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Malia déambulait telle une âme en peine dans les nombreux couloirs qu’habitaient le château. Son visage ne trahissait aucune émotion, si ce n'est son regard où luisait la peine et la peur. Oui, la peur. La vampire craignait cette soirée qui marquerait un tournant définitif à sa relation avec le roi, cet homme que tous comparaient au diable, détesté des loups-garous, adulé par les nobles vampires. Elle ne savait plus de quel côté se positionner. Les mises en garde de Messone et d’Hermès résonnaient sans cesse dans son esprit, pourtant son ressenti était différent, ou peut-être se voilait-elle la face ? Préférant retenir ses bons côtés plutôt que de faire face à ses pires défauts. Les reconnaître apporteraient tant de soucis, les ignorer  ne faisait que retarder l'inévitable… 
Malia ouvrit la porte de sa chambre et soupira, le regard rivé sur le sol. 

— C’est tout l’effet que je vous fais ?

Elle sursauta et posa une main sur son cœur en voyant le roi adossé contre le mur de sa chambre. Son ventre se serra lorsqu’elle rencontra ses deux iris d’un bleu perçant. Le sourire en coin qu'il affichait serait probablement inexistant, s'il savait que dans quelques heures elle ne serait plus ici. Malia se sentit soudainement envahie par la culpabilité. Elle avait l’impression d’être une traîtresse et cette sensation était des plus désagréables, il lui était insoutenable de le regarder en face en sachant que sa fuite était prévue dans quelques heures. Non, elle ne pouvait pas le trahir comme ça, il fallait qu’elle trouve le moyen de sortir d’ici sans qu’elle n'ait à le faire par la force mais aussi pour Hermès. Il était hors de question qu’il se sacrifie pour elle, il lui avait été d'un grand soutien durant son séjour dans ce lieu inconnu, à présent c'était à elle d'en faire autant.

— Je veux partir et maintenant. 

Le roi haussa un sourcil et pouffa de rire sous son regard surpris. Ne s’attendant pas à une telle réaction, Malia ne sut quoi dire ni faire. 

— Voyons princesse, depuis quand êtes-vous en position d’exiger quoique ce soit ?

Malia serra ses poings si fort que leur jointures blanchirent sous sa force surhumaine. Jusque-là, elle ne s'était pas sentit prisonnière, Alban lui avait appris à contrôler sa soif lorsqu'elle mordait un humain, tout comme Hermès lui avait apporté son aide précieuse dans bien des circonstances, mais s'il pensait pouvoir la garder indéfiniment, il se trompait lourdement. 

— Qu’est-ce que vous pouvez être susceptible. Je plaisante, dit-il en s’approchant d’elle. Vous pourrez partir dès demain matin, au lever du jour. 

— Et pourquoi pas ce soir ?

Malia plissa légèrement les paupières, suspicieuse, en voyant Alban se déplacer jusqu'à elle. Ce dernier leva sa main et replaça une mèche de ses cheveux, tout en la regardant intensément. 

— Parce que ce soir je vous réserve une surprise que vous n’êtes pas prête d’oublier, et j’espère de tout cœur Malia que vous prendrez la bonne décision. 

— La bonne décision ? répéta-t-elle incertaine.

De son pouce, il lui caressa la joue et déposa un chaste baiser sur son front. Le regard qu’il posait sur elle la mettait mal à l’aise, jamais il ne l’avait observée de cette façon. Habituellement séducteur, cette fois il était froid et sans aucune émotion, Malia crut même y percevoir un avertissement. Un courant d'air frais lui parcourut la nuque et l'envie de s'éloigner se fit ressentir, mais elle n'en fit rien. 

— Aimez-vous le théâtre ? 

Cette fois, la vampire recula de quelques pas. Cet homme était complètement dingue et ses soudains changements d’humeur la rendaient complètement folle. Il passait d’un comportement sérieux à un comportement désinvolte en un claquement de doigt. Ne lui laissant nullement le temps de répondre, le roi quitta la pièce sous son regard incrédule et la laissa seule, le regard chargé d'incompréhension.

Peut-être n'était-il plus sain d'esprit, pensa Malia en haussant un sourcil et en prenant place sur son lit. Son corps s'allongea lourdement sur la douceur de la soie et durant un instant, la vampire savoura le calme autour d'elle. Les paupières closes, des images de ses amis passèrent les une après les autres et enfin elle sourit. La douceur de Méline, Jacke qui n'était jamais très loin derrière sa douce, son meilleur ami Jessy préparant une mauvaise blague à Dylan et Dae levant les yeux au ciel face à leur bêtises, tout de ses amis lui manquait mais celui qui hantait ses pensées n’était nul autre que son loup. Le simple fait de l'imaginer lui serrait le cœur, ses pupilles émeraudes la fixant avec intensité lui procuraient mille sensations et il n'y avait que lui pour lui faire ressentir toutes ces sensations. 

Sa famille et son âme-sœur était sa source de vie, celle pour qui elle voulait se battre et donner sa vie s'il le fallait mais perdre l'un d'entre eux se résumait à perdre une partie d'elle. Depuis la mort de Messone, Malia sentait qu'elle n'était plus totalement la même et si pour le moment elle arrivait encore à contrôler sa noirceur, qu’en serait-il si une autre personne chère à ses yeux mourait à nouveau ? Ses capacités à se contrôler avaient ses propres limites et Malia l'avait bien compris. Elle pensait la contrôler mais se fourvoyait, au moindre déchirement, cette dernière n'hésitait pas à faire surface et ternir ce qui restait de bon en elle. Comme lui disait Hermès, “Une guerre apporte son lot de morts dans un camp comme dans l'autre.”.

Des coups à la porte de sa chambre la firent sursauter, Malia se leva d'un bond, poings serrés.

— Pardon, je ne veux pas vous déranger mais son altesse m'a demandé de vous apporter mon aide pour vous habiller. 

— Je n'ai pas besoin d'aide pour m'habiller, nous ne sommes plus au temps des rois, enfin si tu vois ce que je veux dire… 

Emma étira un sourire timide.

— C'est aussi ce qu'il m'a dit, que vous refuseriez une fois de plus mon aide mais cette fois-ci, permettez moi d'insister, dit-elle en ouvrant l'armoire. 

Malia découvrit une magnifique robe longue, d'un vert émeraude parsemée de magnifiques broderies d'or. Elle s'approcha et du bout des doigts toucha le magnifique tissu d'une douceur indescriptible, le roi connaissait précisément ses goûts et si habituellement cela l'aurait agacée, cette fois elle ne dit rien. 
Emma quant à elle saisit le corset que Malia n'avait pas encore remarqué, trop absorbée par sa robe mais lorsque la domestique l'agita sous son nez avec un sourire moqueur, Malia abaissa les épaules et soupira en sachant qu'elle allait passer un très mauvais quart d'heure. 

— Les femmes portaient cet objet de torture tous les jours ! Je ne peux pas le croire ! Aïe ! 

En tant que vampire et doté d'une force considérable, Emma n'avait pas à forcer pour mettre le corset en place mais pour ce qui était de Malia, elle avait beau être une Ultime, l'inconfort se lisait sur son visage. 

— Cessez de bouger, vous allez vous décoiffer, c'est pratiquement terminé.

Malia émit un petit gémissement de mécontentement et s'apprêtait à rétorquer lorsque la femme de chambre lui apporta la robe. La vampire l'enfila et Emma boutonna l'arrière du vêtement. 

L'Ultime observa son reflet dans le miroir, ses longs cheveux étaient remontés en un chignon ondulé. Quelques torsades encadrait son joli visage tapissé d'un rouge à lèvres rouge et son regard était allongé d'un trait d'eye-liner noir. 

Malia était enfin prête. Les portent s'ouvrirent et pensant que le roi se trouvait derrière celles-ci, son cœur se mit à battre plus rapidement, mais ce dernier semblait manquer un battement lorsqu'elle crut apercevoir ce maudit vampire de Stanley. Cela faisait des jours qu'elle ne l'avait pas vu et pour cause, chaque fois qu'il avait croisé son chemin, Malia se retenait pour ne pas le tuer et rares étaient les fois où elle avait réussi à se contrôler. Heureusement pour elle où plutôt pour lui, ce fut un jeune homme qui lui demanda de le suivre. Ce dernier avait à peine posé un regard sur elle, il n'était visiblement pas heureux de devoir l'accompagner et sur ce coup, ils étaient deux. 

Alban n'était pas du genre à laisser un autre homme l'accompagner et cette situation suffit à faire ressurgir sa méfiance envers lui. Docile, elle suivit ce vampire aux longs cheveux bruns sans un mot jusqu'à ce qu'il la fasse entrer dans une pièce qu'elle n'avait jusque-là jamais vue. 

Le sol était tapissé d'un magnifique plancher en bois foncé sur lequel se reflétaient de scintillantes lumières provoquées par les nombreux lustres en cristal et aux pampilles étincelantes. Des banquettes anciennes vêtues d'une épaisse étoffe de damas rouge étaient disposées au centre de la pièce. Des dessins majestueux embellissaient les balustrades des nombreux balcons perchés sur les hauteurs apportant une vue exceptionnelle sur la scène. 
Les personnalités les plus influentes siégeaient confortablement à l'intérieur des loges qui dominaient la scène et c'est face à l'une d'entre elles, que le chaperon s'arrêta. Le vampire leva le rideau rouge et convia l'Ultime à prendre place sur l'un des fauteuils, ce qu'elle fit sans un mot, trop absorbée par ce magnifique décor. Lorsque enfin elle se tourna en direction du vampire pour le remercier, celui-ci avait déjà quitté les lieux. Malia haussa légèrement un sourcil, interloqué par ce curieux personnage, mais sa réflexion fut rapidement balayée lorsqu'elle aperçut la scène drapée d'épais rideaux rouges brodés d'or. 

La vampire jeta un regard en contrebas et observa les vampires affluer un à un, vêtus d'élégants vêtements. Costard, robe de soirée, tous rivalisaient d'élégance, mais une personne en particulier attira son attention, Mégan. Habillée d'une belle robe rouge, cette dernière ne passait pas inaperçue, mais ce qui la surprit le plus, était son grand sourire qui ne la quittait pas. Jamais elle ne l'avait vue si souriante, à tel point que s'en était même perturbant, à moins qu'elle ne cache encore quelque chose? Ou peut-être avait-elle rencontré un homme assez fou pour la supporter ? Malia pouffa de rire et Megan leva la tête dans sa direction. Au lieu de lui jeter son regard le plus noir comme elle en avait l'habitude, la blonde étira un sourire narquois et disparu de son champs de vision. 

L'Ultime reprit place sur son siège et sentit son ventre se serrer douloureusement, comme lorsqu'elle ressentait un mauvais pressentiment, ce qui était le cas. Quelque chose n'allait pas avec cette soirée, toutes les personnes présentes semblaient si joyeuses et leurs attitudes à son égard était totalement différentes. Habituellement, Malia était l'attraction de la soirée et cette fois-ci, pas un seul regard se tournait dans sa direction, tous semblaient obstinés à ne pas lui apporter la moindre attention. Pourtant, placé dans cette loge, Malia était à la vue de tous, il était donc impossible que personne ne remarque sa présence. 

La lumière des grands lustres diminua, plongeant la salle dans l'obscurité et accentuant les battements de son cœur. Malia posa les mains de chaque côté de son siège prête à bondir en cas d'attaque, mais sans qu'elle ne s'y attende la lumière d'une loge opposée à la siège s'alluma. À l'intérieur de celle-ci se trouvait le monarque richement âpreté d'un costard entièrement noir. Ses cheveux blonds étaient plaqués en arrière, apportant plus de sévérité à son visage dépourvu de tout sourire. Des lumières vinrent éclairer la scène apportant un once de clarté à la pièce, Malia aperçut que tous les vampires sans exception avaient la tête relevées ou tournés vers le roi, mais lui ne regardait qu'elle. Bien que l'éclairage soit restreint, Malia apercevait sans difficulté son regard azur dépourvu de toute émotion la fixer intensément. 

Il semblait si froid, son expression si dure que Malia ne reconnaissait pas l'homme en face d'elle. Était-ce son vrai visage ? Celui dont tous lui parlaient ? Celui que tous redoutaient d'entrevoir un jour ? La vampire n'en savait rien, mais une chose était sûre, elle n'aimait pas ça. Malia avait l'impression de faire face à un inconnu et cela l'a touchait bien plus qu'elle ne l'aurait voulu. Son cœur subissait une déchirure comme si ce dernier avait compris que tout était fini, que l'homme qu'elle avait connu avait disparu pour faire place à son côté le plus sombre. La douleur était intense à tel point qu'elle dut serrer les accoudoirs avec force, mais malgré la douleur son Ultime qui cherchait à se montrer la poussait à rester forte et à ne montrer aucune faiblesse. Sa noirceur en avait que faire de sa peine, seul son rival comptait, comme s'il n'y avait plus que lui dans la pièce et lorsqu'il laissait place à son Ultime, Malia éprouvait le plus grand mal à contrôler cette soif de supériorité.

Sa respiration se coupa lorsque Alban se redressa avec une prestance que lui seul possédait. Ses pupilles toujours ancrées aux siennes, il leva sa main et claqua des doigts juste après avoir prononcé ces mots : 

— Que le spectacle commence, princesse.

Le rideau se leva avec une lenteur délibérée sous le regard écarquillé de la belle vampire…

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