Trois semaines s'étaient écoulées depuis sa rencontre avec Lenzo. Peu de choses avaient changé, la chambre de Malia et les jardins étaient devenus ses seuls refuges. Ses amis venaient de temps à autre la voir mais sans réellement s'attarder. Ces derniers événements l'avaient atteinte plus qu'elle ne le pensait et ce n'était pas fini, puisque Jessy avait demandé à la voir, pour lui donner des explications. Au départ elle s'était montrée récalcitrante mais le temps lui avait permis de comprendre qu'elle devrait tôt ou tard, affronter ses problèmes, plutôt que de les fuir.

La vampire sortit de sa chambre pour se rendre dans les jardins où avait lieu leur rendez-vous. Jessy était assis sur l'herbe et son coeur se mit à tambouriner dans sa poitrine, il ne s'était pas retourné mais son ouïe fine, lui indiquait qu'elle se rapprochait de lui. Malia prit place silencieusement à ces côté et attendit qu'il prenne la parole. Se retrouver dans de telles circonstances, lui donnaient l'impression que quelques chose était non pas brisé, mais fissuré et cette simple pensée suffit à lui faire monter les larmes aux yeux.

- Je suis son Bêta le plus proche mais aussi son meilleur ami. J'étais sous ses ordres, je ne pouvais rien te dire, je le voulais, mais je ne le pouvais pas.

- Tu te rends compte de toutes les fois où je me suis confiée à toi ? Où j'ai pleuré dans tes bras ?

- Ça me brisait le cœur à chaque fois...

- Je n'ai plus confiance en toi, Jessy.

Ces paroles lui comprimèrent l'estomac mais Malia n'avait pas le choix, elle voulait qu'il sache qu'il lui avait fait du mal.

- Je le sais, dit-il en serrant les dents, mais si seulement tu pouvais te mettre à ma place, tu comprendrais.

- Et toi, me comprends-tu ?

- Bien sûr que oui, mais je suis déçu que toi en revanche tu ne me comprennes pas. Tu sais tout de moi, je suis la même personne, j'avais seulement mes secrets. Je reste le même, dit-il en la regardant droit dans les yeux.

Jessy n'avait pas tort, il avait donné sa parole mais son cœur lacéré semblait ne pas vouloir le comprendre. Il était peut-être tout simplement trop tôt.

- Une partie de moi comprend que tu étais sous serment et que tu ne pouvais rien me dire, mais je suis tiraillée par cette autre partie. Celle qui est blessée et qui ne peut pour le moment pas te pardonner totalement, du moins, notre relation ne sera pas comme avant. Je te propose de laisser le temps au temps et nous verrons par la suite.

Jessy ancra son regard à celui de sa meilleure amie. Il voulait qu'elle lise en lui pour qu'elle comprenne à quel point ses mots lui faisaient mal. Malheureusement, Jessy rompit cet instant et fronça les sourcils. Jacke lui informa par télépathie de les rejoindre.

- On doit rejoindre Messone dans sa suite.

Elle se leva mais Jessy la retint par le bras.

- Lenzo sera là.

Un éclair de colère passa dans ses yeux. Il avait tenté à plusieurs reprises de la voir et à chaque fois elle l'avait rejeté, et si cette fois encore il désirait lui parler, elle le renverrait dans sa meute, une fois de plus.

Malia ouvrit la porte où tout le groupe était présent. La vampire prit soin de ne pas croiser le regard ardent que Lenzo posait sur elle et porta son attention sur Messone qui lui tendit une lettre.

- Je suppose que tu sais de qui ça vient.

- Bien sûr puisque c'est moi-même qui lui ait envoyé la première, dit-elle d'une voix à peine audible.

Des regards confus se posèrent sur la jeune femme qui visiblement n'en avait rien à faire, ce qui fit sortir l'Alpha de ses gonds.

- Comment ?! Tu aurais pu nous le dire ! s'étonna ce dernier.

La brune se retourna vivement en serrant les poings.

- Que ce soit bien clair, toi je n'ai aucun compte à te rendre.
- Et nous ? Tu m'avais promis de ne rien faire de stupide.

Malia se retourna pour croiser le regard déçu de son ami et lui expliqua que c'était la meilleure solution. Étant une Ultime, elle devait absolument justifier son geste d'avoir tué deux vampires le soir du bal et même si rendre des comptes ne l'enchantait pas vraiment, il valait mieux faire profil bas, surtout avec les récents événements. Stanley n'allait certainement pas se gêner pour la descendre auprès du roi, elle devait contre-attaquer face à ce serpent et plaider sa cause auprès du roi.

Messone acquiesça, ce qui fit grogner Lenzo de mécontentement. Agacée, elle plongea son regard dans le sien pour le sermonner mais le regretta aussitôt. Ce geste réveilla mille sensations au creux de son ventre. "Ressaisis-toi bon sang !" Pesta t'elle contre elle-même. La vampire s'éclipsa de la pièce, préférant mettre un terme à ce duel de regard.

Lenzo quant à lui se tourna vers Messone.

- Tu iras avec elle.

Le vampire le toisa sévèrement. L'Alpha pouvait certes diriger ses loups mais en aucun cas lui donner des ordres, surtout depuis les récents événements.

- J'irai avec elle parce que je l'ai décidé et non parce que tu me l'ordonnes.

Lenzo serra les poings regrettant déjà d'avoir employé un ton si autoritaire avec son ami de longue date, qu'il s'était mis à dos.

- Ce n'était pas un ordre.

- Alors c'était quoi ? rétorqua Messone en passant près de lui sans le lâcher du regard.

Il n'attendit pas la réponse et sortit à son tour rejoignant Malia dans sa chambre où celle-ci s'était allongée, l'air pensive. Il s'allongea près d'elle et passa un bras derrière sa tête.

- Peu importe ce qu'il te dira ce soir, contrôle-toi.

- Je suis la reine du contrôle, tu le sais non ?

Ils se mirent à rire, ce qui lui fit le plus grand bien. Mais ce moment fut de courte durée puisque Lenzo entra dans la chambre, le regard assombri par la jalousie. Voir sa belle dans les bras d'un autre l'énervait au plus haut point, mais lui faire une crise de jalousie ne ferait que l'énerver d'autant plus. Messone embrassa le front de son amie et sortit sans un regard pour l'Alpha. Malia se leva à son tour et se posta devant lui attendant qu'il rompe ce silence devenu pesant.

- Je sais que tu ne veux pas me parler et je n'insisterai pas mais si tu pouvais porter ça ce soir je me sentirais plus rassuré...

Malia émit un rire amer en voyant cette broche qui était celle que Jessy lui avait donné quelques temps plus tôt.

- J'ai rencontré le roi plus d'une fois tu sais ? Je suis rentrée en conflit avec plus d'une personne tu le sais ? J'ai tué aussi plus d'une personne depuis que j'ai mis un pied dans cette école, tu le sais ?

- Oui, mais...

- Toi, tu étais où ?

Il ne dit rien, mais l'énervement se lisait sur son visage.

- Laisse-moi t'expliquer ce qui c'est passé ce soir là.

- Non. Je ne veux pas l'entendre pour le moment.

- Alors tu ne peux pas comprendre.

- Peu importe, tu as pris tout ton temps pour venir à moi, à moi d'en faire de même.

Il soupira, lui tendant quand même la broche.

- Mets-la, s'il te plaît.

Elle saisit la broche et frôla sa main ce qui lui procura des milliers de frissons. Il recula affichant un sourire en coin et partit à son tour de la chambre. Malia se détestait de réagir avec autant d'intensité à chaque effleurement de sa part même si ces sensations nouvelles étaient loins d'êtres désagréables. Ne voulant pas s'attarder sur ses sentiments, la brune se prépara pour son rendez-vous.

Le moment était venu pour eux de partir sous les regards inquiets de leurs amis qui tous se demandaient comment le roi allait réagir et surtout, qui prendrait-il pour responsable des actes de cette soirée catastrophique. Malia descendit les escaliers vêtue d'une jolie robe noire, sous le regard appréciateur de Lenzo, mais son visage s'assombrit lorsqu'il se rappela que c'était son pire ennemi qui allait profiter d'elle. La brune lança un coup d'oeil en direction de Jessy dont le regard trahissait son inquiétude et les posa ensuite sur celui de l'Alpha qui reflétait la même lueur. Il ne la lâchait pas du regard, les accompagnant même jusqu'à la porte d'entrée. Prise d'un petit remord, elle passa la porte et actionna le bouton de la broche sans se retourner, devinant le sourire de son ami mais surtout celui de son âme sœur.

Le trajet se fit en silence, chacun se préparait à cette rencontre qui pouvait mal finir si le roi décidait de s'en prendre à elle, pourtant elle n'y croyait pas. Elle était presque sûre que le roi ne lui ferait pas de mal. Ils arrivèrent aux portes du château où le majordome qui n'était d'ailleurs pas le même que d'habitude, les fit entrer et les accompagna jusqu'à la salle du trône. Quelle ne fut pas leur surprise de voir Stanley assis à la place du roi, son air confiant et son sourire narquois plaqué sur son visage qui le rendait d'ailleurs encore plus laid. Ses cheveux noirs plaqués en arrière lui donnaient un air sévère.

- Messone, quel plaisir de te revoir.

Son regard se posa ensuite sur Malia.

- Malia, dit-il en faisant un signe de tête.

Sa voix se fit plus dure et son regard plus perçant. S'il pensait l'impressionner, c'est qu'il ne la connaissait pas.

- Où est le roi ?

- C'est moi qui remplace le roi en son absence et puisque vous vouliez un entretien, je vous l'ai accordé. Il est certain que parlementer avec moi vous sera beaucoup moins agréable, mais nous n'avons pas toujours ce que l'on veut.

Elle serra les poings. Ce vicieux serpent voulait lui mettre des bâtons dans les roues mais Malia était bien décidée à ne pas se laisser faire.

- C'est exact, on n'a pas toujours ce que l'on veut. Enfin passons, si je suis là aujourd'hui c'est pour parler de ce qu'il s'est passé à Felesia.

- Vous voulez parler du soir où vous avez ôté la vie à deux vampires ?

- Deux vampires qui ont créé un véritable chaos et qui avaient complètement perdu l'esprit en s'en prenant à tout le monde. Si c'est bien de ces deux vampires là dont nous parlons alors oui, c'est exact.

- On dirait bien que vous vous croyez au-dessus de nos lois. Vous agressez deux vampires de la garde royale, vous tuez un autre vampire et là deux d'un coup et devant tout le monde

- J'ai fais ce qui me semblait le plus juste, dit-elle en le regardant droit dans les yeux.

Mais avant qu'il ne rétorque, elle lui posa une question qui lui brûlait les lèvres.

- Me prenez-vous pour une menace ?

Maintenant que la guerre était déclarée, Stanley ne comptait plus se retenir envers elle, surtout en l'absence du roi.

- Vous êtes une menace pour mon roi mais aussi pour notre espèce ! Un Ultime peut exister, mais pas deux. C'est contre nature et tôt ou tard vous voudrez cette place ! s'exclama-t-il en haussant la voix.

Contre toute attente, elle gardait son calme ce qui ne fit que l'énerver encore plus.

- Voyez-vous Stanley, je ne recherche en rien le trône, c'est vous qui avez cette idée dans la tête, pas moi. Vous cherchez à me détruire alors que je ne cherche qu'à vivre en paix.

Le visage déformé par la haine, il avait de plus en plus de mal à se contenir.

- Servez vos mensonges au roi ! Il est clair que celui-ci est tombé sous votre charme mais moi non !

Le regard de la vampire s'assombrit, il n'y avait rien à faire, cet homme voulait la voir morte et rien ne pourrait lui faire changer d'avis. Son esprit était en plein dilemme, devait-elle le tuer maintenant et en finir une bonne fois pour toutes ou attendre... mais attendre quoi ? pensa-t-elle.

Ayant déjà vu ce regard sur le visage de son roi, Stanley recula de quelques pas tout en essayant de voiler sa peur. Il devait mettre fin à ce rendez-vous avant de finir la tête arrachée. Heureusement pour lui, Messone était là et prit le bras de la jeune femme pour qu'elle se calme, ce qui lui redonna confiance.

- Je vais mettre fin à cette entrevue, mais ne vous y méprenez pas, nous nous reverrons bientôt.

- Vous, ou vos acolytes ?! pesta-t-elle.

Un sourire narquois prit place sur le visage du vampire. Il leur fit un signe de tête et partit sans un mot de plus.

Messone prit sa main et quitta la salle avant qu'elle ne commette une erreur irréparable. Il n'avait plus aucun doute, Stanley voulait sa mort et il n'était certainement pas le seul, ils allaient devoir redoubler de vigilance.

Comme vidée de toute émotion, Malia posa sa tête contre son siège et laissa son regard défiler sur le paysage. Stanley ne leur laisserait aucun répit, il désirait sa mort et très bientôt il frapperait de nouveau. Le temps, leur étaient comptés.