💎53
Abattue, écoeurée, déçue et tant d'autres mots n’étaient pas suffisants pour décrire ce que Malia ressentait. Seules quelques larmes silencieuses reflétaient sa tristesse et sa colère. Elle avait échoué et s'était montrée plus faible que le roi et comme si cela n'était pas suffisant, Hermès s'était donné la mort sous ses yeux impuissants. Cet homme à la détermination sans faille s'était donné la mort, persuadé qu'elle était la clé pour sauver l'espèce des vampires du tyran qui les gouvernait. Dire qu'elle n'était pas à la hauteur de son espérance lui faisait l'effet d'un coup de poignard, Malia aurait voulu l'être, elle s'était entraînée durement pour devenir l'Ultime dont tout le monde parlait, cette héroïne, celle dont tous se souviendraient ; mais la réalité avait un goût bien plus amer. Ultime impuissante, faible, ne valant guère mieux que ses prédécesseurs au destin funèbre.
— Hermès a fait un travail formidable, ta technique de combat est…
— Pitoyable ! dit-elle sans le laisser finir sa phrase. J'ai échoué ! Il est plus fort que moi ! Sans Hermès je… je n'en serais pas là.
Émettre son prénom à voix haute noua sa gorge d'émotion. Malia osait à peine imaginer la douleur d'une telle perte pour Messone, pourtant, le vampire observait son chemin sans transparaître la moindre émotion. Ce fut à cet instant précis qu'elle prit conscience qu'il se trouvait bien là, c'était très étrange, le voir assis près d'elle lui donnait l'impression qu'il n'était jamais vraiment parti. Mais Malia l'avait vu de ses propres yeux, son cœur se souvenait encore de cette douleur lancinante à la limite de lui faire perdre conscience.
— J'ai vu la lance Messone. Je l'ai vue transpercer ton corps, ton teint pâle se couvrir de ce maudit gris, alors explique-moi Messone, dis-moi que tout ceci est réel, que tu te trouves bien auprès de moi.
Malia sentait son corps mais plus son esprit, son corps semblait lutter pour la faire tenir debout alors que sa conscience sombrait dans une pure folie. Puis sa peine éclata dans un bruyant sanglot, jamais elle ne s'était sentie si démunie, si perdue face à son destin et toutes les embûches qu'elle devait surmonter.
Sans qu'elle ne vit quoique ce soit, la portière de la voiture s'ouvrit à la volée et deux bras puissants l'enlacèrent avec force. La jeune vampire continua de pleurer quelques instants jusqu'à ce que la voix de son meilleur ami lui conte son récit.
— Le traqueur détenait une arme qui je pensais n'existait plus depuis longtemps, une lance en bois de sorbier. Bien qu'elle ait touché mon cœur, cette dernière ne fit que l'effleurer suffisamment pour y pénétrer son poison. Créées par les sorcières de Salem il y a plusieurs siècles, ces dernières avaient imbibé de poison un grand nombre de pieux afin de faire souffrir notre espèce. Il faut dire qu'à l'époque, elles ne nous appréciaient pas tellement.
Malia devina aisément le sourire que devait afficher Messone.
— Quoiqu'il en soit, Darius demanda à Agathe la régente des sorcières d'ordonner le bannissement d'une telle arme. Le poison détenu dans le sorbier prend une couleur grisâtre lorsqu'il rentre en contact avec notre hémoglobine, ce dernier se faufile jusqu'à notre coeur et l'entoure d'une fine pellicule noir. Tes muscles se raidissent, la couleur de ta peau se ternit et ton corps se plonge dans une mort physique. J'insiste sur le mot physique car ta conscience, elle, vit toujours.
La brune sentit le vampire se raidir, il lui fallut quelques secondes pour retrouver la parole.
— Le poison te fait vivre un doux rêve qui se transforme rapidement en cauchemar, tu veux te réveiller, t'échapper de cet enfer mais c'est impossible. Imagine-toi vivre un cauchemar chaque seconde de ta vie sans jamais pouvoir te réveiller, le seul moyen de t'en sortir est qu'une personne retire le pieu. Les conséquences psychologiques pour la victime peuvent parfois être désastreuses. Pour moi c'est différent, j'ai la chance d'avoir des amis pour m'aider à avancer peu importe les difficultés.
Il mentait, pensa Malia, il n'avait jamais su mentir. Elle-même avait vécu cet horrible cauchemar mais une fois uniquement. Cette belle petite fille qui jouait avec Lenzo, elle voyait encore ce beau regard avant que tout ne s'écroule autour d'elle et qu'elle se réveille dans l'antre du roi. C'était donc un pieu en bois de sorbier que le roi lui avait lâchement poignardé dans le dos. La vampire préféra taire ce passage et releva le regard, deux pupilles d'un bleu saisissant l'observaient avec attention.
— Ce sont dans des moments comme celui-ci qu'on tire notre plus grande force. Nourris-toi de cette colère, attire-la au plus profond de toi pour te créer ta propre armure.
Encore une fois, Messone avait su trouver les mots justes pour apaiser son âme blessée. Malia sentait encore cette douleur au creux de son ventre, mais elle n'était plus aussi intense. Il déposa un furtif baiser sur son front et l'invita à remonter dans la voiture.
— Hermès t'a-t-il confié quelque chose ?
La brune fronça les sourcils en cherchant à se remémorer chaque mot qu'il lui avait murmuré.
— Il m'a parlé de la lune, de la suivre et de ne pas la craindre. Il fait certainement allusion à Lenzo, mais pourquoi me dire de ne pas la craindre ? Il est évident que je n'ai pas peur de mon âme sœur.
Instinctivement, Malia tourna son regard en direction de l'astre de la nuit. Cette dernière n'était pas pleine montrant seulement qu'une partie d'elle, qu'une seule facette de ce qu'elle était vraiment.
— Il ne t'a pas donné la réponse parce qu'il souhaite que tu le découvres par toi-même. Hermès a toujours eu le don pour faire planer le mystère, il m'a fait tourner en bourrique plus d'une fois et même dans la mort il continue.
— Je suppose qu'on ne s'y fait jamais ? Je veux dire, la perte d'une personne que l'on aime. Cette douleur, ce vide. Tu le connaissais depuis tellement longtemps, je n'ose pas imaginer ta peine.
— Pour un vampire, la douleur est bien plus intense car nous sommes censés être immortels. Les humains ont le paradis pour se consoler alors que nous, nous avons l'éternité et une multitude de cicatrices à porter. Mais avec le temps, la douleur est moins profonde, plus facile à supporter, bien qu'elle ne s'efface jamais. En ce qui concerne Hermès sa mort est différente puisqu'il la désirait, vivre n'avait plus aucun sens pour lui, il était las de la vie, la seule chose qui le maintenait dans ce monde était la vengeance. Ce soir je considère qu'il est enfin libéré de ce poids qui le rongeait de l'intérieur. Maintenant nous allons devoir nous concentrer sur ses derniers mots, car il ne disait rien au hasard et pour ça, nous possédons la meilleure équipe qu'il puisse exister.
Le visage du vampire s'étira d'un sourire lorsqu'il aperçut la grande forêt où était dissimulée Felesia. Aux abords de cette dernière, elle aperçut plusieurs silhouettes s'avancer dans leurs direction, mais l'une d'entre elle se faisait plus pressante et à la vitesse à laquelle elle se déplaçait, nul doute que c'était un vampire - ou plutôt une vampire. À peine avait-elle mis un pied dehors que Malia eut simplement le temps d'apercevoir une tête blonde sauter dans les bras de son grand amour. La vampire les contempla quelques secondes avant d'apercevoir Méline bondir dans ses bras. Dylan, Jacke, Jason, Jessy et Daé étaient tous présents. Les retrouvailles étaient émouvantes, la vampire pouvait sentir son cœur battre avec puissance, la joie qu'elle ressentait de tous les retrouver était indescriptible, mais son cœur quant à lui réclamait une autre personne. Celui qui habitait ses rêves la nuit et ses pensées le jour, celui qui d'un seul regard pouvait lire en elle, mais elle avait beau regarder autour d'elle, Lenzo n'était pas là.
Instinctivement, elle s'approcha de la forêt espérant qu'il apparaisse et comme une réponse à sa demande silencieuse, L'Alpha apparût devant elle. Cependant, son regard était teinté d'un voile de colère, ses poings serrés et ses muscles tendus à leur extrême exprimaient à eux seuls que leur retrouvailles ne se passeraient pas comme elle l'avait si souvent imaginé.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top