Chapitre 26-2


C'était une petite pièce aux murs nus, d'environ deux mètres sur deux et dépourvue de tout mobilier, à l'exception d'un W.C. et d'une couverture posée à même le sol. Une petite fille, aux longs cheveux blonds qui s'échappaient de ses couettes et aux joues striées de larmes, était assise sur la couverture, recroquevillée contre le mur. Position défensive qu'elle avait dû prendre instinctivement à l'entente de notre entrée.

Elle se détendit imperceptiblement lorsqu'elle m'aperçut et essaya de me toiser avec tout le courage qui lui restait. Même si l'on voyait à son visage maculé de larmes qu'elle était effrayée, sa posture et son petit menton en avant disaient clairement qu'elle n'avait plus l'intention de le montrer. J'étais tellement soulagée que je n'avais qu'une envie : me précipiter vers elle, la prendre dans mes bras et lui dire qu'elle ne risquait plus rien, mais je craignais de lui faire plus peur qu'autre chose.

— Aria ? C'est ton grand-père qui m'envoie, lui chuchotai-je tout doucement pour ne pas l'effrayer et éviter d'alerter les gardes qui pourraient être à l'affût.

À la minute où je dis cela, je vis à l'étincelle dans ses yeux qu'elle m'avait reconnue. Elle ne m'avait entraperçue que quelques secondes, mais apparemment cela avait suffi. Elle laissa alors tomber le masque et se dirigea vers moi en sanglotant, lorsqu'à mi-chemin, elle s'arrêta brusquement et fixa avec intensité et frayeur un point derrière moi. Je ne me retournai pas, sachant que c'était Féline qui venait de pénétrer dans la pièce. Si nous avions toujours pu communiquer, je lui aurais demandé de ne pas le faire, mais en l'état actuel des choses...

Cependant, à peine avais-je émis cette pensée que je la vis faire demi-tour et sortir de la pièce. Apparemment, la communication n'était coupée que dans un sens. Très bien, c'était bon à savoir.

— Ne t'inquiète pas, elle est avec moi. Elle ne te fera aucun mal. Mais... il ne faut pas traîner ici, la pressai-je gentiment.

Était-ce le ton de ma voix ou le fait qu'elle soit une future métamorphe, je n'aurais su le dire ; mais elle me crut sans hésitation et termina son mouvement avorté en se jetant en larmes dans mes bras. Je la réconfortai du mieux que je le pus, avant de lui répéter que nous devions sortir d'ici très vite.

Elle me lâcha au bout de quelques minutes et sécha ses larmes du revers de la main. Nous étions en train de franchir la porte lorsqu'une alarme stridente se déclencha. J'eus l'impression que l'on me transperçait le crâne de part en part, tellement le son aigu me vrillait les tympans.

— On a trop tarder ! Vite, il faut partir ! criai-je pour couvrir le son strident.

— Pas sans Adam ! me cria Aria d'une voix paniquée. Je sais qu'il est ici, je l'ai senti et entendu. Il faut le sauver.

Elle avait peur mais son regard était déterminé. Pas question qu'elle parte sans lui ! Néanmoins, si nous restions là ne serait-ce qu'une minute de plus, nous serions pris au piège, car l'unique sortie possible se trouvait être la porte par laquelle nous étions arrivées. Je devais mettre Aria à l'abri ! Mais où et comment ? Je ne pouvais pas la confier à une panthère... si ?

Si au moins j'avais la certitude que Worth et Jude étaient dans les parages...

Le temps perdu en hésitations me fut fatal. Au moment où je m'apprêtai à dire à Aria d'aller se cacher avec Féline le temps que je cherche Adam, un bruit de bottes résonna soudain dans le couloir. Je n'eus que le temps de pousser Aria et la panthère dans la cellule d'où elles venaient de sortir avant que l'homme ne pénètre dans la pièce.

Il s'avança d'un pas tranquille, un gros fusil d'assaut braqué sur ma poitrine, le tout accompagné d'un sourire lubrique qui me rappelait quelqu'un.

— J'espérais bien que ce soit toi ! s'exclama-t-il d'une voix désagréable tandis qu'il continuait d'avancer, me détaillant des pieds à la tête. Mon frère m'a tellement vanté ton physique de rêve... que j'étais un peu jaloux.

Malgré moi, je me mis à reculer. Il n'était pas question que je laisse ce type m'approcher et encore moins me toucher. Je préférerais encore qu'il me tue. Je savais maintenant pourquoi il me paraissait familier. C'était le frère de l'autre pervers et, a priori, ils n'avaient pas que leur filiation en commun.

— C'est mon jour de chance. Avec le grabuge qu'il y a là-haut, ils m'ont laissé venir seul, fanfaronna-t-il avec un sourire de prédateur. Je vais pouvoir m'amuser un peu, dit-il en se passant la langue sur les lèvres. Miam... En plus, tu es déjà à moitié déshabillée ! C'est gentil de me faciliter le boulot, continua-t-il en ricanant tandis qu'il s'approchait encore plus près.

À force de reculer, je finis par heurter le mur du fond et me cognai douloureusement la tête au râtelier. Je brandis ma clef anglaise devant moi d'une main tremblante, ce qui le fit partir d'un rire moqueur désagréable. Je devais gagner du temps ! Dans mon malheur, je venais d'apprendre que l'inspecteur était bien là-haut avec ses hommes, et je ne pouvais pas échouer maintenant !

— N'approchez pas ! lui ordonnai-je d'une voix chevrotante, qui même à moi me parut pathétique.

— Et tu crois que c'est avec ça que tu vas m'en empêcher ?

Il se mit alors à rire franchement et franchit la distance qui nous séparait en deux enjambées. Dans une tentative désespérée, j'essayai de le frapper à la tête, malgré l'arme toujours braquée sur moi. S'il voulait me violer, il y avait peu de chances qu'il me tire dessus tout de suite. Malheureusement, je ratai mon coup et il m'arracha l'arme des mains, avant de me gifler violemment. Ma tête partit vers la droite et alla heurter le mur.

Je dus m'évanouir quelques secondes, car lorsque je revins à moi, j'étais allongée sur le sol, mon soutien-gorge gisant à côté de moi et les mains du garde en train de me tripoter. Je me forçai à ne pas penser à ce qu'il était en train de faire et tentai d'entrer en contact avec Féline. Avec un peu de chance, elle m'entendrait. L'homme était tellement concentré sur sa tâche qu'il avait posé son arme et tournait le dos à la porte. C'était le meilleur moment pour attaquer. Alors que j'envoyais l'information psychique à la panthère, j'entendis la porte s'ouvrir doucement.

Mais si moi je pouvais l'entendre, mon tortionnaire aussi. Il fallait que je trouve un moyen de détourner son attention. Je me forçai donc à reporter mon regard sur lui et constatai avec horreur qu'il avait déjà presque terminé d'ouvrir sa braguette. Je tentai le tout pour le tout et décidai de le provoquer.

— Les petites bites, c'est comme les petits cerveaux, c'est de famille ?

Cela fonctionna au-delà de mes espérances et le détourna de son objectif quelques secondes, le temps de m'assener une autre gifle et de me traiter de salope. Il avait dû, pour me frapper, lâcher mon bras et j'en profitai pour attraper mon soutien-gorge. Je n'avais pas d'idée précise en tête au moment où je l'avais pris, mais à l'instant où il se pencha de nouveau sur moi dans une intention évidente, je lui passai mon soutif autour du cou. Puis croisant les bretelles, je me mis à tirer de toutes mes forces pour l'étrangler. Au même moment, Féline lui sauta sur le dos avec un rugissement furieux et tandis qu'elle se maintenait avec ses griffes, elle entreprit de lui arracher la gorge.

Ce fut long et particulièrement salissant, car le moins que l'on puisse dire est qu'il ne se laissa pas faire ! Il se débattit violemment pour essayer de faire tomber Féline qui n'avait pas encore atteint sa jugulaire, saignant et hurlant à la mort. Lorsqu'elle y parvint dans un grondement de satisfaction, l'homme cessa tout d'un coup de bouger et tomba lourdement sur moi, tandis qu'un flot chaud et visqueux se déversait sur ma poitrine. Dégoutée et horrifiée, je pédalai comme une forcenée


pour m'extraire de sous le cadavre, essayant vainement d'enlever le sang qui me recouvrait avant de remettre mon soutien-gorge légèrement distendu avec mes mains tremblantes. Je sentis que j'étais prise d'une sorte de hoquet et un bruit bizarre résonnait dans la pièce. Il me fallut un petit moment pour me rendre compte que ce bruit, c'était moi qui riais, d'un rire nerveux et limite hystérique, mêlé de larmes. Je finis par me relever et constatai, étonnée, que je n'avais mal nulle part. Même plus à la tête ! J'étais comme... déconnectée, certainement en état de choc. Restait à savoir combien de temps il durerait, car je pressentais que je n'allais pas apprécier le retour à la réalité. 


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