Chapitre 22 (partie III)

Je ne peux supprimer un frisson tandis que ses paroles se gravent dans mon esprit. Il y a une sorte de menace dans ses propos et je ne peux m'empêcher de me demander ce qu'il advient de ceux qui ne sont pas acceptés parmi « eux ».

Qui est « eux » ? Il se dit différent de l'hôpital et pourtant il refuse de me donner les réponses, comme le faisait l'infirmière. Sa dernière phrase me frappe de plein fouet et mes yeux s'ouvrent grand, tandis que cette même voix trouve son écho dans mon esprit : tu es en sécurité maintenant.

C'était lui ? Cela expliquerait pourquoi sa voix me semblait aussi familière tout à l'heure. Mon regard trouve le sien et je l'observe, les sourcils froncés. Je sens ma bouche s'ouvrir légèrement et le regard de l'inconnu se radoucit tandis qu'il hoche la tête dans ma direction. Il se tourne ensuite vers Benny, puis de nouveau vers moi pour continuer :

— C'était moi. Ma patrouille vous a trouvé à deux heures d'ici et tu étais loin d'être en bon état. On vous a ramené ici et Madigan s'est chargée de toi et de ton ami. Maintenant que vous êtes tous les deux réveillés, il est temps de vous mettre à la page sur ce qu'il vous manque comme souvenir du monde qui vous entoure. Si vous voulez survivre, il faut savoir ce que vous fuyez. Et également savoir de qui vous méfier, à moins de vouloir retourner dans un hôpital.

J'entends Benny bouger dans mon dos et me retourne pour l'observer. Son regard s'est fait plus sombre et ses muscles se tendent petit à petit. Il s'avance lentement vers l'autre garçon, qui reste parfaitement stoïque malgré la carrure imposante du jeune homme qui lui fait désormais face.

Je peux presque sentir le coup partir avant même de voir Benny fermer son poing face à un adversaire parfaitement calme. Je ne sais pas à quoi pense Benny, mais je ne peux pas le laisser prendre une décision impulsive qu'il pourrait regretter.

Alors je m'avance également, posant une main sur le bras du jeune homme et le forçant à tourner la tête. Ses yeux presque noirs trouvent les miens et je secoue doucement la tête, dans l'espoir de le faire renoncer à toute pensée violente.

Je ne sais pas ce qui, dans le discours du garçon, l'a mis dans cet état et je ne tiens pas à les voir se battre. Heureusement, Benny semble comprendre le message et rouvre la main, mais ne se retient pas de fusiller le jeune homme du regard.

Je ferme les yeux quelques secondes, soulagée de ne pas voir tout cela partir en bagarre. Je reste tout de même perplexe face au fait que j'ai compris ce qui allait se passer avant même que les signes ne deviennent vraiment clairs.

— Je n'ai pas passé un mois et demi dans un désert pour me faire insulter par un gamin qui porte un pantalon trop court ! Les robots sont des ennemis et pourtant vous en avez installé un au cœur de votre précieux « QG ». Je ne pense pas avoir besoin d'apprendre de quoi me méfier et je ne cherche en aucun cas votre acceptation. Je n'ai en aucun cas besoin d'un enfant qui refuse de nous donner son prénom, siffle Benny, ce qui semble faire réagir notre guide.

Le jeune homme fronce les sourcils et tourne la tête vers l'endroit d'où nous venons. Est-ce qu'il peut voir la plateforme d'ici ? J'en doute. Je ne vois même pas la grande salle, étant donné que l'ouverture qui y mène s'est refermée derrière Benny il y a quelques minutes.

Il reste ainsi quelques secondes puis baisse un petit peu la tête, ses yeux venant balayer le sol. Je connais cette expression, j'ai presque la même lorsque je recherche quelque chose dans ma mémoire.

Du moins, j'avais la même avant que je ne me rende compte que toute recherche est futile puisque tout avait disparu de mon disque dur vierge. Apparemment, il ne se souvient pas de quelque chose, puisque je peux voir sa bouche s'ouvrir puis se refermer dans un bruit presque inaudible, si ce n'est pour un couinement surpris.

Il relève la tête, les sourcils toujours proches des yeux et pose ses mains sur ses hanches. Incrédule, il secoue la tête et hausse les épaules avant de prendre la parole :

— Mon nom est Calliste. Je pensais que Madigan vous l'aurait enseigné, puisqu'elle vous a donné un semblant de « tour » du QG. Je suis le bras droit de notre « organisation », si je puis dire.

Benny émet un rire que j'identifie immédiatement comme étant faux et je ne peux m'empêcher de me tourner vers lui, définitivement confuse. Qu'est-ce qui lui prend ? Ce n'est pas vraiment dans ses habitudes de se moquer des gens, surtout s'il vient de les rencontrer...

Est-ce qu'il connaissait déjà Calliste avant ? Se sont-ils déjà rencontrés pendant que je dormais ? Non, cela me paraît impossible puisque Calliste semble dire que Madigan aurait dû nous donner son prénom, sous-entendant ainsi que Benny ne pouvait pas le connaître à l'avance...

Alors pourquoi est-ce qu'il réagit ainsi ? Je lis dans ses yeux qu'il semble peser le pour et le contre de son argument, ou peut-être doute-t-il de ce que dit Calliste ? Après tout, on vient de découvrir cet endroit et il parle d'organisation ? Comment une « organisation » peut rester parfaitement inconnue des androïdes, qui semblent tout savoir sur la technologie ?

— Je me débrouille seul, je n'ai aucun besoin d'une Organisation dirigée par des enfants, répond Benny avec dureté.

Face à lui, Calliste lève les yeux au ciel et laisse échapper un soupir un peu exagéré pour être vrai. Cette réaction n'est probablement pas celle attendue par Benny, si j'en crois sa contraction de la mâchoire et son serrage de poings.

Je hausse un sourcil, surprise par la réponse de Benny. Seul ? Comment ça, seul ? Jusqu'à preuve du contraire, je l'aidais à s'en sortir avant de commencer à halluciner ! Hallucinations causées par un sérum, injecté parce que Benny m'avait donné envie de fuir !

Mais comme je ne peux pas exprimer oralement ma protestation, je suis obligée d'attendre la réponse du nouveau venu. Et puis je dois avouer être d'accord avec Benny sur le fait qu'il ne nous ait pas une seule fois donné son prénom. Peut-être qu'il n'en a pas, comme l'infirmière ?

— Je n'ai insulté personne, seulement vous donner des faits, Benny. Je ne doute en aucun cas de votre capacité à survivre par vous-même et mon but est de vous aider à atteindre ce but. Mais pour ça, il faut que vous ayez une idée de ce que vous devez attendre et connaître du monde extérieur. Vos souvenirs sont probablement flous, voire inexistants sur ce domaine et on ne peut pas gagner une guerre sans en connaître le détail, explique-t-il posément, presque comme si Benny ne venait pas de l'insulter et rejeter son aide.

Mon sang se glace et ses mots dansent dans ma boite crânienne autour d'un seul mot. Un mot qui ne semble pas être employé simplement pour faire comprendre la phrase ou l'idée, mais qui semble être regretté, si j'en crois le silence qui suit la déclaration de Calliste.

Lui-même semble se demander pourquoi il a dit ce mot et non un autre. Cette fois, mes mains bougent avant même que je n'y réfléchisse, mon cerveau répétant en boucle le seul mot que j'ai retenu de tout ce discours :

« Une guerre ? »

Le jeune homme fronce les sourcils en voyant mes mains s'agiter tandis que Benny est devenu raide et muet, les yeux fixant le vide, probablement en train de réfléchir face à ce discours, comme moi.

Mon cœur s'enflamme dans ma cage thoracique et je jette des coups d'œil en direction de mon ami, dans l'espoir qu'il comprenne que j'ai besoin de lui pour traduire ma demande, parce que Calliste ne semble pas comprendre ce que je lui demande.

Après tout, je ne peux pas m'attendre à ce que d'autres personnes sachent comprendre le langage des signes. Ce n'est probablement pas une langue très connue, étant donné que toutes les personnes que j'ai croisées jusqu'ici savent parler.

Mais à ma grande surprise, le jeune homme se contente de hocher lentement la tête, confirmant que ses propos n'étaient pas juste une jolie manière de s'exprimer, mais bien la réalité. Je me suis réveillée au beau milieu d'une guerre dont je ne sais absolument rien.

Et il faut maintenant que je vive dans ce monde en guerre sans savoir à quoi ressemblait le précédent.

Finalement, notre guide baisse les yeux, soupire et de sa main droite, semble attraper quelque chose sur le mur et le tirer, révélant alors une ouverture dans le mur. Derrière lui, la pièce qu'il vient de découvrir est assez grande, avec une table trônant au centre sur laquelle sont posés de nombreux papiers et une grande carte.

Ladite carte étant maintenue ouverte et à plat par une jeune femme qui lève les yeux à notre arrivée. La première chose que je remarque est son œil droit, barré par une grande cicatrice qui descend jusqu'au milieu de sa joue et ses cheveux bruns attachés en une queue-de-cheval haute.

Elle porte une tenue colorée, ce qui me surprend. Son haut laisse ses épaules nues et dessus, sont imprimées des feuilles bleues et orange et le tout est maintenu par une « salopette » rouge, me souffle mon cerveau.

Elle me paraît aussi âgée que Calliste, donc un petit peu plus que moi. Son regard passe sur moi, puis sur Benny, avant de s'arrêter sur Calliste, qui vient d'ouvrir la porte. Elle se redresse et croise ses bras sur son torse sans pour autant nous lâcher du regard, ce qui me rend nerveuse. Il y a quelque chose à propos d'elle qui la rend relativement effrayante.

— Felidae, Benny, je vous présente Ethel. Elle est la dirigeante de notre organisation, déclare Calliste.

Il se tourne alors vers elle et quelque chose semble passer entre eux ; comme s'ils venaient d'avoir une conversation à travers leurs yeux. La jeune femme s'écarte de la table et nous fait signe d'entrer dans la pièce d'un geste sec et autoritaire.

Je ne perds pas une seconde pour m'exécuter, suivie de Benny qui observe la pièce avec un mélange de fascination et de méfiance. Des sentiments que j'ai du mal à partager depuis que j'ai entendu le mot « guerre ».

Je ne suis pas exactement sûre de la définition, mais je sais que c'est quelque chose de bien plus grave que ce Benny ou moi avions pu imaginer lors de notre départ. Et même à deux, nous serions bien incapables de rester vivants bien longtemps.

Nous avons besoin d'en apprendre plus avant de décider quoi que ce soit. La porte claque dans mon dos, ce qui me fait frissonner et mes yeux se ferment malgré moi, internalisant ma peur. Je peux sentir le regard d'Ethel sur moi à cet instant.

Je rouvre les yeux d'un seul coup, expirant fortement, puis posant mon regard sur les papiers et la carte. Je ne comprends pas un traitre mot de ce qui est écrit, mais cela m'évite de devoir regarder Ethel, qui m'intimide énormément. Elle a une sorte d'aura qui me force à détourner le regard.

— Bienvenue chez les Survivants, ironise cette dernière d'une voix grave, presque masculine.

Salut tout le monde !
Comment ça va ?
Quoi de neuf ? 👀

Bienvenue donc à Calliste et Ethel ! Il ne nous manque plus qu'Aksel et vous aurez rencontré tout le monde 👀. Mais avant de le voir, il va falloir passer par la case "Ethel"... Et ça va laisser des séquelles 😏😏.

Qu'avez-vous pensé du chapitre ?
Du comportement de Calliste ?
De celui de Felidae ?
Et qu'arrive-t-il à Benny ?
Comment va réagir Ethel aux deux nouveaux ? 🤔👀

Pour ce qui est de Benny, il est simplement frustré de devoir se plier à la volonté de personnes qui semblent plus jeunes et il a aussi un gros problème de confiance. Alors forcément, il explose.... 👀

Je vous laisse tout l'espace pour commenter et on se dit à mardi prochain pour la suite !
Kisses 💜

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