Chapitre 22 (partie I)

L'appréhension serre mon cœur lorsque je franchis la porte de la salle dans laquelle j'ai passé trois jours inconsciente. Trois jours.

Benny n'a pas quitté la pièce -ou presque pas - pendant trois longues journées. Et après tout ce temps, je peux soudainement faire le tour de l'endroit, sans problème ?

Même à l'hôpital, ils ont attendu plus longtemps avant de me laisser explorer d'autres endroits que ma chambre.

Selon Madigan, si je peux te tenir debout, je peux visiter le QG, même après trois jours de mini-coma.

Qui plus est, toujours selon elle « on n'est pas à l'hôpital ici. Si tes jambes fonctionnent, tout fonctionne ».

Je n'ai pas vraiment cherché à argumenter plus que ça et elle nous a donc guidés hors de la pièce, vers le « QG ».

Cette drôle d'appellation, signifiant apparemment « Quartier Général », désigne le bâtiment dans lequel nous nous trouvons.

Et c'est tout ce que je sais, pour le moment. La jeune femme a refusé d'en dire plus, indiquant simplement que l'endroit dans lequel on se trouve est « l'avant-dernier niveau » et qu'ici, tout est « très différent de n'importe quel hôpital ».

Et elle n'a pas menti. La première fois qui me frappe lorsque nous passons la porte, c'est l'ambiance.

Là où l'hôpital était lumineux et extrêmement blanc, le couloir est ici dans les mêmes tons que la pièce soit gris métallique avec cette fameuse rouille qui pousse un peu partout.

Il y a si peur de lumière que je suis obligée d'attraper le bras de Madigan pour naviguer. J'aperçois quelques portes sur lesquelles je ne distingue aucun numéro.

Ce sont juste des portes, menant à des salles. Notre guide explique que derrière ses portes se trouvent d'autres patients, allongés sur des matelas, reliés à des machines retrouvées dans des entrepôts désaffectés.

Je ne sais pas ce que ces mots désignent, mais cela semble à la fois important et inimaginable, alors je me contente de hocher la tête, les yeux plissés, à la recherche de la moindre lumière me permettant de mieux découvrir mon entourage.

Sans aucun problème, Madigan continue de marcher lentement, pointant des portes du doigt, donnant le nom de certains patients comme si nous allions les retenir.

Elle s'arrête au bout du couloir, devant une énorme porte qui semble bien plus épaisse que les autres.

- Et le clou du spectacle : la Porte, s'esclaffe Madigan en posant sa main sur le côté.

Je fronce les sourcils, cherchant à deviner ce qui peut être aussi intéressant à propos d'une porte, quand j'entends une voix provenir du plafond.

Une voix claire, distincte, mais surtout... robotique. La voix prononce le nom de Madigan, suivi de « empreinte acceptée » et redevient silencieuse.

Je me fige instantanément, mes doigts s'enfonçant dans le bras de la jeune femme qui se retourne prestement pour poser son autre main sur la mienne et nous offrir un sourire rassurant.

Je tourne la tête vers Benny, qui a réagi à peu près de la même manière que moi en entendant la voix.

Madigan lève les yeux au ciel et remercie la voix, ce qui provoque l'ouverture de la porte d'un mouvement rapide, mais bruyant, me forçant à placer mes mains sur mes oreilles pour les épargner.

Devant nous se trouve désormais un escalier de la même couleur que les murs, qui semble monter à l'infini en forme de spirale.

Je cligne des yeux et lâche le bras de Madigan, fascinée par cette construction. Même à l'hôpital, les escaliers n'étaient pas faits ainsi.

Et des petits ronds de lumière sont incrustés dans l'immense pilier autour duquel tournent les marches et permettent une meilleure vue du couloir derrière nous également. Au-dessus de la porte, le numéro « -4 » y est inscrit.

Je n'ai cependant pas le loisir de voir cela très longtemps, car notre guide attrape nos poignets pour nous emmener dans les escaliers, commençant la probablement très longue montée.

Madigan ouvre la voie tandis que Benny ferme la marche, montant les marches derrière moi.

Le rythme imposé par Madigan est trop rapide pour que je puisse découvrir quoi que ce soit de plus, si ce n'est la douleur qui commence à tirer dans mes jambes et mon souffle qui se fait de plus en plus court au fil des marches.

Devant moi, Madigan continue de tracer son chemin, sans un seul regard en arrière. Marchant juste derrière elle, je peux presque ressentir son stress comme si c'était le mien.

Peut-être est-ce le mien ? Après tout, je viens à peine de sortir du lit et je suis déjà en train de faire un trek dans un escalier qui sent la boîte de conserve !

Je pense que j'ai de quoi être stressée par ce qui s'offre à moi. Je tourne la tête vers la gauche pour découvrir, à quelques pas de nous, une plateforme au-dessus de laquelle est peint le numéro « -3 ».

Qu'est-ce que cela signifie ? Il n'y avait pas cette petite barre devant les numéros à l'hôpital. Est-ce que sont des numéros spéciaux ?

Je n'ai pas le temps de m'interroger plus, car la voix de Madigan perce le silence pour nous intimer de nous dépêcher.

J'accélère le rythme avec une certaine difficulté, mes jambes me faisant souffrir. Enfin, surtout mes chevilles et l'arrière de mes cuisses, qui semblent brûler.

Même à l'hôpital je n'avais jamais ressenti cela. Ni même lors de notre fuite. Nous n'avions pas beaucoup de montées à faire, il faut dire.

Est-ce que c'est lié à l'escalier ? Je ne vois que cette explication pour expliquer que je ressente des douleurs à des endroits où j'ignorais avoir des muscles.

Un bruit attire mon attention et je fronce les sourcils, tendant l'oreille autant que possible. Une respiration sifflante. La mienne ? Non.

Elle semble venir de plus bas... J'entends Benny s'arrêter pour reprendre son souffle derrière moi et attrape aussitôt la manche de Madigan pour l'en informer.

Cette dernière tourne la tête et s'arrête, un petit sourire sur ses lèvres en découvrant le visage légèrement rouge du jeune homme et ma main posée sur mon cœur, essayant de ralentir ses battements.

Contrairement à nous, la jeune femme est parfaitement calme et reposée, la respiration calme et ne semblant pas ressentir la moindre douleur nulle part.

- Vous pouvez survivre un mois à l'extérieur sans aucune provision ni forme physique, mais vous ne pouvez pas monter un escalier, se moque gentiment la jeune femme, accusant le regard noir de Benny tandis que je me contente de hausser un sourcil.

Benny se contente de bouger son bras droit dans notre direction, intimant à Madigan de reprendre l'ascension, sans un mot de plus.

Je souris au jeune homme et pose ma main sur la sienne, essayant de lui insuffler un petit peu de mon énergie, si cela est possible.

La jeune femme hoche la tête et reprend son chemin, s'arrêtant six marches plus haut, nous offrant à nouveau un sourire moqueur tandis que nous la rattrapons.

Nous sommes désormais sur une plateforme ressemblant à celle qui se trouvait derrière la Porte du bas, mais en un peu plus grande.

Elle est plus grande que celle que j'ai aperçue plus tôt également et est surmontée d'un « 0 ».

Madigan s'approche du mur qui nous fait face et pose une nouvelle fois sa main dessus.

J'inspire brutalement, levant les yeux en anticipation avant même que la voix ne se fasse entendre, répétant les mêmes mots.

Mais cette fois, je ne suis pas aussi terrifiée qu'en bas. Devant mes yeux choqués, le mur s'ouvre en deux et une bourrasque d'air frais vient gifler mes joues et ébouriffer mes cheveux.

Du moins, plus qu'ils ne le sont déjà. Je ferme les yeux quelques secondes et souris devant la sensation. L'air extérieur m'avait manqué, je suppose.

J'avance de moi-même vers la sortie, précédée de Madigan qui ne semble pas partager mon enthousiasme. Seulement, face à moi se trouve un hall géant et vide.

Il me faut tourner la tête à droite pour trouver la source du vent : une ouverture dans un autre mur.

Madigan m'arrête avant que je ne puisse traverser l'ouverture, son regard observant cependant bien au-delà de moi.

Elle semble détailler la forêt d'arbres morts qui nous fait face et j'ouvre grand les yeux en découvrant que les branches nues sont recouvertes d'une fine couche blanche qui ne peut être que de la neige.

Nous sommes donc bel et bien en hiver... Je sens des larmes de joie piquer mes yeux tandis que j'observe la neige avec émerveillement.

C'est la première fois que j'en vois d'aussi près et je suis encore à une bonne distance. C'est magnifique... La lumière du soleil levant qui éclaire le dessus de chaque tas de neige, qui semble briller de mille feux...

C'est bien plus beau que le paysage que Benny et moi avons observé chaque matin en nous levant.

La désolation de l'endroit est désormais enfouie sous une couche de neige brillante et immaculée dont je ne peux détourner le regard.

Le corps de Madigan bloquant le passage, je ne peux pas aller plonger la main pour découvrir la texture de la neige sur mes mains.

Et puis il me faudrait traverser le grand hall qui me fait face et qui est totalement vide pour accéder à l'extérieur.

- Sinon, tu comptes nous parler de la voix dans le plafond ? Parce qu'on l'a entendu deux fois et je pense que tu as remarqué notre « peur » de ce type de voix, demande Benny, interrompant mon train de pensée.

Je me tourne également vers Madigan, qui a croisé ses bras sur son torse et continue d'observer l'extérieur de la plateforme avec les sourcils froncés. Quelque chose ne lui plaît pas, visiblement.

Je peux voir d'ici à quel point elle est tendue, ne serait-ce que par la rigidité de ses mouvements et son regard rapide qui balaye l'entièrement de la surface visible.

C'est presque comme si l'immobilité du paysage l'ennuyait ou l'énervait.

Cependant, je l'entends inspirer fortement et souffler avant de se tourner vers le jeune homme, détendant ses bras et lui offrant un petit sourire.

L'espace d'un instant, on pourrait même croire que toute tension a quitté son corps, si ce n'est son regard qui reste relativement fuyant.

Chaque mouvement la fait tressaillir et son corps bloque l'accès à l'extérieur, me forçant à rester sur la plateforme, ne pouvant avancer que jusqu'à l'ouverture.

- C'est l'intelligence artificielle qui gère le QG. C'est un vieux modèle qui est impossible à hacker pour les androïdes modernes et surtout impossible à tracer. On a un gars qui est parvenu à le mettre en place il y a deux ans maintenant. Un vrai petit génie ! J'ai dû lui parler trois fois et à chaque fois, c'était « robot-ci, robot-ça »... Avec tout ce qu'il a pu vivre dans son hôpital, il arrive encore à voir les robots comme de magnifiques pièces de métal. Enfin bref. Le plus long a été de rentrer les empreintes digitales de tout le monde afin qu'on puisse tous bouger de manière sécurisée et libre à toutes heures de la journée. Certains ont été plutôt réticents à l'idée de mettre un robot ici, mais ce n'est pas comme si elle était physiquement présente dans le bâtiment, donc ça va. Plus personne n'y fait attention maintenant. Je crois que certaines personnes lui ont même donné un prénom. C'n'est pas totalement ridicule ? souffle-t-elle.

Je hausse un sourcil et me tourne vers Benny, qui me rend mon expression. Ironique, murmure mon cerveau.

D'après ce que j'ai vu, le « QG » semble plus ou moins rempli de machines en toutes sortes, allant de la machine lisant les signes vitaux à celle-ci, qui peut parler dans le plafond.

Visiblement, même si d'autres personnes ici ont vécu dans un hôpital, ils n'ont pas le moindre problème avec les robots.

Je suppose qu'après un moment, mes craintes se dissiperont aussi et j'apprendrai à vivre avec ces robots-là. Peut-être. Pour le moment, l'idée même d'en apercevoir un me donne envie de vomir.

Et je préfèrerais éviter. Je ne sais pas exactement ce qu'en pense Benny. Après tout, il est déjà là depuis trois jours et la machine n'a pas semblé le déranger plus que ça jusqu'à mon réveil.

Peut-être s'est-il déjà habitué à ces nouveaux engins. Je finirais par le faire aussi, si nous sommes amenés à rester. Ces machines m'intriguent plus que ne me font peur, je l'avoue.

J'aimerais savoir comment elles marchent. Madigan aperçoit notre échange de regard et émet un petit couinement en fronçant le nez, levant un doigt vers nous.

- Hé ! Ce n'est pas pareil ! Jasper, Cora et Léana sont différents, ce sont des machines qui sauvent des vies ! Et en plus, elles ne parlent pas. Elles sont simplement là pour m'épauler avec les patients. Et puis les journées sont longues quand tu les passes dans un sous-sol peu éclairé, alors il fallait bien que je parle à quelqu'un. Et j'ai passé assez de temps à les réparer pour avoir le droit de leur donner un prénom, proteste la jeune femme avec une moue provoquant un fou-rire général.

Coucou tout le monde !
Comment ça va ?
Quoi de neuf ?

Petit chapitre un peu tranquille avec quelques révélations légères pour nos héros 🤗🧡

Pourquoi Madigan est-elle tendue ?
Que pensez-vous du QG jusqu'ici ?
Benny et Felidae parviendront-ils à s'y faire une place ? 😜💜🚀

Comme toujours, je vous laisse me donner vos théories sur l'histoire, les personnages et la suite des événements 😘💜🚀 et je vous souhaite une bonne fin de semaine !

A mardi prochain 💪💜

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