Chapitre 43 (partie I)
Le trajet jusqu'à l'extérieur me paraît plus long, cette fois-ci. C'est comme si les marches se multipliaient sous mes pieds, sans que je ne comprenne pourquoi. Je ne m'arrête pas, l'avertissement de R.O.B tournant en boucle dans ma tête.
Mon I.A reste silencieuse tandis que je dévale les escaliers jusqu'à entrevoir le soleil. Lorsque j'arrive finalement, à bout de souffle, au rez-de-chaussée, j'ai à peine le temps de reprendre mon souffle qu'une main m'attrape le bras et me tire à l'extérieur. J'émets un petit bruit de protestation mais me remets aussitôt à courir sans poser de questions.
Ce n'est qu'à l'extérieur du bâtiment que je distingue clairement les traits de Benny. Mon sourire retombe lorsque je réalise qu'il est seul, couvert de sang et qu'il ne ralentit pas. Où sont les autres ? Accélérant la cadence, il est forcé de lâcher mon bras et dois lutter contre mes poumons pour conserver le rythme. Je ne sais pas combien de temps je lutte littéralement contre l'étouffement avant qu'une voiture n'arrive à notre hauteur.
Rectification : un camion. Je parviens à le signaler à Benny, qui ralentit jusqu'à s'arrêter. Surprise par ce mouvement, je manque de lui rentrer dedans, l'obligeant à me soutenir pour ne pas que je m'écroule, pour la troisième fois de la journée. Avec une grimace, j'inspire goulûment l'air tout en jetant un œil terrifié sur le camion qui ralentit.
Je me redresse et tire Benny par la manche pour qu'on s'enfuie, jusqu'à ce que la porte du conducteur s'ouvre pour laisser entrevoir la tête de Max. A l'arrière, je vois Ethel sauter hors du camion, sourcil froncés et arme au poing, prête à nous cribler de balles avant de réaliser ce qu'elle a devant les yeux.
— Felidae !
— Ethel, je m'exclame en retour, ravie.
Suite à ce cri du cœur, je retrouve le sourire et cours dans ses bras. Nos retrouvailles sont de courtes durées cependant, car bien vite Max et Benny nous font signe de remonter. J'ai à peine le temps de claquer la portière blindée que les premières balles fusent. A l'avant, Benny et Max reprennent la route tandis que je découvre les visages de Laël, Sasha, Aksel et des autres membres du petit groupe.
Ils sont tous couverts de sang, aussi bien rouge que violet, l'air grave et silencieux, mais ils semblent tous intacts. En balayant les visages, je me rends compte que Léane et Dys manquent à l'appel et je me fige. Un seul regard échangé avec Aksel me permet de comprendre ce que j'ai besoin de savoir. Tandis que le camion file à toute allure sur une route jonchée de débris, je parviens à trouver la main du jeune homme et la serre dans la mienne.
Ce dernier me sourit et répond de la même manière, tout en m'adressant un petit clin d'œil. Je baisse les yeux et souris faiblement, appréciant ce simple contact qui me permet de prendre pleinement conscience du fait que l'on s'en soit sortis. Tous. Ou presque. Encore faut-il parvenir jusqu'à la mer...
Mais si nous devions mourir ici, au moins nous serions tous ensemble. Risu profite de ce moment pour bondir hors de la poche où il s'était caché pendant ma course dans les escaliers et je vois Sasha sourire. Les bruits de balles se font toujours entendre, mais semble cette fois venir du haut. Les sourcils froncés, je me tourne vers Ethel qui frappe la séparation entre nous et les conducteurs pour demander ce qu'il se passe.
— Ils ont un hélico' !, hurle Max et le camion fait une violente embardée.
Nous nous serrons pour éviter de se frapper contre les portières et je lâche la main d'Aksel dans la cohue. Derrière nous, je peux clairement entendre des bruits de motos et d'autres voitures et mon cœur se serre. Va-t-on réussir à atteindre la mer en un seul morceau ?
— Est-ce qu'on peut le semer ?, répond Ethel au même volume, me faisant grimacer.
Nouveau virage brutal.
— On essaie !
Cette fois, c'est Benny qui a crié.
— On va devoir prendre les petits chemins, ils sont bordés par des maisons, ça réduira leur champ de vision ! Mais ça risque de nous ralentir !
Sasha grimace.
— Je ne comprends pas, le virus devait nous garantir trois heures de tranquillité, peste-t-il.
Je soupire.
— R.O.B a anticipé, je réponds.
Sasha me regarde, incrédule.
— Comment il aurait pu savoir pour le virus ?
Le camion fait un nouveau virage court et le silence retombe tandis qu'Ethel heurte sa portière avec un glapissement de douleur. Je pointe du doigt mon cerveau et j'entends Ethel jurer tandis que Sasha semble totalement perdu. Risu se glisse à nouveau dans ma poche pour s'accrocher.
— Fichu androïde ! Espérons que les garçons parviennent à les semer. Il est hors de question qu'on les emmène jusqu'à Calliste, siffle la jeune femme.
Je hoche la tête, tout comme le reste du groupe. Sasha continue de m'observer étrangement, jetant parfois un regard à Ethel, mais sans dire un mot.
— Tu n'es pas blessée, souffle Aksel.
Je me tourne vers lui. Ce n'est pas une question. Je secoue la tête.
— Ce n'était pas son intention, je réponds.
Le jeune homme acquiesce, visiblement soulagé.
— Tant mieux, termine-t-il avec un demi-sourire.
Je souris. Si seulement il savait... Quelque part, son intention est pire. Et il a toujours l'occasion d'y parvenir... Puis, mes sourcils se froncent. Au même moment, la jeune fille qui me fait face se lève.
— Ethel, lâche Laël.
Elle se tourne vers elle, l'air songeuse.
— Quoi ?
La jeune fille pointe du doigt le toit.
— Les coups de feu ont cessé.
Nous nous regardons en silence, réalisant qu'en effet, le silence semble être tombé. Ethel frappe contre la séparation une nouvelle fois.
— Les garçons, qu'est-ce qui se passe ?
Aucun des deux ne semble répondre. Puis :
— L'hélico a fait demi-tour. Et d'après ce que je vois, les voitures sont passées au non létal, explique Benny.
J'ouvre de grands yeux.
— Comment tu sais ça ?, je crie.
Le garçon soupire.
— Max est blessé, termine-t-il, faisant aussitôt réagir Laël.
— Il va bien ?, demande-t-elle.
— Comme je l'ai dit, ce sont des balles non létales. Il blessé et je pense qu'il est infecté avec leur fichu CDS, mais la dose est trop faible pour agir, donc il est juste shooté. Mais il va nous falloir un plan de secours parce que je ne peux pas conduire éternellement et que si je suis touché, on est tous à pieds. Alors on s'active les génies, termine Benny.
Les sourcils froncés, j'échange un nouveau regard avec Aksel, qui semble tout aussi perdu que moi. Je ferme les yeux, essayant de me connecter à mon I.A qui visiblement, décide de rester éteinte. Je ne sais pas exactement si je dois m'en réjouir.
— Pourquoi est-ce qu'ils ont rappelés l'hélico ?, demande Sasha.
Laël lève les yeux au ciel.
— Au pire on s'en fiche ? Ils sont bizarres depuis le début.
Aksel approuve d'un hochement de tête. Ethel, elle, se contente de me fixer, attendant la réponse qu'elle a déjà devinée.
— Parce qu'il me veut vivante, je lâche.
Sasha se tourne vers moi.
— Pourquoi ? Qu'est-ce que tu as de plus que les autres ?
Je grimace. Ils allaient tous finir par le savoir, de toute façon. Ce n'est plus vraiment la peine de le cacher.
— Sasha, ce n'est pas –, commence Ethel.
— Un cerveau composé à 30% par une Intelligence Artificielle, je réponds au même moment.
La jeune femme me fusille du regard tandis que les autres membres de l'équipe me dévisagent avec stupeur. Aksel se tend imperceptiblement et réajuste son arme, comme s'il s'apprêtait à tirer sur une des personnes présentes dans la voiture.
— Qu'est-ce qui me dit qu'il n'est pas en train de nous regarder à travers tes yeux ?, demande Laël, visiblement hostile.
Je hausse les épaules.
— Rien. Mais il semblait contrarié par le fait qu'il n'ait pas réussi à corrompre complètement mon Intelligence Artificielle, alors je dirais que pour le moment, il est hors de ma tête, je réponds.
Ethel émet un bruit de langue, agacée.
— Ce n'est pas le moment, ni même le problème ! Quoi que R.O.B veuille faire avec Felidae, elle a clairement refusé alors je doute qu'il la laisse tranquille, souligne la jeune femme.
Laël la dévisage.
— Comment tu as pu garder ça secret après l'explosion ? Si ça se trouve, c'était elle qui –, commence la jeune femme.
D'un geste sec, Aksel vient taper la crosse de son arme contre la tempe de la jeune femme, l'envoyant dans les vapes pour un petit moment. Ethel l'observe en haussant un sourcil tandis que Sasha reste silencieux. Les autres se contentent d'observer sans rien dire.
— Désolé, elle m'énervait, se justifie le jeune homme.
Ethel échappe un rire.
— C'est partagé.
Je souris, puis me tourne vers la jeune femme.
— Au sujet de l'explosion... Ce n'était pas ton frère. Ils... Je ne sais pas comment ils ont fait, mais c'était un androïde. Un nouveau modèle, apparemment, j'avoue.
La jeune femme reste silencieuse un petit moment puis hoche la tête.
— Je pense qu'une partie de moi savait que ce n'était plus vraiment lui, mais je mettais ça sur le compte de la prison. Au moins, je sais que mon frère est mort sans me trahir, admet-elle en réprimant un sanglot.
Je lui attrape la main et hoche la tête. La jeune femme me sourit et retire sa main de la mienne, tournant la tête vers la portière, laissant le silence retomber.
— Hey, m'appelle Aksel.
Je me tourne vers lui.
— Quoi qu'il advienne, on reste tous ensemble. Plus de séparation, déclare le jeune homme, lançant un regard lourd de sens à Sasha, qui se mure dans son silence.
Je lui souris et hoche la tête. Puis, je me concentre à nouveau sur la demande de Benny, cherchant un plan qui pourrait fonctionner et nous faire gagner quelques précieuses minutes de répit. Finalement, je regarde par la fenêtre et fronce les sourcils. Interpelant Ethel, je pointe du doigt son bracelet.
— Tu aurais un plan de la région là-dessus ?
La jeune femme fronce les sourcils et fait apparaître l'hologramme en question, sans un mot, clairement à moitié dans sa bulle. Je l'observe, puis tourne la tête derrière moi, dans le fond du camion, où sont entreposées deux caisses entières d'explosifs.
— Une idée ?, demande Laël.
Je confirme d'un hochement de tête. Je pointe du doigt une zone sur l'hologramme.
— Ici, c'est l'hôpital dans lequel je me trouvais avec Benny. Il n'est pas tout à fait sur la route, mais il est à une heure du port. Dans les caisses derrière nous, il y a des explosifs longs distances. Si les garçons nous y emmènent, on peut le remplir d'explosifs, s'enfuir et le faire sauter au moment où les troupes androïdes se pointent. On devrait gagner l'heure qu'il nous faut pour rejoindre Calliste et quitter le port tranquillement, j'explique.
Ethel reste songeuse. Sasha ricane.
— Ouais, en oubliant le détail des voitures d'androïdes, même armées de balles qui nous rendent groggys et l'hélico qui nous tournait autour depuis dix minutes qui pourrait revenir. Sans parler de Max qui est dans les vapes, lâche-t-il.
Ethel fronce les sourcils.
— Tu as une meilleure idée ?, demande la jeune femme, visage fermé.
Le jeune homme secoue la tête et repart dans son mutisme, parlant dans sa barbe à intervalles réguliers. Ethel communique alors le plan à Benny, qui reste silencieux plusieurs minutes.
— Si c'est notre meilleure option... Ça me va. Il nous reste environ une heure et demie de route, ça risque de secouer ! Je vais essayer de ne pas me prendre de balles, lance-t-il.
Le reste de la route s'effectue dans le plus grand des silences. Sasha me jette de temps en temps des regards torves, comme s'il s'attendait à ce que je prenne mon arme pour tous les tuer. Ethel est perdue dans ses pensées, sans doute suite à mes déclarations sur son frère. Aksel est le seul qui semble ouvert et prêt à discuter.
De mon côté, je me contente d'observer la route, échanger quelques mots avec Aksel et veiller d'un œil sur Laël, qui est toujours dans les vapes. Le camion continue de filer tandis que le soleil décline et ça me rassure. Tant qu'on ne s'arrête pas, c'est que Benny va bien. Les balles fusent toujours, visant l'arrière du camion.
Ils cherchent clairement à lacérer les roues, ce qui est assez difficiles puisqu'elles sont protégées par des plaques de métal blindé qui crisse contre la route à chaque sursaut du véhicule. Par la fenêtre, toujours les même paysages dévastés et je m'imagine ce à quoi pourrait ressembler les paysages dans les autres continents. Laël finit par reprendre ses esprits après une heure de trajet.
— Qu'est-ce que j'ai manqué ?, demande la jeune femme.
Sasha lance un regard dans ma direction.
— Visiblement, on transporte une monnaie d'échange. Le boss veut Felidae. On lui donne, on est libre, lâche-t-il.
Aksel le regarde, approchant son arme du visage du jeune garçon.
— Un mot de plus et je t'inflige le même traitement qu'à Laël, lance-t-il.
Ethel sort enfin de sa torpeur.
— On arrive dans une demie heure, alors soyez prêt à quitter le camion en emportant les deux caisses d'explosifs et à courir pour vos vies. Il va falloir porter Max, avec Laël tu vas devoir rejoindre Benny à l'avant pour l'aider. Et le premier qui fait une réflexion sur Felidae sera mis K.O par Aksel. Je préfèrerai éviter, mais nous n'avons pas le temps de nous disputer. Une fois à Buisia, vous pourrez faire votre vie, mais avant, vous suivez le groupe, ordonne Ethel d'une voix monocorde, juste avant que le camion ne s'arrête.
Le silence tombe et j'échange un regard paniqué avec la jeune femme.
— Benny ?, appelle cette dernière.
Le bruit d'une portière qui se ferme résonne et quelques secondes plus tard, celle d'Ethel s'ouvre pour laisser entrevoir Benny. Le jeune homme paraît fatigué, mais toujours alerte.
— Visiblement, on a semé les voitures. Je pense qu'il est plus prudent de finir la route à pieds. Il sera plus compliqué de repérer cinq personnes à pieds qu'un camion, explique le jeune homme.
Laël se précipite hors du véhicule pour aller chercher son frère, qui peine à ouvrir sa portière. Il est pâle et sa respiration est sifflante, mais il semble assez conscient pour rester alerte et avec nous. Ethel est la dernière à mettre pied à terre, observant le paysage environnant. Effectivement, pas une seule voiture derrière nous, ni d'hélicoptère au-dessus. Juste nous et la nuit.
Allumant son hologramme, Ethel affiche le plan jusqu'à l'hôpital, qui se trouve visiblement à seulement vingt minutes à pieds. On se met en route, Benny et Laël alternant pour porter Max. A l'avant, Sasha et Aksel s'assurent que la route soit dégagée. Ce n'est qu'une fois devant l'hôpital que nous faisons halte.
J'échange un regard avec Benny, atterrée. Alors que je pensais trouver un bâtiment, il ne reste qu'un vestige. Les murs sont encore partiellement debout et l'aile sud est entièrement détruite. L'entrée est encore debout, entourée de pierres et de débris, encore une fois. Le petit jardin a totalement disparu.
C'est donc cela que voulait dire R.O.B lorsqu'il a dit qu'Aïra avait été détruite ? A-t-il « puni » tout l'hôpital ? Ou savait-il que nous finirions ici ? Devant moi, Aksel s'engage à l'intérieur, suivi du reste du groupe. Rapidement, nous nous mettons en route pour placer les décharges. Ethel concerte Benny pendant plusieurs minutes avant d'annoncer une nouvelle séparation.
Aksel et Sasha d'un côté pour mettre les charges en place, tandis que Laël et Max emprunteront le chemin vers la sortie de secours, la plus proche de notre destination. Benny, Ethel et moi resteront dans cette partie pour placer nos charges avant de tous se rejoindre directement sur le bateau. Aksel grimace mais ne proteste pas, comprenant pourquoi Ethel l'éloigne avec Sasha. Je regarde les garçons s'éloigner avec Laël et Max, fixant la caisse restante.
— Au travail, nous presse Ethel.
Hello les loulous ! What's up ?
Que me racontez-vous ?
Comment s'est passée votre semaine dernière ? Et votre week-end ?
Bon sang, voici l'avant-dernière partie avant l'épilogue. Je ne suis pas prête.... Bouh !
Qu'avez-vous pensé du chapitre ?
Des personnages ?
Des décisions prises ?
Selon vous, que va-t-il se passer ?
Vont-ils survivre ?
Vont-ils tous mourir ?
Vont-ils réussir à à quitter Héliantia ?
Dites-moi tout, je vais lire tout ça pendant mon cours d'actualités, parce que Dieu sait comme ça peut être péniiiiiiiiiiiiiiiible ! Brefouille, je vous laisse la parole, à la semaine prochaine !
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