Chapitre 27 (partie III)

Aksel relève les yeux vers moi et au lieu du jugement que je pensais y trouver, j'y vois qu'un miroir du mien. Il ne semble pas le moins du monde surpris par ma question, ni même ma réflexion.

Au contraire, il semble même y avoir déjà pensé. Je fronce les sourcils devant ce manque de réaction, passant de l'appréhension à la surprise la plus totale. Un sourire résigné se dessine sur les lèvres du jeune homme malgré mes révélations et il me rend ma feuille, prenant le soin d'effacer ma question à ma place.

Il place ensuite ses avant-bras sur la table, croisant ses doigts entre eux, ses yeux plongés dans les miens. Je reste à côté de lui, droite comme un « i », mes yeux cherchant une trace d'explication dans ceux du jeune homme.

— C'est une possibilité que j'ai considéré le jour où tu as commencé à faire ton cauchemar. Tu te tenais la tête et tu pleurais sans pouvoir te contrôler, bien que tout soit silencieux. La douleur imprimée sur ton visage... Même la plus parfaite des hallucinations ne parviendrait pas à les reproduire. Sans parler du fait que les effets du K.T.A devraient commencer à se dissoudre maintenant et non rester aussi vivide que les premiers jours. La seule chose que je ne comprends toujours pas, c'est comment tu peux ressentir la douleur d'une telle opération alors que les méthodes d'endormissement sont infaillibles. C'est la seule chose qui me fait penser que c'est probablement juste une hallucination basée sur des faits réels, d'où le sentiment de réalité et les émotions qui y sont liées, explique Aksel.

Je reste silencieuse un instant, digérant les informations qui m'ont été données. Aksel ne semble pas dénier le fait que ce soit un souvenir, mais il n'en a pas l'air convaincu. Il semble plutôt penser qu'il s'agit toujours d'une hallucination.

Et je ne sais que croire. Au fond de moi, je pense que je connais déjà la réponse. La question désormais, c'est suis-je prête à l'accepter ? Le jeune homme se redresse et pose son coude sur la table, tournant son buste dans ma direction, retrouvant tout son sérieux.

Mon regard passe sur ma feuille, hésitant à écrire. Qu'est-ce que je pourrais bien dire maintenant ? « Merci pour tes théories ? » Non. Je pense qu'il est grand temps que j'aie enfin la réponse à cette question. Peut-être que la réponse me permettra d'arrêter de faire ce cauchemar ? Je reprends la feuille, écrivant alors tout ce que je sais sur la petite voix qui habite mon cerveau.

Celle qui me parlait pendant mon coma, celle qui voulait que je me réveille, celle qui me tient toujours compagnie aujourd'hui bien qu'elle ne se contente plus que de faire des remarques de temps à autre. Aksel lit en même temps que j'écris, ses sourcils se fronçant au fil des mots.

— Tu penses qu'il y a un lien entre ton hallucination sur une possible opération et cette petite voix ? questionne le jeune homme.

Je hausse les épaules, ne sachant pas vraiment quoi dire de plus. À cet instant, je ne sais plus quoi penser de rien. Hallucinations, petite voix... Qu'est-ce qui me dit que la petite voix n'est pas une hallucination depuis le début ?

Une invention de ma part, pour me prouver que je ne suis pas un androïde, que je suis bel et bien humaine ? Aksel reste silencieux, son regard passant de moi au texte qu'il a sous les yeux.

Je n'ose pas tourner la tête vers lui, ne préférant pas savoir ce qu'il pense que moi maintenant, Felidae la poupée brisée. Felidae la folle, qui s'imagine des voix et des opérations du cerveau pour combler un vide de souvenir qui la torture depuis plus d'un an.

Je l'entends soupirer et ses doigts reprennent leurs tapotements de plus belle, le bruit de cette « musique » emplissant la pièce à la place du silence. Finalement, il arrête et se redresse, éteignant la feuille sous mes yeux comme j'ai pu le faire avec l'écran de la machine tout à l'heure, celle qui se trouve derrière nous.

— Le seul moyen d'en être vraiment sûr serait de faire une radio de ton cerveau pour y déceler des traces d'une possible opération. Radio que je peux faire ici même, si tu es prête à accepter les réponses qu'elle te donnera, quelles qu'elles soient, propose le jeune homme à voix basse.

Je me tourne vers lui, les yeux remplis d'espoir. Les siens me renvoient sincérité et une brève lueur de doute. J'expire d'un coup et hoche la tête, comprenant qu'il me laisse quelques secondes pour réfléchir à sa proposition.

Pour la première fois —ou presque — depuis mon réveil, je suis sur le point d'avoir une réponse concrète et utile. Comme pour le retour de Benny, c'est un moment que j'attends depuis des mois et pourtant, l'appréhension me serre le ventre, me figeant sur place.

Les réponses d'Aksel sont toujours aussi sincères que prudentes, en m'offrant des solutions sans forcément me donner l'espoir d'une réponse qui me conviendra. Au contraire, il semble hésiter à me faire cette radio et je devine sans mal que c'est à cause de ma fragilité émotionnelle.

Je ne sais pas comment je pourrais réagir en apprenant que la petite voix est une hallucination et que je suis bel et bien folle depuis mon réveil. Mais je ne peux pas baisser les bras maintenant. Alors je me tourne vers le jeune homme, qui semble comprendre ma réponse avant même que je ne la donne.

— Je vais préparer la machine, souffle-t-il avant de s'enfoncer dans le Laboratoire, vers la partie Ouest dans laquelle j'ai dû aller deux fois.

C'est la partie la mieux rangée du Laboratoire, et ce, même avant que je n'arrive. Aksel m'a avoué un jour que c'est parce qu'il n'y allait jamais, puisqu'il y entreposait simplement de vieilles machines en état de marche, mais qui ne lui servaient pas pour les sérums. Je suppose donc que parmi ces machines se trouve celle permettant de faire des radios du cerveau.

Il m'appelle au bout d'une dizaine de minutes pendant lesquelles je pensais et repensais à ma décision afin d'être certaine que c'était la bonne, pour finir à la même conclusion : il me faut des réponses, quelles qu'elles soient.

Je le rejoins dans une partie dégagée et plus ou moins rangée —je le soupçonne d'avoir poussé des machines vers le fond pour me faire de la place —. Il y a une chaise, au-dessus de laquelle se trouve un petit écran duquel pend une sorte de rond blanc en métal.

Aksel me pointe la chaise du doigt tandis qu'il continue de régler l'écran au-dessus. Finalement, il pose le petit rond sur mon oreille droite, me faisant frissonner. Il reste figé, son regard plongé dans le mien.

— Tu es sûre de toi ? s'enquiert-il une dernière fois, attendant mon approbation finale.

Je lève mon pouce vers lui, le faisant rire. Son sourire est la dernière chose que je vois, lorsque le petit rond blanc —après une pression de la part d'Aksel — se déploie pour englober toute ma tête, s'arrêtant à la base de mon cou.

Il fait noir, mais étrangement, je ne panique plus. L'appréhension m'a quittée également. Je peux entendre le ronronnement familier d'un moteur de machine dans mon oreille, probablement le petit rond de départ. Je respire sans aucune difficulté, presque comme si ce cocon de métal respirait avec moi.

Pendant un long moment, rien ne se fait. J'entends Aksel tapoter sur l'écran qui doit être en face de lui, puis le vrombissement s'éteint. Je ferme les yeux lorsqu'une vive lumière s'active dans ma bulle, traversant même mes paupières.

Elle ne dure que quelques secondes, le temps suffisant pour me faire grimacer, puis tout s'éteint. Une seconde après, la bulle se désintègre et le petit rond tombe de mon oreille. Je souris en ouvrant les yeux, avant que l'appréhension du résultat ne me frappe avec force, me laissant KO quelques secondes sur ma chaise.

Aksel est immobile à mes côtés également, probablement dans l'attente des résultats. Il va falloir que je me lève et que j'accepte la vérité, comme quoi je suis probablement juste complètement tarée.

Je finis par lever les yeux vers lui et me fige une nouvelle fois. Aksel est bien devant l'écran, mais il le fixe avec les yeux ronds et la bouche entrouverte. La surprise est rarement quelque chose que je vois sur le visage du jeune, ou en tout cas pas à ce point.

Clairement, il a vu quelque chose auquel il ne s'attendait pas. Mon cœur rate un battement, l'espoir semblant revivre dans mon cerveau. Serait-ce possible qu'il y ait une explication rationnelle à tout ça ?

Que j'ai bel et bien été opérée ? Semblant se souvenir que je suis là, il baisse alors la tête et descend l'écran face à moi dans un même mouvement, visiblement incapable de m'expliquer lui-même ce qu'il a vu. Je ne vois rien d'anormal, si ce n'est une petite tache noire dans l'hémisphère gauche de mon cerveau.

Et encore, il ne me paraît pas anormal. Je ne saurais pas vraiment dire ce qui doit être anormal sur une radio, puisque je n'en ai jamais faite ou vu avant aujourd'hui de toute façon ! La réaction d'Aksel m'est donc incompréhensible.

Je lève un sourcil dans sa direction et cela semble lui délier la langue. Me donnant l'écran afin d'avoir les mains libres, il pointe la tache sur la radio. Je tourne mon regard vers cette petite « anomalie ». Aksel révèle clairement surpris et fasciné :

— Au départ, je pensais que c'était une puce MOREIEM à cause de la taille, mais c'est beaucoup plus avancé que ça. C'est compliqué à voir sur une radio, mais ce petit carré régit l'hippocampe de ton hémisphère gauche, ou ton hémisphère dominant. N'est-ce pas incroyable ? L'avancée de la technologie ne cessera jamais de m'étonner.

Il fait une pause pour me regarder, mais je lui renvoie le même regard qu'avant son explication. De quoi est-ce qu'il parle ? Une puce ? Je ne vois pas ce qui est incroyable dans le fait d'avoir une « puce » dans le cerveau, quoi que cela veuille dire. Aksel soupire et pose l'écran sur son support, avant de se tourner à nouveau vers moi. Cette fois, son excitation a cédé sa place à l'hésitation. C'est si grave que ça d'avoir une puce dans la tête ?

— Felidae, tu as une intelligence artificielle dans le cerveau, termine le jeune homme.

Pardon ?

TIN.TIN.TIIIIIIIN.
*Gif de la marmotte qui se retourne*

Salut les courginettes, what's up ?
Je vous avais DIT que ce chapitre allait vous mindfuck. Je vous l'avais DIT. Et c'est le CAS. Cette fin, mais pardon ?!

Qu'en pensez-vous ? 👀
Comment cette I.A est arrivé là ?
Pour quelles raisons Felidae en a une ?
Et comment vont réagir les autres ? 😱

Dites-moi tout, j'attends vos pétages de câbles en commentaire 😂😂🍀
Sur ce, je vous souhaite une bonne fin de semaine à essayer de trouver les réponses et on se dit à mardi prochain pour le reste 😏👌

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