Bonus #2
Et un premier bonus sur Félins, un.
J'espère qu'il vous plaira, n'hésitez pas à me suggérer de nouveaux thèmes.
PS : Le tome 3 est en ligne sur mon profil, pour ceux que cela intéresse.
Bisous et bonne lecture !
❤️
J'avais du retard.
Réglée habituellement comme une horloge, je savais très bien que sept jours de retard n'était absolument pas normal dans mon cas.
J'avais arrêté toute forme de contraception depuis notre mariage en juin, et les mois de juillet, août et septembre avaient été parfaitement réglés.
Mais nous étions à la fin du mois d'octobre, et je n'avais pas mes règles.
Je n'en dormais pas la nuit. Terrifiée.
Si c'était ce que je pensais que cela pouvait être, je ne me sentais absolument plus prête. Du moins je l'étais en théorie, mais maintenant que la nature s'en mêlait... pour de vrai, je vrillai totalement.
Je savais que j'étais censée faire un test, mais ne pouvait m'y résoudre, parce que tant que je ne le voyais pas écrit, j'avais l'impression qu'il n'était pas vraiment là.
Et puis une fois fixée, il faudrait en parler. À Hakim d'abord et puis à Clem, à Lucie. Je n'étais pas prête du tout à ce que les gens se mettent à me considérer comme une femme en...
Seigneur, rien qu'en pensant à ce mot je sentais tout mon système nerveux en panique.
Et puis cela tombait au moment où je commençais à me dire que je pouvais peut-être aborder la danse d'une autre façon. Peut-être dans l'enseignement. J'étais en plein dans mon deuil, ce n'était pas du tout idéal pour tomber en...
Ce mot, mon Dieu, ce mot.
Après trois nuits sans sommeil, je n'arrivais toujours pas à me décider.
Sans Hakim, j'aurais pu attendre très longtemps. Mais il avait remarqué mon état anormal et me coinça dans le salon alors que j'allais sortir Hydra.
— Toi ! fit-il en me pointant du doigt, Tu bouges pas de là tant que tu m'as pas pas dit ce que t'as.
Aïe, la nouvelle technique pour me forcer à parler.
— J'ai rien, répondis-je en essayant d'avoir l'air détendue, arrête d'imaginer des trucs.
Un sourcil haussé, les bras croisés, le regard sévère, mon mari ne sembla nullement convaincu par mon piètre mensonge.
— Fais belek Namira, si tu veux sortir de cet appartement un jour, je te conseille parler deuspi.
— Quoi ? Tu vas me séquestrer dans notre propre maison ? Oh mon Dieu j'ai trop peur de toi.
Hakim ne bougea pas d'un pouce.
— Attaque Hydra ! ordonnai-je au staff que je tenais en laisse.
Elle me regarda, l'air de dire « t'es complètement conne ou quoi ? » et son maître parut partager son point de vue.
— Nam. Arrête ton cinoche. Dis moi ce que t'as, tu veux boire un verre ?
Clairement pas.
— Sans façon.
Mais il m'ignora, ouvrit le placard où se trouvaient les bouteilles, en récupéra une et d'une pression sur l'épaule, il me força à rejoindre le canapé.
Je me dégageai rapidement.
— Je boirai pas, et sûrement pas à dix heures du matin pour que tu me fasses avouer quoi que ce soit. T'as vrillé Haks, c'est quoi ce nouveau système d'interrogatoire ? C'est ça le mariage ?
— Le mariage, c'est se dire les choses Maya, ça fait trois nuits que tu dors pas et que tu cogites, prends moi pour un con. Quand est-ce que tu vas enfin me parler sans que je te harcèles pour que tu le fasses ?
Soupirant, je me laissai retomber dans le canapé, il avait raison. Il fallait que j'arrête de fuir les discussions de ce type. De toutes façons, je ne pouvais pas faire grand chose sans lui. Je n'avais pas le courage de me disputer aujourd'hui.
— J'ai du retard.
Il me regarda sans comprendre. Bon en même temps ce n'était pas la phrase la plus explicite pour un homme assez peu intéressé par le cycle féminin.
— Pour quoi ?
— Mes règles, sale hmar. Je devais les avoir il y a plus d'une semaine.
L'incompréhension était toujours bien visible sur son visage.
— Euh, j'y connais rien à tout ça, mais ça va peut-être venir non ? Vu que t'as arrêté la pi... Oh putain.
Ah voilà, mon mec avait vraiment l'esprit vif. Son visage aurait sans doute pu me faire rire dans d'autres circonstances, foudroyé le Mékra.
— Attends tu euh... bordel de merde, tu... penses ?
Comme je me contentais de fixer le mur, les yeux dans le vague, serrant les dents de peur qu'il dise le mot qui me terrifiait.
— Maya !
Je hochai la tête, et relevai le regard vers lui. Panique à bord.
— File dans la voiture.
Quoi ? Pourquoi ?
Devant mon air interrogatif, il jugea bon d'expliquer son ordre.
— On va faire une prise de sang.
Ah oui, direct. Putain.
Je n'étais absolument pas prête à me confronter au résultat, parce qu'au fond de moi, je savais déjà la réponse.
— Magne toi.
Impossible, mon corps était paralysé, je ne voulais pas savoir.
— Vas-y sans moi, murmurai-je.
Hakim parut alors se rendre compte que je paniquais et même si sa fébrilité et était palpable, il prit sur lui et calmement, s'accroupit face à moi pour saisir mes mains dans les siennes.
— T'es au courant que si je fais une prise de sang sans toi, on va juste me dire qu'il faut que j'arrête la tise et les grecs ?
Je soupirai, sachant très bien qu'il me tirerait de force au labo si je refusais de le suivre.
— Nam', ça va rien changer à part qu'on va nous dire comment gérer ça. Allez viens.
— J'ai peur.
Une paume sur ma joue, des lèvres contre mon front, puis des doigts autour de ma mâchoire, faisant pression pour que je lève les yeux vers leur propriétaire.
— Moi aussi. Mais on va pas rester neuf mois dans ce putain de salon à attendre de voir ce qu'il se passe.
Euh ça m'allait bien comme programme, avec un peu de chance il ne se passerait rien.
— Maya, on va gérer, si mon reufré a su faire ça, je peux le faire aussi.
Vite dit, Lucie était exceptionnelle, Idriss avait juste à rappeler à tout le monde que c'était lui qui avait mis la petite graine.
— Chérie, regarde moi.
Ce surnom me fit automatiquement relever les yeux. Je n'y avais droit que très rarement, en fait, il ne l'avait employé qu'une fois, le soir de notre mariage.
— Je te jure que ça ira mieux quand tu seras fixée. Laisse moi gérer si t'arrives pas, t'as juste à me suivre, ok ?
Hochant la tête, je rendis les armes. Les doigts cachés dans le creux de sa paume, je le laissai m'entraîner vers la voiture, sachant très bien que quelques heures plus tard, ma vie serait totalement transformée.
(...)
C'était écrit noir sur blanc. Et pourtant, je n'arrivais pas à l'exprimer, ni en pensée ni en parole. Un silence assourdissant emplissait la voiture, nous venions de récupérer le résultat des analyses et aucun de nous ne savait quoi dire après cette confirmation.
Hakim ne prit pas la direction de chez nous et continua de rouler. Une heure, puis deux.
Je reconnaissais la route.
Il pleuvait des cordes sur la côte normande. L'automne semblait plus présent ici que n'importe où. Il se gara face à la plage, je sortis en trombe de la voiture.
La violence de l'averse me trempa aussitôt jusqu'aux os.
Lorsque mes tennis foulèrent le sable détrempé, j'eus envie de hurler. J'avais cru que j'étais prête, j'avais voulu l'être, mais maintenant que cela me tombait dessus, je réalisai que je m'étais totalement surestimée.
Une vie humaine grandissait en moi. Une vie humaine. Ce n'était pas un concept, une idée. C'était la vie, la vraie, ce qu'il y avait de plus précieux au monde. Ce que j'avais failli perdre un peu plus d'un an auparavant.
Et moi, j'allais être la garante de ce petit être, j'allais devoir le protéger, le garder en vie, lui apprendre à faire le bien, j'allais devoir le rendre heureux.
Et je m'en sentais totalement incapable.
Je marchai, sans m'arrêter, la pluie giflant mon visage, se mêlant aux larmes qui s'échappaient en flot continu de mes yeux. La culpabilité m'étouffait littéralement, j'avais été irresponsable, comment avais-je pu penser un seul instant être capable d'élever un enfant.
La gorge en feu, le cœur au bord des lèvres, je m'arrêtai subitement, face à l'immensité grise et agitée qui répétait à l'infini le même mouvement. J'eus le vertige en réalisant que nos vies ne représentait strictement rien pour elle. Dans cent ans, nous aurions tous sombré dans l'oubli, personne ne se rappellerait de nos noms, mais la mer, elle, continuerait de polir des galets.
Alors à quoi servions nous ? Qu'avais-je à transmettre ?
Un violent cri m'échappa, rauque et dénué de signification.
Je tombai assise sur le sable dur, l'humidité glacée s'infiltrant aussitôt à travers le tissus de ma jupe. Ramenant mes jambes contre mon ventre, je reproduisis la position qui bientôt, serait celle du minuscule être qui grandissait en moi.
C'était terrifiant.
Les minutes passèrent comme des heures.
Je réalisai alors, que malgré ma solitude apparente sur cette immense plage de Deauville, je n'avais absolument pas l'impression d'être seule.
Nous étions deux.
Mais l'autre se cachait au tréfonds de mon corps blessé, bien au chaud, attendant patiemment l'heure de découvrir ce qu'il se passait au dehors.
Alors je tournai la tête vers l'endroit d'où je venais. Assise sur le capot de la BMW noire qui m'avait conduite jusqu'ici, une silhouette encapuchonnée semblait attendre quelque chose.
Mon cœur se gonfla aussitôt d'une tendresse toute nouvelle. Lui aussi, ne serait jamais plus le même homme, lui aussi voyait sa vie se transformer.
Je croyais n'avoir rien de bon à offrir à cet enfant. Pourtant je me trompais totalement, c'était affreusement faux, je lui offrais mon mari, son père. Je partageais avec lui la plus belle chose qui me soit arrivée. Et si je n'étais pas à la hauteur, il le serait pour deux.
Me relevant, je repris mon chemin dans le sens inverse, suivant les traces que j'avais laissées à l'aller.
Un instant plus tard, j'étais face à lui, son visage était impassible, il me fixait sans expression particulière, et c'était ce que je voulais.
— Hakim.
— Ouais.
— On a froid, tu veux bien nous réchauffer ?
Son regard s'éclaira et il hocha la tête pendant que je me précipitai au creux de ses bras.
— Je suis enceinte, murmurai-je pour la première fois.
Autour de moi, les bras protecteurs de mon mari se resserrèrent doucement tandis que je glissai mon nez glacé et humide dans son cou.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top