.
— Ouais, murmurai-je, désolée j'étais très prise ces derniers temps.
— T'as une voix bizarre ? Ça va ?
Évidemment que j'avais une voix bizarre, je souffrais d'une gueule de bois aiguë.
— Oui j'ai juste un peu bu hier soir.
Un peu, ben voyons.
— Ah ! Écoute on peut se rappeler plus tard, ou se voir si tu veux.
Je me frottai le visage, oui clairement c'était la meilleure solution.
À ce moment là, je me pris le pied dans une paire de Nike qui n'était pas la mienne et me rattrapai comme je pus à ce que je trouvai sous la main, le cadavre de la bouteille de Vodka.
Elle tomba par terre à grand fracas.
— Putain.
Ça allait être pratique de nettoyer ça avec mon pied dans le plâtre.
— Maya ça va ? demanda Clem à l'autre bout du fil.
— Euh ouais.
— Sah tu peux pas au moins arrêter de me casser les couilles quand j'dors ?
Il ne manquait plus que ça.
Hakim était réveillé.
— Maya ? T'es avec Mékra ?
Je fermai les yeux et ne pris pas le temps de réfléchir longtemps.
— Écoute Clem, là c'est pas le meilleur moment pour parler. On se voit ce soir, où tu veux, tu m'envoies un texto.
Je ne lui laissais pas le temps de répondre et raccrochai.
Hakim se tenait la tête dans les mains, lui aussi avait l'air de souffrir de notre cuite de la veille.
— Tu veux un café ?
— Ouais.
— Y'en a dans le placard.
Ok j'étais vraiment une biatch parfois.
— T'as du jus de carotte ?
J'explosai de rire, il ne pouvait pas être sérieux.
— Bien sûr que non. Tu bois ça ?
Mais il secoua la tête.
— Pas pour moi, pour toi, ça rend aimable.
Je lui adressai un regard un peu moqueur.
— Je suis aimable avec les gens qui le méritent. Pas avec ceux qui m'écrasent.
Le rappeur esquissa un sourire, se leva en se frottant le visage et se dirigea vers la cuisine. Je l'entendis mettre en marche la machine à café.
Je m'affalai de nouveau sur le canapé réfléchissant aux événements de la veille.
À vrai dire, il ne s'était rien passé d'incroyable. On avait juste bu, chacun avait dit à l'autre à quel point il l'énervait, mais aucun de nous n'avait eut envie de mettre fin à ce moment. C'était vraiment étrange comme situation, une sorte de complaisance dans la haine.
— C'est qui ? Ta daronne ?
Hakim était revenu, tenant dans une main un café, dans l'autre un cadre avec la photo d'une danseuse.
— Pose ça.
Le voir, avec la seule photo de ma grand-mère qui me restait, me remplissait d'effroi.
Il ne bougea pas.
Évidemment.
— Pose ça Hakim, t'as pas à toucher à mes affaires.
Le rappeur ne broncha pas, semblant toujours attendre une réponse.
Je me levais tant bien que mal en prenant appui sur l'une de mes cannes et je me dirigeais vers lui à cloche pied.
— Donne moi ça sale hmar, je rigole pas.
Me voir aussi énervée parut beaucoup l'amuser. Il ignorait qu'il jouait avec mon seul point faible. Lentement il recula et je sautai sur mon pied valide pour le suivre.
— Putain mais arrête.
Soudain je trébuchai et dûs à nouveau me retenir à la première chose que je trouvais, le t-shirt d'Hakim. Bien malgré moi, je me retrouvai plaquée contre son torse tandis qu'il essayait de maintenir son propre équilibre. Une grande flaque de café atterrit sur le sol et je vis le portrait de ma grand mère menacer de s'écraser à son tour.
— NON ! hurlai-je.
M'agrippant au bras d'Hakim je saisis l'objet, mais cela acheva de mettre en péril notre équilibre et il s'effondra par terre, m'entraînant dans sa chute.
Je parvins de justesse à empêcher le cadre de se cogner au sol et le lâchait doucement.
J'étais totalement allongée sur Hakim et n'en pris conscience qu'une fois mon cadre hors de danger. Je tentais alors de de me relever le plus vite possible, mais en m'appuyant sur mon pied droit je poussai un cri de douleur et m'effondrai de nouveau contre son torse.
— Putain !
Le rappeur ne disait rien, m'observant simplement, il avait l'air mal à l'aise.
— T'as failli signer ton arrêt de mort ce matin toi.
— Pourquoi tu tiens autant à cette tof ?
Cette quoi ?
— Tof ?
Il leva les yeux au ciel comme si j'étais débile.
— Photo.
Ah ben oui, effectivement c'était logique.
— Ça te regarde pas.
Alors sans que je n'aie eu le temps de temps de réaliser, il tendit le bras et saisit de nouveau le cadre.
— Hakim arrête lâche ça, criai-je en tambourinant contre ses côtes.
Son sourire s'agrandit, il prenait un malin plaisir à me torturer. Pour une fois qu'il avait le dessus.
— Vous avez les mêmes yeux, fit-il, c'est ta mère ?
Je fermai les yeux pour tenter de calmer mes nerfs. J'essayai de me laisser glisser sur le côté, mais de son bras libre il me maintint fermement contre lui.
— Tu me fais des câlins maintenant ? raillai-je.
Il eut l'air gêné, parfait.
— Non, j'te maîtrise, réponds moi. C'est qui ?
Je soufflai bruyamment. Mais qu'est-ce qui lui prenait à vouloir connaître toute ma vie soudainement.
— Putain mais t'es chiant ! C'est ma grand-mère voilà, t'es content ? Tu peux me lâcher ?
Mais il ne bougea pas. Notre proximité me dérangeait vraiment, ses yeux braqués sur moi également.
— Pourquoi y a aucune autre tof de personne d'autre dans ton appart ?
Il commençait à vraiment me rendre barge, en quoi ma vie pouvait l'intéresser ?
— Tu me gaves. Je te dirai rien.
Il eut un nouveau sourire perfide.
— Bon, bah on va rester comme ça longtemps.
Je ne comprenais pas, il m'avait clairement dit qu'il me détestait, qu'il me trouvait insupportable et que j'étais « une galère pas possible », mais mon histoire semblait le passionner bien plus que tout autre chose. Hakim était gêné par notre position je le sentais, il était tout raide, mais il semblait prêt à faire des sacrifices pour avoir des réponses.
— J'attends.
Je tentais de le griffer pour échapper à son étreinte, mais il se redressa brusquement et, comme si je ne pesais rien, me souleva en se levant. Je me débattais en vain, il posa le cadre sur la table et maintint fermement mes poignets dans sa paume.
— Elle a finit de griffer la tigresse ? demanda-t-il.
C'était vraiment pénible de n'avoir qu'une jambe valide, je ne pouvais pas me défendre comme je l'aurais souhaité. Et ce fut pire encore quand, sans lâcher mes poignet, il s'installa sur le canapé.
Je me retrouvai allongée, la tête sur ses genoux et les bras emprisonnés par sa poigne.
— Non mais je rêve ? Tu m'as pris pour ta pote ?
Il ne bougea pas et haussa les épaules, maintenant fermement mes bras, il s'installa plus confortablement et garda ses yeux mi-clos.
— J'attends des réponses. Maintenant arrête de brailler si tu compte pas en donner. J'ai besoin de sommeil.
C'était une énorme blague. Ce type me rendait folle de rage, j'avais envie qu'il parte.
— Va-t-en Hakim, laisse moi tranquille. T'as pas du travail ?
— Nan. Tu sais bien que j'bicrave du shit en bas des blocs, je taffe quand je veux.
Je levai les yeux au ciel, me maudissant intérieurement de l'avoir fait rentrer chez moi.
— Putain mais pourquoi je te dirais des trucs sur moi alors qu'on se déteste ! Tu crois vraiment que je te parlerais de choses dont je ne parle même pas à ma meilleure amie, alors que tu pourrais t'en servir contre moi ?
Un fin sourire naquit sur les lèvres d'Hakim. Il inclina la tête vers moi.
— T'as envie de le faire et ça t'zehef. Parce que j't'ai dit hier que j'avais pas de pitié et de remords, parce que vu qu'on se déteste tu peux me raconter des trucs sans que des sentiments viennent rendre les choses gênantes. Et aussi parce que t'as très bien compris que j'étais pas le genre de type qui jacte derrière.
J'allais le tuer, mais je notais néanmoins qu'il n'avait jamais parlé aussi longtemps sans s'arrêter.
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